N° 728

SÉNAT

2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 10 juillet 2024

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur l'immobilier de la gendarmerie nationale,

Par M. Bruno BELIN,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

L'ESSENTIEL

I. L'IMMOBILIER DE LA GENDARMERIE EST DANS UNE SITUATION DÉGRADÉE MALGRÉ LES DÉPENSES CROISSANTES PORTÉES PAR LE COÛT DES LOYERS

A. LA FONCTION IMMOBILIÈRE EST UNE FONCTION STRATÉGIQUE DANS LA GENDARMERIE AU REGARD DE L'OBLIGATION DE LOGEMENT EN CASERNE DES GENDARMES ET DE LEURS FAMILLES

Les militaires de la gendarmerie nationale résident par principe en casernement, à proximité de leur lieu de travail. Le logement en caserne, qui concerne également les familles des gendarmes, est à la fois un droit et une sujétion pour les militaires de la gendarmerie qui résulte de leur statut1(*) et qui garantit leur disponibilité.

Le parc de la gendarmerie nationale comporte également, outre les immeubles de logements, des locaux de service et techniques dédiés à la réalisation des missions de maintien de la sécurité et de l'ordre public de la gendarmerie.

La gendarmerie occupe

réparties dans la zone gendarmerie nationale qui recouvre

et

 
 
 

casernes

du territoire

de la population

Conditions de résidence des personnels de la gendarmerie nationale

(en ETPT en 2023)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Pour financer le parc immobilier qu'elle occupe, la gendarmerie bénéficie chaque année d'une enveloppe budgétaire, correspondant à 923 millions d'euros en 2023. Les marges de manoeuvre dont dispose le responsable de programme sont néanmoins limitées au regard du poids des loyers qui représentent 64 % de cette enveloppe.

Sur le périmètre des crédits restant, le rapporteur spécial souligne que le parc souffre d'un déficit d'investissements qui ne représentent que 39 % des dépenses budgétaires immobilières hors loyer. En particulier, seuls 18 millions d'euros sont consacrés à l'acquisition et à la construction de nouveaux bâtiments pour la gendarmerie nationale.

Dépenses immobilières de la gendarmerie nationale en 2023

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Le logement en caserne des gendarmes garantit la permanence de la réponse opérationnelle et un service de proximité efficace.

B. LA GENDARMERIE OCCUPE UN PARC DE 11 MILLIONS DE MÈTRES CARRÉS MARQUÉ PAR LA « DETTE GRISE » DU PARC DOMANIAL ET LE COÛT CROISSANT DU PARC LOCATIF

La gendarmerie occupe 649 casernes domaniales, c'est-à-dire dont l'État est propriétaire. Ce parc immobilier est le fruit de l'histoire de la gendarmerie nationale et il comporte des immeubles d'époques différentes dont certains ont été construit il y a plus de cent ans. Ce patrimoine historique, qui est un actif essentiel de la gendarmerie et qui contribue à la qualité de son service, se trouve dans une situation dégradée par le manque d'investissement en matière de maintenance et de réhabilitation des bâtiments.

Écart entre le besoin d'investissements immobiliers
et les investissements réalisés dans le parc domanial

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Alors que la gendarmerie évalue les besoins d'investissement dans la maintenance de son parc entre 300 et 400 millions d'euros, l'enveloppe allouée à ces travaux est systématiquement inférieure de plus de 50 % de cette estimation depuis plus de dix ans.

Cette période de sous-investissement systématique a contribué à la dégradation du parc domanial et a constitué une « dette grise », qui correspond à l'écart accumulé entre les besoins d'investissement et les investissements effectivement réalisés, et s'élève désormais à 2,2 milliards d'euros cumulés en dix ans.

Le sous-investissement dans la maintenance du parc domanial a généré une « dette grise » de plus de deux milliards d'euros en dix ans.

En plus de son parc domanial, la gendarmerie occupe également 3 075 casernes locatives réparties sur l'ensemble du territoire et qui représentent plus de la moitié de la surface occupée par la gendarmerie. Les investissements de maintenance des bâtiments du parc locatif, qui ont été construits plus récemment, sont à la charge des propriétaires et le rapporteur spécial relève que ce schéma aboutit à un meilleur état de santé de ces bâtiments.

Pour la construction des casernes locatives, la gendarmerie nationale s'appuie sur deux catégories principales de financeurs publics. En premier lieu, les collectivités territoriales peuvent participer au financement des immeubles destinés à la gendarmerie conformément aux dispositions du décret du 28 janvier 1993. En second lieu, le décret du 26 décembre 2016 prévoit que les organismes d'habitations à loyer modéré peuvent également financer la construction de casernes en bénéficiant d'une garantie apportée par des collectivités pour le financement de l'opération.

Du fait de la faible capacité d'investissement immobilier de la gendarmerie dans la période récente, l'extension du parc de la gendarmerie repose sur l'extension de son parc locatif en conséquence de quoi le rapporteur spécial souligne que les loyers représentent un poids croissant qui vient réduire d'autant la capacité d'investissement de la gendarmerie en termes de maintenance, de réhabilitation mais aussi de constructions et d'acquisitions.

Coût annuel des loyers versés par la gendarmerie nationale

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

II. MOBILISER DES FINANCEMENTS INNOVANTS ET SÉCURISER LA PROGRAMMATION DES INVESTISSEMENTS POUR LUTTER CONTRE LE DÉSORDRE BÂTIMENTAIRE

A. CONFIRMER LE RECOURS AUX FINANCEMENTS INNOVANTS ET CONSOLIDER LA PARTICIPATION DES COLLECTIVITÉS LOCALES AU DÉPLOIEMENT DES 200 NOUVELLES BRIGADES TERRITORIALES

Le poids des loyers versés chaque année par la gendarmerie nationale, qui concentrent 64 % du budget immobilier total de la gendarmerie, a pour conséquence de réduire considérablement les marges de manoeuvre dont dispose le responsable de programme pour investir dans l'extension du parc domanial. Pour autant, le durcissement des contraintes opérationnelles de la gendarmerie induit des investissements immobiliers en dépit du risque d'impasse de financement.

Pour répondre à cette difficulté, le rapporteur spécial recommande de mobiliser des modes de financement innovants et en particulier de recourir au marché de partenariat pour les projets immobiliers structurant de la gendarmerie, dont en priorité les projets sur le plateau de Satory et à Dijon.

B. PRIORISER LES URGENCES À TRAITER ET MIEUX PROGRAMMER À MOYEN TERME LES INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS

L'état dégradé du parc domanial résultant de plus d'une décennie de sous-investissement chronique a des conséquences concrètes pour les gendarmes et leurs familles qui ont l'obligation de travailler et de vivre dans des conditions extrêmement dégradées dans certaines situations.

Pour répondre dans l'urgence à ces situations et améliorer visiblement le quotidien des gendarmes, le rapporteur spécial recommande de dresser chaque année une liste de « points noirs immobiliers » à traiter en cours d'exercice pour en assurer un suivi régulier et transparent.

La gendarmerie doit investir de manière régulière et visible pour améliorer le quotidien des gendarmes et de leurs familles.

L'amélioration de la réponse apportée à des situations d'urgence ne doit pas masquer le problème structurel de sous-investissement dans le parc domanial et le rapporteur spécial recommande également de publier chaque année une trajectoire triennale des investissements de maintenance et de réhabilitation de manière à rendre visible le sous-investissement et à engager une dynamique de réinvestissement dans la maintenance du parc domanial.

LISTE DES RECOMMANDATIONS

Recommandation n° 1. Confirmer le recours au marché de partenariat pour financer une nouvelle génération de projets immobiliers structurants de la gendarmerie nationale dont en priorité les opérations immobilières sur le plateau de Satory et à Dijon (Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), Direction de l'immobilier de l'État (DIE), Direction du budget (DB)).

Recommandation n° 2. Réviser le montant des coûts-plafonds pour la fixation des loyers versés par la gendarmerie aux collectivités territoriales et aux organismes d'habitations à loyer modéré pour garantir la viabilité des projets d'extension du parc locatif de la gendarmerie (DGGN, DB).

Recommandation n° 3. Adapter les critères de cofinancement des travaux de rénovation énergétique des bâtiments pour garantir leur adéquation aux spécificités du parc de la gendarmerie nationale (DIE).

Recommandation n° 4. Mobiliser les marchés globaux de performance énergétique à paiement différé (MGPE-PD) pour accélérer la rénovation énergétique des bâtiments de la gendarmerie nationale (DGGN, DB).

