II. DES OBLIGATIONS DIFFERENTES
A. UN CORPS DE REGLES COMMUNES
Les trois régimes obéissent à un corps de règles communes ou comparables.
1. Du point de vue des obligations de contrôle
Les deux régimes (CGOS, Préfon), qui ressortent
du code des assurances sont soumis à la juridiction de la commission de
contrôle des assurances : celle-ci peut contrôler ces
régimes à travers les comptes des compagnies concernées,
qui font l'objet de comptabilités séparées.
Le régime du CREF est soumis au contrôle (art. L.531-1 du
code de la mutualité) de la commission de contrôle des mutuelles
et institutions de prévoyance, qui peut s'adjoindre notamment des
membres de l'inspection générale des affaires sociales : le
contrôle n'est, cette fois-ci, pas effectué par le corps des
commissaires contrôleurs des assurances.
Par ailleurs, deux des trois régimes sont soumis au contrôle de
commissaires aux comptes :
- le CREF est contrôlé par les commissaires aux comptes de
l'Union nationale des mutuelles retraite des instituteurs et fonctionnaires de
l'Education nationale et de la fonction publique ;
- la Préfon est contrôlée (association et
régime de retraite) par un commissaire aux comptes dans le cadre des
obligations prévues par la loi du 4 décembre 1985 relative
aux entreprises en difficulté, pour les associations d'une taille
minimale.
Le CGOS, quant à lui, fait l'objet, depuis 1993, d'une étude
annuelle confiée à une société d'actuaires dont
l'objet est différent de ce type de contrôles, puisqu'il s'agit de
définir les conditions de pérennité du régime.
2. Du point de vue des règles applicables
a) La contrainte démographique : les tables de mortalité
Les tables de mortalité permettent de
déterminer, pour chaque classe d'âge, la probabilité d'un
individu d'être encore vivant à une échéance
donnée. Afin d'intégrer l'augmentation de l'espérance de
vie, ces tables ont été renouvelées en 1993.
L'utilisation de ces nouvelles tables de mortalité a
entraîné, pour l'ensemble des trois régimes, une diminution
du taux de couverture des engagements, ainsi que la nécessité
d'une baisse du rendement pour les adhérents.
Ainsi, le rendement de la Préfon est passé de 10 % à
7,9 % (pour un retraité de 65 ans) et les cotisations du CREF ont
été augmentées dans des proportions qui ont parfois pu
atteindre 20 %.
b) La protection des adhérents : la couverture des engagements
Les régimes fonctionnant en répartition (CGOS et
caisse de répartition du CREF) sont tenus d'assurer le provisionnement
de cinq années de prestations.
Les régimes basés sur la capitalisation (Préfon et Caisse
de capitalisation du CREF) sont astreints (respectivement depuis 1995 et
1996), d'assurer le provisionnement de 100 % de leurs engagements.
c) les contraintes de la gestion : la rémunération des provisions
L'ensemble des trois régimes pratique un taux de
revalorisation minimum garanti aux adhérents (dit taux technique) :
3 % pour la Préfon, 3,5 % pour le CREF et 4,5 % pour le
CGOS
5(
*
)
.
L'obligation de rémunérer les provisions mathématiques
-correspondant au total des engagements vis-à-vis des adhérents-
à un taux au moins égal à ce taux technique (prévue
par les textes pour la Préfon et le CREF, et par la convention CGOS-AGF)
permet d'expliquer la nature des placements des trois régimes. En effet,
seuls des actifs obligataires permettent d'assurer une
rémunération minimale régulière.
Pour la Préfon, cette obligation est renforcée par
l'article R 441-7 du code des assurances qui prévoit une
rémunération annuelle de 3,5 % de la provision technique
spéciale, correspondant au montant des cotisations versées.
Structure des placements pour la quote-part de la
Préfon gérée par CNP
(situation au 31 décembre 1995)
Valeur nette au bilan
|
Valeur nette au bilan
|
|
Immeubles bâtis |
229 |
4,1 % |
Obligations cotées |
4.342 |
77,8 % |
OPCVM d'obligations |
148 |
2,7 % |
TCN et divers |
45 |
0,8 % |
Total placements obligataires |
4.535 |
81,3 % |
Actions cotées |
615 |
11,0 % |
OPCVM d'actions |
200 |
3,6 % |
Total placements actions |
815 |
14,6 % |
TOTAL |
5.579 |
100,0 % |
Répartition de l'actif net du CREF au 31
décembre 1996
(17,9 milliards de francs au total)
Obligations |
65,75 % |
Immobilier |
16,50 % |
Court terme |
10,25 % |
Actions |
7,32 % |
Actifs du CGOS au 31/12/96
(total : 9 milliards
de francs)
Produits de taux |
88,9 % |
Actions françaises |
3,7 % |
Actions étrangères |
4,2 % |
Pierre papier |
1,2 % |
Immeubles |
0,1 % |
Liquidités |
2,0 % |
Cette prédominance des actifs obligataires commence tout juste à être tempérée par la tendance de l'ensemble des gestionnaires à renforcer leurs compartiments " actions " 6( * ) .
B. DES CARACTERISTIQUES BIEN DISTINCTES
1. Capitalisation et répartition7( * )
a) Un régime de répartition pure
Le CGOS fonctionne par pure répartition,
c'est-à-dire que les cotisations perçues au cours d'une
année servent à payer les prestations au cours de la même
année. Ainsi, aux termes de l'article 8 de la convention
CGOS/AGF : "
les primes d'assurance sont financées par les
cotisations versées par les affiliés, nettes de la taxe et du
chargement d'encaissement
".
