II. LES HANDICAPS : L'ASPHYXIE FINANCIÈRE DANS LA RIGIDITÉ ?
La Poste dispose de marges de manoeuvre limitées : elle
est " prise à la gorge " par une équation
diabolique : ses résultats sont faibles ou déficitaires, elle ne
peut plus augmenter le prix du timbre, elle supporte de lourdes charges
financières et pour combler la mesure, elle voit se réduire les
compensations qui lui avaient été accordées et
s'accroître le poids de la fiscalité.
Dans ce contexte, les problèmes de la compensation du coût de ses
missions d'intérêt général et de la prise en charge
des pensions de retraites de ses anciens fonctionnaires se posent avec
acuité.
A ces données financières s'ajoutent deux problèmes
d'ordre internes : la persistance de rigidités et l'apparition de
ce que d'aucuns seraient tentés d'appeler une " poste sociale
à deux vitesses ".
A. SON RÔLE D'AMÉNAGEUR DU TERRITOIRE A UN COÛT POUR LA POSTE
Si nul ne conteste la véracité de cette
assertion, l'unanimité ne semble pas encore faite sur le montant du
coût ainsi supporté.
Pour traiter la question complexe -mais ô combien essentielle- de
l'évaluation de ce coût, votre rapporteur a adopté une
démarche en trois temps :
- il a défini les principes qu'à son sens une telle
évaluation devait respecter pour être acceptée ;
- il a examiné les travaux déjà conduits en ce
domaine dans le but d'en exposer les conditions de réalisation et les
résultats ;
- il a soumis au crible des principes qu'il avait définis, les
méthodes d'élaboration de ces travaux et leurs fondements
conceptuels, afin d'être en mesure de prendre position.
1. Les principes arrêtés
Ils sont au nombre de quatre.
Tout d'abord votre rapporteur s'est refusé à construire et
à appliquer une méthode de chiffrage qui lui soit propre,
considérant qu'il n'en avait ni le mandat, ni les moyens.
Il a écarté par avance toute étude ne présentant
pas des garanties techniques suffisantes de fiabilité, de rigueur et de
cohérence.
Il a également jugé que pour être pertinente et
échapper à toute polémique, une évaluation du
coût de la mission d'aménagement du territoire impartie à
La Poste ne devait pas se cantonner au cadre strict de l'économie
publique mais envisager une approche de marché.
En effet, après transposition en droit français des mesures
portées par le projet de directive en voie d'achèvement à
Bruxelles
112(
*
)
, ce sera au
moins 62,5 % du chiffre d'affaires de La Poste qui se trouvera
réalisé en concurrence avec d'autres opérateurs
113(
*
)
, soit près des deux tiers !
Dans ce contexte, continuer à appréhender La Poste comme un
monopole public constituerait une erreur d'appréciation, d'autant plus
grave que la réglementation européenne qui s'élabore ne
permet pas un financement des coûts de l'aménagement postal du
territoire -s'il excède le périmètre du service universel
européen- par des droits exclusifs ou par des fonds de compensation.
En bref, votre rapporteur s'est fondé sur le postulat que seule pourrait
être acceptable une méthode d'évaluation qui
n'apparaîtrait pas contestable par un opérateur postal
répondant à un appel d'offre ayant pour objet d'attribuer au
soumissionnaire les actuels missions et moyens de La Poste. L'hypothèse
est, bien entendu, par construction, inenvisageable, mais elle présente
l'avantage de souligner que, dans une telle occurrence, seule la
vérité des coûts peut servir de base à la
négociation.
Était enfin réservée la possibilité
d'écarter l'ensemble des évaluations disponibles, si elles
apparaissaient insuffisantes ou insatisfaisantes.