N° 13

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 octobre 2024

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation (1) relatif à l'adaptation des communes et des intercommunalités
au
vieillissement de la population,

Par M. Laurent BURGOA et Mme Corinne FÉRET,

Sénateur et Sénatrice

(1) Cette délégation est composée de : Mme Françoise Gatel (2), présidente ; M. Rémy Pointereau, premier vice-président ; Mme Agnès Canayer, MM. Cédric Vial, Fabien Genet, Mme Corinne Féret, MM. Éric Kerrouche, Gérard Lahellec, Mme Guylène Pantel, MM. Didier Rambaud, Pierre Jean Rochette, Grégory Blanc, vice-présidents ;
MM. Jean Pierre Vogel, Laurent Burgoa, Bernard Delcros, Hervé Gillé, secrétaires ; M. Jean-Claude Anglars,
Mme Nadine Bellurot, MM. Guy Benarroche, François Bonhomme, Max Brisson, Mme Céline Brulin, MM. Bernard Buis, Cédric Chevalier, Thierry Cozic, Mme Catherine Di Folco, MM. Jérôme Durain, Daniel Gueret, Pascale Gruny,
MM. Joshua Hochart, Patrice Joly, Mmes Muriel Jourda, Sonia de La Provôté, Anne-Catherine Loisier, M. Jean-Jacques Lozach, Pascal Martin, Jean-Marie Mizzon, Franck Montaugé, Mme Sylviane Noël, MM. Olivier Paccaud, Hervé Reynaud,
Jean-Yves Roux, Mme Patricia Schillinger, MM. Laurent Somon, Lucien Stanzione, Jean-Marie Vanlerenberghe.

(2) Mme Françoise Gatel a été nommée membre du Gouvernement le 21 septembre 2024.

SYNTHÈSE

L'ADAPTATION DES COMMUNES ET DES INTERCOMMUNALITÉS AU VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION :

BIEN VIEILLIR DANS NOS COMMUNES

De M. Laurent BURGOA, sénateur du Gard (groupe Les Républicains)

et Mme Corinne FÉRET, sénatrice du Calvados (groupe Socialiste, Écologiste et Républicain)

La décennie 2020 est marquée par l'« "explosion" du nombre de personnes âgées de 75 à 84 ans »1(*), qui atteindra 6,1 millions en 2030. Dans ce contexte, les maires s'affirment comme les « grands architectes de la transition démographique »2(*). L'adaptation au vieillissement concerne l'ensemble des dimensions de la vie quotidienne des « seniors », que l'on pense aux solutions de mobilité et aux travaux de voirie, à l'accès aux services de proximité ou à la lutte contre l'isolement. Dans ces matières, alors que les initiatives foisonnent à l'échelle locale, le rôle des communes et des intercommunalités doit être pleinement reconnu et conforté. Comme le rappelait le Sénat lors des débats sur la proposition de loi dite « Bien vieillir », une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge reste incontournable pour faire du « bien vieillir » une « grande cause nationale », conformément aux valeurs de fraternité.

I. LE BLOC COMMUNAL, QUI S'INVESTIT DE LONGUE DATE AU SERVICE DES AÎNÉS, EST CONFRONTÉ À DES DÉFIS INÉDITS

Les communes rurales et littorales sont particulièrement marquées par la « gérontocroissance ». La part des personnes de plus de 60 ans atteint également des niveaux élevés dans certains territoires d'outre-mer (la Martinique abritant 33 % de personnes de plus de 60 ans).

Sur le fondement de leur clause de compétence générale, les communes se sont affirmées comme des maillons essentiels de la prise en charge des personnes âgées, notamment au travers de leurs centres communaux d'action sociale.

 

96 % des centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et
CIAS) fournissent ainsi des aides facultatives aux personnes âgées. À
titre d'exemple, le CCAS de Bellegarde (Gard) participe activement au dispositif Monalisa (Mobilisation nationale contre l'isolement des âgés) en mobilisant des équipes de citoyens bénévoles pour accompagner les personnes âgées isolées.

Si la création des CIAS n'est possible que depuis 1986, l'échelon intercommunal peut constituer une échelle pertinente pour la mutualisation de certaines actions de soutien aux personnes âgées, pourvu que les acteurs communaux soient étroitement et régulièrement associés à cette démarche (par exemple, au sein des commissions « cohésion » ou « grand âge » de l'intercommunalité, ou encore via la conférence des maires).

Les communes et les intercommunalités n'en restent pas moins confrontées aux lacunes des politiques nationales. La problématique de l'adaptation du logement en est un exemple éloquent : à l'heure où 85 % des Français souhaitent vieillir à domicile, les politiques publiques de l'habitat « ne prennent en compte le vieillissement à domicile que de manière embryonnaire »3(*). Le dispositif MaPrimeAdapt', lancé le
1er janvier 2024, n'est prévu que pour adapter 680 000 logements en dix ans (bien en deçà des besoins estimés à près de 2 millions). De surcroît, les premiers retours du terrain, collectés par l'Union nationale des centres communaux d'action sociale (Unccas), font état de « difficultés pour les personnes bénéficiaires à consentir des avances de trésorerie qui peuvent être importantes et freiner les opérations de travaux ».

Pour combler ces retards, les dispositifs d'habitat intermédiaire se sont multipliés à l'échelle locale, soutenus par des communes et des intercommunalités. Ainsi, le département du Gard a développé le label « Maisons en partage » en soutien de certaines initiatives portées par des municipalités. Les expériences d'habitats intermédiaires peuvent prendre des formes variées (« béguinages », habitats dits « inclusifs »), mais l'évaluation de leur efficacité reste lacunaire. Ainsi, le nouveau « Centre de ressources et de preuves
dédié à la prévention de la perte
d'autonomie
 », créé en 2023 et placé sous l'égide de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), pourrait s'affirmer comme une instance à l'usage des élus locaux en diffusant les bonnes pratiques auprès des acteurs communaux et intercommunaux.

II. CONSACRER LE RÔLE DU BLOC COMMUNAL ET AMÉLIORER SON ARTICULATION AVEC LES ACTEURS DE LA POLITIQUE DU GRAND ÂGE

De récentes évolutions législatives ont conforté le rôle du bloc communal dans l'adaptation au vieillissement, même si l'articulation avec les acteurs de la politique du grand âge pourrait encore être améliorée.

La loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement (dite « ASV ») du 28 décembre 2015 :

ü prévoit une meilleure prise en compte du vieillissement dans les documents de planification. Les programmes locaux de l'habitat (PLH), établis au niveau des communes et des intercommunalités doivent ainsi servir de « supports à des politiques coordonnées d'adaptation de l'habitat au vieillissement et à la perte d'autonomie »4(*) ;

ü a institué les conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie (CFPPA) qui visent, dans chaque département, à définir un programme coordonné de financement des actions individuelles et collectives de prévention pour les personnes âgées de 60 ans et
plus.
La participation des élus communaux et intercommunaux - qui reste optionnelle - constitue une bonne pratique qui devrait être encouragée, voire consacrée dans la législation.

Par ailleurs, et bien que ses ambitions soient restées trop limitées, la loi dite « Bien vieillir » du 8 avril 2024 :

ü élargit - sauf opposition des personnes intéressées - les possibilités de collecte de données (identité, âge et domicile) concernant les seniors les plus fragiles. Une fois le décret d'application publié, les maires pourront transmettre ces données aux CCAS ou CIAS, aux services sanitaires ou aux établissements et services médico-sociaux pour informer les personnes de leurs droits, proposer des actions de lutte contre l'isolement social ou « organiser un contact périodique » dans le cadre d'un plan d'alerte et d'urgence ;

ü crée, au 1er janvier 2025, un service public départemental de l'autonomie (SPDA), « guichet unique » devant faciliter les démarches d'accès aux services d'aide sociale, de santé et d'accompagnement. Deux points de vigilance méritent d'être soulignés : d'une part, le SPDA devra éviter de fragiliser les dispositifs de coordination déjà en place au niveau local ; d'autre part, sa territorialisation pourrait être renforcée, notamment en permettant
aux conseils départementaux et aux agences régionales de santé (ARS) de définir des « territoires de l'autonomie » au niveau infradépartemental.

Plus fondamentalement, la coordination des actions ne saurait faire oublier les difficultés liées à la raréfaction des moyens et à la perte d'attractivité des métiers du service à domicile. Comme l'ont souligné l'Association des maires de France (AMF) et Intercommunalités de France, la réussite du SPDA dépendra de la capacité à attirer des professionnels dans le secteur médico-social.

III. L'ADAPTATION DU BLOC COMMUNAL AU VIEILLISSEMENT DOIT PROCÉDER D'UNE APPROCHE TRANSVERSALE

L'adaptation du bloc communal au vieillissement embrasse tous les aspects de la vie quotidienne des seniors et implique - pour reprendre la formule de Luc Broussy - une « politique à 360° »5(*).

Dans le cadre des programmes Petites Villes de demain et Action Coeur de Ville, l'ANCT prévoit désormais des volets dédiés à l'adaptation au vieillissement, en tant qu'enjeu structurant des politiques locales.

Les nouveaux aménagements du centre-bourg de Trévières (Calvados) - commune bénéficiaire du programme Petites Villes de demain - répondent par exemple, tout à la fois, à des objectifs de redynamisation et d'accessibilité. Engagée depuis 2017 dans des actions de lutte contre l'isolement des aînés, Trévières déploie en outre un plan d'action aux fins d'obtenir le label « Ville amie des aînés ».

Le délégué général des Petits frères des Pauvres6(*), appelant à décloisonner et défragmenter les politiques publiques, suggère à cette fin de prévoir une délégation spécifique pour les enjeux - par nature transversaux - du vieillissement, en privilégiant la dénomination « maire adjoint en charge des seniors ». Il convient également de mettre l'accent sur la dimension participative des politiques d'adaptation au vieillissement, par exemple au travers de l'institution de conseils des aînés.

Le référentiel proposé par le réseau francophone des « Villes amies des
aînés
» (RFVAA) est de ce point de vue particulièrement pertinent. Le RFVAA comptait, en octobre 2024, 330 collectivités adhérentes. La ville de Caen (Calvados), qui vise l'obtention du label en 2025, a par exemple conçu à cette fin un plan d'action participatif et transversal, construit autour des huit thématiques du référentiel RFVAA (dont trois concernent l'environnement bâti et
cinq l'environnement social).

La visibilité du réseau, encore modeste, gagnerait à être renforcée. Par ailleurs, la subvention annuelle versée au RFVAA par le ministère des Affaires sociales, de l'ordre de 35 000 euros en 2021, pourrait être revalorisée.

IV. DE BONNES PRATIQUES POURRAIENT ESSAIMER, SOUS RÉSERVE QUE LE BLOC COMMUNAL DISPOSE DES FINANCEMENTS ADÉQUATS

Un réseau de bonnes pratiques, ayant vocation à être adaptées aux particularités locales, s'est progressivement structuré. Ainsi des ressources mises à disposition par le CEREMA et l'ANCT (au travers de sa projetothèque).

Par ailleurs, la CNSA a conclu, fin 2023, une convention avec l'Union des gérontopôles de France, prévoyant le repérage et l'essaimage d'initiatives territoriales prometteuses.

Le développement des bonnes pratiques dépend toutefois de la pérennité des financements et des ressources en ingénierie des communes et des EPCI. Les travaux d'audition ont mis en lumière la pertinence du fonds d'appui aux territoires innovants seniors, expérimenté au cours de la période 2022-2023. Financé par la CNSA et animé par le réseau « Ville amies des aînés », ce fonds de dimension modeste
(8 millions d'euros pour la période 2022-2023) a permis de soutenir quelque 152 projets de communes et intercommunalités visant à adapter les territoires au vieillissement de la population.

La pérennisation et l'élargissement de ce fonds - qui soutient des actions concrètes pour les seniors (travaux de voirie, adaptation des mobilités, action
culturelle) - s'inscriraient dans une logique de prévention et répondraient à certaines des préoccupations exprimées par les élus locaux.

Les principales recommandations de la mission

Étudier la possibilité de faire de « MaPrimeAdapt' » un dispositif universel ou revoir a minima ses ambitions à la hausse.

Encourager la participation des communes et des intercommunalités aux CFPPA, voire envisager de la rendre obligatoire dans la phase de recensement des initiatives locales.

Veiller à faire de la bonne association du bloc communal un critère du référentiel de qualité de service du cahier des charges national du SPDA.

Approfondir la territorialisation du SPDA en soutenant également, à l'échelle infradépartementale, les modèles de coordination préexistants.

Privilégier une approche transversale de l'adaptation au vieillissement, au travers de la désignation d'un « maire adjoint en charge des seniors ».

Renforcer la visibilité du RFVAA.

Pérenniser le fonds d'appui pour les territoires innovants seniors dans le cadre du PLFSS pour 2025. Assouplir parallèlement l'exigence de cofinancement par la collectivité ou par l'EPCI et permettre un financement pluriannuel des projets.


LES 11 RECOMMANDATIONS DE LA MISSION

N° de la recommandation

Recommandation

Acteur(s) concerné(s)

Calendrier prévisionnel

Support/action

1

Faire du nouveau « centre de ressources et de preuves dédié à la prévention de la perte d'autonomie » une instance à l'usage des professionnels « de terrain ».

CNSA

Courant 2025

Systématiser la diffusion des travaux du centre de ressources et de preuves auprès des associations représentantes des élus locaux et intercommunaux.

2

Envisager de faire de « MaPrimeAdapt » un dispositif universel, ou réduire sensiblement les restes à charge.

Parlement et Gouvernement

Horizon 2026

Exercices de programmation budgétaire.

Projet de loi de finances.

3

Encourager, voire rendre obligatoire, la participation des communes et des intercommunalités aux conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie (CFPPA).

CNSA et
Conseils départementaux

Courant 2025

Diffuser les bonnes pratiques en matière d'association des communes et des intercommunalités à la gouvernance des CFPPA.

Envisager une évolution de la législation (code de l'action sociale et des familles).

4

Veiller à la publication du décret d'application relatif aux modalités de collecte et de transmission par les maires d'informations concernant les personnes les plus fragiles.

Gouvernement

(Ministère des solidarités et de l'autonomie)

D'ici à début 2025

Assurer une consultation approfondie de l'ensemble des associations d'élus locaux pour la rédaction du décret d'application.

5

Veiller à faire de la bonne association du bloc communal un critère du référentiel de qualité de service du cahier des charges national du SPDA.

Gouvernement

(Ministère des solidarités et de l'autonomie)

D'ici à fin 2024

Arrêté relatif au cahier des charges national du SPDA (dont la publication est attendue fin 2024).

6

Approfondir la territorialisation du SPDA en soutenant également, à l'échelle infradépartementale, les modèles de coordination préexistants.

Ministère des solidarités et de l'autonomie

Ensemble des acteurs locaux de la maille infradépartementale

Courant 2025

Diffuser les bonnes pratiques pour prévenir les effets d'éviction des modèles de coordination
infra-départementaux.

Envisager une évolution de la législation (code de l'action sociale et des familles) pour permettre au conseil départemental et à l'ARS de définir des
« territoires de l'autonomie » au niveau infradépartemental.

7

Privilégier une approche transversale de l'adaptation au vieillissement, au travers de la désignation d'un « maire adjoint en charge des seniors ».

Communes (et intercommunalités)

Courant 2025

Parallèlement, la DGCL devrait s'attacher à recenser de manière exhaustive, dans les fichiers nationaux, les communes comptant des adjoints au maire en charge des seniors.

8

Sensibiliser les agents ou les délégataires des communes et intercommunalités au repérage d'anomalies (pour lutter, notamment, contre les phénomènes de « mort solitaire »).

