III. LES RELATIONS FRANCO-ALBANAISES : UN TERRAIN FAVORABLE
Vos rapporteurs ont été frappés, lors de
leur séjour en Albanie, de la
vivacité de la francophonie
,
que ce soit dans les milieux universitaires et intellectuels ou dans le monde
politique. Incontestablement, la France dispose dans ce pays d'une
influence
culturelle
résultant de relations anciennes et d'une politique
jamais interrompue de formation des élites albanaises dans les
universités françaises.
Dans un contexte d'ouverture de l'Albanie à l'Europe, la
préservation de cette influence française
nécessite
un renforcement de nos moyens de coopération culturelle.
Quant aux relations politiques et économiques, elles semblent encore
modestes alors que la tradition francophone crée pourtant un terrain
très favorable à leur développement.
A. UNE INFLUENCE CULTURELLE QU'IL CONVIENT DE PRÉSERVER
D'après les informations fournies à vos rapporteurs, on évalue à 30 % de la population la proportion d'Albanais comprenant ou parlant le français, ce qui ne manque pas de surprendre dans un pays si longtemps coupé de l'extérieur. Pour autant, ce "capital" francophone ne saurait être immuable, compte tenu de l'ouverture de l'Albanie à d'autres pays, et sa préservation exige une attention prioritaire.
1. Des assises solides pour la francophonie
Il convient de souligner que les
relations culturelles
avec
l'Albanie n'ont jamais été interrompues
, même au plus
fort de l'isolement du pays, notamment en raison du maintien de
bourses de
longue durée
qui permettaient à des étudiants albanais
de se former en France.
Favorisé par le lycée français de Korça, entre 1917
et 1939,
l'enseignement du français
s'est poursuivi sous la
dictature d'Enver Hoxha, lui-même enseignant dans ce lycée. On
estime qu'aujourd'hui,
plus de 30 % de la population parle le
français,
la langue française occupant une place de tout
premier ordre chez les principaux dirigeants politiques du pays. Même
s'il a perdu sa première place au profit de l'anglais, le
français est étudié par le tiers des collégiens et
des lycées, ainsi que par plus de 1 300 jeunes enfants
bénéficiant de l'opération "français
précoce". L'Albanie compte 700 enseignants de français
regroupés dans l'Association des professeurs de français
d'Albanie. L'Albanie vient d'être admise comme observateur dans les
structures des Etats ayant le français en partage.
Une
Alliance française
est installée à Tirana
depuis mars 1992. Elle dispose de deux antennes dans le nord (Shkodra) et le
centre (Elbasan) du pays, une troisième devant être ouverte dans
le sud-est (Korça). L'Alliance française accueille plus de 1 600
étudiants, dont 1 085 à Tirana.
A l'occasion des cérémonies de célébration de son
5e anniversaire, votre délégation a pu juger du dynamisme et de
l'impact de cette jeune Alliance française en dépit de la
modestie de ses moyens. Elle dispose en effet de locaux qui lui sont
prêtés par le lycée des langues étrangères de
Tirana qu'elle a dû rénover et équiper. Elle souhaite
développer ses activités en diversifiant le type des cours
prodigués, notamment en direction de spécialités telles
que le secrétariat commercial et l'hôtellerie, et surtout en
disposant d'un espace multimédia plus accessible.
Il n'existe malheureusement
pas de
centre culturel
français
en Albanie
. Toutefois, il est envisagé de
créer à Tirana un espace culturel réunissant le bureau de
coopération linguistique et éducative, un centre de ressource et
l'Alliance française, dans de nouveaux locaux. On doit souligner que
compte tenu de la possibilité de recruter du personnel local
francophone, le coût de fonctionnement d'un centre culturel ne serait pas
considérable, et paraît même tout à fait à la
portée de notre pays. Il répond à un besoin évident
lié à la fois à la place remarquable du français en
Albanie et à l'absence d'infrastructures culturelles de qualité.
Il y aurait donc tout intérêt à ce que la création
d'un centre culturel français soit désormais une priorité
pour notre coopération.
La
création d'un établissement d'enseignement
franco-albanais
, sous la forme d'une réouverture du lycée
français de Korça, est régulièrement
évoqué par les autorités albanaises, ainsi que vos
rapporteurs l'ont vérifié au cours de plusieurs entretiens.
Compte tenu du coût de réalisation et de fonctionnement d'un tel
établissement, et de l'absence d'une communauté française
expatriée en Albanie, à l'exception du personnel de l'ambassade
et de quelques coopérants, cette création ne semble pas
envisageable à court terme. Il paraît en revanche tout à
fait réaliste de développer des
filières d'enseignement
en français
, avec des enseignants albanais ayant
bénéficié de stages de formation en France. Ces
filières pourraient voir le jour dans un lycée de Tirana et
également à Korça. Aux yeux de vos rapporteurs, la mise en
oeuvre effective, et dans les meilleurs délais, de cette
solution
pragmatique
permettrait d'obtenir des résultats rapides
répondant aux aspirations des autorités albanaises, très
attachées à la présence d'un enseignement en
français en Albanie.
Dans le
domaine audiovisuel,
un programme d'installation de
réémetteurs est en cours afin de favoriser la retransmission de
TV5 par voie hertzienne. Parallèlement, un accord avec la
télévision albanaise permet la diffusion d'émissions de
CFI.
Il faut enfin signaler qu'un nombre important de projets de coopération
scientifique et universitaire ont vu le jour entre des universités
françaises et l'université albanaise dans le domaine des sciences
exactes, de la géologie, de la philosophie et des sciences
économiques, la France offrant par ailleurs des bourses pour chercheurs
albanais post-doctoraux dans le cadre de projets de recherche
d'intérêt commun.