Recommandation n° 5. Identifier les investissements prioritaires d'entretien à court terme en publiant chaque année une liste de « points noirs immobiliers » correspondant aux urgences bâtimentaires devant être traités et en garantissant un suivi transparent des actions (DGGN).

Recommandation n° 6. Sécuriser une trajectoire triennale d'investissements immobiliers en maintenance et réhabilitation du parc domanial, en l'intégrant chaque année à la documentation budgétaire relative au programme 152 « Gendarmerie nationale » (DGGN, DB).

Recommandation n° 7. Expérimenter la création d'un « gestionnaire immobilier indépendant » sur le périmètre du ministère de l'intérieur et en assurer une évaluation approfondie (Secrétariat général du ministère de l'intérieur et des Outre-mer, DIE).

I. LE SOUS-INVESTISSEMENT DANS LE PARC IMMOBILIER EST UN DÉFI OPÉRATIONNEL POUR LA GENDARMERIE, EN PARTICULIER AU REGARD DE L'OBLIGATION DE LOGEMENT DES GENDARMES EN CASERNEMENT

A. LA GENDARMERIE CONSACRE CHAQUE ANNÉE 923 MILLIONS D'EUROS À SON PARC IMMOBILIER QUI TIENT COMPTE DE L'OBLIGATION DE LOGEMENT DES GENDARMES EN CASERNE

1. Le parc immobilier de la gendarmerie nationale doit tenir compte des conditions d'exercice de son service et du logement des gendarmes en caserne qui est à la fois une obligation et une condition essentielle à l'efficacité du service rendu
a) Les militaires de la gendarmerie nationale ont l'obligation d'être logés en casernement et bénéficient à ce titre d'une concession de logement

Par principe, les personnels militaires de la gendarmerie nationale résident sur leur lieu de travail, c'est-à-dire dans une caserne qui correspond à une enceinte militaire clôturée sur la totalité de sa périphérie.

La résidence des militaires de la gendarmerie nationale relève de trois situations principales qui correspond aux trois catégories, hors réservistes, de personnels militaires de la gendarmerie2(*). Les personnels civils de la gendarmerie ne sont pas soumis aux mêmes obligations en matière de résidence.

En premier lieu, les officiers et les sous-officiers de gendarmerie sont logés en caserne avec leurs familles.

En deuxième lieu, les volontaires de la gendarmerie nationale, ou gendarmes adjoints volontaires (GAV), sont hébergés3(*) en célibataire dans les locaux de service et techniques (LST) des casernes.

Enfin, en troisième lieu, les officiers du corps technique et administratif de la gendarmerie nationale (OCTAGN) et les sous-officiers du corps de soutien technique et administratif de la gendarmerie nationale (CSTAGN) ne sont en principe pas logés en caserne et relèvent de la politique du logement du ministère des armées.

Conditions de résidence des personnels de la gendarmerie nationale

(en ETPT en 2023)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Pour les officiers et les sous-officiers de gendarmerie, qui représentent un effectif de 79 000 militaires en 2023, soit 79 % des effectifs totaux de la gendarmerie nationale, le logement en caserne est une obligation à la fois légale4(*) et statutaire qui résulte directement de leur statut militaire5(*).

Le logement en caserne constitue pour les gendarmes à la fois un droit et une obligation encadrés notamment par le code de la défense et le code général de la propriété des personnes publiques. Le code de la défense consacre ainsi le fait que le logement en caserne fait partie des « sujétions et obligations particulières » qui pèse sur les officiers et sous-officiers de gendarmerie « du fait de la nature et des conditions d'exécution de leur mission »6(*).

La mise à disposition par l'État aux gendarmes de leurs logements est encadrée par le code général de la propriété des personnes publiques qui prévoit un régime relatif aux logements concédés par nécessité absolue de service (LCNAS) dans l'hypothèse où « l'agent ne peut accomplir normalement son service, notamment pour des raisons de sûreté, de sécurité ou de responsabilité, sans être logé sur son lieu de travail ou à proximité immédiate »7(*). Dans le cas spécifique des gendarmes, le code général de la propriété des personnes publiques dispose expressément que « les personnels de tous grades de la gendarmerie nationale en activité de service et logés dans des casernements ou locaux annexés aux casernements bénéficient d'une concession de logement par nécessité absolue de service »8(*). Dans certaines collectivités d'outre-mer9(*), les gendarmes peuvent se voir attribuer un logement concédé par utilité de service (LCUS) lorsque « sans être absolument nécessaire à l'exercice de la fonction, le logement présente un intérêt certain pour la bonne marche du service »10(*).

Les gendarmes se voient donc attribuer lors de leur affectation un logement en caserne. Si en principe le logement en casernement implique l'attribution d'un logement dans l'enceinte d'une caserne rassemblant dans un lieu homogène et clos des logements de militaires de la gendarmerie et des locaux de service, la gendarmerie est parfois contrainte d'attribuer aux militaires des logements individuels pris à bail hors caserne, en principe à proximité immédiate du lieu de travail des gendarmes, qui sont regardés comme des locaux annexés à un casernement.

La taille du logement attribué tient compte des charges de famille et du grade du militaire concerné. En pratique, l'attribution du logement est effectuée en appliquant un barème de points11(*). Pour la prise en compte des charges de famille, la gendarmerie s'appuie sur le périmètre fixé par le droit fiscal qui tient compte des enfants de moins de vingt-cinq ans et des ascendants, frères ou soeurs qui réclament une assistance particulière. Le système tient également compte, pour les militaires divorcés ou séparés, des enfants faisant l'objet d'un droit de visite et d'hébergement.

Les logements accordés aux gendarmes sous le régime de la concession pour nécessité absolue de service (CNAS) sont occupés à titre gratuit par les militaires de la gendarmerie. Parallèlement, les gendarmes sont tenus de souscrire une assurance multirisques habitation, de conserver les locaux en bon état d'entretien et de payer les charges et les taxes d'occupation du logement.

Il est également à relever que les besoins immobiliers de la gendarmerie nationale en termes de logements ne dépendent pas uniquement des effectifs de militaires de la gendarmerie nationale mais également des familles des gendarmes qui sont logés avec eux en casernement.

Si plus de la moitié des militaires de la gendarmerie nationale n'ont pas d'enfant à charge12(*), la proportion de gendarmes vivant en casernement avec leurs familles reste significative puisqu'elle représente 45 % d'entre eux, dont 6 % avec au moins trois enfants à charge ce qui représentent plus de 4 700 familles nombreuses à loger dans le parc immobilier de la gendarmerie.

Militaires de la gendarmerie nationale selon le nombre d'enfants à charge

(en 2022)

Source : commission des finances, d'après les données du HCECM

b) Les locaux de service de la gendarmerie dépendent des spécificités de sa mission de maintien de l'ordre et de la sécurité

L'immobilier de la gendarmerie nationale, que le rapporteur spécial a contrôlé dans le cadre de rapport d'information, excède la question du logement des gendarmes et de leurs familles et il inclut également les nombreux bâtiments affectés aux locaux de service et techniques.

Le parc immobilier de la gendarmerie nationale est composé, outre les logements des gendarmes et de leurs familles, des très nombreux bâtiments au sein des casernes qui servent de lieu de travail aux gendarmes dans le cadre de l'accomplissement de leur mission de sécurité publique et d'ordre public dans la zone gendarmerie nationale (ZGN), qui recouvre en particulier les zones rurales et périurbaines.

Les bâtiments qui sont des lieux de travail pour les gendarmes constituent des locaux de service et techniques (LST), qui servent notamment de lieux d'accueil du public, d'hébergement des gendarmes adjoints volontaires, de lieux d'entraînement ou de formation au tir, de stockage du matériel, de bureaux, le cas échéant de locaux de sûreté, notamment dans le cadre des gardes à vue.

L'ensemble des locaux de service et technique représente une surface au sol de 4,3 millions de mètres carrés (m2) en incluant toutes les casernes utilisées par la gendarmerie13(*), soit 39 % de la surface au sol du parc total de la gendarmerie nationale. Dans le périmètre du parc domanial de la gendarmerie, l'âge moyen des locaux de service et techniques est de 57 ans.

Le rapporteur relève que le bon état des locaux de service et techniques est non seulement un enjeu essentiel pour garantir des conditions de travail décentes pour les gendarmes mais qu'il est également un enjeu d'efficacité opérationnelle pour donner à la gendarmerie nationale les moyens de mener à bien les missions qui lui sont confiées. Pourtant il a pu constater lors de ses déplacements dans des locaux de service et techniques que certaines casernes n'étaient pas, du fait de leur vétusté et de leur exiguïté, conformes à l'impératif de sécurité pour les gendarmes dans l'exercice de leur mission. À plus forte raison, la qualité de vie au travail des gendarmes se trouve dégradée par l'inadaptation d'une partie du parc aux exigences opérationnelles de la gendarmerie nationale.