Communes et intercommunalités

Courant 2025

Actions de formation et de sensibilisation à l'échelle de la commune ou de l'intercommunalité, notamment auprès des agents responsables de la collecte des déchets ménagers.

Sensibilisation auprès des agents des bibliothèques municipales et intercommunales
et des
CCAS/CIAS pour
coupler - lorsque cela est possible - le portage de repas avec celui de livres ou de revues.

9

Renforcer la visibilité du RFVAA.

Ministère de la cohésion des territoires

Ministère des solidarités et de l'autonomie

Courant 2025

Soutien symbolique (reconnaissance juridique, actions de communication), voire matériel (subventions).

10

Poursuivre la structuration de réseaux de bonnes pratiques, aux fins d'adapter les espaces publics aux besoins des aînés (accessibilité des services publics, mobilités).

Gouvernement

CNSA

CEREMA

Courant 2025

Veiller à la bonne diffusion des guides pratiques du CNSA en cours de rédaction.

Faire connaître et diffuser les fiches pratiques du CEREMA.

11

Pérenniser le fonds d'appui pour les territoires innovants seniors dans le cadre du PLFSS pour 2025.

Assouplir parallèlement l'exigence de cofinancement par la collectivité ou par l'EPCI et permettre un financement pluriannuel des projets.

Gouvernement

D'ici à la fin 2024

Pérenniser le fonds d'appui pour les territoires innovants seniors au travers d'une programmation budgétaire adaptée (PLFSS).

Assouplir l'exigence de cofinancement de la collectivité ou de l'EPCI (aujourd'hui comprise entre 20 et 40 %).

Ouvrir la possibilité de financements pluriannuels des projets pour prévenir le phénomène de saupoudrage.

AVANT-PROPOS

À l'heure où la transition démographique s'accélère, l'adaptation au vieillissement de la population est devenue un véritable « enjeu territorial »7(*). Ainsi que le prédisait Luc Broussy dans un rapport interministériel remis en 20218(*), les « maires sont en passe de devenir sur leur territoire les grands architectes de la transition démographique ». La reconnaissance du rôle stratégique des communes et des intercommunalités reste pourtant limitée.

Les données démographiques sont sans équivoque : la décennie 2020 est marquée par une « explosion du nombre de 75-84 ans »9(*), qui seront 6,1 millions en 2030 (contre 4,1 millions en 2020, soit une augmentation de 49 %). À l'horizon 2050, la France devrait compter 7,2 millions d'habitants âgés de 75 à 84 ans.

Pourtant, les politiques nationales trahissent toujours « le manque de conscience et le niveau d'impréparation de la puissance publique dans son ensemble à accueillir cette vague de vieillissement »10(*). Dans ce contexte, compte tenu de la nature éminemment locale de certains enjeux, « l'adaptation de la société au vieillissement ne pourra se faire sans les collectivités, et plus spécifiquement sans les communes et intercommunalités »11(*). Les initiatives qui foisonnent
à l'échelle locale - et dont un échantillon sera présenté dans ce
rapport - mériteraient d'être mieux soutenues et d'essaimer sur d'autres territoires.

Ce travail vise aussi à mettre en valeur certains axes d'une stratégie du « bien vieillir » à l'échelle du bloc communal. Au-delà des aspects médico-sociaux12(*), l'adaptation au vieillissement concerne l'ensemble des dimensions de la vie quotidienne des « seniors » 13(*), que l'on pense à l'adaptation du mobilier urbain et des logements, à l'accès aux services publics, ou encore à la participation citoyenne.

Au terme d'un important travail d'auditions d'élus, d'associations d'élus locaux, d'acteurs associatifs, de chercheurs et de représentants de caisses de sécurité sociale, vos rapporteurs sont convaincus de la place incontournable que doit jouer le bloc communal pour permettre à nos concitoyens de vieillir sereinement, et ne peuvent que souscrire aux appels à faire du bien vieillir « une grande cause nationale ».

I. LES COMMUNES ET LES INTERCOMMUNALITÉS SONT, PLUS QUE JAMAIS, DES ACTEURS ESSENTIELS POUR RÉPONDRE AUX BESOINS CROISSANTS DES SENIORS

Dans le contexte de transition démographique, les élus locaux - et plus particulièrement les maires - sont en première ligne pour répondre aux besoins croissants des aînés. Alors que le bloc communal s'est affirmé comme un acteur incontournable du soutien et de l'accompagnement des personnes âgées, ce rôle mériterait d'être conforté.

A. LE BLOC COMMUNAL, QUI S'INVESTIT DE LONGUE DATE AU SERVICE DES AÎNÉS, EST CONFRONTÉ À DES DÉFIS INÉDITS

1. Les communes sont directement - quoiqu'inégalement - concernées par le vieillissement de la population
a) Le vieillissement de la population se poursuit à un rythme toujours plus soutenu

Au 1er janvier 2024, en France, les personnes âgées de plus de 65 ans représentaient 21,5 % de la population. La « gérontocroissance », amorcée depuis plus de trois décennies, « s'accélère depuis le milieu des années 2010 », notamment sous l'effet du vieillissement des « générations nombreuses du
baby-boom
 »14(*). C'est ainsi que les personnes de plus de 65 ans devraient constituer un quart de la population en 204015(*).

Selon le Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA), le nombre de personnes âgées souffrant d'incapacités modérées à sévères augmentera considérablement à partir de 2030. Le nombre de personnes dépendantes pourrait ainsi atteindre 2,3 millions d'ici 206016(*).

Les territoires ruraux et littoraux sont particulièrement marqués par cette dynamique démographique, elle-même confortée par les soldes migratoires17(*).

En France métropolitaine, la population est en moyenne plus âgée
sur la façade atlantique, dans le Sud et le Sud-Est ainsi que -- plus
globalement - dans les bourgs ruraux. Dans la Creuse et le Lot, la proportion de personnes âgées de plus de 65 ans dépasse ainsi les 30 % (comparée à une moyenne nationale de 20,2 %).

Dans les Outre-mer, la situation est particulièrement contrastée. Si la Martinique abrite ainsi 33 % de personnes de 60 ans et plus, le département de Mayotte n'en comptait à l'inverse que 4 % en 2019.

Les enjeux du vieillissement de la population en Martinique

Le rapport d'information n° 658 (2022-2023) de la commission des affaires sociales18(*), publié en conclusion d'un déplacement d'une délégation sénatoriale en Martinique, revient sur les effets du vieillissement rapide de la population martiniquaise. D'ici 2050, la Martinique deviendra
« la collectivité territoriale la plus âgée de France »
 : les personnes âgées de 65 ans et plus représenteront 42,3 % de la population, contre 16,9 % en 2013.

Parmi les pratiques innovantes observées lors du déplacement, le rapport met en lumière le travail de l'association « Les Ailes des Anges », qui propose des moments de répit aux aidants en leur permettant de s'absenter en toute sérénité du domicile de la personne âgée dépendante, pendant plusieurs jours, grâce à un remplacement par un tiers. Cette initiative, connue sous le nom de « baluchonnage » (une formule inspirée du modèle québécois), repose cependant sur un modèle économique coûteux, nécessitant des moyens financiers significatifs19(*).

b) Les communes sont inégalement concernées par la « gérontocroissance »

À l'inverse des grands centres urbains, qui enregistrent en moyenne un solde migratoire négatif de populations seniors, les communes les plus rurales, dites « hors attraction des villes », connaissent un solde migratoire des seniors près de trois fois supérieur à leur solde migratoire global20(*). En raison, notamment, de leur attractivité auprès des retraités, les bourgs ruraux constituent la « catégorie de peuplement avec la part de personnes âgées la plus élevée en France »21(*).

Le référent grand âge de l'AMF, auditionné par vos rapporteurs, appelle ainsi à « se préparer à l'augmentation du nombre de personnes âgées, notamment en planifiant la réponse aux besoins des personnes souhaitant vieillir à domicile ainsi qu'en définissant une politique globale, s'appuyant sur des financements dédiés et répondant à la diversité des attentes »22(*). Les territoires concernés par ces évolutions démographiques doivent s'adapter au vieillissement tout en restant attractifs pour les autres générations23(*). L'enjeu est, en effet, d'offrir des services pour la population active qui participe à la « silver economy », tels que des infrastructures de mobilités adaptées ou des services de garde d'enfants pour les salariés.

L'adaptation au vieillissement, qui concerne particulièrement les communes rurales, est évidemment loin de s'y limiter. Ainsi, une problématique trop souvent oubliée est celle de l'adaptation des quartiers prioritaires de la ville (QPV), ceux-ci étant souvent mal préparés, au risque d'accentuer les inégalités territoriales. C'est dans ce contexte que la ville de Nîmes s'est engagée dans la démarche « Quartiers résilients », initiée par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), et dont l'objectif est de repenser l'inclusion des personnes âgées dans le quartier de Pissevin-Valdegour. De même, la ville de Caen, à la suite d'un diagnostic révélant un besoin d'information sur les services et dispositifs disponibles pour les seniors, a organisé en mai 2023 le 1er Forum « Bien vieillir à Caen » dans le quartier du Chemin vert. Ce forum visait à informer les seniors des offres locales, couvrant tous les domaines, afin de favoriser leur inclusion et leur autonomie au sein du territoire24(*).

2. Les actions de soutien aux seniors : entre tradition communale et nouveauté intercommunale

Comme le rappelait le référent grand âge de l'AMF dans le cadre des travaux de cette mission, les « maires et présidents d'intercommunalité jouent indéniablement un rôle majeur dans l'inclusion sociale des personnes âgées, l'accès aux droits, la coordination des acteurs, le développement d'une offre de mobilité adaptée, de logements inclusifs ».

a) Le soutien aux personnes âgées est le « domaine de l'action sociale dans lequel les communes s'investissent le plus » 25(*)

Si les compétences obligatoires des communes en matière de dépendance sont rares26(*), elles peuvent néanmoins s'appuyer sur la clause de compétence générale pour innover et apporter un soutien aux seniors. Niveau de collectivité le plus proche des citoyens27(*), les communes se sont traditionnellement affirmées comme des maillons essentiels dans la prise en charge des personnes âgées, notamment grâce à leurs centres communaux d'action sociale (CCAS) 28(*), obligatoires dans les communes de plus de 1 500 habitants29(*).

Les CCAS « comblent souvent des interstices, là où le privé et l'associatif n'interviennent pas en raison de l'absence de rentabilité »30(*). Ainsi que le relevait l'Unccas dans ses réponses écrites aux rapporteurs, 96 % des CCAS et centres intercommunaux d'action sociale (CIAS) fournissent des aides facultatives aux personnes âgées, et 89 % d'entre eux contribuent à l'accompagnement des personnes âgées vulnérables.

Ainsi, les communes et leurs CCAS mettent en place une offre culturelle et sportive dédiée aux seniors, gèrent des services d'aide à domicile, de transport adapté ou de portage de repas et encouragent plus globalement la participation des personnes âgées dans la vie de la commune. En outre, au travers de leur CCAS, les maires peuvent être gestionnaires de divers établissements et services dédiés aux personnes âgées (voir encadré ci-dessous).

Dans sa contribution remise aux rapporteurs, l'AMF a souhaité alerter les rapporteurs sur la situation « intenable » des communes contraintes de « voter des subventions à leur CCAS pour maintenir les Ehpad », dont 85 % sont aujourd'hui en déficit. Toujours selon l'AMF, la situation des résidences autonomie est comparable à celle des Ehpad, les maires n'ayant d'autre choix que de verser une subvention pour éviter leur fermeture. La situation financière des Ehpad a fait l'objet d'un récent rapport de la commission des affaires sociales31(*), auquel on pourra se référer. Les rapporteurs y soulignent la diversité des modalités d'intervention d'urgence des EPCI au soutien d'Ehpad en situation déficitaire : octroi d'une subvention d'équilibre ou d'une aide financière, règlement du loyer de l'Ehpad ou baisse des loyers en compensation d'un investissement dans un pôle d'activité de soins adaptés (Pasa), bail emphytéotique, financement des travaux d'entretien de bâtiments, financement d'aides techniques pour améliorer les conditions de travail, soutien en moyens matériels.

Les missions des CCAS :

Extraits du rapport d'information de l'Assemblée nationale sur « la commune dans la nouvelle organisation territoriale »

Le CCAS (ou le CIAS), avant même de participer à l'instruction des demandes d'aide sociale, a notamment pour obligation de produire une analyse des besoins sociaux de l'ensemble de la population du territoire de son ressort. Il lui appartient de réaliser cette photographie pour les différentes politiques sociales, et notamment pour le grand âge, ce qui permet ensuite de réaliser les investissements là où ils sont nécessaires. Muni de cette connaissance fine de la population et de ses besoins, le CCAS dispose ensuite de différents moyens pour accompagner le vieillissement.

Le CCAS peut tout d'abord intervenir sous forme de prestations financières (remboursables ou non) ou en nature à destination des personnes âgées.

Il lui est possible aussi d'organiser des services à la personne et de proposer aux personnes âgées, par exemple, divers services d'aide ou d'accompagnement, tels que des services de portage ou de livraison à domicile (repas, médicaments, etc.).

Le CCAS peut par ailleurs créer ou gérer les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) mentionnés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles dont « les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ». Les CCAS représentent 10 % de l'offre d'Ehpad en France, 60 % des résidences autonomie (les anciens « foyers logements ») et 30 000 personnes employées comme aides à domicile. Il convient de rappeler à ce sujet que, entre le maintien à domicile (avec par exemple un service de soins infirmiers) et la prise en charge en Ehpad, il existe en effet des lieux intermédiaires : petites unités de vie, résidences autonomie, maisons d'accueil rural pour les personnes âgées (MARPA), etc. Contrairement à une idée reçue, ces lieux de taille modeste ne sont pas nécessairement plus chers ou moins compétitifs. Ces lieux intermédiaires présentent surtout l'avantage de prendre en compte le désir de la population vieillissante de conserver le plus longtemps possible un « chez soi »32(*).

Source :  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_lois/l15b2191_rapport-information.pdf, p. 55

À titre d'illustration, on pourra citer l'action du CCAS de la
ville de Caen
, qui déploie une mission spécifique dédiée au « bien vieillir ». Considérant que « près d'un Caennais sur quatre a aujourd'hui plus de 60 ans [et que] cette tendance va s'accélérer dans les années à venir »33(*), le CCAS de la ville assure la gestion de résidences seniors, d'un établissement d'accueil pour personnes âgées dépendantes, de services de soutien à domicile, sans oublier un service de portage de repas. Parallèlement, la ville de Caen contribue activement au fonctionnement du centre local d'information et de coordination (CLIC) gérontologique de Caen et Couronne, afin d'offrir aux Caennais un guichet unique pour l'information, le conseil, et l'orientation, et faciliter in fine l'accès aux droits et pour développer des actions de prévention améliorant la qualité de vie des seniors.

b) L'action de l'échelon intercommunal est plus récente en la matière

L'affirmation de l'échelon intercommunal en tant qu'acteur des politiques du grand âge est relativement récente, puisque la création des CIAS n'est possible que depuis 198634(*). Un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre peut créer un CIAS35(*) lorsqu'il est compétent en matière d'action sociale d'intérêt communautaire, ou lorsqu'il exerce une compétence en matière d'action sociale en application de l'article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

Dans le cadre de leur audition par vos rapporteurs, les représentants de l'association Intercommunalités de France ont souligné que l'échelon du bassin de vie constituait une échelle pertinente pour la définition et la mutualisation de certaines actions de soutien aux personnes âgées. Les domaines de compétence de l'intercommunalité, qu'il s'agisse de mobilités, d'habitat, d'aménagement ou encore d'action sociale, offrent en effet des possibilités pour « organiser à l'échelle infra-départementale l'adaptation de la société au bien-vieillir »36(*). L'action des intercommunalités au soutien des personnes âgées peut également s'incarner au travers de guichets France Service, dont certains sont directement hébergés au sein des locaux de l'intercommunalité, permettant bien souvent de renseigner des citoyens éloignés du numérique, en particulier des personnes âgées.

