Les erreurs stratégiques
Les erreurs privées : le dogme de la banque universelle
La Banque Universelle peut être une réponse
adaptée à la désintermédiation pour les grands
réseaux disposant d'une taille critique et d'un réseau
international développé. Mais s'agissant des
établissements de taille petite et moyenne, elle s'est assurément
révélée moins profitable qu'une stratégie de
spécialisation sur les créneaux pour lesquels les avantages
comparatifs sont les plus forts. L'analyse par "
groupes homogènes
d'établissements
", effectuée dans la première partie
de ce rapport confirme que ce sont ces établissements qui ont le plus
souffert de la crise.
Même pour les grands réseaux, le schéma de banque
universelle suppose une organisation sans faille, impliquant notamment une
maîtrise du risque global, qui était loin d'être de
règle dans toutes les banques universelles.
Sans préjudice de ce qui sera dit plus loin sur les distorsions de
concurrence, le groupe de travail retire de ses auditions et plus
généralement de l'ensemble des contacts qu'il a pu avoir avec le
milieu bancaire que la gestion des réseaux mutualistes, qui allie, on
pourrait dire par construction, la proximité et le pragmatisme dans la
prise de décision à une moindre implication sur la région
parisienne, explique, au moins en partie, les résultats
contrastés entre ces réseaux et les banques AFB. Au demeurant, le
Crédit Agricole, qui, comme les banques commerciales, ne
bénéficie pas du monopole de distribution du Livret A, est de
loin la banque française qui se porte le mieux. Cette opinion rejoint
celle de certains analystes pour qui la progression supérieure du
produit net bancaire des réseaux mutualistes à celui des banques
AFB ne serait pas dû aux rentes de monopole "
mais à une
activité de banque de proximité, aussi bien pour les particuliers
que pour les entreprises qui s'avère plus rentable que la banque
généraliste, contrairement à une opinion auparavant
établie
"
66(
*
)
.
L'erreur stratégique a donc été de croire que la
banque universelle était à la portée de tous.
Certains théoriciens se sont du reste récemment
interrogés sur la spécialisation. Parmi eux, Olivier
Pastré, auteur d'un célèbre rapport sur la modernisation
des banques françaises, remis en 1985 à M. Daniel Lebègue,
alors directeur du Trésor, pense désormais que : "
compte tenu
de l'incertitude qui caractérise l'environnement bancaire actuel, la
spécialisation est un moyen (si ce n'est le moyen) de créer une
différenciation et, au-delà, de créer de la valeur
ajoutée bancaire. Rendons justice aux spécialistes. Ce sont eux
qui créent la valeur ajoutée. Le mouvement de
déréglementation qu'a connu le système bancaire
français a eu, dans ce domaine, des effets pervers. (...) Le cas des SDR
est particulièrement représentatif. Structures
spécialisées dans le financement des PME, elles constituaient,
dans bien des cas, des pôles de compétence, viables à
terme, mais incapables de réagir immédiatement à une
concurrence à laquelle elles n'avaient pas été
préparées.
"
67(
*
)