À cet égard, la mise en place de locaux de sûreté et de bureaux adaptés constitue une priorité pour garantir la sécurité des gendarmes alors que le manque de place contraint aujourd'hui certaines unités à procéder à des auditions dans des conditions qui ne garantissent pas pleinement leur sécurité et à utiliser des locaux inadaptés pour les gardes à vue.

Parallèlement, il est également à relever qu'un grand nombre de bâtiments de casernement sont des lieux d'accueil du public. À ce titre, la maintenance d'un parc immobilier en bon état est une condition pour préserver la qualité de l'accueil des usagers dont certains constituent un public fragile. La taille et l'entretien du parc immobilier ne peuvent par conséquent pas être détachés de considérations pratiques relatives à l'aménagement de la chaîne d'accueil du public dans les gendarmeries, qui doit permettre d'organiser efficacement l'accueil, l'orientation, l'attente puis l'éventuelle dépôt de plainte des usagers.

Sur ce point, le rapporteur relève en particulier que le phénomène de mobilisation croissante de la gendarmerie nationale en matière de sécurité du quotidien et plus spécifiquement de lutte contre les violences intrafamiliales doit être pris en compte et que la politique immobilière de la gendarmerie doit donner les moyens aux unités d'accueillir de manière adaptée les victimes de ces violences.

Il est enfin à relever que le risque d'atteinte à l'efficacité opérationnelle de la gendarmerie induit par le manque d'investissement immobilier et la vétusté des locaux de service et techniques a été identifié depuis plusieurs années. Dans le Livre blanc de la sécurité intérieur publié en 2020, le ministère de l'intérieur estimait que la qualité du parc immobilier constituait une « condition indispensable de la qualité de l'accueil et des conditions de travail », en soulignant l'importance que les locaux des forces de sécurité intérieur présentent « des conditions opérationnelles adaptées »14(*).

Plus récemment, la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) de 2023 réaffirmait l'importance que la politique immobilière du ministère soit « à la hauteur des projets et des besoins quotidiens du réseau »15(*).

c) Le logement en caserne des gendarmes et le maillage territorial de la gendarmerie nationale est une composante indispensable de son efficacité opérationnelle

Le logement en caserne des militaires de la gendarmerie est une spécificité de cette force. Au regard des caractéristiques de la zone gendarmerie nationale (ZGN), qui recouvre 95 % du territoire et 50 % de la population, notamment dans les zones rurales et périurbaines, le rapporteur estime que le modèle de logement en casernement des gendarmes doit être défendu.

Alors que la résidence des gendarmes sur leur lieu de travail est un héritage ancien qui remonte à 1720 et à la sédentarisation de la maréchaussée, le Sénat a constamment soutenu ce modèle singulier en particulier à l'occasion de l'examen en 2009 de la loi relative à la gendarmerie nationale. Dans son rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères et de la défense et des forces armées, notre collègue Jean Faure réaffirmait son attachement au principe du logement en caserne, en estimant qu'il « devait être absolument préservé »16(*).

En effet, si ce modèle se traduit par une limitation notable de la liberté de choix du domicile des gendarmes consacrée par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) du 4 novembre 1950, il présente des avantages essentiels et indétachables de l'efficacité opérationnelle de la gendarmerie pour remplir ses missions sur le territoire national.

En premier lieu, l'obligation de logement en casernement pour les gendarmes donne sa pleine portée au réseau des 3 728 casernes qui assure un maillage dense sur le territoire national et permet d'assurer la sécurité et l'ordre publics sur une zone très étendue avec un niveau d'effectif contraint. La présence des gendarmes et de leurs familles dans les communes rurales et périurbaines est une composante indissociable de l'efficacité de la gendarmerie pour assurer un service de proximité, renforcer la présence des gendarmes sur la voie publique et la qualité de ses relations avec les usagers, et sa capacité à veiller à l'exécution des lois et à la protection des populations.

En second lieu, l'obligation de logement en casernement est une condition nécessaire à l'effectivité de l'obligation de disponibilité qui pèse sur les militaires de la gendarmerie. En effet, ces derniers sont soumis à une obligation de disponibilité « en tout temps et en tout lieu »17(*) rattaché à leur statut de militaire.

Cette obligation de disponibilité, qui est centrale dans la militarité de la gendarmerie nationale, est rendue effective par l'obligation de logement en caserne pour les gendarmes. Dans la zone gendarmerie nationale, c'est-à-dire dans les territoires ruraux et périurbains, l'occupation effective de leurs logements par les gendarmes assure la permanence de la réponse opérationnelle de la gendarmerie et l'efficacité d'une réponse de proximité avec une possibilité de montée rapidement en puissance lorsque le service l'exige.

2. Les services immobiliers du ministère de l'intérieur et la gendarmerie nationale sont associés pour la gestion du parc immobilier de la gendarmerie nationale à laquelle sont dédiés 923 millions d'euros de crédits budgétaires chaque année
a) La gestion du parc immobilier de la gendarmerie nationale est partagée entre les services immobiliers du ministère de l'intérieur et la chaîne immobilière intégrée de la gendarmerie nationale
(1) Les services immobiliers centraux et déconcentrés du ministère de l'intérieur assistent la gendarmerie nationale pour la gestion de son parc immobilier

La gestion du parc immobilier de la gendarmerie nationale s'inscrit dans le contexte plus large de la gestion par le ministère de l'intérieur de son parc immobilier, qui est marqué par un manque d'effectif au sein de la fonction immobilière du ministère. En effet, selon les données figurant dans le document de politique transversale (DPT) sur la politique immobilière de l'État annexé au projet de loi de finances pour 2024, le ministère de l'intérieur est le deuxième ministère dans le périmètre de l'État en matière de parc immobilier occupé avec 15 millions de m2 de surface utile brute (SUB) occupée soit 27 % du parc immobilier total occupé par l'État. En parallèle, les agents du ministère de l'intérieur dans la fonction immobilière représentent 2 632 équivalents temps plein travaillés (ETPT) soit 19 % seulement de l'ensemble des agents de l'État dédiés à la fonction immobilière.

Poids du ministère de l'intérieur dans le parc immobilier de l'État
et dans les effectifs dédiés à la politique immobilière

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Dans ce contexte de ressources humaines sous contrainte, en particulier pour les compétences rares mais néanmoins essentielles au maintien de l'autonomie de décision du ministère, l'immobilier de la gendarmerie nationale est géré principalement par la chaîne immobilière intégrée de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), qui s'appuie sur le soutien et la coordination de la direction de l'évaluation, de la performance, de l'achat, des finances, et de l'immobilier (DEPAFI) rattachée au secrétariat général du ministère.

Dans le périmètre du secrétariat général du ministère de l'intérieur et de ses services déconcentrés, la gestion du parc immobilier de la gendarmerie nationale mobilise deux catégories d'acteurs. Premièrement, le directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN) délègue, en qualité de responsable de programme du programme budgétaire 152 « Gendarmerie nationale », la conduite des opérations immobilières et l'appui des échelons régionaux au bureau des affaires immobilières de la gendarmerie nationale (BAIGN) placé sous l'autorité du sous-directeur des affaires immobilières (SDAI) rattaché à la DEPAFI. Deuxièmement, pour la gestion déconcentrée du parc, les échelons locaux de commandement de la gendarmerie nationale peuvent solliciter l'assistance des secrétariats généraux pour l'administration du ministère de l'intérieur (SGAMI) notamment pour les questions relatives à la domanialité, à l'urbanisme et pour le traitement du contentieux. La direction générale de la gendarmerie nationale estime que l'équilibre trouvé en matière d'assistance apportée par les services du secrétariat général du ministère était satisfaisant et assure de bonnes relations entre la DEPAFI et la gendarmerie nationale18(*).

(2) La gendarmerie nationale s'appuie sur sa chaîne immobilière intégrée pour assurer la gestion de proximité de son parc immobilier

La gendarmerie nationale représente une composante particulière du ministère de l'intérieur du point de vue du parc immobilier dans la mesure où le parc immobilier occupé par la gendarmerie nationale représente 10,9 millions de m2 de surface utile brute (SUB), soit 73 % de l'intégralité du parc immobilier occupé par le ministère de l'intérieur.

Par conséquent, parallèlement au soutien apporté par les services du secrétariat général du ministère, la gendarmerie nationale s'appuie pour la gestion de proximité de son parc immobilier sur une chaîne immobilière intégrée étoffée qui comprend notamment des effectifs du corps de soutien technique et administratif de la gendarmerie.