Les EPCI assurent parfois directement des missions dites « d'aller vers » : en matière de lutte contre l'isolement, ainsi, les représentants d'Intercommunalités de France ont cité l'exemple de l'intercommunalité du grand Autunois Morvan qui, par l'intermédiaire de son CIAS, organise des visites de convivialité pour les personnes âgées isolées. Un agent de l'EPCI, chargé de coordonner les actions avec les différents partenaires, effectue des visites au domicile ou en établissement, toutes les deux semaines, pour échanger pendant environ une heure et demie avec chaque personne âgée isolée. L'agent a également un rôle de veille sociale et peut orienter les personnes vers les services compétents ou vers des activités collectives proposées par l'intercommunalité.

Pour garantir une articulation harmonieuse entre les interventions des communes et de l'intercommunalité, il convient d'associer pleinement les acteurs communaux aux instances de gouvernance (par exemple, au sein des commissions « cohésion » ou « grand âge » de l'intercommunalité) et d'assurer la diffusion « stratégique » des informations, notamment via la conférence des maires ou, plus généralement, au travers d'échanges réguliers entre le président de l'intercommunalité et les maires. Si les CIAS permettent effectivement aux EPCI de coordonner les actions sociales à l'échelle de plusieurs communes, la coopération intercommunale reste encore trop souvent limitée à la gestion de services ou d'équipements, plutôt qu'à la définition d'une véritable politique commune structurée37(*). Vos rapporteurs ne peuvent que souscrire à la vision du référent grand âge de l'AMF qui, dans ses réponses écrites à la mission, appelle à « défend[re] une approche pragmatique » de l'articulation des interventions des communes et des intercommunalités consistant, « dans le respect du principe de subsidiarité et de libre administration des communes », à laisser aux élus locaux le soin de définir les modalités de cette coopération.

3. En première ligne face au vieillissement de la population, le bloc communal subit les lacunes des politiques nationales

Les communes et les intercommunalités se trouvent confrontées aux lacunes des politiques nationales, qui ne leur donnent pas les moyens pour répondre pleinement aux enjeux croissants liés au vieillissement de la population.

La problématique de l'adaptation du logement en est un exemple édifiant, à l'heure où 85 % des Français souhaitent vieillir à domicile alors que la proportion de logements du parc privé adaptée aux besoins des personnes âgées n'est estimée qu'à 6 %. Dans un rapport publié en octobre 2023, la Cour des comptes déplorait ainsi que les politiques publiques de l'habitat « ne prennent en compte le vieillissement à domicile que de manière embryonnaire »38(*).

Comme l'ont souligné devant vos rapporteurs les représentants de la CNSA, certains progrès méritent certes d'être relevés, notamment dans le cadre du plan d'action interministériel pour l'habitat inclusif39(*) et de la stratégie interministérielle sur le bien vieillir lancée en novembre 2023. Les représentants de l'Unccas, auditionnés par vos rapporteurs, saluaient par exemple la mise en place de l'aide à la vie partagée (AVP) et de l'aide à l'investissement pour l'habitat inclusif, qui participent d'une dynamique prometteuse pour promouvoir des formes d'habitat alternatives adaptées aux personnes âgées. Ces habitats, qui incluent des structures comme les résidences autonomie ou les petites unités de vie, répondent à une demande croissante de la population, soucieuse de conserver un « chez-soi ». La loi dite « Elan » du 23 novembre 2018 est venue définir officiellement l'habitat inclusif, compris comme étant « destiné aux personnes handicapées et aux personnes âgées qui font le choix, à titre de résidence principale, d'un mode d'habitation regroupé, entre elles ou avec d'autres personnes [...], et assorti d'un projet de vie sociale et partagée défini par un cahier des charges national » -- ce qui recouvre donc un large spectre.

Ces plans d'action ont toutefois leurs limites. L'association France urbaine note ainsi que les initiatives en faveur du virage domiciliaire « s'appuie[nt] insuffisamment sur la construction d'une stratégie mettant l'accent sur le partenariat entre les départements, les EPCI et les communes »40(*) . Une réflexion à l'échelle du bassin de vie apparaît souvent nécessaire pour identifier le foncier disponible et construire in fine des locaux adaptés pour accompagner le vieillissement à domicile. Dans ses réponses écrites à la mission, par ailleurs, le président de la commission grand âge des Départements de France a souligné que le plan interministériel pour l'habitat inclusif avait pu être perçu comme une « injonction à la massification » par certains acteurs sur le terrain.

Surtout, comme le relevait le chercheur Laurent Nowik lors de son audition, l'évaluation des différents dispositifs d'habitat intermédiaire reste insuffisante. Or, le secteur de l'habitat inclusif se caractérise par une diversité de projets, tant en termes de publics (personnes âgées, personnes en situation de handicap), que de types de porteurs de projets ou encore de territoires. Alors que ces projets connaissent des fortunes diverses, la connaissance
des « spécificités du territoire en matière de foncier et des besoins des
personnes
 » constitue un facteur clef
de leur pérennité41(*).

Le déficit d'évaluation empêche de tirer les enseignements des expériences mises en oeuvre sur les territoires42(*). Pour combler ces lacunes, vos rapporteurs recommandent de faire du nouveau « Centre de ressources et de preuves dédié à la prévention de la perte d'autonomie », créé en 202343(*) et placé sous l'égide de la CNSA, une instance accessible aux professionnels de terrain, en facilitant la diffusion de ses travaux auprès des élus locaux et des acteurs communaux et intercommunaux.

Recommandation n° 1 : Faire du nouveau « centre de ressources et de preuves dédié à la prévention de la perte d'autonomie » une instance à l'usage des professionnels « de terrain », en systématisant la diffusion de ses travaux auprès des associations représentant les élus communaux et intercommunaux.

Le dispositif « MaPrimeAdapt' », lancé au 1er janvier 2024 et dont le budget prévu est de 400 millions d'euros par an sur dix ans, ne pourra couvrir qu'une fraction des besoins d'adaptation des logements pour les personnes âgées. Celui-ci n'est en effet dimensionné que pour adapter environ 680 000 logements au total, bien en deçà des besoins réels (près de 2 millions de ménages étant identifiés comme prioritaires)44(*).

Eu égard au caractère stratégique de ce dispositif - par exemple pour prévenir les chutes à domicile et réduire le risque d'accidents
domestiques - une revendication, portée par plusieurs associations d'élus à l'instar de France urbaine, consisterait à étudier la possibilité de transformer le dispositif « MaPrimeAdapt' » en un dispositif universel ou, à tout le moins, de revoir ses ambitions à la hausse.

Recommandation n° 2 : Étudier la possibilité de faire de « MaPrimeAdapt' » un dispositif universel, ou réduire sensiblement les restes à charge.

B. SI LE RÔLE DU BLOC COMMUNAL EST MIEUX RECONNU, L'ARTICULATION AVEC LES AUTRES ACTEURS DE LA POLITIQUE DU GRAND ÂGE RESTE PERFECTIBLE

1. De récentes évolutions législatives ont consolidé le rôle du bloc communal dans le soutien aux aînés
a) La meilleure prise en compte des enjeux d'adaptation au vieillissement dans les programmes locaux de l'habitat et au sein des commissions d'accessibilité

La loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement (dite « ASV ») prévoit la prise en compte, par les documents de planification urbaine, des besoins des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.

Le programme local de l'habitat (PLH)45(*) - document élaboré tous les six ans à l'échelle intercommunale pour définir la politique de
l'habitat - intègre désormais la problématique de l'adaptation de l'habitat au vieillissement. Toutefois, les évolutions procèdent surtout d'une « logique d'incitation, puisque l'obligation pesant sur les EPCI est essentiellement une obligation de réflexion »46(*).

La loi « ASV » élargit par ailleurs la composition des commissions communales et intercommunales d'accessibilité47(*), pour y inclure des associations représentatives de personnes âgées, aux côtés des représentants de la commune, des associations d'usagers et de représentants des personnes en situation de handicap. Ces commissions d'accessibilité formulent des propositions visant à améliorer l'accessibilité du bâti, de la voirie, des espaces publics et des transports.

b) La loi dite « ASV » du 28 décembre 2015 a institué les conférences des financeurs

La loi du 28 décembre 2015 dite « ASV » a instauré dans chaque département une conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées (CFPPA)48(*), chargée de financer des actions de prévention de la perte d'autonomie chez les personnes âgées de 60 ans et plus.

Ces conférences disposent d'une enveloppe de financement correspondant à une partie du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa), versée au budget de la CNSA. Leur mission est de favoriser la « mise en commun des expertises, des projets et des financements dans une optique de mutualisation et, in fine, [l']amélioration de l'offre et de la lisibilité des dispositifs de prévention destinés aux personnes âgées de soixante ans et plus »49(*). Les CFPPA peuvent soutenir les actions locales d'adaptation au vieillissement, y compris celles portées par les communes et leurs CCAS, et sont également chargées de recenser les initiatives locales.

Aux termes de l'article L. 233-3 du CASF, la conférence des financeurs est présidée par le président du conseil départemental et comprend :

- des représentants de l'agence nationale de l'habitat (Anah) et de l'ARS du département ;

- des représentants des régimes de base d'assurance vieillesse et d'assurance maladie ainsi que des fédérations des institutions de retraite complémentaire ;

- des représentants des organismes régis par le code de la mutualité ;

- des représentants des départements et d'autres collectivités territoriales contribuant aux financements.

Les membres de droit de la conférence peuvent décider, à la majorité, d'autoriser « toute autre personne physique ou morale concernée par les politiques de prévention de la perte d'autonomie » à participer à ses travaux. Les représentants de la CNSA, auditionnés par vos rapporteurs, ont ainsi noté que « la rencontre et la mobilisation des élus cantonaux et des maires au sein de la conférence sont de bonnes pratiques pour améliorer la coordination des pratiques de prévention sur leur territoire »50(*).

Sans remettre en cause le principe d'une gouvernance resserrée, gage d'efficacité, les modalités d'association des communes et des intercommunalités pourraient être renforcées, en particulier dans la phase d'évaluation des besoins et de recensement des initiatives locales, en amont de la définition des programmes de financement.

Les bonnes pratiques de gouvernance consistant à associer des communes et des intercommunalités à la gouvernance des CFPPA devraient être promues. Il pourrait être envisagé de rendre obligatoire, lors de la phase de recensement des initiatives locales, la participation de représentants de communes et d'intercommunalités.

Recommandation n° 3 : Étudier l'opportunité de rendre obligatoire la participation de représentants de communes et d'intercommunalités dans le cadre de la mission de recensement des initiatives locales, qui incombe aux CFPPA.

c) En dépit de son manque d'ambition, la loi « Bien vieillir » conforte certaines opérations destinées à lutter contre l'isolement des personnes âgées

Bien que la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie, dite « Bien Vieillir », n'ait pas été à la hauteur des attentes en matière d'adaptation au vieillissement, l'un de ses apports est néanmoins d'élargir les possibilités de collecte et de transmission d'informations concernant les personnes âgées les plus fragiles51(*), à condition que celles-ci ou le cas échéant leur représentant légal ne s'y soient pas opposés.

Les conditions de collecte de données (identité, âge et domicile) par les maires sont précisées, ainsi que, réciproquement, les modalités
de transmission aux maires des données relatives aux bénéficiaires
d'allocations52(*). Concrètement, les maires peuvent transmettre ces données aux CCAS (ou CIAS), aux services sanitaires ou aux établissements et services médico-sociaux (ESMS) de leur territoire, pour informer les personnes de leurs droits, proposer des actions contre l'isolement social ou organiser un contact périodique dans le cadre d'un plan d'alerte et d'urgence. Toutefois, le décret d'application, qui doit être pris après avis de la CNIL, est toujours attendu.

Si les dispositifs de lutte contre l'isolement ne sont pas nouveaux, ces nouvelles dispositions doivent conférer davantage de sécurité juridique pour lutter contre l'isolement et mieux orienter les seniors vers des services
adaptés. Les dispositions de la loi « Bien vieillir », relatives à la collecte et à la transmission des données, pourraient faciliter ces initiatives. Dans le cadre des travaux d'audition, plusieurs exemples de coopérations fructueuses ont été mis en exergue. L'association France urbaine a cité la convention d'échanges de données conclue entre la ville de Rennes et le département d'Ille-et-Vilaine, dont l'objet est de repérer, sur la base de critères objectifs de fragilité, des situations d'isolement. Cette initiative a permis à la ville d'adresser des courriers d'information ciblés aux habitants et de multiplier par six, en l'espace de deux ans, le nombre de personnes inscrites sur le registre des personnes vulnérables.

Ces nouvelles possibilités de collecte de données contribuent à la mise en place des « réseaux de vigilance »53(*), mettant en relation les acteurs engagés dans la lutte contre l'isolement social, tout en respectant le libre arbitre des personnes quant à leur volonté de prendre part à ces démarches.

L'AMF souhaite aller plus loin, considérant que le « repérage des publics » est l'un des obstacles majeurs dans la mise en oeuvre
des «
 démarches permettant d'aller au contact direct des
personnes
 ». L'association propose ainsi d'engager une réflexion pour que la « réglementation RGPD puisse être assouplie lorsque la demande émane du pouvoir public et relève de démarches de solidarités et non commerciales »54(*).

Recommandation n° 4 : Veiller à la publication du décret d'application relatif aux modalités de collecte et de transmission par les maires d'informations concernant les personnes les plus fragiles.

2. Le nouveau SPDA devra renforcer la coordination entre les acteurs de la politique du grand âge
a) Au 1er janvier 2025, le SPDA sera déployé dans chaque département

Conformément aux dispositions de la loi du 8 avril 2024
dite « Bien vieillir », le SPDA sera mis en place à compter du 1er janvier 2025. Ce nouveau service public devra - entre autres missions55(*) - renforcer la coordination entre les acteurs de la politique du grand âge, quel que soit le point d'entrée (guichet France services, maison départementale du handicap (MDPH), CCAS, caisses de sécurité sociale, etc.).

L'article L. 149-6 du CASF, dans sa rédaction issue de la loi « Bien vieillir », dispose que les communes et leurs groupements seront parmi les acteurs devant assurer conjointement le SPDA56(*). L'approche de la loi « Bien vieillir » rejoint largement celle portée par son inspirateur, Dominique Libault, qui dans son rapport « Vers un service public territorial de l'autonomie »57(*) décrivait les communes et les intercommunalités comme des « partenaires » de la gouvernance de ce futur service public départemental. Selon cette conception, le bloc communal compterait ainsi parmi un « ensemble » d'acteurs apportant des « réponses de proximité », tandis que la gouvernance du SPDA aurait vocation à être assurée par « l'État [et] le conseil départemental, chacun légitime dans [leur] sphère de compétences respective »58(*).

Cependant, le texte de la loi « Bien vieillir » se cantonne à une territorialisation inaboutie du SPDA. Dans le cadre des discussions sur la proposition de loi, le Sénat avait adopté un amendement59(*) visant à permettre au conseil départemental et à l'ARS de définir conjointement des « territoires de l'autonomie » au niveau infra-départemental, c'est-à-dire au niveau des bassins de vie. En effet, une approche plus fine peut parfois être nécessaire, « le niveau départemental n'[étant] pas nécessairement suffisant pour penser la coordination de l'offre de services à la population et pour créer une articulation avec les EPCI, les centres locaux d'information et de coordination (CLIC) et les centres communaux d'action sociale (CCAS) notamment »60(*). Si le rôle de chef de filât du département apparaît justifié en matière sociale, il n'en reste « pas moins essentiel de laisser une grande place au niveau infra-départemental »61(*).

