RÉDUIRE LES COÛTS DE LA LÉGISLATION CONSUMÉRISTE
La forte protection des débiteurs, qui est propre
à la France, majore le risque de crédit des banques et, en cette
période de forte concurrence, réduit leur marge
d'intermédiation. Elle tend à se retourner contre ses objectifs :
les postulants à l'emprunt présentant par ailleurs d'autres
risques peuvent se voir écartés de l'accès au
crédit, faute pour les établissements de pouvoir maîtriser
les coûts engendrés par les lois de protection des consommateurs.
Notre législation consumériste devra évoluer sous la
pression de la concurrence européenne: du fait de l'existence d'un
marché bancaire unique et de l'avènement prochain de l'Euro. Pour
l'essentiel, la négociation au sein des instances communautaires y
pourvoira.
A cet égard, il ne faut pas fermer la porte à la
possibilité, pour nos négociateurs, d'obtenir de nos partenaires
des avancées dans le sens de notre droit actuel.
Cependant, le
groupe de travail a jugé qu'un problème urgent devait être
traité plus rapidement en raison de son coût élevé
pour le système bancaire: celui des remboursements d'emprunt par
anticipation.
Une convergence des législations consuméristes se produira du fait de l'intégration européenne
Dans son rapport de mai 1995 sur l'application de la
deuxième directive bancaire créant le marché unique des
services bancaires, la Commission de l'Union européenne relève
que la protection des consommateurs de services bancaires est plus forte en
France que dans le reste de l'Union
88(
*
)
. Cette protection est
considérée par la France comme relevant de l'intérêt
général, ce qui lui permet, en application de l'article 15
de la directive, de faire obstacle à la vente de services par les
banques européennes qui ne se conformeraient pas à cette
protection.
Cependant, la Commission rappelle dans son projet de communication du
4 novembre 1995 que la Cour de justice
89(
*
)
de Luxembourg considère que cet
obstacle doit être :
- d'intérêt général,
- non discriminatoire,
- objectivement nécessaire,
- proportionné à l'objectif poursuivi.
En effet, il faut reconnaître que l'obligation faite à des
banquiers anglais de se conformer à notre législation
consumériste, alors que celle-ci est restreinte dans leur État
d'origine, revient à les empêcher de distribuer des contrats sur
notre territoire.
Lors de l'entrée en vigueur de l'Euro, il deviendra très
difficile à la France d'exciper de l'intérêt
général pour maintenir des règles qui n'y répondent
pas de façon irréfutable
. Il sera aisé pour les
établissements des Etats participant à la monnaie unique de venir
concurrencer nos banques sur des critères autres que la protection des
consommateurs, notamment par des coûts de crédit moins
élevés.
Dans ces conditions, la législation et la réglementation
françaises devront évoluer naturellement.
Mais il est possible
aussi que la législation de nos partenaires évolue
. Beaucoup
d'éléments de notre appareil normatif peuvent paraître
protéger excessivement les consommateurs (la législation sur le
surendettement, le droit des offres de crédit notamment). Mais on peut
les juger efficaces quant à leurs objectifs (les consommateurs sont bien
protégés) et d'un coût non prohibitif pour les
établissements. Aussi faut-il permettre au gouvernement français
de défendre nos positions actuelles. Par la suite, l'ensemble devra
converger de manière à ce que la concurrence ne se fasse pas par
des différences normatives.
Aussi le groupe de travail n'a-t-il pas jugé nécessaire de
proposer à ce stade une réforme d'ensemble de notre
législation consumériste
. Il vaut mieux laisser se
développer la confrontation européenne, qui provoquera les
ajustements nécessaires en France, mais aussi dans le reste de l'Union.