Cette chaîne immobilière intégrée, réorganisée en 2022, repose sur trois échelons :

- au niveau national, la sous-direction de l'immobilier et du logement (SDIL), placée sous l'autorité du directeur des soutiens et des finances (DSF) de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN). Cette sous-direction assure notamment la programmation budgétaire et remplie une fonction de conseil et d'assistance auprès des différents échelons de commandement ;

- au niveau régional, la chaîne immobilière intégrée de la gendarmerie est responsable de la gestion des casernes domaniales et assure la cohérence globale de la répartition géographique des implantations ;

- au niveau départemental, la chaîne immobilière intégrée de la gendarmerie repose sur les unités opérationnelles locales qui sont responsables de la gestion de leur parc locatif et de la remontée d'information pour déterminer les besoins immobiliers.

Sur l'ensemble du territoire, la chaîne immobilière intégrée de la gendarmerie nationale représente 1 045 emplois, dont seulement 10 % à l'échelon central. Alors qu'il existe en 2024 une vacance sous plafond de 391 emplois19(*), le maintien de l'attractivité des métiers de la fonction immobilière de la gendarmerie nationale est essentiel pour continuer à bénéficier d'une expertise intégrée nécessaire à la mise en oeuvre de projets complexes.

Répartition par échelon territorial des emplois de la chaîne immobilière intégrée
de la gendarmerie nationale

Source : commission des finances, d'après les données de la SDIL

b) La gendarmerie nationale dispose d'un budget de 923 millions d'euros dédiés à la politique immobilière en 2023, consommés à hauteur de 64 % pour le règlement de ses loyers

À l'image de sa gouvernance, le budget de la politique immobilière de la gendarmerie nationale doit être inscrite dans le contexte institutionnel du périmètre du ministère de l'intérieur, dont le parc immobilier occupé est le deuxième plus étendu au sein de l'État après le ministère des armées.

De la même manière que le ministère de l'intérieur affronte une situation de sous-effectifs dans la chaîne « affaires immobilières » au regard de l'importance de son parc, le budget global pour l'immobilier dont dispose le ministère n'est pas proportionnel au poids de son parc dans le périmètre de l'État. Ainsi, le budget pour la politique immobilière pour l'ensemble des programmes du ministère de l'intérieur représentait 1 893 millions d'euros en 2023, soit 20 % du budget total de la politique immobilière de l'État en crédits de paiement (CP). Le rapporteur relève par surcroît que si les autres programmes budgétaires placés sous l'autorité du ministre de l'intérieur excède le périmètre de ce contrôle, de nombreuses problématiques rencontrées par la gendarmerie nationale pour la gestion de son parc immobilier et le financement de sa politique immobilière, dont notamment le déficit structurel de dépenses de maintenance immobilière, sont communes avec d'autres services gérés par le ministère de l'intérieur et il sera attentif, dans l'examen des lois financières à venir, à la cohérence de la politique immobilière menée sur l'ensemble de la mission « Sécurités ».

Au sein du budget immobilier du ministère de l'intérieur, la gendarmerie nationale représente 44 % des crédits en 2023, soit une proportion substantiellement moindre que le poids du parc de la gendarmerie au sein du ministère en termes de surface occupée.

Poids du ministère de l'intérieur dans le parc immobilier de l'État
et dans le budget dédié à la politique immobilière

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Le rapporteur relève que les besoins d'investissement de la gendarmerie nationale dans le domaine de l'immobilier sont une réalité ancienne et documentée. Pour autant, le budget immobilier de la gendarmerie nationale a connu une croissance de 17 % en cinq ans, passant en crédits de paiement de 787 millions d'euros en 2018 à 923 millions d'euros en 2023.

Trajectoire des crédits immobiliers de la gendarmerie nationale (P152)

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Au sein de l'enveloppe de 923 millions d'euros de crédits de paiement (CP) dont a bénéficié la gendarmerie en 2023, les marges de manoeuvre dont dispose le directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), en qualité de responsable du programme budgétaire 152 « Gendarmerie nationale », dépendent directement de la nature des dépenses financées par ces crédits.

En effet, une partie significative des dépenses immobilières financées par le programme 152 « Gendarmerie nationale » correspondent au versement de loyers aux bailleurs qui sont propriétaires des nombreuses casernes locatives occupées par la gendarmerie. Pour l'exercice 2023, le montant des loyers20(*) représente 590 millions d'euros en crédits de paiement (CP), c'est-à-dire 64 % soit près des deux tiers de l'ensemble du budget immobilier de la gendarmerie nationale.

Coût annuel des loyers versés par la gendarmerie nationale

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

L'importance du montant des loyers réglés annuellement par la gendarmerie nationale est renforcée par l'inertie de ces dépenses qui se traduit par une réduction de l'autonomie dont dispose le responsable de programme pour répartir ses crédits immobiliers et les orienter vers ses priorités stratégiques.

Dépenses immobilières de la gendarmerie nationale en 2023

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

En excluant les dépenses de loyers, qui ne sont pas pilotables, le budget immobilier de la gendarmerie nationale est de 333 millions d'euros en crédits de paiement en 2023 dédiés au parc domanial. Un des éléments déterminant dans l'utilisation du budget immobilier est la répartition, faite par le responsable de programme, entre les dépenses immobilières allouées au fonctionnement et les dépenses immobilières allouées à l'investissement.

Les dépenses immobilières de fonctionnement correspondent aux dépenses mises à la charge de l'occupant du bâtiment, c'est-à-dire, en dehors du loyer, les dépenses d'entretien courant, les dépenses de gestion du parc (nettoyage, gardiennage, études de sécurité) et les dépenses d'énergie et de fluides des bâtiments21(*). Les dépenses immobilières d'investissement correspondent aux dépenses mises à la charge du propriétaire, c'est-à-dire les dépenses de construction ou d'acquisition, ainsi que les dépenses de maintenance préventive et corrective et les travaux structurants sur les bâtiments.

Sur l'enveloppe budgétaire hors loyers de la gendarmerie nationale, les dépenses d'investissement représentent en crédits de paiement 39 % de l'enveloppe hors loyers, soit 130 millions d'euros, un montant très limité pour financer l'intégralité des dépenses de maintenance lourde du parc domanial de la gendarmerie nationale voire des dépenses d'acquisition ou de construction de nouveaux bâtiments.

Répartition des dépenses immobilières hors loyers
de la gendarmerie nationale en 2023

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire

Enfin il est à relever que la gendarmerie nationale peut également bénéficier ponctuellement de cofinancements en provenance d'autres programmes du budget général qui complètent les crédits du programme 152 « Gendarmerie nationale » pour la réalisation de certains projets immobiliers spécifiques.

En premier lieu, la gendarmerie nationale bénéfice d'un cofinancement au titre des cessions immobilières de l'État. Ce cofinancement correspond au reversement à la gendarmerie nationale d'une partie des recettes réalisées à l'occasion d'une cession d'un bâtiment anciennement occupé par la gendarmerie.

En application d'une décision prise sous l'autorité du Premier ministre22(*), la gendarmerie nationale bénéficie d'un régime dérogatoire par rapport à d'autre services de l'État qui prévoit notamment un abondement annuel pérenne de 2 millions d'euros au profit du ministère de l'intérieur indépendamment des produits de cession en plus du taux de retour de 50 % des produits de cession au bénéfice de la gendarmerie. En 2023, la gendarmerie a ainsi bénéficié d'une attribution de produit de 2 millions d'euros au titre de la cession de biens immobiliers.

En second lieu, la gendarmerie nationale a bénéficié d'un complément de financement dans le cadre du plan France Relance pour réaliser 328 opérations de rénovation énergétique, avec un financement complémentaire de 117 millions d'euros en crédits de paiement entre 2021 et 2023 abondé par le programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance ».

B. L'INSUFFISANCE DE L'INVESTISSEMENT DANS LE PARC DOMANIAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE SE TRADUIT PAR DES COÛTS CROISSANTS ASSOCIÉS À SON PARC LOCATIF

1. La gendarmerie nationale dispose d'un important parc immobilier domanial qui est insuffisamment entretenu
a) Les 649 casernes domaniales de la gendarmerie nationale représentent une surface de plus de cinq millions de mètres carrés

La constitution du parc immobilier de la gendarmerie nationale résulte des constructions ou achats successifs intervenus au cours de l'histoire de la gendarmerie nationale et certains bâtiments occupés aujourd'hui, que le rapporteur a pu visiter lors de ses déplacements, sont des constructions anciennes à l'image du Fort d'Issy, construit dans les années 1840, dont un bastion est utilisé par le siège de la direction générale de la gendarmerie nationale, ou des immeubles en meulière de la caserne Delpal sur le plateau de Satory qui ont été construit en 1933.