L'expérimentation du SPDA par les 18 départements préfigurateurs n'ayant été lancée que le 21 mai 2024, le retour d'expérience reste
limité62(*). Après cette courte phase de « préfiguration », le nouveau service public sera déployé sous la direction des conseils départementaux, en collaboration avec les ARS.

La procédure de sélection des 18 départements préfigurateurs du SPDA

Les 18 départements « préfigurateurs » du SPDA sont : les
Alpes-Maritimes, l'Aveyron, la Corrèze, le Finistère, la Gironde, la Guyane, les Hauts-de-Seine, l'Hérault, le Loir-et-Cher, la Mayenne, la
Meurthe-et-Moselle, le Nord, le Pas-de-Calais, la Sarthe, la Seine-Maritime, la Seine-Saint-Denis, la Somme, les Yvelines.

Ces départements, retenus par un « comité de sélection national », ont répondu à un appel à manifestation d'intérêt (AMI) intitulé « Préfiguration du Service public départemental de l'autonomie » (63(*)) dont l'objet était de « disposer d'un panel représentatif de la diversité des territoires (taille, situation géographique, caractéristique de la population... ». La prise en compte des réseaux d'initiatives locales mis en oeuvre pour coordonner les services publics de l'autonomie semble toutefois avoir occupé une place secondaire parmi les critères de sélection.

b) Le SPDA ne devra pas déstabiliser les modèles de coopération déjà structurés à l'échelle locale

Au cours des auditions menées par vos rapporteurs, plusieurs interlocuteurs - à l'instar de l'AMF et de France urbaine - ont souligné le risque de remise en cause des structurations et réseaux préexistants à l'échelle locale.

L'association France urbaine alerte ainsi sur les effets contreproductifs que risquerait d'avoir la méconnaissance de mécanismes de coordination locaux préexistant au SPDA : « Ce manque de connaissance des dispositifs à l'oeuvre peut conduire à présenter des dispositifs comme étant des nouveautés alors qu'ils prennent la suite de dispositifs de coordination déjà mis en place depuis plusieurs années (MAIA (64(*)), DAC (65(*)), CLIC (66(*)), Communautés 360 (67(*))...) et à générer des effets d'éviction : une coordination chasse l'autre et le travail de mise en réseau repart de zéro. ».

L'un des principaux écueils serait de remettre en question la « longue histoire de la structuration » des réseaux locaux, dont certains s'appuient par exemple sur une ingénierie contractuelle (conventions entre CLIC et départements, entre EPCI et départements, ou encore entre CLIC, caisses de retraite et CCAS). En d'autres termes, la bonne articulation du SPDA avec les dispositifs de coopération déjà en place sera déterminante pour le succès de ce nouveau service public. Par le passé, la mise en place des Dispositifs d'appui à la coordination (DAC) avait pu fragiliser « des années de structuration de réseau entre MAIA et CLIC »68(*). L'articulation entre DAC et CLIC n'est, à ce jour, « toujours pas parfaitement clarifiée ».

France urbaine invite ainsi à « stabiliser les modèles de
coordination
 » 
: les modèles de coordination devraient partir des besoins exprimés par les seniors, sans omettre aucun des acteurs de la chaîne d'orientation et d'accompagnement. C'est pourquoi la bonne association des communes et des intercommunalités à la gouvernance du SPDA devrait constituer un critère de qualité du service dans le cahier des charges national du SPDA, dont la publication est attendue dans les prochains mois69(*).

Recommandation n° 5 : Veiller à faire de la bonne association du bloc communal un critère du référentiel de qualité de service du cahier des charges national du SPDA.

Recommandation n° 6 : Approfondir la territorialisation du SPDA en soutenant également, à l'échelle infradépartementale, les modèles de coordination préexistants.

Plus fondamentalement, la nécessaire coordination des actions ne saurait faire oublier les difficultés liées à la raréfaction des moyens et à la perte d'attractivité des métiers du service à domicile.

À ce stade, selon l'AMF, les élus locaux « s'interrogent sur le caractère opérationnel de [la] démarche, le SPDA n'intervenant pas dans l'organisation de l'offre ou encore sur des sujets tels que la pénurie de professionnels ». Les maires peuvent agir « à hauteur de leurs compétences » sur l'attractivité des métiers (par exemple « en fléchant des logements sociaux, en réservant des places d'accueil en crèche »), mais « ne peuvent le faire seuls ». Dès lors, les maires demandent au Gouvernement de « proposer une grande réforme du domicile permettant de structurer davantage l'offre et de lever les difficultés actuelles, en particulier la pénurie de professionnels ».

De la même manière, l'association Intercommunalités de France, constatant que « les attentes sont très fortes concernant la revalorisation des métiers (attractivité des formations dès l'orientation, revalorisations salariales, amélioration des conditions et du cadre de travail) », appelle à « ne pas passer à côté des urgences du secteur : l'attractivité des métiers et le financement des établissements. »

Vos rapporteurs ne sauraient donc trop insister sur le caractère stratégique que revêtira la future loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge, qui devra donner de la visibilité et des moyens aux acteurs du secteur, et permettre in fine de répondre au désir des seniors de vieillir à domicile.

II. L'ADAPTATION DU BLOC COMMUNAL AU VIEILLISSEMENT, QUI INTÉRESSE TOUTES LES DIMENSIONS DU QUOTIDIEN, DOIT PROCÉDER D'UNE APPROCHE TRANSVERSALE

L'adaptation au vieillissement n'implique « plus seulement de prendre en charge, mais de prévoir et d'éviter des phénomènes d'exclusion, d'isolement et d'imaginer un fonctionnement harmonieux dans lequel l'ensemble de la population se retrouve »70(*). L'adaptation du bloc communal au vieillissement suppose une approche politique globale. Les initiatives, qui foisonnent sur les territoires, méritent une médiatisation et des moyens renforcés pour maximiser leur impact.

A. L'ENJEU DU VIEILLISSEMENT IMPLIQUE UNE APPROCHE TRANSVERSALE, À L'IMAGE DU RÉFÉRENTIEL PORTÉ PAR LE RÉSEAU DES « VILLES AMIES DES AÎNÉS »

1. L'adaptation du bloc communal à la transition démographique doit procéder d'une « politique à 360° »
a) L'adaptation au vieillissement est un enjeu éminemment transversal

L'adaptation au vieillissement - qui touche à tous les aspects de la vie quotidienne - nécessite de dépasser les approches cloisonnées (dites « en silos ») pour mettre en oeuvre une « politique à 360° »71(*). Créer un environnement favorable pour les seniors implique d'adapter des politiques aussi variées que celles de l'habitat, des mobilités, de l'urbanisme, ou encore l'offre culturelle72(*).

Le délégué général de l'association Petits frères des pauvres, auditionné dans le cadre de cette mission, souligne que « nombre de solutions nécessitent avant tout un changement de regard dans la structuration des politiques municipales existantes [ou] des réorganisations de dispositifs, voire de services »73(*). C'est dans cet esprit que la commune de Clamart, dont les représentants ont été auditionnés par vos rapporteurs, a impulsé une dynamique résolument transversale, tournée vers « l'aller vers », et a institué un conseil des aînés afin de mettre l'accent sur la dimension participative des politiques d'adaptation au vieillissement.

Cependant, contrairement à d'autres domaines municipaux clairement identifiés tels que la petite enfance, le sport ou la culture, les bases de données de la direction générale des collectivités locales (DGCL) ne proposent pas de « recension nationale en bonne et due forme, et encore moins une dénomination harmonisée »74(*) des élus référents dans le domaine du grand âge.

Si bon nombre de communes restent dépourvues d'élu dédié aux personnes âgées, ce rôle apparaît pourtant nécessaire pour « donner à [cette] délégation un caractère global » et affirmer sa nature transversale en posant un « oeil âgé »75(*) sur chaque programme d'aménagement ou d'équipement public. Sur la forme, pour plus de lisibilité, une suggestion serait de privilégier la dénomination « maire adjoint en charge des seniors » 76(*).

Recommandation n° 7 : Privilégier une approche participative et transversale de l'adaptation au vieillissement, par exemple au travers de la désignation d'un « maire adjoint en charge des seniors ».

Les initiatives visant à adapter les communes et intercommunalités au vieillissement, bien que disparates selon les territoires, couvrent des domaines variés. Pour n'en citer que quelques exemples :

- pour adapter les mobilités et les transports, les transports à la demande (TAD) se sont développés sous l'impulsion des collectivités territoriales, prenant des formes variées telles que des bus réservables ou des covoiturages solidaires. À l'échelle intercommunale, les points d'information médiation multiservices (PIMMS77(*)) offrent souvent des solutions de mobilité, notamment via le dispositif « Senior Mobile » permettant aux personnes âgées ou non véhiculées de réserver gratuitement un véhicule avec chauffeur, afin de pouvoir effectuer des achats ou encore effectuer des démarches administratives ;

- l'effort d'adaptation de l'aménagement urbain consiste à rendre les espaces piétons et la voirie plus accessibles en prévoyant « la présence de points d'arrêt rassurants que sont les bancs ou les toilettes publiques »78(*) ;

- en matière d'offre culturelle, l'association France urbaine a présenté à vos rapporteurs l'exemple de la ville du Havre, qui expérimente un dispositif d'accompagnement des publics isolés vers les lieux culturels. Dans les communes de plus petite dimension, il peut être envisagé de « coupler le portage des repas avec celui de livres ou de revues, ou bien de films et de musique »79(*), sur la base d'une offre construite, le cas échéant, par la bibliothèque communale ou intercommunale80(*).

b) La lutte contre l'isolement des personnes âgées isolées, un enjeu de fraternité à l'échelle de la commune

Alors que l'on estime à 530 000 le nombre de personnes en situation de « mort sociale »81(*), la lutte contre l'isolement des aînés est essentielle pour traduire concrètement les valeurs de fraternité.

Les communes peuvent, par exemple, participer au dispositif Monalisa. On pourra citer l'exemple de Bellegarde (Gard) qui, au travers de son CCAS, prend part à cette initiative depuis 2019, en mobilisant des équipes de citoyens bénévoles formés82(*) pour accompagner les personnes âgées isolées et recréer du lien social. Ce service d'accompagnement, gratuit et accessible sur simple inscription, permet de mobiliser l'ensemble des acteurs d'un quartier, tels que les « associations, les bailleurs sociaux, les commerçants de proximité » 83(*), contribuant in fine à l'inclusion des aînés isolés.

Pour prévenir le drame des « morts solitaires », les agents et délégataires de la commune ou de l'intercommunalité - en particulier ceux chargés de la collecte des ordures ménagères - peuvent être sensibilisés au repérage des anomalies (boîtes aux lettres non vidées, poubelles non sorties ou vides, etc.)84(*).

Recommandation n° 8 : Lutter contre l'isolement des personnes âgées et contre les phénomènes de « mort solitaire » :

- en sensibilisant les agents ou délégataires des communes et intercommunalités au repérage d'anomalies (poubelles non sorties, boîtes aux lettres pleines) ;

- en couplant - lorsque cela est possible - le portage des repas avec celui de livres ou de revues.

c) L'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) prévoit désormais des volets spécifiques consacrés à l'adaptation au vieillissement

Dans la lignée des recommandations de Luc Broussy dans son rapport précité85(*), l'ANCT a fait de la transition démographique l'une de ses priorités, aux côtés de la transition écologique et économique, en particulier dans le cadre de ses programmes « Petites villes de demain » et « Action coeur de ville ».

L'enjeu de l'adaptation au vieillissement est d'autant plus prégnant que les communes membres du programme « Petites villes de demain » sont, au regard de leurs caractéristiques, concernées au premier chef par la transition démographique. La part des personnes âgées de plus de 75 ans y est nettement supérieure à la moyenne nationale86(*) :

 

Petites villes de demain

Moyenne nationale

Part des personnes de 75 ans et plus

12,6 %

9,3 %

Part des personnes de 65 ans et plus

24,5 %

19,8 %

Source : données INSEE

Vos rapporteurs recommandent ainsi de continuer à veiller à l'inclusion systématique, dans les programmes structurants de l'ANCT, d'un volet consacré à l'adaptation au vieillissement des communes et groupements de communes.

Les représentants de l'ANCT ont présenté à vos rapporteurs la démarche « Bien vieillir dans les Petites villes de demain » initiée en décembre 2021. Dans ce cadre, un appel à manifestation d'intérêts a été initié en partenariat avec la CNSA et la Banque des territoires, pour soutenir le développement de projets d'habitats inclusifs dans les communes du programme « Petites villes de demain ». Selon l'ANCT, en octobre 2023, quelque 116 projets d'habitat inclusif avaient été accompagnés87(*) dans le cadre de l'opération Petites villes de demain. Les porteurs de projets, publics ou privés, bénéficient d'un accompagnement en ingénierie dès l'entrée dans le dispositif, d'une « mise en visibilité nationale », d'un accompagnement local sur mesure, ainsi que d'une mise en réseau avec les autres lauréats.

Le projet d'habitat social, écologique et intergénérationnel porté par la commune de Créon (Gironde) a été retenu parmi les lauréats de l'appel à manifestation d'intérêt « Bien vieillir dans les Petites villes de demain ». Ce projet participatif et coopératif, porté par des résidents désireux de vivre en colocation intergénérationnelle, a bénéficié d'un soutien financier
de 15 000 euros de la CNSA, permettant au collectif d'être accompagné par une architecte et de réaliser une étude des sols.

2. Le réseau des « Villes amies des aînés » reste méconnu malgré sa pertinence

Le RFVAA88(*), créé en 2012 et affilié au réseau mondial des villes et communautés amies des aînés de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), comptait 333 collectivités adhérentes en octobre 2024.

La démarche portée par ce réseau a été largement saluée lors des auditions menées par vos rapporteurs. La participation au RFVAA implique de répondre à des critères définis dans un référentiel « extrêmement pertinent », bien que « trop méconnu » selon Jean-Marc Blanc, directeur de l'institut méditerranéen des métiers de la longévité (I2ML), auditionné dans le cadre de cette mission. Les principaux objectifs de la démarche
consistent à :

- mieux anticiper les changements sociétaux liés à l'augmentation de l'espérance de vie ;

- lutter contre l'âgisme, c'est-à-dire les discriminations fondées sur l'âge, en revalorisant la place et le rôle des aînés ;

- adapter les territoires au vieillissement à travers une prise en compte du quotidien des seniors ;

- permettre à chaque individu, quel que soit son âge, de trouver sa place dans la société et de se sentir pleinement acteur de son territoire.

Ce cadre est décliné autour de huit principaux axes thématiques, dont trois concernent l'environnement bâti (bâtiment et espaces
extérieurs ; transport et mobilité ; habitat) et cinq relèvent de l'environnement social (culture et loisirs ; autonomie, services et soins ; participation citoyenne et emploi ; lien social et solidarité ; information et communication). Ces objectifs sont regroupés dans un plan d'action « applicable à tout territoire souhaitant améliorer la qualité de vie de ses habitants âgés, quels qu'en soient la taille, le cadre de vie, ou les ressources »89(*).

