INTERVENTION DE M. JEAN HUCHON, SÉNATEUR DU MAINE-ET-LOIRE

M. Jean Huchon .- Merci. Je suis un peu gêné parce que mon rôle était de rebondir sur les propos du délégué à l'aménagement du territoire. J'espère néanmoins vous tenir quelques propos cohérents sur ce problème de l'aménagement du territoire qui nous tient à coeur et qui, depuis quelques années, à la commission des affaires économiques, nous a beaucoup occupés.

Je ne rappellerai que pour mémoire le dépôt du premier rapport sur l'avenir de l'espace rural, et les congrès ou les conventions de Bordeaux et du Futuroscope où 1 500 à 1 800 maires ont écouté et ont clamé à la fois leur détresse et leur espoir. Je ne rappellerai que pour mémoire la campagne menée à travers villes et champs par M. Balladur et M. Pasqua sur ces problèmes d'aménagement du territoire. Ils ont passionné les maires ruraux et l'ensemble du territoire. Nous avons élaboré cette loi d'aménagement du territoire en 1995 et nous fondons nos plus grands espoirs sur le déroulement normal de l'application de cette loi qui est compliquée, qui a des aspects et des facettes diverses, mais qui je crois permet de traiter en profondeur ce problème très important de l'aménagement du territoire.

Le sujet qui m'était imparti et que va sans doute traiter M. Aubert tout à l'heure, c'est sur le plan de l'aménagement de la future loi sur l'espace rural. Cela me pose quelques questions que je pourrais reposer, parce que la préparation de ce projet de loi, qui découle des dispositions de la loi d'orientation, fait que nous nous interrogeons sur la vraie politique de l'aménagement rural. L'équilibre des mesures en faveur de l'espace rural et celles de l'espace urbain est une idée force de la loi d'orientation. Or, la création de zones franches et la modification récente de la dotation globale de fonctionnement amorcent une rupture d'équilibre entre le monde rural et le monde urbain. Le renforcement des incitations fiscales en faveur des zones franches urbaines (nouvelle exonération de taxe professionnelle) est sans équivalent pour les zones rurales.

En outre, des mesures résultent également du plan de relance et du pacte de relance pour la ville : majoration de l'aide de l'Etat aux chômeurs créateurs d'entreprise, implantations de services de proximité. De telles mesures fiscales seraient tout autant utiles dans les zones rurales les plus défavorisées.

J'en viens aux modifications des mécanismes de répartition de la dotation globale de fonctionnement qui résultent de la loi relative au mécanisme de la solidarité financière entre collectivités locales. L'accroissement de la dotation de solidarité urbaine est beaucoup plus favorable que celui de la dotation de solidarité rurale, et je ne manquerai pas de poser ces questions à M. Aubert.

Alors là encore je me permets de dire que j'étais un maire d'une commune rurale de mille habitants et je ne peux m'empêcher devant vous, qui êtes un auditoire raffiné, de répéter ce que je dis chaque semaine face aux auditeurs que j'ai dans mon pauvre pays. Je gère ma commune de mille habitants avec 2 500 francs par habitant. Mon chef-lieu de canton, qui a une belle taxe professionnelle, a 4 000 francs par habitant. Ma sous-préfecture a 8 000 francs par habitant pour son budget de fonctionnement, et ma préfecture a 11 000 francs par habitant. Et je ne me risquerais à citer des chiffres de la région parisienne.

Comment voulez-vous qu'il y ait un aménagement du territoire quand de tels chiffres marquent une disparité de moyens qui fait que nous ne jouons pas dans la même cour ? A partir de là, pour l'aménagement du territoire, la première chose à faire est de mettre en route un système qui régule des injustices aussi patentes et flagrantes.

Alors voilà ce que j'aurais voulu dire à M. Aubert. Et je pense qu'évidemment il y a des problèmes financiers, les problèmes des services publics, de la création d'entreprises, de la taxe professionnelle. On a longuement parlé ce matin de toutes ces choses.

M. François-Michel Gonnot .- M. Aubert nous fait l'amitié de nous rejoindre. Il n'a pas entendu les questions de M. Huchon, mais si vous voulez les répéter, monsieur le délégué pourra y répondre dans la foulée.

M. Jean Huchon .- J'ai évoqué le problème des nouvelles mesures qui sont prises de dotation de solidarité. Nous, les ruraux, nous trouvons difficiles à supporter que la dotation de solidarité urbaine soit conséquente, que la dotation de la solidarité rurale soit relativement mineure.

M. François-Michel Gonnot .- En clair, le sénateur se faisait le reflet d'un sentiment qu'on continuait à faire davantage pour la ville que pour les campagnes, et à quoi rimait une politique d'aménagement du territoire dans la mesure où les campagnes n'ont pas les moyens d'influer sur leur environnement et qu'il n'y avait pas encore des systèmes de régulation pour réparer cette inégalité et ces injustices entre les villes et les campagnes.

M. Raymond-Max Aubert .- Est-ce que vous me permettez de poursuivre sur l'ensemble des dispositions que nous envisageons en faveur du monde rural ou est-ce que M. Huchon souhaiterait lui-même développer ce sujet ?

M. François-Michel Gonnot .- Nous sommes partis sur le monde rural, donc vous avez officiellement la parole.

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