Le parc domanial de la gendarmerie nationale comprend l'ensemble des bâtiments dont l'État est propriétaire et qui sont occupés par la gendarmerie soit dans le cadre de l'obligation de logement des militaires de la gendarmerie soit comme locaux de service et techniques (LST)23(*). Les locaux de service et techniques réunissent tous les espaces de travail des gendarmes, dont notamment les bureaux, les lieux de stockage du matériel, les lieux d'entraînement, les lieux d'accueil du public et les lieux de sûreté qui doivent être adaptés à la mission spécifique de la gendarmerie.

Le parc domanial de la gendarmerie est constitué, à la fin de l'exercice 2023, de 649 casernes pour une surface utile brute (SUB) de 5 225 479 m2. Il est à relever que le parc domanial de la gendarmerie nationale représente à lui seul 65 % du parc domanial de l'État possédé par le ministère de l'intérieur.

Répartition par région des logements domaniaux
de la gendarmerie nationale

(en nombre de logements)

Note : le code couleur correspond au nombre de logements domaniaux appartenant à la gendarmerie nationale par région métropolitaine

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Du fait de la spécificité de la gendarmerie, et en particulier du statut militaire de ses agents et de l'obligation de logement en casernement qui y est rattaché, le parc immobilier domanial de la gendarmerie est largement constitué de logements familiaux. Sur une surface totale de 5,2 millions de m2, les logements représentent 2,5 millions de m2 soit 48 % du parc. Le reste du parc est constitué par les locaux de service et techniques (LST) qui occupent 2,7 millions de m2 soit une moyenne de 4 160 m2 par caserne domaniale.

Comme il a été rappelé, les bâtiments de la gendarmerie nationale sont pour certains très anciens et le maintien en bon état de ces bâtiments est un enjeu déterminant pour assurer de bonnes conditions de logement aux militaires concernés et pour assurer des conditions de travail adéquate dans les locaux de service et techniques. Pour mesurer « l'état de santé des bâtiments », la direction de l'immobilier de l'État (DIE) et la gendarmerie nationale utilisent un diagnostic technique aboutissant à attribuer à chaque bâtiment une note entre 1 et 4, la note 1 étant attribuée à un bâtiment vétuste et la note 4 étant attribuée à un bâtiment en très bon état.

Sur l'ensemble du territoire, le parc domanial de la gendarmerie nationale dispose d'un diagnostic technique moyen de 3, soit un état de santé bâtimentaire inférieur de 14 % à celui des bâtiments loués par la gendarmerie nationale. Dans plusieurs régions, dont notamment les régions Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Île-de-France et Pays de la Loire, le diagnostic technique des bâtiments domaniaux est inférieur à 3, ce qui témoigne de la nécessité de mieux entretenir ces bâtiments dont l'État est propriétaire.

État technique24(*) des bâtiments domaniaux
de la gendarmerie nationale par région

(diagnostic technique entre 1 et 4)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Enfin, les investissements importants en matière de maintien en l'état du parc domanial de la gendarmerie nationale résultent notamment du fait que peu de bâtiments domaniaux ont été construits par la gendarmerie dans les années récentes. Par conséquent, le parc domanial est composé de bâtiments dont la majorité ont été construits dans les années 1970 à 1990 et qui demandent des investissements de maintenance et de réhabilitation conséquents. Dans certains cas qui représentent 766 logements domaniaux de la gendarmerie, le bâtiment a été construit il y a plus de cent ans.

L'âge moyen des locaux de service et techniques (LST) du parc domanial est ainsi de 58 ans et celui des logements domaniaux de 51 ans, ce qui signifie qu'en moyenne un gendarme logé dans le parc domanial vit avec sa famille dans un logement construit en 1973.

Répartition par âge des logements du parc domanial de la gendarmerie

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

b) Le sous-investissement chronique dans les travaux de maintenance et de réhabilitation a constitué une dette grise de plus de 2 milliards d'euros en dix ans

En tant qu'occupante et propriétaire de son parc immobilier domanial, la gendarmerie nationale est tenue de prendre en charge chaque année des dépenses importantes qui correspondent à l'entretien des bâtiments du parc domanial.

En premier lieu, le budget de la gendarmerie, abondé par le programme 152 « Gendarmerie nationale », finance les dépenses immobilières de fonctionnement (titre 325(*)) du parc domanial. Ces dépenses correspondent à celles qui sont mises à la charge de la gendarmerie en tant qu'occupante du parc.

En second lieu, le budget de la gendarmerie finance également les dépenses immobilières d'investissement (titre 526(*)) du parc domanial, c'est-à-dire les dépenses mises à la charge de la gendarmerie en qualité de propriétaire des bâtiments.

Pour maintenir en bon état ses bâtiments domaniaux, la direction générale de la gendarmerie nationale estime son besoin annuel de financement à 400 millions d'euros, dont 270 millions d'euros au titre des dépenses d'investissement, de maintenance et de réhabilitation à la charge du propriétaire et 130 millions d'euros au titre des dépenses de fonctionnement d'entretien à la charge de l'occupant.

Cette estimation du besoin annuel de financement pour le maintien en état du parc domanial de la gendarmerie a évolué à partir de l'année 2023 pour passer de 300 millions d'euros par an à 400 millions d'euros par an. Cette réévaluation s'explique par deux facteurs principaux.

En premier lieu, les coûts de construction et de travaux d'entretien ont connu un phénomène d'inflation avec une augmentation de 30 % de l'indice du coût de la construction (ICC) depuis 2012 et de 27 % de l'indice de prix des travaux d'entretien et d'amélioration (IPEA). En second lieu, la gendarmerie a renforcé ses investissements bâtimentaires pour assurer la sécurisation des casernes, notamment domaniales, en particulier depuis l'attentat de Magnanville en juin 2016. Les besoins en investissement dans le parc domanial pour assurer des travaux de sécurisation sont estimés à 300 millions d'euros répartis selon un rythme de 15 millions d'euros par an pendant vingt ans.

Écart entre le besoin d'investissements immobiliers
et les investissements réalisés dans le parc domanial

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

La trajectoire des crédits immobiliers de la gendarmerie nationale depuis dix ans fait apparaître une sous-dotation chronique du parc immobilier domanial de la gendarmerie nationale.

Entre 2014 et 2022, alors que les besoins financiers en matière immobilière étaient estimés à 300 millions d'euros par an, les crédits de paiement exécutés par la gendarmerie nationale en matière immobilière sont restés dans un intervalle entre 39 et 123 millions d'euros. Cela fait par conséquent plus d'une décennie que les crédits immobiliers de la gendarmerie n'ont pas atteint 50 % des besoins estimés de financement pour conserver en état les bâtiments domaniaux qui servent de cadre de travail aux gendarmes et de cadre de vie à leurs familles.

L'écart qui existe chaque année entre les besoins d'investissement immobiliers et les travaux effectivement engagés par la gendarmerie est constitutif d'une « dette grise » pour le parc domanial de la gendarmerie, qui correspond au besoin à couvrir accumulé au fil des années et qui se traduit par une dégradation de l'état des bâtiments concernés. En se tenant aux dix exercices compris entre 2014 et 2023, la gendarmerie nationale a constitué une dette grise de 2 208 millions d'euros de retard d'investissement dans le maintien en état de ses bâtiments. Le rapporteur relève par surcroît que l'estimation de cette dette grise est minorée par le périmètre temporel retenu de seulement dix ans, eu égard au fait que le phénomène de sous-investissement avait débuté avant 2014 et que par conséquent cette estimation constitue un minimum.

Évolution de la dette grise du parc domanial de la gendarmerie
entre 2014 et 2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Enfin, la croissance constante de cette dette grise n'est pas sans effet sur le parc immobilier domanial de la gendarmerie. En effet, au-delà de la dégradation des conditions de vie et de travail des militaires de la gendarmerie, le sous-investissement chronique en matière immobilière a pour conséquence l'abandon de certains casernes domaniales lorsque le niveau de criticité des bâtiments se traduit par un montant d'investissement qui dépasse les marges d'intervention du programme 152 « Gendarmerie nationale ».

Depuis vingt ans, plus de deux cents casernes domaniales ont été abandonnées par la gendarmerie nationale, en étant pour certaines remplacées par de nouveaux bâtiments loués et relevant du parc locatif de la gendarmerie.