Depuis janvier 2021, la ville de Caen est engagée dans la démarche « Ville Amie des Aînés », et vise l'obtention du label en 2025. À cette fin, la municipalité a déployé un plan d'action, autour des huit axes évoqués supra, reposant sur des actions concrètes et réalisables à moyen terme, pour apporter des améliorations tangibles dans le quotidien des aînés. Comme le souligne la ville de Caen dans sa contribution écrite à la mission, cette « démarche se veut participative et transversale. Participative puisqu'elle repose en grande partie sur la parole des personnes âgées qui sont partenaires à part entière de la démarche, et transversale tant elle a vocation à fédérer l'ensemble des délégations municipales et partenaires de la société civile. ».

L'engagement de la commune de Caen dans la démarche « Ville amie des aînés »

Source : contribution écrite de la commune de Caen à la mission

Forte de 924 habitants, la commune de Trévières (Calvados) - par ailleurs bénéficiaire du programme « Petites villes de demain » - s'est également engagée dans la démarche. En mars 2023, un diagnostic des besoins, mené en partenariat avec le gérontopôle de Normandie, a été restitué pour définir un plan d'action, en suivant le référentiel du RFVAA. L'étude révélait que
38,4 % de la population était âgée de plus de 60 ans, et qu'un tiers des seniors était dans une situation de « fragilité sociale ». Parmi les principales recommandations du diagnostic, on trouve la nécessité de prévoir des espaces extérieurs récréatifs, de développer des solutions de mobilité et d'adapter le parc de logements au vieillissement90(*). L'étude montre aussi que, grâce aux actions et ateliers déployés depuis 2017 pour lutter contre l'isolement des personnes âgées, Trévières a su « développer le lien intergénérationnel », qui pourrait être conforté au travers de l'institution d'un conseil des seniors.

La commune de Clamart figure parmi les 38 territoires labellisés « Ami des aînés »91(*). Les principes ayant présidé à cette démarche ont été présentés à vos rapporteurs par Jessica Vanborre, directrice de l'action sociale de la commune, et Gauthier Afchain, directeur général adjoint en charge des services à la population.

Le label « Ami des aînés » à Clamart : une démarche participative et transversale

L'entrée dans la démarche Ville Amie des Aînés en février 2022 a permis de « structurer » la politique de l'âge en conduisant « l'ensemble des services de la ville investis à changer leur angle d'approche dans la conduite des projets ».

Le principe du « faire avec » plutôt que du « faire pour » a permis de « remettre systématiquement les aînés au coeur des décisions pour eux-mêmes ». Ainsi, un conseil consultatif des aînés a été créé en décembre 2023, pour participer au déploiement du plan d'action « Ville amie des aînés » au travers de commissions thématiques. Des « aînés ambassadeurs » participent en outre à la commission communale d'accessibilité.

La commune de Clamart a obtenu, en 2024, le label « Ami des aînés ». Un comité de pilotage de la démarche se réunit deux fois par an, et « rassemble des acteurs clés au sein de la ville : cabinet du maire, service communication, élus du territoire, élue du CCAS, agents du CCAS, aînés ambassadeurs, partenaires » afin de permettre une « prise en compte globale des enjeux liés au vieillissement, une mise en lien entre les différents acteurs et une expression facilitée des aînés ».

Si la démarche du RFVAA s'adresse essentiellement aux communes, les représentants d'Intercommunalités de France ont précisé, dans le cadre de leur audition, que l'objectif était aussi de déployer la méthode de RFVAA à l'échelle de l'intercommunalité92(*). En décembre 2023, l'agglomération de Cholet est devenue la première intercommunalité de France à être labellisée
« Amie des aînés ».

Recommandation n° 9 : Renforcer la visibilité du réseau « Villes amies des aînés » au travers d'un soutien symbolique (reconnaissance juridique, actions de communication), voire matériel (subventions93(*)), du ministère de la cohésion des territoires.

*

B. DE BONNES PRATIQUES POURRAIENT ESSAIMER, SOUS RÉSERVE QUE LE BLOC COMMUNAL DISPOSE DES FINANCEMENTS ADÉQUATS

Un réseau de bonnes pratiques, devant être adaptées aux réalités locales, s'est progressivement structuré grâce au foisonnement des initiatives. La diffusion de ces pratiques reste toutefois conditionnée à la pérennité des financements et des ressources en ingénierie des communes, en particulier pour les plus petites d'entre elles.

1. La structuration de réseaux de bonnes pratiques, encore trop peu médiatisés, est en cours
a) La CNSA se donne pour objectif de repérer et de faire essaimer des initiatives territoriales prometteuses

La CNSA a signé, fin 2023, une convention avec l'Union des gérontopôles de France, afin de mettre en oeuvre les axes de son programme, en particulier le repérage et l'essaimage d'initiatives territoriales prometteuses.

Les représentants de la CNSA ont informé vos rapporteurs qu'un guide méthodologique pour la lutte contre l'isolement, à destination des élus locaux (y compris les membres des communes et intercommunalités), était en cours de conception et devrait être prochainement publié.

Par ailleurs, ainsi que le suggérait Jean-Marc Blanc, directeur de l'i2ml, l'accent pourrait être mis sur la prévention, en intensifiant les actions de promotion du vieillissement actif au sein des « ateliers Bienvenue à la retraite »94(*) déployés par la CNAV en lien avec l'État, la CNSA et les collectivités territoriales. Plus globalement, l'intensification des relations entre les collectivités et le réseau des caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) serait de nature à consolider les actions de prévention à destination des seniors.

b) Des réseaux de bonnes pratiques sont également animés par l'ANCT et le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA)

L'ANCT propose, via sa projetothèque, un accès à des projets et réalisations de collectivités et d'acteurs locaux qu'elle accompagne ou qu'elle a repérés. Ces projets sont regroupés sous forme de fiches de cas pratiques, de témoignages ou de reportages.

La projetothèque de l'ANCT

La projetothèque de l'ANCT regroupe des exemples, qui concernent notamment des communes membres du programme « Petites villes de demain ». Plusieurs d'entre eux ont trait à l'adaptation des communes au vieillissement de leur population.

On pourra citer, à titre d'illustration, la commune de Montendre95(*)
(Charente-Maritime) qui, pour lutter contre l'isolement des aînés, a développé des structures et des services dédiés à leur inclusion sociale, en partenariat avec l'État via le dispositif France services. Trois associations y interviennent ainsi auprès des seniors : (1) le centre socioculturel de la commune organise des ateliers d'« équilibre » pour prévenir les chutes, ainsi que des sorties collectives pour rompre l'isolement, et apporte une aide - au travers de l'espace France services - à l'accès à Internet et aux services en ligne notamment ; (2) une association propose des soins et de l'aide à domicile chez les personnes âgées ; (3) une association dédiée, « Forme, Détente et Retraite Sportive », organise des activités centrées sur le sport et des sorties adaptées aux seniors.

En outre, les villes membres des réseaux Action coeur de ville (ACV) et Petites villes de demain (PVD) bénéficient du partenariat noué entre l'ANCT et le RFVAA, qui consiste notamment en la mise à disposition de fiches de partages d'expérience96(*).

Le CEREMA a produit, dans le cadre du programme national « Une voirie pour tous », une documentation abondante97(*) sur les politiques d'aménagement visant à « repenser l'espace public autrement pour plus de bien-être, de sécurité, de confort d'usage, de lien social et d'urbanité ». Ainsi que le soulignait Luc Broussy dans son rapport de mai 2021, les fiches pratiques du CEREMA, de grande qualité, restent trop largement inexplorées faute d'une médiatisation suffisante.

Recommandation n° 10 : Poursuivre la structuration de réseaux de bonnes pratiques, aux fins d'adapter les espaces publics aux besoins des aînés (accessibilité des services publics, mobilités).

Pour déployer ces bonnes pratiques aux vertus préventives, encore faut-il que les communes disposent de moyens suffisants et d'un soutien adéquat.

2. Le fonds d'appui aux territoires innovants seniors, outil au service de l'adaptation du bloc communal, devrait être pérennisé

Les travaux d'audition ont mis en lumière la pertinence du fonds d'appui aux territoires innovants seniors, expérimenté sur la période
2022-2023 pour soutenir les projets des communes et intercommunalités visant à adapter les territoires au vieillissement de la population.

L'animation de ce fonds a été assurée par le réseau « Ville amies des aînés », à partir de financements de la CNSA. Certaines communes membres des réseaux « Action coeur de ville » et « Petites villes de demain » en ont notamment bénéficié, à l'instar de la commune de Trévières (Calvados), qui a établi un diagnostic des besoins à hauteur de 10 000 euros aboutissant - entre autres actions - à la décision d'installer de nouveaux bancs en centre-ville.

Plébiscité par ses bénéficiaires98(*), ce fonds est cependant resté relativement confidentiel, en raison de sa modeste dimension (8 millions d'euros environ pour la période 2022-202399(*)). Au total, quelque 380 projets lauréats, répartis entre 274 collectivités, ont pu être soutenus (dans la limite de 40 000 euros par projet). Les porteurs de projets incluaient des communes, des EPCI, des pays et, dans certains cas, des CCAS ou CIAS.

La mobilisation du fonds d'appui aux territoires innovants seniors100(*)

Sur un total de 8 millions d'euros pour 2022 et 2023, la répartition envisagée des fonds était comme suit :

· Sur le volet ingénierie, environ 0,5 M€ étaient dédiés à « une bourse d'appui aux collectivités » pour « financer la réalisation d'un état des lieux transversal du territoire ou le pilotage d'une démarche participative avec les habitants âgés ».

Des communes, EPCI et pays ont pu solliciter cette bourse autour d'un ou plusieurs des objectifs suivants : structurer la gouvernance en faveur de la politique de l'âge dans le territoire, élaborer un état des lieux transversal du territoire et animer un diagnostic participatif et en réaliser la synthèse.

La bourse a permis à la collectivité de solliciter l'appui de consultants, d'organismes tels que l'Association nationale des pôles territoriaux et des pays ou les centres permanents d'initiatives pour l'environnement (CPIE), ou d'autres collectivités.

· Le second volet, doté de 7,5 millions d'euros, a permis de financer quelque 380 projets dans les territoires, « en complémentarité des dispositifs existants (conférences des financeurs, aide à la vie partagée, financements de la Caisse des Dépôts...) ».

Parmi les exemples de démarches : l'élaboration d'une offre culturelle destinée aux petits-enfants et grands-parents, la mise en place de lieux pour enfants dans des habitats collectifs dédiés aux aînés, l'amélioration des conditions d'accueil des aînés dans des événements grand public tels que des festivals, des bibliothèques ou des « repaires cafés » animés par des aînés, « des actions visant à permettre aux aînés de s'impliquer dans la transition écologique » (mobilité douce, recours aux circuits courts...).

Alors que la reconduction du fonds n'est toujours pas confirmée, vos rapporteurs soulignent la pertinence de ce dispositif pour répondre aux besoins concrets exprimés, sur le terrain, par les élus communaux et intercommunaux. À titre d'exemple, dans une contribution spontanée à cette mission, le maire de Bernières sur mer101(*) (Calvados) a regretté que les travaux de voirie, nécessaires pour faciliter la mobilité piétonne, soient trop « peu accompagnés financièrement ». Précisément, ce type de projets devrait pouvoir trouver un débouché, après instruction, dans le fonds d'appui pour les territoires innovants seniors.

Au-delà de la pérennisation de ce fonds, qui répondrait à certaines préoccupations exprimées par les élus locaux pour adapter le quotidien des seniors, un assouplissement des modalités de financement permettrait à un plus grand nombre de communes, notamment de petite taille, d'en bénéficier.

Dans le cadre de l'expérimentation menée entre 2022 et 2023, en effet, les subventions étaient allouées sur la base d'un co-financement de la collectivité ou de ses partenaires (avec un engagement minimal de 20 % pour les collectivités de moins de 20 000 habitants, de 50 % pour les collectivités
de 20 000 à 100 000 habitants et de 70 % pour les collectivités de plus
de 100 000 habitants). De plus, ces financements étant annuels, ils ne permettent pas de prévoir un soutien sur plusieurs années, pourtant indispensable pour l'ingénierie d'animation, dont le rôle est crucial dans les actions d'inclusion des aînés et de lutte contre l'isolement.

Recommandation n° 11 : Pérenniser le fonds d'appui pour les territoires innovants seniors dans le cadre du PLFSS pour 2025.

Il pourrait être envisagé parallèlement :

- d'assouplir l'exigence de cofinancement par la collectivité ou l'EPCI (aujourd'hui comprise entre 20 et 40 %), au bénéfice des communes de petite dimension ;

- de permettre des financements pluriannuels, au soutien, notamment, de l'ingénierie d'animation.

Ce fonds ne pourra naturellement compenser l'absence d'une véritable programmation budgétaire nationale en faveur de l'autonomie, nécessaire pour faire face aux défis du vieillissement de la société. C'est ainsi que l'AMF porte la « demande en urgence d'une politique nationale à destination des personnes âgées par l'adoption d'une loi de programmation et d'orientation, s'appuyant sur des financements dédiés, et non sur les budgets communaux, aujourd'hui contraints. ».

CONCLUSION GÉNÉRALE

Ainsi que le résume Yann Lasnier, délégué général des Petits frères des pauvres, les élus locaux sont « les mieux placés pour disposer à la fois de la légitimité et de la capacité suffisante pour entraîner les forces vives de leur territoire »102(*) en faveur du bien vieillir.

Les élus du bloc communal, fidèles à leur réputation « d'inventeurs de solutions », rivalisent d'ingéniosité pour déployer des dispositifs permettant d'adapter leur territoire au vieillissement de la population. Ces enjeux intéressent l'ensemble des domaines de l'action communale et supposent le déploiement d'une véritable « politique à 360° », dans des domaines aussi variés que les mobilités, le logement, la voirie ou l'offre culturelle.

Cependant, les moyens des communes et des intercommunalités restent insuffisants face aux défis croissants, exacerbés par les lacunes des politiques nationales.

Comme le rappelait le Sénat lors des débats sur la proposition de loi dite « Bien vieillir », une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge reste incontournable pour faire du « bien vieillir » une « grande cause nationale », conformément aux valeurs de fraternité.

EXAMEN EN DÉLÉGATION

Lors de sa réunion du 8 octobre 2024, la délégation aux collectivités territoriales a autorisé la publication du présent rapport.

M. Rémy Pointereau, premier vice-président. - Mes chers collègues, l'ordre du jour de cette semaine est chargé. Nous discutons aujourd'hui d'un thème transversal, qui est au coeur des préoccupations des élus locaux et met à l'honneur le foisonnement de leurs initiatives, à savoir le vieillissement de la population.

Alors que nous venons de célébrer, le 1er octobre dernier, la Journée internationale des personnes âgées, la décennie 2020 est marquée par un phénomène saillant, auquel les maires sont confrontés : l'explosion du nombre de personnes âgées de 75 à 84 ans. D'ici à 2030, leur nombre aura augmenté de 49 % par rapport à 2020 ! Ce n'est pas rien.

Même si elle relève d'abord des compétences départementales, l'adaptation au vieillissement est donc tout à la fois un défi pour le bloc communal, à l'heure où les politiques nationales et les moyens alloués à la prévention sont insuffisants - au regard du contexte, cela risque de le
rester -, et un appel à réinventer les territoires et à renforcer l'inclusion des personnes âgées, conformément au principe de fraternité inscrit sur le fronton de nos mairies.

L'adaptation du bloc communal au vieillissement, enjeu éminemment transversal, suppose une « politique à 360 degrés », selon la formule utilisée par Luc Broussy dans son rapport interministériel sur l' « Adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires à la transition démographique » de mai 2021, qu'il s'agisse de repenser l'aménagement des espaces publics ou la voirie pour les rendre plus accessibles, d'adapter les logements pour permettre à nos concitoyens de vieillir dignement chez eux - certaines communes le font déjà -, de lutter contre l'isolement et la « mort sociale », tant en ville qu'à la campagne.

