Le risque de remboursement anticipé des crédits aux particuliers
Introduite par la loi du 13 juillet 1979, la faculté offerte aux emprunteurs de pouvoir renégocier leurs prêts à taux fixe moyennant une pénalité assez faible constitue une source de pertes de revenus pour les banques, invoquée par de nombreuses personnalités entendues par le groupe de travail.
Rappel des règles relatives au remboursement
anticipé
· Crédit à la consommation :
article L 311-29 du code de la consommation.
Droit exerçable à tout moment, sans indemnité, pour un
montant au moins égal à trois fois le montant de la
première échéance non échue (décret
n° 90-979 du 31 octobre 1990).
· Crédit immobilier : article L 312-21 du
même code.
Droit exerçable à tout moment, avec une indemnité ne
pouvant excéder six mois d'intérêt, plafonnés
à 3 % du capital restant dû * (décret
n° 80-473 du 28 juin 1980 - art. 2), pour un montant qui
peut ne pas être inférieur à 10 % du montant initial
du prêt.
* 1 % pour les prêts aidés par l'Etat.
De fait, lorsque les taux d'intérêt baissent significativement,
les emprunteurs trouvent avantage à rembourser leurs prêts par
anticipation puis à réemprunter le capital restant dû, ou
à renégocier leur prêt sur la base du gain qu'ils
pourraient réaliser par ce remboursement.
Cette attitude n'est pas illégitime,
mais elle coûte
très cher aux établissements
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*
)
qui doivent répercuter ce
coût sur les nouveaux emprunteurs
(phénomène connu sous
l'expression de "
mutualisation
" du risque de remboursement
anticipé).
En outre, elle peut donner lieu, dans certains cas, à des pratiques
déontologiquement condamnables. C'est le cas par exemple des pratiques
qui affectent les établissements spécialisés, notamment
dans le secteur des crédits immobiliers (voir audition du
président de l'Association des sociétés financières
en annexe). Ces institutions, qui, le plus souvent, font tenir leurs comptes
par des banques domiciliataires, ont été victimes, de la part de
ces dernières, de détournements de fichiers dont l'objectif est
de démarcher les clients en leur proposant de renégocier les
crédits en cours.
Examiné tout au long de l'année par le comité des usagers
du Conseil National du Crédit, ce dossier a fait l'objet de
réflexions présentées dans le rapport 1994-1995, mais n'a
pu déboucher sur un accord. Faute d'un consensus quant aux solutions
à adopter, les banques sous l'égide de l'AFEC et de l'AFB, n'ont
pu que clore provisoirement le dossier.
*
Cette impossibilité de procéder à des
ajustements a provoqué une anémie
généralisée du secteur bancaire. Au lieu d'être
concentrées sur les acteurs les plus faibles, les difficultés ont
été partagées par l'ensemble du système
(phénomène dit du partage du fardeau ou
burden share)
, ce
qui a rendu les ajustements particulièrement lents par comparaison avec
les systèmes bancaires étrangers et notamment britanniques et
américains, où la crise a été surmontée
beaucoup plus rapidement.
Surtout, les établissements de crédit se sont lancés dans
une concurrence effrénée qui les ont conduits dans des situations
d'aveuglement collectif. A défaut d'être
"
régulatrice
" la concurrence est devenue
"
destructrice
".