La valeur de service du point de retraite est fixée, chaque
année, par le conseil d'administration au vu des calculs actuariels
présentés par les AGF.
b) Un régime de capitalisation
La Préfon fonctionne en capitalisation : les cotisations sont versées au compte de l'adhérent et capitalisées jusqu'au départ en retraite. Les cotisations sont converties en points de retraite, dont la valeur d'acquisition (pour la cotisation) et la valeur de service (pour le service de la rente), sont fixés chaque année par le Conseil d'administration (articles 17 et 18 du règlement du régime Préfon).
c) Un régime mixte
Le régime du CREF présente la
particularité d'être mixte : les deux-tiers de la prestation
de l'adhérent sont assurés par la technique de la
répartition des cotisations, le tiers restant par capitalisation, ces
deux opérations étant gérées par des caisses
autonomes distinctes.
La capitalisation a été introduite dans ce régime en 1953
afin de tempérer les aléas démographiques liés
à la répartition.
2. Des spécificités très fortes
a) Les aléas de la répartition
Les régimes de répartition (caisse de
répartition du CREF et du CGOS) sont basés sur l'adhésion
facultative, ce qui renforce l'aléa né de leur évolution
démographique naturelle.
Le CGOS a tiré depuis l'origine les conséquences de cet
aléa, en ne garantissant à ses adhérents que cinq
années de versement de rentes.
L'article 7 de la convention CGOS/AGF précise ainsi :
"
l'assureur garantit à tout instant
(...)
le service pendant
cinq ans
(...)
de la retraite acquise par cotisations
".
L'article 11 précise par ailleurs que la résiliation du
régime intervient "
lorsque les réserves mathématiques
du régime au 31 décembre d'un exercice
déterminé sont inférieures au niveau minimum fixé
au dernier alinéa de l'article 9
", c'est-à-dire
35 % des réserves que devrait posséder le régime si
les rentes étaient viagères et non temporaires.
Ainsi, même si les rentes ont pu être versées de
façon viagère depuis l'origine, le régime n'est nullement
à l'abri d'une évolution défavorable.
Depuis l'année 1992, le CGOS, conscient de ce risque, a eu recours
à un audit annuel d'un cabinet d'actuaires. En octobre 1996, un rapport
de l'inspection générale des affaires sociales soulignait :
"
la combinaison d'une évolution démographique
défavorable et d'un taux de rendement élevé conduit
nécessairement à l'impossibilité de maintenir le versement
des rentes viagères à une échéance qui peut se
rapprocher considérablement en fonction de la variation des
paramètres utilisés
".
C'est sur cette base que le conseil d'administration du CGOS a
décidé d'abaisser, à partir de 1997, le rendement du
régime de 10 % à 7 %.
Le CREF surveille également l'évolution démographique de
son régime en effectuant des travaux de prospective qui vont jusqu'en
2040, assortis de différentes hypothèses de nombre annuel de
recrutements et de taux de rendement.
L'aléa démographique est ici tempéré par
l'obligation d'une durée minimale des cotisations fixée à
10 ans, par des pénalités infligées en cas de
démission du régime ainsi que par des avantages accordés
aux jeunes cotisants. Par ailleurs, le CREF a mis au point un indicateur qui
mesure le rapport entre les prestations servies et les cotisations
augmentées des revenus financiers des réserves, qui évolue
depuis une dizaine d'années entre 38 et 40 %, soit de
manière favorable selon les responsables du régime.
b) La capitalisation collective : le système des points de la Préfon
Contrairement à la caisse de capitalisation du CREF,
qui pratique une capitalisation individuelle des droits, la Préfon
apparaît comme un régime de capitalisation collective.
En, effet, le régime d'épargne retraite complémentaire de
la Préfon se situe dans le cadre de l'article L. 441-1 du code
des assurances : il s'agit des opérations ayant pour objet
"
l'acquisition ou la jouissance de droits en cas de vie
" dans
lesquelles
est encadré le recours au système des points.
Ainsi la valeur d'acquisition du point, qui détermine le montant des
cotisations, et la valeur de service du point, qui détermine la valeur
de prestation de la rente viagère, sont arrêtées chaque
année par le régime ; elles ne peuvent évoluer de
manière totalement indépendante puisque le quotient de la valeur
de service par la valeur d'acquisition doit être au moins égal
à 0,05.
Chaque adhérent se voit ainsi constituer un compte accumulant les
cotisations versées sous forme de points, la conversion des cotisations
en points étant affectée d'un coefficient d'âge par
génération.
Ce compte est converti en rente viagère, dont le montant est obtenu en
multipliant le nombre de points accumulés sur le compte par la valeur de
service du point, réévaluée chaque année.
Le régime d'épargne retraite de la Préfon peut donc :
- faire jouer une solidarité entre générations par la
fixation des coefficients d'âge ;
- ajuster la valeur de service pour distribuer les produits financiers
nés de la gestion des cotisations des adhérents : cet
instrument permet de ménager des marges de manoeuvre financières
au régime.
En effet, comme tout régime soumis au " L. 441-1 " du
code des assurances, la Préfon peut, en cas de gestion financière
favorable, ne pas choisir d'augmenter la valeur de service à son niveau
maximum (qui permettrait tout juste la couverture à 100 % des
engagements) mais, en choisissant une valeur
" raisonnable ", amener
le taux de couverture des engagements pris à plus de 100 %.
Ce mode de gestion permet :
- de lisser dans le temps la revalorisation de la valeur de service,
malgré les aléas des produits financiers ;
- de prendre en compte l'amélioration continue de l'espérance de
vie humaine.
Naturellement, une telle gestion peut provoquer un conflit
d'intérêts entre les différentes classes d'âge, selon
leur préférence pour une distribution plus ou moins
différée des produits financiers.