2. Peut-on améliorer la gestion des fonds structurels ?
a) La répartition des rôles entre la Commission et les Etats membres
En dépit du principe de partenariat, il a
été observé que la Commission européenne avait
parfois tendance à sortir de son rôle de pur gestionnaire des
fonds structurels. En effet, en vertu du principe de subsidiarité le
partage des tâches devrait reposer sur le fait que si la
responsabilité de la gestion correcte des fonds appartient à la
Communauté européenne, la responsabilité de la
programmation doit relever des Etats membres.
Or, certaines décisions de la Commission ne respectent pas cette
répartition des rôles, ce que n'a pas manqué de souligner
le Parlement européen, notamment en octobre 1995, lorsque la Commission
a annoncé l'usage qu'elle entendait opérer de la réserve
qu'elle avait précédemment constituée, portant sur
20 % du budget affectés aux initiatives communautaires (soit
1,665 milliards d'écus).
Elle se proposait de répartir cette enveloppe entre les Etats membres,
d'une part, et entre les différentes initiatives communautaires, d'autre
part, en l'espèce l'aide aux industries lourdes en difficulté, la
création d'emplois et la prévention des inondations et de la
sécheresse.
La répartition de cette réserve entre les différents Etats
a fait l'objet de vives critiques du Parlement européen, celui-ci
considérant que la Commission utilisait les initiatives communautaires
comme "
un instrument de redistribution indirecte des ressources
financières entre les Etats
" sans tenir compte des besoins
réels au niveau de l'Union européenne.
Au-delà de cet exemple de confusion des genres, il importe de clarifier
les rôles respectifs des différents intervenants pour optimiser
l'affectation des fonds structurels.
b) Le nécessaire suivi des opérations financées
La complexité des procédures, parfois mal
maîtrisées par les partenaires concernés, conduit
inévitablement à la constitution d'irrégularités,
voire de fraudes, dans l'utilisation des fonds structurels. Ainsi que le
souligne le Parlement européen, "
l'absence de capacité
technique au sein des administrations, régionales ou locales, ou les
problèmes institutionnels liés aux relations entre les
différents niveaux administratifs sont souvent à l'origine d'une
programmation défectueuse et, partant, d'une mise en oeuvre inefficace
des fonds structurels tout comme, dans certains cas, d'une absorption
insuffisante des aides
".
Ainsi, le rapport de la Cour des Comptes pour 1994 dénonce le manque de
fiabilité des déclarations de dépense permettant le
paiement par la Commission, ainsi que la définition confuse de la notion
de " dépense éligible ".
Parmi les exemples d'erreurs dans les certificats de dépense, on trouve
notamment :
- des dépenses effectuées hors de la période
d'éligibilité,
- des dépenses déclarées supérieures aux
dépenses réelles,
- l'inclusion de la subvention communautaire dans la déclaration de
dépense globale,
- la comptabilisation de la même dépense au titre de deux
interventions différentes.
Il a été également constaté des
irrégularités dans les procédures d'appels d'offres et
d'attribution des marchés, des manquements au respect du principe
d'additionnalité, dont le contrôle reste difficile en raison de la
non-disponibilité des données permettant ces
vérifications, et de délais anormalement longs de transmission
des subventions à leurs bénéficiaires finals, ce qui
laisse à penser que les versements du FEDER, largement effectués
sous forme d'avances, ont temporairement pour effet d'alimenter les
trésoreries nationales.
Le strict respect des règles communautaires suppose un suivi des
programmes engagés qui relève, en vertu du principe de
subsidiarité, de la responsabilité des Etats membres. Cette
activité de contrôle a été précisée
par l'adoption, le 11 juillet 1994, du règlement (CE) n° 1681/94 de
la Commission relatif aux irrégularités et au recouvrement des
sommes indûment versées dans le cadre des politiques sectorielles,
qui instaure une obligation d'information systématique entre les Etats
membres et la Commission sur les cas d'irrégularité
décelés.
La France n'a que très récemment décidé d'effectuer
des contrôles sur l'usage des fonds accordés par l'Union
européenne en matière de politique structurelle. Ceux-ci,
assurés par des comités du suivi et par les secrétaires
généraux aux affaires régionales (SGAR) sous la
responsabilité des préfets de régions, ont montré
que la gestion des fonds structurels n'était pas parfaitement
satisfaisante. La Commission européenne a ainsi considéré
que la France aurait indûment bénéficié de
800 millions de francs de crédits qu'il lui faudrait rembourser.
La Cour des Comptes note que "
l'existence d'un nombre important de
projets dont la régularité n'est pas clairement établie
(...) souligne l'ampleur des progrès encore à réaliser
pour assurer rigoureusement la légalité et la
régularité de la gestion des fonds structurels, six ans
après la mise en oeuvre de la réforme (...)
La mise en oeuvre de la réforme de 1994 est marquée par les
mêmes types de problèmes que ceux engendrés par la
réforme de 1988. La Commission et les Etats membres se sont
trouvés face aux mêmes contraintes de temps de préparation
des actions, aux mêmes difficultés de programmation et
d'évaluation ex ante des programmes envisagés (...)
Dans ces conditions, le processus d'amélioration tend à
être lent et reste en-deçà des exigences qu'imposent
l'accroissement et la diversification des interventions ".
Enfin, jusqu'à présent, il n'existe pas de sanctions efficaces
à l'encontre des Etats membres qui ne sont pas en mesure d'apporter les
justifications du financement par l'Union européenne auquel ils
prétendent. De même, le système de
récupération des montants indûment versés doit
être amélioré pour atteindre un niveau convenable
d'efficacité.