B. DES MISSIONS ESSENTIELLES POUR LA SAUVEGARDE ET L'ENTRETIEN DE LA MÉMOIRE
1. Le devoir de mémoire
" Tant peut sur les humains la mémoire
chérie
C'est la cendre des morts qui créa la patrie "
Par ces deux vers, Lamartine se place au coeur du débat sur le devoir de
mémoire et rappelle que la mémoire, en transformant en bien
commun et en héritage collectif les événements
passés, crée et conforte le sentiment d'appartenance à une
nation particulière. La mémoire constitue ainsi l'un des ciments
de la société et ce n'est pas un hasard si tous les
régimes qui, dans l'histoire de l'humanité, ont essayé
d'instaurer une société nouvelle ou un homme nouveau, se sont
attachés, dès leur arrivée au pouvoir, à
réécrire l'histoire de leur pays.
Pour autant, la mémoire ne se contente pas de donner aux hommes des
racines et de leur faire prendre conscience du poids des ans qui les ont
précédés. Elle joue également un rôle
essentiel dans l'éducation de la jeunesse et dans la préservation
de l'avenir. A cet égard, le vingtième siècle constitue
une véritable rupture. En effet, comme le fait remarquer dans un article
l'ancien délégué à la D.M.I.H, Roger Jouet,
"
jusqu'à la première guerre mondiale, la mémoire
était l'auxiliaire d'une marche vers le progrès, continue
malgré les rechutes (guerre de Cent ans, guerres de religion) et qui
avait amené des tribus barbares appelées " Francs "
à former en quinze siècles un grand pays respecté et
libre, qui pouvait à son tour propager dans le monde les valeurs dont il
était porteur
". Les deux guerres mondiales et la
décolonisation ont brisé cette croyance. Désormais,
"
le besoin de se souvenir, d'analyser, de reconnaître
a
pour mission de montrer à la jeunesse
que
" la
démocratie, la liberté, les droits de l'homme sont des valeurs
fragiles, qui ont pu en quelques années être balayées par
une crise économique et une idéologie pernicieuse
".
Le devoir de mémoire revêt donc une double importance, puisqu'il
perpétue le sentiment d'appartenance à la nation et contribue
à la défense nationale et à la paix.
2. Un intérêt accru pour le passé
L'attitude des Français vis-à-vis de la
mémoire est ambiguë. L'éloignement des conflits et la
disparition progressive des combattants diminuent l'intérêt des
Français pour leur passé. Ainsi, les hauts lieux de
mémoire enregistrent une chute de leur fréquentation, d'une part,
parce que les pèlerinages traditionnels, qui touchent les anciens
combattants et leurs familles, se font plus rares faute de participants, et
d'autre part, parce que les jeunes générations, plus enclines
à s'inventer un avenir que de se tourner vers le passé, sont
moins attirées par ces visites.
Pourtant, d'autres signes tempèrent ce constat. Tout d'abord, les
célébrations qui ont accompagné le cinquantième
anniversaire des Débarquements ont suscité un véritable
engouement des Français pour leur histoire, qui s'est notamment traduit
par une reprise sensible de la fréquentation des musées. En
outre, la Délégation à la Mémoire et à
l'Information Historique a constaté depuis quelques années une
recrudescence des demandes de renseignements sur des proches ou des parents
morts pendant les conflits mondiaux. Dans la plupart des cas, ces demandes
d'informations sont le fait soit de personnes âgées, qui,
arrivées à la retraite, ont désormais le temps d'engager
des recherches sur leurs familles, soit de jeunes (entre 12 et 19 ans) qui sont
désireux de connaître le passé de leurs ancêtres,
mais qui n'ont plus d'interlocuteurs, faute de survivants.
En définitive, il existe donc une réelle aspiration des
Français à la sauvegarde de la mémoire, que la
Délégation à la Mémoire et à l'Information
Historique a le devoir de cultiver et de développer. Par ailleurs, il
lui faut relever le défi de l'oubli et, dans cet objectif, concentrer
son action sur les jeunes.
Or, l'absence de crédits limite singulièrement les marges de
manoeuvre de la D.M.I.H.