B. LES INCERTITUDES
Les débats du Conseil sur le projet de
Conférence européenne ont révélé certains
clivages. L'Allemagne et la Grèce ont exprimé de fortes
réticences à l'égard d'une participation de la Turquie,
craignant qu'elle ne renforce d'une certaine manière la perspective
d'une adhésion de ce pays à l'Union. Certains Etats membres et
certains pays candidats, ont, quant à eux, exprimé la crainte que
la Conférence européenne n'apparaisse comme une compensation
accordée aux pays provisoirement exclus des négociations
d'adhésion, et par là comme un encouragement et une caution
à l'approche sélective de la Commission.
On peut par ailleurs s'interroger sur l'articulation des activités de la
Conférence avec celles de l'Union européenne. Centrée sur
les domaines qui correspondent aux deuxième et troisième piliers
de l'Union, la Conférence reviendrait en effet, d'une certaine
manière, à réintroduire des mécanismes
intergouvernementaux dans les domaines où le traité d'Amsterdam
prévoit, dans un but d'efficacité, de remplacer au moins en
partie l'approche intergouvernementale par de nouveaux modes de décision
(selon le cas, " communautarisation " ou
" intergouvernementalité renforcée "). Il est vrai que
la Conférence européenne serait une enceinte plus vaste que
l'Union, mais elle comprendrait tous les membres de celle-ci. Des risques
d'interférences ne seraient donc pas à écarter si la
Conférence avait tendance à se structurer, propension
inhérente à ce genre d'organismes quelles que soient les
assurances contraires qui sont généralement prodiguées au
départ.
Par ailleurs, aucun " pendant " parlementaire à la
Conférence européenne ne semble avoir été
envisagé, alors que celle-ci couvrirait des domaines constituant des
centres d'intérêts essentiels pour les parlements. On pourrait
suggérer à cet égard qu'une association des parlements
s'effectue par le biais de la COSAC, organisme souple où sont
représentés le Parlement européen et toutes les
assemblées parlementaires des Etats membres, et où est possible
une participation appropriée des assemblées des pays candidats.
Au total, il semble que la Conférence européenne puisse certes
constituer un forum utile, favorisant un dialogue politique sur des sujets
d'intérêt commun, mais qu'elle ne peut ni ne doit apparaître
comme une " solution de repli ", rendant acceptable
l'approche
différenciatrice de la Commission en fournissant aux pays du
" deuxième groupe " un substitut à l'ouverture de
négociations d'adhésion.