En bonne entente avec la commission des affaires sociales, dont nos collègues rapporteurs, Laurent Burgoa et Corinne Féret, sont d'ailleurs membres -, nous avons bien pris soin d'exclure de notre champ les aspects relatifs à la situation des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), puisqu'il s'agit de compétences nationales et départementales. Nous renvoyons sur ces points à l'excellent travail de la mission d'information sur la situation des Ehpad, présenté le 25 septembre 2024.

Vous en conviendrez aisément, toutefois, les sujets de discussion ne manqueront pas.

M. Laurent Burgoa, rapporteur. - Ce fut un grand plaisir de travailler avec Corinne Féret. Notre dynamique de travail a été victime de la dissolution de l'Assemblée nationale, puisque certains de nos déplacements comme certaines de nos auditions ont été annulés : notre travail n'a pu reprendre qu'il y a quelques jours.

Comme le président Rémy Pointereau vient de l'indiquer, l'adaptation du bloc communal au vieillissement de la population est devenue impérieuse.

La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation a confié à Corinne Féret et à moi-même une mission d'information qui nous a conduits à mener des auditions avec des acteurs très variés : chercheurs, élus locaux et intercommunaux, associations d'aides aux personnes âgées, représentants de centres communaux d'action sociale (CCAS) ou encore de caisses de sécurité sociale.

Comme le prédisait Luc Broussy dans son rapport interministériel, il apparaît bien que « les maires sont en passe de devenir les grands architectes de la transition démographique ». Nous pourrions ajouter que les maires sont en première ligne face à des besoins croissants, mais non compensés, et que leur rôle, pourtant crucial, reste insuffisamment reconnu.

Les politiques nationales trahissent bien un manque d'anticipation, voire une certaine impréparation. Nous ne reviendrons pas ici sur la situation financière préoccupante des Ehpad. Je vous renvoie à mon tour au récent rapport d'information de la commission des affaires sociales.

Prenons un autre sujet stratégique, celui de l'adaptation des logements. À l'heure où 85 % des Français souhaitent vieillir chez eux, le nouveau dispositif « MaPrimeAdapt' » est largement sous-dimensionné : la Cour des comptes relève ainsi que les objectifs de logements à adapter, fixés à 680 000 sur dix ans, ne couvrent pas le besoin estimé à 2 millions de ménages prioritaires.

Les communes jouent un rôle traditionnellement important dans la prise en charge des aînés. Le champ de l'action sociale est le domaine dans lequel elles s'investissent le plus. Ces actions sont souvent coordonnées - en tout cas, dans les communes à partir de 1 500 habitants - par les CCAS, qui proposent dans 96 % des cas des aides facultatives aux personnes
âgées : portage de repas, aide à domicile, activités culturelles et sportives dédiées aux seniors.

Les intercommunalités ont plus récemment investi ce champ. La création des centres intercommunaux d'action sociale (CIAS) est possible depuis 1986 et l'échelon intercommunal peut être pertinent pour définir une stratégie de soutien aux personnes âgées, pourvu que les acteurs communaux soient étroitement associés à cette démarche, par exemple au sein des commissions Cohésion ou Grand Âge de l'intercommunalité.

Face au vieillissement accéléré de la population, de récentes avancées législatives ont partiellement reconnu le rôle du bloc communal. Ainsi, la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement, dite « ASV », prévoit que le programme local de l'habitat (PLH) - élaboré tous les six ans à l'échelle intercommunale - intègre désormais la problématique de l'adaptation de l'habitat au vieillissement. L'obligation pesant sur les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) est essentiellement une « obligation de réflexion », et non pas une obligation de résultat.

Mme Corinne Féret, rapporteure. - Je remercie à mon tour
Laurent Burgoa : nous avons en effet dû réaliser ce travail intéressant selon un calendrier particulier.

J'insisterai d'abord sur les apports, encore trop limités, de la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie, dite « Bien Vieillir ». L'AMF, dont nous avons auditionné les représentants, a souligné que les difficultés de collecte de certaines données personnelles pouvaient constituer un obstacle dans les opérations de lutte contre l'isolement des personnes âgées assurées par le bloc communal.

La loi « Bien Vieillir » apporte une première réponse en élargissant les possibilités de collecte de données par les maires et de transmission aux organismes compétents concernant les personnes âgées vulnérables, sauf opposition de ces dernières. Les nouvelles dispositions inscrites dans le code de l'action sociale et des familles doivent permettre de mieux repérer les personnes isolées et de les orienter vers les services adaptés.

Nous serons particulièrement attentifs à la publication rapide du décret d'application, attendu d'ici à la fin 2024, qui doit apporter davantage de sécurité juridique aux communes. L'enjeu est de lutter contre le fléau de l'isolement. Selon l'association Petits frères des pauvres, 530 000 personnes âgées de plus de 60 ans sont aujourd'hui en situation de « mort sociale ». Cette solitude peut aboutir à des cas dramatiques, les phénomènes de « mort
isolée
 », qu'il nous faut à tout prix éviter.

La loi « Bien Vieillir » prévoit également le déploiement, dans chaque département, à compter du 1er janvier 2025, d'un SPDA, après une courte phase de préfiguration dans dix-huit départements. Pour renforcer la coordination entre les acteurs de la politique du grand âge, le SPDA devra éviter certains écueils. En particulier, plusieurs de nos interlocuteurs - AMF, Intercommunalités de France, France urbaine notamment - se sont inquiétés du risque de déstabilisation des mécanismes de coordination locaux préexistant au SPDA. Il ne s'agit pas de fragiliser l'existant et d'avoir à repartir de zéro.

Le risque serait ainsi qu'« une coordination chasse l'autre et que le travail de mise en réseau reparte de zéro », en fragilisant l'ingénierie contractuelle liant par exemple certains CCAS aux centres locaux d'information et de coordination (Clic) gérontologiques.

Par exemple, la ville de Caen contribue activement au fonctionnement du Clic de Caen et Couronne : cette coopération vise déjà à offrir un guichet unique pour faciliter l'accès aux droits et les actions de prévention.

Ensuite, comme le Sénat l'a proposé dans le cadre des débats sur la proposition de loi « Bien Vieillir » et comme l'ont confirmé plusieurs de nos interlocuteurs, la territorialisation du SPDA gagnerait à être renforcée, sans remettre en cause le rôle légitime de chef de filât du département. Cette territorialisation pourrait consister à permettre aux conseils départementaux et aux ARS de définir des « territoires de l'autonomie » à l'échelon infradépartemental, c'est-à-dire au niveau du bassin de vie, qui peut parfois constituer une échelle plus fine pour adapter l'offre de services aux réalités locales.

M. Laurent Burgoa, rapporteur. - D'un point de vue stratégique, l'adaptation du bloc communal au vieillissement touche à l'ensemble des dimensions de la vie quotidienne.

Elle implique donc de déployer une « politique à 360 degrés » et de poser un « oeil âgé » sur l'ensemble des domaines d'action de la commune, pour reprendre la formule de Yann Lasnier, délégué général des Petits frères des pauvres.

Il peut s'agir, par exemple, de nommer un « maire adjoint en charge des seniors », donnant à sa délégation un caractère global en matière de logement, de mobilités, d'accès à l'espace public ou à la culture, et favorisant l'engagement citoyen.

De ce point de vue, le RFVAA, affilié à l'OMS, propose un référentiel que nos interlocuteurs de l'i2ml ont qualifié d'« extrêmement pertinent ».

La participation au réseau, qui comprend à ce jour 330 membres, est conditionnée à la mise en oeuvre d'un plan d'action structuré autour de
huit axes thématiques, dont trois concernent l'environnement bâti et cinq relèvent de l'environnement social.

Pour être labellisées, à l'instar de la commune de Clamart dont nous avons rencontré les représentants, les communes doivent s'engager dans une démarche participative qui suppose de consulter les personnes âgées aux différentes phases de la construction des politiques publiques, par exemple au travers de la constitution d'un « Conseil des aînés » qui ne peut pas être une simple coquille vide, mais doit être associé à certaines décisions.

Le processus est exigeant et l'obtention du label suppose plusieurs années de travail, entre la mise en place du plan d'action transversal, son évaluation et la mise en oeuvre de la démarche participative. Dans le département de ma collègue Corinne Féret, par exemple, la commune de Caen a engagé cette démarche en 2021 et vise l'obtention du label « Ville amie des aînés » en 2025.

Mme Corinne Féret, rapporteure. - Je souhaite citer la commune de Trévières, commune rurale de mon département, qui a décidé de proposer, dès 2017, des actions de maintien du lien social et de lutte contre l'isolement des aînés.

Trévières, qui est en lice pour l'obtention du label « Ville amie des aînés », organise des ateliers intergénérationnels dont le succès ne se dément pas, avec pour objectif de prévenir la perte d'autonomie, via des activités physiques adaptées et des randonnées, ou, plus largement, d'incarner les valeurs de fraternité. Une réflexion a également été engagée sur le mobilier urbain, avec l'installation de bancs.

Ces actions ont été facilitées par un diagnostic des besoins, financé à hauteur de 10 000 euros par un fonds aussi méconnu que plébiscité lors de nos auditions, le « Fonds d'appui pour des territoires innovants seniors ».

Ce fonds de dimension modeste - 8 millions d'euros - a été expérimenté entre 2022 et 2023. Alimenté par la CNSA et animé par le réseau « Villes amies des aînés », il a permis de soutenir 152 projets très concrets de communes et d'intercommunalités, tels que des projets d'adaptation de la voirie ou du mobilier urbain.

Alors que le fonds est aujourd'hui épuisé et que sa reconduction n'est, à ce jour, toujours pas confirmée, nous estimons qu'il s'agit là d'un dispositif de soutien à l'ingénierie pertinent pour répondre aux besoins concrets des élus communaux et intercommunaux. Nous préconisons donc de le pérenniser, en assouplissant certaines conditions pour permettre, notamment, un soutien pluriannuel aux projets qui, comme l'animation d'ateliers, supposent des financements réguliers pour ne pas péricliter.

Ce financement s'inscrit dans une logique de prévention et doit permettre au bloc communal d'anticiper ce qu'il est parfois convenu d'appeler le « mur démographique » ; celui-ci se rapproche inexorablement.

La commune de Trévières a été labellisée et reconnue « Petites villes de demain ».

Aussi ingénieux que soient les élus locaux, et nous devons ici leur rendre hommage, l'adaptation de notre société au vieillissement dépendra également de financements adaptés à l'échelle nationale et de la coordination entre les différents acteurs, y compris les acteurs communaux et intercommunaux.

Voilà autant de sujets qui, nous l'espérons, animeront les débats dans notre hémicycle, dans le cadre d'une future loi pluriannuelle sur le grand âge, maintes fois annoncée, mais toujours - nous le regrettons - reportée.

M. Rémy Pointereau, premier vice-président. - Je vous remercie de votre travail. L'isolement est en effet un problème majeur dans la ruralité. Certaines communes ont mis en place des systèmes d'alerte par application sur smartphone. Mais tout le monde n'a pas forcément de téléphone portable... Avez-vous réfléchi aux moyens de mieux alerter les personnes âgées en cas, par exemple, de vague de froid ou de fortes chaleurs ?

Le président du groupe « La Poste » nous a indiqué souhaiter que les facteurs puissent aller régulièrement à la rencontre des personnes seules et prendre soin d'elles. Évoquez-vous ce point dans le rapport ? Et faites-vous référence aux aides de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) - je ne sais pas si elles existent encore - à l'adaptation des logements ?

M. Laurent Burgoa, rapporteur. - Nos travaux ont été extrêmement condensés, ce qui ne nous a pas forcément permis d'aborder autant de sujets.

« La Poste » disposera-t-elle des financements pour maintenir sa présence sur l'ensemble des territoires ? Nous attendons de voir. J'ai un exemple dans le Gard : une initiative en ce sens devait être engagée, mais elle a malheureusement été abandonnée in fine, « La Poste » ne pouvant pas en assumer la charge financière.

Mme Corinne Féret, rapporteure. - Nous avons surtout axé le rapport sur les communes et les intercommunalités, même s'il y a évidemment d'autres acteurs.

Ce qui est actuellement proposé par « La Poste » est un contrat payant. Les missions des facteurs, qui sont de facto parfois les seuls à avoir un contact avec les personnes âgées, ont évolué ; on leur demande beaucoup plus, et dans des délais réduit. En l'occurrence, ils peuvent effectivement passer du temps auprès des personnes âgées isolées, mais c'est contre rémunération. D'ailleurs, je le regrette : cela fait perdre toute notion de relation humaine.

Les systèmes d'alerte par application, c'est très bien, mais encore faut-il que les personnes aient un smartphone, sachent s'en servir, n'habitent pas en zone blanche, etc.

Il y a également le lien personnel ; les démarches « d'aller vers » sont essentielles. Dans les petites communes, les maires connaissent tous les habitants. Dans les communes plus importantes, ce lien peut être assuré par des agents de services municipaux. Le registre institué par la loi « Bien Vieillir » pourrait être utilisé pour référencer et identifier toutes les personnes, même hors des périodes de crise sanitaire. Mais, encore une fois, nous pensons que rien ne vaut le lien humain.

M. Grégory Blanc. - Comment pourrait-on utiliser davantage les multiples fonds qui existent dans des actions plus importantes ?

L'organisation du médico-social dans nos territoires est un sujet majeur. Entre les ARS et les départements, il est toujours difficile de savoir qui a la responsabilité. Je crois qu'une clarification est nécessaire.

Le SPDA, c'est très bien. Mais j'ai le sentiment que l'on évacue systématiquement les acteurs du privé. Or nous avons besoin d'eux dans nos territoires.

Comment permettre au bloc communal d'avoir une place dans l'organisation médico-sociale ?

Avez-vous réfléchi à une remise à plat de la loi « Borloo » de 2004 ? La désectorisation avait été décidée dans un contexte de chômage
important. Même s'il ne serait pas forcément souhaitable de revenir à ce qui existait avant 2004, je pense que des ajustements s'imposent.

Mme Céline Brulin. - Sur ce sujet comme sur d'autres, c'est toujours un peu le même constat : il existe des dispositifs, des fonds, mais nous avons devant nous un vaste chantier pour apporter un peu plus de cohérence et permettre aux élus locaux de se repérer dans les méandres de mesures dont ils n'ont pas forcément connaissance.

Dans mon département, deux petites communes qui cherchaient, comme beaucoup d'autres, à lancer de toutes petites opérations de logement pour permettre à des anciens de rester sur leur territoire ont rencontré des difficultés pour trouver des financements. Les bailleurs et autres acteurs du logement privilégient plutôt des opérations d'envergure, qui sont, certes, respectables, mais qui ne correspondent pas aux besoins. Il me semble que nous manquons d'accompagnement et d'appui financier.

M. Bernard Delcros. - N'avez-vous pas le sentiment qu'il est difficile de connaître les différentes aides à l'habitat, voire de les demander, d'autant que les procédures sont souvent dématérialisées ? Ne serait-il pas utile d'aller vers une simplification ? Aujourd'hui, des personnes n'accèdent pas à leurs droits.

L'important est évidemment la relation humaine ; je pense aux maires, mais aussi aux clubs du troisième âge. Il faut, je le crois, appuyer ce que fait « La Poste » et utiliser, même si le service est payant, le maillage que les facteurs assurent sur l'ensemble du territoire pour apporter du lien humain et du service dans les communes.