De même, les casernes domaniales du Creusot, de Douai et de Boulay présentent actuellement un besoin significatif de réhabilitation et ne pourront être conservées au sein du parc domanial de la gendarmerie qu'au prix d'un effort substantiel d'investissement immobilier pour les maintenir en état.

2. La gendarmerie nationale occupe un vaste parc locatif de plus de 3 000 casernes dont l'extension alourdit ses dépenses annuelles de loyer
a) La gendarmerie nationale occupe 3 075 casernes locatives et dispose d'un parc locatif de 5,9 millions de m2 de surface

Le parc domanial de la gendarmerie nationale, malgré son étendue et sa capacité d'accueil de 30 500 logements, ne permet pas de couvrir l'ensemble des besoins de la gendarmerie qui compte 95 000 militaires en poste et dont la zone recouvre 95 % du territoire national.

Par conséquent, la gendarmerie occupe un parc immobilier scindé en deux parties : au parc domanial, s'ajoute un parc locatif constitué de bâtiments que la gendarmerie utilise à la fois pour loger les militaires de la gendarmerie et leurs familles sous le régime du logement concédé par nécessité absolue de service (LCNAS) et pour servir de locaux de service et techniques (LST) pour toutes les activités opérationnelles de la gendarmerie, y compris en matière de lieux de sûreté ou d'accueil du public. Le rapporteur relève à ce titre que pour la réalisation de la mission éminemment régalienne de la gendarmerie nationale, l'État s'appuie largement sur des bâtiments dont il n'est pas propriétaire, dès lors que le parc locatif représente 53 % de la surface totale du parc immobilier de la gendarmerie nationale.

Le parc locatif de la gendarmerie permet d'une part l'implantation d'unités de gendarmerie dans des casernes locatives qui associent des logements et des locaux de service et techniques (LST) et d'autre part le logement de gendarmes à proximité des casernes, dans des logements qui constituent des prises à bail extérieures. Sur les 48 108 logements du parc locatif, 12 589 correspondent à des prises à bail en dehors des casernements.

Répartition par région des logements locatifs de la gendarmerie nationale

(en nombre de logements)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

En dehors des loyers qui sont financés par des crédits de fonctionnement (titre 3), les besoins d'investissements de la gendarmerie dans le parc locatif sont limités. En particulier, si elle doit prendre en charge les dépenses de l'occupant, dont notamment l'entretien courant et la gestion du parc, les investissements lourds en matière de maintenance et de réhabilitation sont financés par le propriétaire des bâtiments concernés.

De cette répartition des charges résulte un état de santé des bâtiments du parc locatif de la gendarmerie qui est meilleur que celui des bâtiments du parc domanial. Sur l'ensemble des bâtiments locatifs de la gendarmerie, la note moyenne de diagnostic technique obtenue est de 3,48 contre 3 pour les bâtiments domaniaux sur une échelle de ce diagnostic qui va de 1 à 4. L'écart de 0,48 point est donc substantiel.

État technique des bâtiments locatifs de la gendarmerie nationale
par région

(diagnostic technique entre 1 et 4)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Par conséquent, les sous-investissements constatés en matière de maintien en état du parc domanial se traduit par une situation dans laquelle les conditions de vie des familles des gendarmes et de travail des militaires de la gendarmerie nationale sont, au regard de l'état des bâtiments, meilleures dans les bâtiments loués par la gendarmerie que dans les bâtiments qui appartiennent à l'État.

Il est également à relever que le parc domanial est en général plus ancien que le parc locatif et que les logements locatifs ont en majorité été construits depuis la fin des années 1990. Alors que l'investissement dans la construction du parc domanial est atone, plus de 6 500 logements du parc locatif sont des logements récents construits depuis 2013. Cet écart dans l'âge des bâtiments du parc locatif explique également en partie le meilleur état technique des bâtiments concernés, dont plus de la moitié ont été construit il y a moins de vingt-cinq ans.

Répartition par âge des logements du parc locatif de la gendarmerie

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

b) Le parc locatif de la gendarmerie nationale est constitué de bâtiments pris à bail notamment auprès de collectivités territoriales ou d'organismes d'habitations à loyer modéré

Pour financer la construction de nouvelles casernes locatives et compte tenu de l'impossibilité pour la gendarmerie de dégager des marges d'investissement suffisantes pour étendre le parc des casernes domaniales, la gendarmerie nationale s'appuie sur deux catégories d'acteurs, les collectivités territoriales et les organismes d'habitations à loyer modéré, qui financent la construction de casernes dont ils sont propriétaires et qui reçoivent en contrepartie des loyers versés par l'État au titre de l'occupation de ces casernes.

Il est à relever que parallèlement à ces deux montages conventionnels qui permettent de construire des casernes locatives associant des bâtiments de logement et des locaux de service et techniques (LST), la gendarmerie opère également des prises à bail auprès d'autres acteurs plus diversifiés du parc privé pour s'assurer de la disponibilité de logement à proximité des casernes, soit dans des ensembles immobiliers où sont regroupés plusieurs familles de gendarmes, soit dans des logements loués individuellement par la gendarmerie nationale.

Le cas particulier des pelotons d'autoroute

La gendarmerie nationale compte 26 pelotons d'autoroute qui assurent la sécurité sur les tronçons autoroutiers du réseau national.

La construction des locaux prévus pour assurer les missions de police sur autoroute a été mise à la charge des sociétés concessionnaires des autoroutes qui sont tenues de mettre à disposition de la gendarmerie à titre gratuit les bâtiments correspondants.

Cette situation présente des risques dès lors qu'il apparait que les immeubles concernés ne font pas dans certains cas l'objet d'investissements suffisants en maintenance, dégradant ainsi les conditions de travail des unités concernées, sans que la gendarmerie soit en mesure d'investir pour la maintenance ou l'extension d'immeubles qui ne lui appartiennent pas.

À titre d'illustration, le rapporteur a constaté lors de son déplacement dans la Vienne le 14 mai 2024 que les locaux mis à disposition du groupe de gestion local des flux (GGLF) rattaché au peloton de motorisé (PMo) de Châtellerault par le groupe Vinci n'étaient plus adaptés aux besoins de cette unité. À ce titre, il est regrettable qu'en dépit des solutions proposées par la gendarmerie pour aménager ce site par l'ajout d'un bâtiment modulaire, le courrier transmis par le rapporteur au groupe Vinci n'ai pas fait l'objet d'une réponse en vue de trouver une solution concertée pour améliorer les conditions de travail et de sécurité des gendarmes de cette unité.

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Les collectivités territoriales sont des bailleurs essentiels pour la gendarmerie nationale sur le territoire. La compétence des collectivités territoriales pour construire ou financer des bâtiments destinés à la gendarmerie nationale a récemment été sécurisée juridiquement par l'insertion d'un nouvel article L. 1311-19 dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) par la loi de finances initiale pour 202127(*).

Depuis le début des années 1990, les modalités de prise à bail par la gendarmerie de locaux auprès des collectivités territoriales sont encadrées par une circulaire du Premier ministre du 28 janvier 199328(*) et un décret du même jour29(*). Ce cadre juridique prévoit en particulier la signature d'un premier bail de neuf ans pendant laquelle le loyer n'est pas révisable. Le loyer annuel est fixé par application d'un taux maximal de 6 % aux coûts de travaux et de terrain, dans la limite d'un coût-plafond par unité-logement dont le montant est réévalué trimestriellement en fonction de l'indice du coût de la construction (ICC) publié par l'INSEE.

L'objectif de ce montage est de permettre aux communes, intercommunalités et départementaux concernés de supporter la charge d'investissement associée à la construction du bâtiment puis d'amortir le coût de l'investissement par le versement annuel d'un loyer adapté par la gendarmerie. Le rapporteur relève également que le dispositif des baux emphytéotiques administratifs (BEA), qui prévoyait la construction de bâtiments par des personnes privées sur le domaine public de collectivités, était applicable aux besoins immobiliers de la gendarmerie entre 2002 et 2016. Toutefois, la possibilité d'engager de nouveau contrat de ce type a été fermée à partir du 1er avril 2016 considérant que cette procédure n'était pas adaptée au regard du risque de fragilisation financière des collectivités par ces contrats.

Parallèlement, le décret du 28 janvier 1993 prévoit également la possibilité pour la gendarmerie de verser aux collectivités qui financent des opérations de construction, d'extension ou de réhabilitation une subvention d'investissement. Le montant de cette subvention d'investissement est fixé dans la limite de 20 % du coût-plafond, pour les communes de moins de 10 000 habitants ne bénéficiant pas d'un cofinancement, et de 18 % pour les départements, les intercommunalités, les communes de plus de 10 000 habitants ou celles de moins de 10 000 habitants bénéficiant d'un cofinancement. En 2023, alors que 280 logements ont été mis à disposition de la gendarmerie par des collectivités territoriales, le montant total des subventions d'investissement versées aux collectivités territoriales par la gendarmerie a été de 7 millions d'euros.

