II. LES ENJEUX POLITIQUES, ÉCONOMIQUES, SOCIÉTAUX, CULTURELS ET SCIENTIFIQUES

Trois grandes catégories d'enjeux sont présentées : les problématiques politiques de l'intelligence artificielle, les transformations socio-économiques, et les défis culturels et scientifiques. L'IA est devenue une technologie incontournable, qui transforme nos sociétés et nos économies, mais aussi les rapports de force politiques et géopolitiques.

A. LES PROBLÉMATIQUES POLITIQUES

· La géopolitique de l'IA

La recherche en IA est dominée par la recherche privée, principalement américaine. Les États-Unis, grâce à leurs géants technologiques - les GAFAM, devenus les MAAAM désignant, dans l'ordre, Microsoft, Apple, Alphabet, Amazon et Meta - dominent l'écosystème global de l'IA, avec Nvidia en sus, qui fournit toutes les entreprises en processeurs graphiques. Outre son impact économique, l'IA devient en elle-même un levier de pouvoir géopolitique.

En parallèle, la Chine aspire à devenir leader mondial d'ici 2030, investissant toute la chaîne de valeur, notamment les semi-conducteurs. Ces derniers sont devenus un enjeu de premier plan qui dépasse la seule filière de l'IA. Alors que les deux tiers des puces sont à ce jour fabriquées à Taïwan, les autorités américaines et chinoises cherchent à attirer une part croissante de cette production sur leur sol.

Pour l'Europe, et notamment la France, le défi est celui de la souveraineté numérique, afin d'éviter de devenir une pure et simple « colonie numérique ». L'Union européenne mise aujourd'hui sur la régulation de l'IA, mais cela reste insuffisant face à la taille et à l'avance des puissances américaine et chinoise. La souveraineté numérique contre la domination de la Big Tech américaine appelle au développement d'acteurs français et européens puissants.

· Les risques de manipulations politiques

L'IA génère de nouveaux risques, notamment à travers la désinformation et les hypertrucages (deepfakes). Les fausses informations ou les trucages ont toujours existé, mais l'IA fait changer d'échelle.

Ces technologies permettent de produire instantanément et massivement des contenus falsifiés réalistes, capables d'influer sur les élections ou de ternir la réputation d'une personnalité publique. Des régulations imposant des filigranes sur ces contenus constituent une réponse, mais elles seront difficiles à appliquer.

· Les menaces pour la sécurité et le risque existentiel

L'IA facilite les attaques à grande échelle, à travers la création de logiciels malveillants ou la capture de données sensibles. Ces risques appellent des mesures de sécurité renforcées : sécurisation des modèles, analyse des risques et formation en cybersécurité des développeurs.

L'intelligence artificielle générale (IAG) qui dépasserait les capacités humaines reste une hypothèse incertaine. Bien qu'elle suscite des débats passionnés, ses bases scientifiques comme les lois d'échelle (scaling laws) restent fragiles. Certains craignent que cette IAG fasse courir un « risque existentiel » à l'humanité, comme Elon Musk qui prône même une hybridation homme-machine pour « rivaliser » avec l'IA tandis que d'autres, comme Yann LeCun, estiment que l'IA actuelle demeure très loin du tournant de la Singularité, n'ayant toujours pas de sens commun ou de capacités autonomes réelles.

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