Pour les seniors, la question de la mobilité en milieu rural est centrale. Comment se déplacer ? Comment accéder aux services ? Nous devons intégrer cette problématique.

Mme Sonia de La Provôté. - Le « mur démographique » qu'évoquait Corinne Féret est une réalité, singulièrement dans les petites communes.

Le parcours résidentiel est désormais l'alpha et l'oméga des politiques publiques en matière de logement. Le maintien à domicile est un objectif. Mais rester là où l'on a vécu, c'est rester dans sa commune, dans son quartier, pas forcément dans le même logement. Nombre de communes réfléchissent à proposer aux personnes âgées des logements plus petits pour que des familles avec enfants puissent occuper les logements plus grands. L'important est que la personne puisse rester en proximité avec son écosystème, le déracinement étant - nous le savons - une des premières causes de perte de repères et de décrochage. Il faut donc faire en sorte que les promoteurs prévoient ce parcours résidentiel. Je sais que les maires sont très actifs à cet égard.

Nous l'avons constaté pendant la crise covid à Trévières, où la maire s'est battue pour éviter des fermetures à la hussarde de distributeurs automatiques de billets : l'accès aux espèces est un sujet prioritaire qui mérite une mobilisation communale.

En matière de mobilité, l'offre de « Blablacar » à destination des collectivités permet aux personnes âgées qui le souhaitent de se déplacer tout en étant accompagnées par des habitants de la commune. Plusieurs municipalités ont recours à ce service, qui manifestement répond à une demande : il y a une vie en dehors du déplacement sanitaire.

Enfin, j'alerte sur la mise en place de dépôts collectifs pour les ordures ménagères. Elle est certes intéressante du point de vue du développement durable, mais il est difficile pour les personnes âgées d'y déposer leurs déchets. En réponse aux initiatives de certaines intercommunalités, il y a eu la « bronca » de ceux qui ne veulent pas, mais il y a aussi la « bronca » de ceux qui ne peuvent pas, et qu'il faut accompagner.

M. Fabien Genet. - Le ramassage à domicile était finalement une bonne chose.

Mme Patricia Schillinger. - Dans le territoire que je représente, aux frontières de la France, de la Suisse et de l'Allemagne, de nombreux habitants n'ont pas accès aux services à la personne. Cela s'explique aussi par la fracture des salaires : faire des ménages en Suisse rapporte deux ou trois fois plus qu'en France.

En tant que maire puis Sénatrice, j'ai pu constater que dans certaines communes, l'activité du CCAS se limitait à l'organisation de rares sorties ou grands anniversaires. Les actions de solidarité ou d'aide aux familles sont souvent renvoyées à l'assistante sociale. Aller vers l'autre et tendre la main n'est pas naturel. J'ai été adjointe aux affaires sociales et nous bénéficiions à l'époque de deux jours de formation sur cette question. Ce n'est plus le cas aujourd'hui pour les adjoints et conseillers qui sont chargés des CCAS. Il est vrai que dans les territoires ruraux, certaines personnes seules ne veulent pas être aidées. La désertification médicale accentue le phénomène. Dans ce contexte, le rôle de la commune dépasse le simple habitat : il faut un lien plus étroit entre la mairie et le monde associatif, et prévoir des actions de formation.

M. Rémy Pointereau, premier vice-président. - Le modèle des maisons d'accueil et de résidence pour l'autonomie (Marpa), développé par la Mutualité sociale agricole (MSA), fonctionne bien. Ces résidences non médicalisées permettent le maintien des personnes âgées sur le territoire.

Mme Sonia de La Provôté. - Lorsqu'une aide-ménagère est nécessaire, il faut pouvoir mettre en commun une partie de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et cela n'est pas toujours simple.

Mme Corinne Féret, rapporteure. - Sur la question de la mobilisation des fonds, nous manquions jusqu'à présent d'une approche globale. L'un des objectifs de notre rapport est précisément de recenser l'existant et de pointer les faiblesses en matière d'information et de communication.

La question du financement est évidemment cruciale. Le dispositif « MaPrimeAdapt' » fonctionne bien, mais son montant est largement insuffisant. Quant au « Fonds d'appui pour des territoires innovants seniors », il est géré par la CNSA, qui en dispose et répond aux sollicitations de nos collectivités.

Si les communes labellisées « Petite Ville de demain » bénéficient du soutien d'un chargé de mission en ingénierie, encore faut-il être labellisé. Il y a donc un effort à faire, notamment dans le cadre du réseau « Villes amies des aînés », qui concerne aussi les petites communes. Le rôle de l'ANCT a également été évoqué : il faut renforcer l'information sur les possibilités dont disposent nos collectivités.

L'organisation du secteur médico-social ne relevait pas du périmètre proprement dit de notre rapport, mais le lien est évident, s'agissant de l'accompagnement du vieillissement de la population.

Je voudrais insister enfin sur la proposition que nous soutenons et qui consiste à créer la fonction d'adjoint au maire chargé des seniors. Il existe bien, dans la quasi-totalité des communes, un adjoint au maire chargé de la jeunesse. Pourquoi ne pas prévoir la même chose pour les personnes âgées, qui représentent parfois plus du quart de la population ? Cette personne aurait une approche globale et transversale. Il ne s'agirait pas seulement, loin de là, d'organiser une fois par an un repas des aînés. Comme plusieurs millions de nos concitoyens qui ont atteint cet âge, nous serons tous un jour concernés. C'est en amont qu'il faut prendre en considération leurs besoins. Ces personnes ont toute leur place dans nos communes.

À l'époque, nous avions mené avec la commission des affaires sociales une mission en Martinique. Ce département deviendra prochainement celui dans lequel la population sera la plus âgée. Le vieillissement de la population concerne tous nos territoires. Il y a nécessité d'agir.

M. Laurent Burgoa, rapporteur. - Nos agences techniques départementales pourraient offrir à nos communes rurales une aide en ingénierie. Je rejoins par ailleurs Grégory Blanc : au travers de partenariats public-privé, les entreprises privées peuvent contribuer au maintien des personnes âgées à domicile.

Dans le Gard, nous avons mis en place voilà quinze ans les « maisons en partage », des logements adaptés dans lesquels nos aînés disposent d'une salle commune et bénéficient d'un certain nombre d'animations. Nous avons pu ainsi libérer dans le centre-bourg de grandes maisons devenues inadaptées pour des personnes seules à mobilité réduite, tout en offrant à ces personnes la possibilité de continuer à vivre dans la commune. De plus, ces logements étant considérés comme sociaux, ils sont très intéressants pour les maires qui cherchent à pallier des carences dans l'application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU).

Sans jouer les oiseaux de mauvais augure, les crédits du « Fonds d'appui pour des territoires innovants seniors » sont déjà épuisés. De plus, alors que nous allons entamer la discussion budgétaire, je doute que la situation financière compliquée dans laquelle nous sommes permette un renouvellement de ce type de fonds ad vitam aeternam.

Enfin, certains d'entre vous ont suggéré la création d'un élu
référent. Les conseils municipaux des aînés, que certaines communes ont mis en place à l'instar des conseils municipaux des jeunes, permettent non seulement à cette population de s'impliquer davantage dans la vie de la commune, mais aussi aux élus de connaître précisément ses attentes. On pense volontiers au « City stade » pour nos jeunes, mais on oublie parfois d'installer un banc à tel ou tel endroit ou de surbaisser un trottoir pour faciliter la traversée d'une rue. En renforçant ainsi la participation de nos aînés, il est possible d'améliorer leur qualité de vie à moindres frais. Mais j'y insiste : on peut avoir des idées, le problème principal reste le financement.

Les recommandations sont adoptées.

La délégation adopte, à l'unanimité, le rapport d'information et en autorise la publication.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

AUDITIONS RAPPORTEURS

(par ordre chronologique)

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) :

o Mme Dominique CONSILLE, directrice des programmes « Action coeur de ville » et « Petites villes de demain » ;

o Mme Annabelle BOUTET, cheffe du Pôle Prospective Veille Innovation de l'ANCT, co-rédactrice du rapport (2023) « Bien vieillir dans les Petites villes de demain ».

Union nationale des centres communaux d'action sociale (Unccas) :

o Mme Véronique BESSE, députée de Vendée et vice-présidente de l'Unccas, déléguée aux seniors ;

o Mme Elodie BACOUP, conseillère technique grand âge et établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS).

Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) :

o Mme Virginie MAGNANT, directrice générale ;

o Mme Anne-Marie HO DINH, conseillère technique.

Institut méditerranéen des Métiers de la Longévité (i2ml) :

o M. Benoit ROIG, président de l'Université de Nîmes ;

o M. Jean-Marc BLANC, directeur de l'i2ml, fondation partenariale de l'Université de Nîmes.

Association nationale des Pôles territoriaux et des Pays (ANPP) :

o Mme Josiane CORNELOUP, députée de Saône-et-Loire, présidente de l'ANPP ;

o M. Michael RESTIER, directeur de l'ANPP.

Ville de Clamart, membre du Réseau francophone des « Villes Amies des Aînés » :

o Mme Jessica VANBORRE, directrice de l'Action sociale de la ville de Clamart ;

o M. Gauthier AFCHAIN, directeur général adjoint en charge des services à la population.

Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) :

o M. Laurent NOWIK, responsable de l'Unité de recherche sur le Vieillissement.

Association des maires ruraux de France (AMRF) :

o M. Jean-François FARENC, président de l'Association des Maires Ruraux de Saône-et-Loire (AMR71) et maire de Blanot.

Association des maires de France (AMF) :

o M. Pierre MARTIN, maire de Chauvé (44), maire-référent grand âge de l'AMF.

Association Petits frères des pauvres :

o M. Yann LASNIER, délégué général ;

o Mme Hélène GILQUIN, directrice des affaires institutionnelles.

Intercommunalités de France :

o M. Hugo CAVAGNAC, président de la communauté de communes du Frontonnais, administrateur d'Intercommunalités de France ;

o Mme Marie MORVAN, conseillère au pôle cohésion sociale ;

o M. Mathieu MARRE, chargé d'étude sociale et territoriale.

France Urbaine :

o Mme Florence THIBAUDEAU RAINOT, adjointe au maire chargée des affaires sociales, de la solidarité et de la santé du Havre ;

o Mme Marion TANNIOU, conseillère solidarités et cohésion sociale ;

o Mme Sarah BOU SADER, conseillère relations parlementaires.

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Association des départements de France (ADF) :

o M. Olivier RICHEFOU, président de la commission grand âge des Départements de France et président du conseil départemental de la Mayenne.

CCAS de la ville de Caen :

o Mme Isabelle HOULEY, directrice générale.

ANNEXE : PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE DU DISPOSITIF « MA PRIME ADAPT' »

Le dispositif « MaPrimeAdapt'» est destiné à aider financièrement les personnes âgées ou en situation de handicap à adapter leur logement pour mieux répondre à leurs besoins d'autonomie.

Le montant de l'aide peut couvrir jusqu'à 70 % du coût des travaux pour les revenus « très modestes » et jusqu'à 50 % pour les revenus « modestes », dans la limite d'un plafond de 22 000 euros hors taxes. À titre d'exemple, ces travaux peuvent inclure l'installation de rampes d'accès, la modification de salles de bains pour les rendre accessibles (douches à l'italienne, barres d'appui) ou encore l'installation de monte-escaliers.

Les critères pour bénéficier de cette aide sont fondés principalement sur l'âge et le niveau d'autonomie, mais aussi sur la situation de handicap :

o les personnes âgées de 70 ans et plus peuvent bénéficier de « MaPrimeAdapt' », quel que soit leur niveau d'autonomie ;

o les personnes âgées de 60 à 69 ans peuvent également être éligibles si elles sont en perte d'autonomie précoce, justifiée par un niveau de GIR (Groupe Iso-Ressources) compris entre
1 et 6 ;

o les personnes en situation de handicap peuvent bénéficier de l'aide sans condition d'âge, à condition de justifier d'un taux d'incapacité de 50 % ou plus, ou d'être éligibles à la prestation de compensation du handicap (PCH).

La mise en place du dispositif « MaPrimeAdapt' » a débuté au début de l'année 2024. Au 29 février 2024, quelque 11 750 dossiers avaient été déposés, témoignant du démarrage de l'action.

Les représentants de la CNSA - auditionnés par vos rapporteurs - estiment que « le ciblage de l'aide au profit les ménages les plus défavorisés, si elle constitue un levier nécessaire, ne permettra sans doute pas à lui seul d'atteindre un objectif de massification cohérent avec le défi démographique ». D'autres leviers doivent dès lors être activés, pour :

- permettre une prise de conscience au plus tôt de la nécessité d'adapter son logement de manière préventive, sans doute à l'occasion de travaux plus globaux (à l'instar de travaux de rénovation énergétique) ;

- favoriser l'accès à un diagnostic du logement pour le plus grand nombre ;

- favoriser une approche coordonnée entre évaluation des besoins et accès à des aides techniques en même temps que d'adaptation des logements (intervention des futures équipes locales d'accompagnement [EqLAAT]).

On notera que les personnes non éligibles au dispositif « MaPrimeAdapt » sont néanmoins éligibles au crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), qui concerne certains travaux visant à améliorer l'accessibilité et la sécurité des logements, en particulier pour les personnes âgées ou en situation de handicap. Les travaux éligibles à ce crédit d'impôt incluent, par exemple : l'installation de barres d'appui ; l'aménagement de douches à l'italienne ou de toilettes adaptées ; l'installation de monte-escaliers. La déduction fiscale varie en fonction des travaux et du type d'aménagement réalisé.

En plus de ce crédit d'impôt, il est parfois possible de cumuler cette aide avec d'autres dispositifs locaux ou régionaux pour financer des projets d'adaptation du logement.


* 1 « Quand les baby-boomers auront 85 ans. Projections pour une offre d'habitat adapté à l'horizon
2030-2050 », Haut-Commissariat au Plan, 2023.

* 2 Luc Broussy, Rapport interministériel sur l'adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires au vieillissement de la population, mai 2021.

* 3 Cour des comptes, « Le soutien aux logements face aux évolutions climatiques et au vieillissement de la population », rapport aux parlementaires du CEC, octobre 2023.

* 4 Rapport annexé à la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement.

* 5 Luc Broussy, Rapport interministériel sur l'adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires au vieillissement de la population (mai 2021), p.96.

* 6 Yann Lasnier et M. Boris Venon, « Bien vieillir : 50 solutions pour les territoires », octobre 2024.

* 7 Martine Long, « Intercommunalités, communes et population âgée : la prise en compte du vieillissement par les territoires », RDSS, 2011 n° 4, p. 605-614.

* 8 Luc Broussy, rapport interministériel sur l'adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires au vieillissement de la population, mai 2021.

* 9 « Quand les baby-boomers auront 85 ans. Projections pour une offre d'habitat adapté à l'horizon 2030-2050 », Haut-Commissariat au Plan, 2023.

* 10 Yann Lasnier et Boris Venon, « Bien vieillir : 50 solutions pour les territoires », octobre 2024.

* 11 Association des Petites villes de France, Guide à destination des petites communes pour « bien vieillir dans les petites villes », p. 4.

* 12 Ce rapport n'a toutefois pas vocation à revenir sur les constats formulés par la commission des affaires sociales du Sénat dans la mission d'information sur la situation des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), dont les conclusions ont été présentées le 25 septembre 2024.

* 13 La notion de « seniors » renvoie elle-même à des réalités diverses, et désignera ici essentiellement la génération dite « silencieuse » (personnes nées entre 1928 et 1945), ainsi que celle dite des
« 
baby-boomers » (personnes nées entre 1946 et 1964).