Répartition des loyers versées par la gendarmerie
selon la catégorie de collectivité territoriale en 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Pour ce qui est des cas dans lesquels la gendarmerie prend à bail des casernes locatives et des logements, isolés ou regroupés dans des ensembles de logement, auprès d'organismes d'habitations à loyer modéré, le schéma de financement des opérations de construction est encadré par un décret du 26 décembre 201630(*), qui prévoit également la signature d'un premier bail de neuf ans pendant lequel le loyer n'est pas révisable.

Les conditions financières de l'opération de construction immobilière réalisée par l'organisme d'habitations à loyer modéré au profit de la gendarmerie sont encadrées par des dispositions réglementaires qui prévoient que le premier loyer est fixé par l'application d'un maximum de 7 % aux coûts des travaux dans la limite d'un coût-plafond par unité de logement précisé dans le décret de 2016 et dont le montant est réévalué trimestriellement en tenant compte de l'évolution de l'indice du coût de la construction (ICC) publié par l'INSEE. Le cadre réglementaire prévoit également la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d'apporter une garantie aux prêts que les offices publics de l'habitat et les sociétés d'habitations à loyer modéré contractent pour financer des opérations de construction de bâtiment au profit de la gendarmerie.

L'objectif de ce montage est de permettre d'associer à la fois un organisme d'habitations à loyer modéré qui, en qualité de maître d'ouvrage et de propriétaire du bâtiment, supporte la dette associée à l'opération immobilière, les collectivités territoriales, pour alléger la charge de cette dette par l'apport de garantie, et enfin la gendarmerie nationale qui permet de sécuriser l'opération en garantissant le versement de loyers dont le montant est fixé pour une durée minimale de neuf ans. Alors que ce dispositif est plus récent que celui du décret de 1993, il a permis le financement de nombreux projets immobiliers de la gendarmerie nationale, plus de 500 logements construits grâce à ce montage financier ayant été mis à la disposition de la gendarmerie entre 2021 et 2023.

Un exemple de caserne locative appartenant à une collectivité :
la gendarmerie de Vouillé

Pour accueillir les 20 personnels militaires de la brigade territoriale autonome (BTA) de Vouillé (Vienne), la gendarmerie a coopéré avec la communauté de communes du Haut-Poitou pour la construction d'une caserne locative neuve que le rapporteur a visité dans le cadre de ce contrôle.

Les immeubles du casernement ont été livrés en 2019 et combinent des bâtiments de locaux de service et techniques adaptés aux besoins de la gendarmerie et de logements pavillonnaires ayant une bonne performance thermique.

L'opération immobilière de 6,3 millions d'euros a été pris en charge par la communauté de commune qui a bénéficié d'une subvention versée par la gendarmerie à hauteur de 622 000 euros. Par surcroît, la gendarmerie verse au bailleur, c'est-à-dire la communauté de communes, un loyer annuel de 228 000 euros.

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale.

Répartition des loyers versés par la gendarmerie
selon la catégorie du bailleur en 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

c) La dynamique d'extension du parc locatif se traduit par un poids croissant des loyers dans les crédits immobiliers de la gendarmerie nationale

La conséquence de l'extension importante du parc locatif de la gendarmerie nationale depuis dix ans est la croissance du coût annuel des loyers versés par la gendarmerie nationale aux collectivités locales et aux organismes d'habitations à loyer modéré en qualité de bailleur. Les crédits inscrits sur le programme 152 « Gendarmerie nationale » ayant pour finalité le versement des loyers sont figés au sein du programme pour garantir la possibilité pour la gendarmerie de respecter ses engagements auprès de ses bailleurs.

Par suite, du fait de l'inertie des dépenses de loyer associées à chaque prise à bail, l'extension du parc locatif à un effet de long terme sur les crédits immobiliers de la gendarmerie nationale. Chaque nouveau projet financé selon le schéma du décret de 1993 ou du décret de 2016 implique le versement annuel pendant plusieurs années voire plusieurs décennies d'un loyer qui vient s'imputer sur les crédits de fonctionnement (titre 3) du programme 152 « Gendarmerie nationale ».

Depuis 2014, le parc immobilier de la gendarmerie nationale a connu un phénomène d'extension porté par le parc locatif. Le nombre de nouveaux logements mis à disposition par les collectivités locales et les organismes d'habitations à loyer modéré atteint 2 873 entre 2014 et 2023.

Cette extension s'est traduite corrélativement par une croissance de l'enveloppe correspondant au règlement des loyers dans le budget de la gendarmerie nationale. Le coût annuel des loyers versés par la gendarmerie nationale est ainsi passé de 467 millions d'euros en 2014 à 590 millions d'euros en crédits de paiement en 2023.

En 2023, les seuls loyers versés par la gendarmerie représentaient 35 % des crédits hors titre 2 du budget de la gendarmerie nationale. L'extension du parc locatif, si elle constitue une réponse à l'impossibilité pour la gendarmerie de financer des investissements immobiliers importants, se traduit néanmoins par un rétrécissement des marges de manoeuvre des gestionnaires du programme et en particulier du directeur général de la gendarmerie nationale en qualité de responsable du programme 152 « Gendarmerie nationale ». En effet, dans une période de forte contrainte budgétaire, la captation des crédits budgétaires par les dépenses de loyers ne permet pas au responsable de programme de réaliser un arbitrage global pour favoriser un redressement de la trajectoire des crédits dédiés aux projets d'acquisition ou de construction pour étendre le parc domanial.

Le rapporteur souligne que ce risque de verrouillage excessif du financement immobilier de la gendarmerie, qui aboutit à une situation d'inertie qui réduit tendanciellement les marges de manoeuvre du responsable de programme, doit être pris en compte pour trouver des modes innovants de financement pour les opérations immobilières de la gendarmerie nationale.

II. LA MOBILISATION D'INVESTISSEMENTS INNOVANTS ET UNE MEILLEURE PROGRAMMATION DES INVESTISSEMENTS CONSTITUENT DES LEVIERS D'AMÉLIORATION DE LA SITUATION IMMOBILIÈRE DE LA GENDARMERIE NATIONALE

A. DÉVELOPPER LES INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS PAR LA MOBILISATION DE MONTAGES FINANCIERS INNOVANTS

1. La réalisation à court terme des projets structurants de la gendarmerie nationale et l'installation des nouvelles brigades nécessitent d'adapter les modes de financement des investissements immobiliers associés
a) Le recours aux marchés de partenariat pour les projets structurants de la gendarmerie permet un étalement dans le temps des investissements associés

La stratégie immobilière de la gendarmerie doit tenir compte des contraintes budgétaires qui pèsent sur l'ensemble des missions du budget général. En particulier, le montant actuel du budget immobilier annuel de la gendarmerie (923 millions d'euros en 2023) ne permet pas le déploiement d'une stratégie d'investissement financée par les crédits de la mission pour la construction de nouveaux bâtiments ou l'extension d'emprises existantes. Pour autant, le vieillissement du parc domanial et la nécessité d'adapter les bâtiments au durcissement des contraintes opérationnelles de gendarmerie nécessite d'engager des investissements immobiliers importants dans les années à venir.

Cet objectif d'adopter la stratégie d'investissements immobiliers de la gendarmerie à l'évolution des contraintes opérationnelles a été consacré en 2020 par le Livre blanc sur la sécurité intérieure qui fait état de la nécessité pour la stratégie immobilière de « couvrir les besoins capacitaires ou fonctionnels nouveaux » et de « financer les projets d'envergure de la gendarmerie »31(*).

En qualité de responsable du programme budgétaire 152 « Gendarmerie nationale », le directeur général de la gendarmerie nationale court le risque de se trouver dans une impasse de financement dès lors que 64 % de son budget immobilier est consacré au paiement de loyers auquel il ne saurait se soustraire.

Sur les 130 millions d'euros de dépenses d'investissement qui peuvent être regardées comme pilotables, le responsable de programme est également contraint par le fait que le parc domanial souffre d'un sous-investissement chronique en matière de maintenance et de réhabilitation des bâtiments, ce qui justifie que ce poste de dépense concentre 77 % des investissements immobiliers soit 100 millions d'euros en 2023. Par conséquent, le budget annuel de la gendarmerie consacré aux investissements d'acquisition et de construction immobilière a été de 18 millions d'euros en crédits de paiement en 2023. Ce niveau structurel faible de crédits de construction résulte structurellement des contraintes budgétaires qui pèse sur la gendarmerie comme sur l'ensemble des dépenses publiques, dans une situation de dégradation des finances publiques.