* 14 Insee Première, n° 1978, Bilan démographique 2023, paru le 16 janvier 2024.

* 15 Ined, 2020, « Enjeux et perspectives démographiques en France. 2020-2050 ».

* 16 Selon les projections de la Haute autorité de santé. En 2012, en France, le nombre de personnes dépendantes était de 1,2 million.

* 17 Marianne Bléhaut, Pauline Jauneau, «  Les trajectoires résidentielles après la
pandémie - Stabilité, aspiration habitat et enjeux liés aux seniors
 », mai 2023.

* 18 Rapport d'information n° 658 (2022-2023), «  Le vieillissement de la population en Martinique », de Catherine DEROCHE, Corinne FÉRET, Jocelyne GUIDEZ, Colette MÉLOT et Philippe MOUILLER, déposé le 31 mai 2023. 

* 19 Rapport d'information n° 658 (2022-2023), op. cit., p. 12.

* 20 Soit un solde migratoire des seniors de 180 pour 10 000 habitants, et un solde migratoire global de 52 pour 10 000 habitants.

* 21 Anton Paumelle. « L'Espace géographique », Tome 51, 2022/1 : «  Vieillissement et attractivité migratoire des bourgs ruraux en France », juin 2023. pp. 22-39.

* 22 Contribution écrite de l'AMF à cette mission.

* 23 Marianne Bléhaut, Pauline Jauneau, «  Les trajectoires résidentielles après la
pandémie - Stabilité, aspiration habitat et enjeux liés aux seniors 
», mai 2023.

* 24 Contribution écrite de la ville de Caen à cette mission.

* 25 Rapport d'information n° 453 (2020-2021), « La prévention de la perte d'autonomie », de Bernard BONNE et Michelle MEUNIER, déposé le 17 mars 2021, p. 46.

* 26 L'AMF, dans les réponses écrites aux questions de cette mission, relevait que : « les communes et les EPCI ont peu de compétences obligatoires concernant la dépendance, hormis la tenue d'un registre nominatif des personnes âgées et handicapées vivant à domicile, prévu par le ``plan national canicule'' ».

* 27 Rapport d'information (Assemblée nationale), «  La commune dans la nouvelle organisation territoriale », de Rémy Rebeyrotte et Arnaud Vial, déposé le 24 juillet 2019.

* 28 Le rapport d'information n° 453 (2020-2021), précité, relève ainsi (p. 46) que les interventions des communes en matière d'action sociale sont exercées à près de 70 % par les CCAS, le restant relevant des services communaux.

* 29 Les communes de plus de 1 500 habitants sont tenues de créer un CCAS, selon l'article L. 123-4 du code de l'action sociale et des familles. En revanche, pour les communes de moins de 1 500 habitants, la création d'un CCAS est facultative.

* 30 Rapport d'information (Assemblée nationale), «  La commune dans la nouvelle organisation territoriale », op. cit.

* 31 Rapport d'information n° 778 (2023-2024), «  Situation des Ehpad », de Chantal Deseyne, Solanges Nadille et Anne Souyris, déposé le 25 septembre 2024, p. 94.

* 32 Selon Dominique Libault (Rapport sur la concertation grand âge et autonomie, remis à la ministre des Solidarités et de la Santé, mars 2019, p. 24), la notion d'« être chez soi » recoupe trois dimensions fondamentales :

- le logement, qui sécurise des activités fondamentales que sont par exemple manger, dormir, se sentir en sécurité ;

- l'intimité, entendue comme la faculté d'arranger son temps comme on veut, de décider de l'agencement de ses temps de vie, de disposer de moments pour soi ;

- le fait d'être dans un lieu dont on se sent habitant, au coeur d'un voisinage et d'un environnement de vie (commerçants, services, relations avec le monde social, etc.).

* 33 Contribution écrite de la ville de Caen à cette mission.

* 34 Les communautés urbaines et les métropoles ne peuvent pour leur part créer des CIAS que depuis la loi dite « 3DS » de 2022, sous réserve qu'elles aient pris la compétence « action sociale d'intérêt communautaire ».

* 35 Les conditions de création d'un CIAS sont précisées par l'article L. 123-4-1 du code de l'action sociale et des familles.

* 36 Réponses écrites d'Intercommunalités de France au questionnaire des rapporteurs.

* 37 Martine Long, « Intercommunalités, communes et population âgée : la prise en compte du vieillissement par les territoires », RDSS, 2011 n° 4, p. 605-614.

* 38 Cour des comptes, « Le soutien aux logements face aux évolutions climatiques et au vieillissement de la population, rapport aux parlementaires du CEC », octobre 2023.

* 39 Plan d'action initié à la suite du rapport de Denis Piveteau et Jacques Wolfrom : « Demain, je pourrai choisir d'habiter avec vous ! » (juin 2020), faisant de l'habitat « Accompagné, Partagé et Inséré dans la vie locale » (habitat « API » ou « inclusif ») une solution « pour sortir du dilemme, lorsque la vie chez soi comme avant n'est plus possible et que la vie collective en établissement n'est ni souhaitée ni nécessaire ».

* 40 Réponses écrites de France urbaine au questionnaire des rapporteurs.

* 41 Réponses écrites de l'Unccas au questionnaire des rapporteurs.

* 42 Face à ce déficit de données, un projet de recherche « Habitats
Intermédiaires - Logements - Autonomie - Seniors (HILAUSENIORS) », coordonné par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) et financé par l'Agence nationale de la recherche (ANR) dans le cadre du Programme prioritaire de recherche (PPR) sur l'autonomie, a été lancé. Les principes en ont été présentés à vos rapporteurs par son responsable, Laurent Nowik. L'objet est « d'examiner si - et comment - les habitats intermédiaires, par les services qu'ils proposent, par leur localisation et la dimension collective qu'ils offrent, représentent une alternative à l'habitat classique pour prévenir et retarder la perte d'autonomie étudiée à travers plusieurs de ses dimensions ».

* 43 Dans le cadre de sa convention d'objectifs et de gestion (COG) pour 2022-2026, la CNSA s'est vu confier la responsabilité de préfigurer et mettre en place le « centre de ressources et de preuves dédié à la prévention de la perte d'autonomie », prévu par la stratégie nationale « Vieillir en bonne santé 2020-2022 ».

* 44 On notera que le déploiement de « MaPrimeAdapt' » peut s'appuyer, entre autres, sur les EPCI bénéficiant de la délégation des aides à la pierre.

* 45 Prévu à l'article L. 302-1 du code de la construction et de l'habitation (CCH).

* 46 Rapport n° 322, tome I (2014-2015) de MM. Georges LABAZÉE et Gérard ROCHE, déposé le
4 mars 2015, sur le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, p. 87.

* 47 L'article L. 2143-3 du CGCT prévoit la mise en place de commissions communales d'accessibilité dans les communes ou dans les EPCI de plus de 5 000 habitants compétents en matière de transports ou d'aménagement. Ces commissions sont présidées par le maire ou le président de l'EPCI.

* 48 V. articles L. 233-1 à L. 233-5 [nouveaux] du code de l'action sociale et des familles (CASF).

* 49 Rapport n° 322, tome I (2014-2015) de MM. Georges LABAZÉE et Gérard ROCHE, déposé le
4 mars 2015, sur le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, p. 47.

* 50 Plaquette de présentation distribuée aux maires dans le cadre du salon des maires et des collectivités locales 2023, « Soutenir l'autonomie dans les territoires ».

* 51 V. article L. 121-6-1 du CASF.

* 52 APA, PCH, aides des organismes d'assurance vieillesse versées au titre de la perte d'autonomie.

* 53 Yann Lasnier et Boris Venon, « Bien vieillir : 50 solutions pour les territoires », octobre 2024,
p. 26.

* 54 Réponses écrites de l'AMF au questionnaire des rapporteurs.

* 55 Plus globalement, le SPDA doit améliorer la prise en charge des seniors ainsi que des personnes en situation de handicap.

* 56 Cf Article L. 149-6 du CASF : « Le service public départemental de l'autonomie est piloté par le département ou la collectivité exerçant les compétences des départements. Il est assuré conjointement par : 1° Le département, la collectivité exerçant les compétences de départements, les communes, leurs groupements et leurs établissements publics ; [...] ».

* 57 « Vers un service public territorial de l'autonomie », Dominique LIBAULT, p. 54.

* 58 Ibid., pp. 68-70.

* 59 Amendement présenté par les rapporteurs du Sénat, Jean Sol et Jocelyne Guidez, le 15 janvier 2024, et adopté en première lecture.

* 60 Réponses écrites de l'association France urbaine au questionnaire des rapporteurs. France urbaine défend ainsi « l'impératif de déclinaison infra-départementale » et insiste plus particulièrement sur la « réintégration du niveau EPCI [...] au vu du rôle exercé par ces derniers dans les politiques de mobilité, d'habitat et de politique de la ville ».

* 61 Comme le concluait le rapport (précité) de la commission des Lois de l'Assemblée nationale en conclusion d'une mission d'information sur la commune dans la nouvelle organisation territoriale.

* 62 Les départements ont largement relevé que le véritable début de l'expérimentation était, non pas en janvier 2024, mais bien plutôt en mai 2024 (le temps de la « mise en place » de l'expérimentation avec les différentes réunions et des consultations préparatoires, par exemple, le département de la Guyane a élaboré 6 semaines de diagnostic). 

* (63) Ministère des solidarités et des familles et CNSA, « Préfiguration du Service public départemental de l'autonomie, appel à manifestation d'intérêt », septembre 2023, p. 7.

* (64) Méthode d'action pour l'intégration des services d'aides et de soins dans le champ de l'autonomie.

* (65) Dispositifs d'appui à la coordination.

* (66) Centre local d'information et de coordination.

* (67) Réseau de professionnels soutenant les parcours de vie des personnes.

* 68 Dans ses réponses écrites au questionnaire des rapporteurs, France urbaine considère que le passage des MAIA (méthodes d'action pour l'intégration des services d'aide et de soins dans le champ de l'autonomie) aux DAC (dispositifs d'appui à la coordination) a conduit à un recentrage sur le sanitaire au détriment d'une approche médico-sociale globale, créant des silos entre les actions départementales, intercommunales, et communales.

* 69 V. article L. 149-5 du CASF.

* 70 Martine Long, « Intercommunalités, communes et population âgée : la prise en compte du vieillissement par les territoires », RDSS, 2011 n° 4, p. 605-614.

* 71 Pour reprendre la formule de Luc Broussy dans son rapport interministériel sur l'adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires au vieillissement de la population (mai 2021), p.96.

* 72 Marianne Bléhaut, Pauline Jauneau, «  Les trajectoires résidentielles après la
pandémie - Stabilité, aspiration habitat et enjeux liés aux seniors 
», mai 2023, p. 7.

* 73 Yann Lasnier et Boris Venon, « Bien vieillir : 50 solutions pour les territoires », octobre 2024,
p. 120.

* 74 Yann Lasnier et Boris Venon, op.cit., p. 35.

* 75 Ibid., p. 66.

* 76 Ibid., p. 36.

* 77 Les PIMMS, structures citées en exemple par Josiane Corneloup, présidente de l'ANPP, lors de son audition par vos rapporteurs, regroupent divers acteurs des services publics et accueillent
plus de 10 000 personnes chaque année, dont 70 % sont âgées de plus de 65 ans.

* 78 Yann Lasnier et Boris Venon, op.cit., p. 68.

* 79 Yann Lasnier et Boris Venon, op.cit., p. 60.

* 80 On pourra également se référer, sur ces points, aux récentes conclusions de la mission relative à « l'ingénierie culturelle dans les communes et les intercommunalités rurales », conduite par la députée Virginie Duby-Muller et la sénatrice Frédérique Espagnac, qui formule plusieurs recommandations pour permettre aux communes de monter leurs projets (renforcement des informations fournies par les DRAC, structuration du soutien apporté par les Conseils d'architectures, etc.).

* 81 Baromètre « Solitude et isolement quand on a plus de 60 ans en France en 2021 »,
30 septembre 2021,
Petits frères des pauvres.

* 82 À Bellegarde, ainsi, 8 bénévoles se sont proposés pour participer au dispositif, et ont bénéficié d'une formation permettant d'assurer des visites conviviales aux personnes âgées isolées inscrites.

* 83 Réponses écrites de France urbaine au questionnaire des rapporteurs.

* 84 Yann Lasnier et Boris Venon, op.cit., p. 30.

* 85 Luc Broussy, Rapport interministériel sur l'adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires au vieillissement de la population, mai 2021.

* 86 Cette problématique étant tout particulièrement marquée dans les 35 communes du programme situées dans les territoires d'Outre-mer, notamment aux Antilles. Par ailleurs, on notera que l'association des Petites villes de France a récemment publié un guide à destination des élus des petites communes pour « bien vieillir dans les petites villes ».

* 87 Les financements pouvant atteindre jusqu'à 1,5 million d'euros.

* 88 Le réseau RFVAA a progressivement supplanté l'initiative « Bien vieillir - Vivre ensemble » lancée en juillet 2009 par la ministre de la santé Roselyne Bachelot et la secrétaire d'État chargée des aînés Nora Berra.

* 89 V. Rapport d'information n° 453 (2020-2021), op. cit., p. 118.

* 90 Journal La Renaissance - Le Bessin, « Trévières : la commune en réflexion pour sa politique de l'âge », 30 mars 2023.

* 91 La liste des communes labellisées ou « en route vers le label » est consultable en suivant le lien :

https://www.villesamiesdesaines-rf.fr/files/ressources/500/523-les-territoires-labellises-ami-des-aines-et-en-route-vers-le-label.pdf

* 92 En 2022, Intercommunalités de France s'est associée au réseau francophone des « Villes amies des aînés » pour signer la tribune « Réaffirmons ensemble l'engagement des territoires pour répondre au défi de la longévité ! ».

* 93 La subvention annuelle au réseau n'étant, en 2021, que de 35.000 euros, versés par le ministère des Affaires sociales.

* 94 Le déploiement des « ateliers Bienvenue à la retraite » est prévu dans la convention d'objectifs et de gestion 2023-2027 de la CNAV.

* 95 Le projet est décrit sur le site internet de l'ANCT à l'adresse: https://agence-cohesion-territoires.gouv.fr/lengagement-associatif-au-service-des-seniors-des-petites-villes-de-demain-montendre-1165

* 96 On notera plus globalement que 41 Petites villes de demain sont adhérentes au RFVAA (dont 12 sont engagées dans la démarche de labellisation « Ville amie des aînés »), ainsi que 47 communes du programme « Action coeur de ville » (auxquelles s'ajoutent 2 communes en cours d'adhésion).

* 97 Cette documentation peut être consultée en suivant le lien ci-après : https://www.cerema.fr/fr/actualites/dossier-voirie-pour-tous
On rappellera par ailleurs que la délégation ministérielle à l'accessibilité (DMA) promeut également l'accessibilité de la chaîne du déplacement et coordonne les actions des différents ministères en matière de bâti, de voirie, de transports et d'espace public.

* 98 À l'instar de la commune de Clamart, dans ses réponses écrites au questionnaire des rapporteurs.

* 99 Sur le fondement d'une convention portant sur le fonds d'appui aux territoires innovants, prévu au titre du budget d'intervention de la CNSA « pour soutenir le déploiement de collectivités amies des aînés et de projets territoriaux en faveur du vieillissement actif et en bonne santé ».

* 100 Source : réponses écrites d'Intercommunalités de France au questionnaire des rapporteurs.

* 101 Contribution, sous forme de courriel, à la mission.

* 102 Yann Lasnier et Boris Venon, « Bien vieillir : 50 solutions pour les territoires » (op. cit.), p. 24.

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