Pour répondre au risque d'impasse financière auquel est affrontée la gendarmerie nationale, le rapporteur relève qu'il est nécessaire de mobiliser des modes alternatifs de financement des investissements immobiliers pour pouvoir réaliser les investissements nécessaires à la couverture des besoins opérationnels nouveaux et améliorer les conditions de vie et de travail des militaires de la gendarmerie.

Les marchés de partenariat constituent un partenariat public-privé (PPP) ayant pour objet de déléguer à un partenaire privé la construction d'un bâtiment et de le prendre en location pendant une longue période à l'issue de laquelle le bâtiment revient dans le patrimoine de l'État.

Le cadre juridique des marchés de partenariat a été institué par l'ordonnance du 23 juillet 201532(*) et codifié depuis dans le code des marchés publics. Il définit le marché de partenariat comme un marché public par lequel l'acheteur public confie à un opérateur économique une mission globale comprenant la réalisation et le financement partiel ou total d'un bien nécessaire au service public.

Dans le domaine immobilier, le marché de partenariat peut inclure, outre les travaux de construction et de rénovation, les missions de « conception des ouvrages » et celle « d'aménagement, d'entretien, de maintenance et de gestion »33(*). La participation de l'opérateur économique au financement du projet est un levier déterminant pour les acheteurs publics ne disposant pas d'une capacité d'investissement immédiate dès lors qu'elle permet un paiement différé qui permet de lisser sur le long terme, en l'intégrant au prix des loyers, le coût du financement de l'opération.

La gendarmerie nationale a déjà eu recours à des partenariats publics privés (PPP), qui ont pris la forme d'autorisations temporaires d'occupation du domaine public assorties d'une location avec option d'achat (AOT/LOA). Ce montage, prévu par la loi d'orientation pour la sécurité intérieure (LOPSI) du 29 août 200234(*), a été remplacé à partir de l'ordonnance du 23 juillet 201535(*) par les marchés de partenariat.

Un exemple de partenariat public privé de la gendarmerie nationale :
la caserne de Sathonay-Camp

La caserne de Sathonay-Camp (Rhône) a été construite par un prestataire dans le cadre d'un marché de partenariat (AOT/LOA) signé en mai 2009 avec une mise à disposition des locaux à compter de juillet 2012 et un bail de trente ans. Les bâtiments construits ont permis la création de 417 logements et 102 hébergements ainsi que l'extension des locaux de service et techniques (LST) au profit notamment de la région de gendarmerie Auvergne-Rhône-Alpes et du groupement de gendarmerie mobile I/5. L'opération représente un montant de 411 millions d'euros qui n'est pas absorbable par le budget annuel d'investissement de la gendarmerie nationale.

Les loyers versés au prestataire entre 2012 et 2023 représentent 39 % du montant total de l'opération.

Financement de l'opération de PPP de Sathonay-Camp

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Entre 2007 et 2012, la gendarmerie a engagé une première génération de sept opérations immobilières d'envergure financées par le recours aux partenariats publics privés (PPP). Cette première génération a permis la construction de plus de 1 000 logements pour les militaires de la gendarmerie et leurs familles ainsi que l'extension de locaux de service et techniques.

En conséquence, le recours au marché de partenariat présente deux avantages déterminants pour la gendarmerie nationale dans la gestion de son parc immobilier. En premier lieu, comme indiqué précédemment, il permet de sortir de l'impasse de financement à laquelle la gendarmerie est affrontée du fait de l'alourdissement tendanciel du coût des loyers qu'elle verse et de la nécessité de préserver ses investissements en maintenance et réhabilitation de son parc domanial dont l'état se dégrade.

En second lieu, si les marchés de partenariat se traduisent par une importante inertie des crédits du programme du fait de la nécessité de rembourser l'opération par des loyers versés pendant une longue période, ils permettent également le retour dans le patrimoine de l'État des biens immobiliers concernés à l'issue du marché. Les marchés de partenariat représentent à ce titre un vecteur de « retour en domanialité » du parc de la gendarmerie nationale justifié au regard de la spécificité des missions de la gendarmerie et des contraintes particulières qui pèsent sur son parc, notamment du point de vue de sa sécurisation.

Aussi, le rapporteur recommande-t-il de recourir au marché de partenariat pour pouvoir définitivement engager les projets immobiliers structurants que la gendarmerie a été contrainte de différer pour des raisons budgétaires.

Le rapporteur identifie en particulier quatre projets structurants et d'envergure qui concernent le parc immobilier de la gendarmerie sur le plateau de Satory (Yvelines), à Dijon (Côte-d'Or), à Melun (Seine-et-Marne) et à Mayotte. Au regard de l'importance des investissements immobiliers associés à ces projets, le rapporteur souligne par surcroît la nécessité de mobiliser les ressources de la chaîne immobilière de la gendarmerie nationale et du ministère de l'intérieur dans le cadre de la négociation puis du suivi de l'exécution des contrats de partenariat pour garantir l'obtention et le maintien de conditions financières optimales pour la réalisation de ces investissements.

Le parc immobilier de la gendarmerie à Mayotte

À Mayotte, la gendarmerie nationale occupe 7 casernes et 273 logements qui sont en majorité pris à bail dans le secteur civil.

Les quatre casernes domaniales ont été construites entre 1981 et 2008 et comportent 58 logements. Elles ont bénéficié de 2,4 millions d'euros d'investissements entre 2017 et 2024.

Les trois casernes locatives doivent être complétées par plusieurs projets de construction de nouvelles casernes locatives dont deux projets dans le cadre des « 200 nouvelles brigades ».

La gendarmerie nationale a identifié parmi les projets structurants à financer par un marché de partenariat un projet immobilier de construction d'une nouvelle caserne à Mayotte dans le cadre d'une manoeuvre de rationalisation des emprises de la gendarmerie.

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Lors de ses déplacements dans le cadre de ce contrôle, le rapporteur a notamment pu constater la nécessité de rapidement confirmer le recours au marché de partenariat pour démarrer les opérations immobilières sur le plateau de Satory et à Dijon. En premier lieu, le projet immobilier sur le plateau de Satory permettra à la fois d'améliorer les conditions de vie des militaires et de leurs familles par la réhabilitation de 1 000 logements sur ce site immobilier et de répondre aux contraintes opérationnelles nouvelles en étendant les locaux de service et techniques du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) et du groupement blindé de la gendarmerie mobile (GBGM). Le marché de partenariat constitue une solution de financement innovante et soutenable pour cette opération immobilière dont le coût en travaux est estimé à 500 millions d'euros.

En second lieu, le parc immobilier de la gendarmerie à Dijon présente l'avantage de réunir deux opérations immobilières à réaliser qui pourraient être mutualisées au sein d'un marché de partenariat. Cette opération globale permettrait d'une part de rénover les bâtiments de la caserne Deflandre et d'autre part de construire de nouveaux bâtiments pour l'école de gendarmerie de Dijon qui doit accueillir six compagnies d'instruction supplémentaires à moyen terme pour tenir compte du rehaussement du rythme des recrutements au sein de la gendarmerie. Le rapporteur relève que malgré leur caractère nécessaire et leur urgence, les travaux de rénovation des logements de la caserne Deflandre ont été bloqués en décembre 2023 en raison d'une insuffisance de crédits budgétaires. Cette situation est incompréhensible pour les gendarmes concernés et leurs familles, qui font face à des bâtiments vétustes où sont constatés des infiltrations d'eau et des coupures de chauffage et d'eau chaude sanitaire (ECS), y compris pendant l'hiver. Une intervention immobilière structurelle sur ces bâtiments est non seulement nécessaire mais également urgente.

Par conséquent, l'intégration de ces travaux à un marché de partenariat global sur l'immobilier de la gendarmerie à Dijon, pour un montant total de travaux de 170 millions d'euros, est un levier qui permet d'étaler le financement dans le temps pour répondre à la fois aux besoins opérationnels de l'école de gendarmerie et à la nécessité d'améliorer rapidement les conditions de vie des gendarmes et de leurs familles.

Recommandation n°1. Confirmer le recours au marché de partenariat pour financer une nouvelle génération de projets immobiliers structurants de la gendarmerie nationale dont en priorité les opérations immobilières sur le plateau de Satory et à Dijon (Direction générale de la gendarmerie nationale, Direction de l'immobilier de l'État, Direction du budget).

b) L'assouplissement des conditions de fixation des loyers versés par la gendarmerie est nécessaire pour garantir l'extension du parc locatif

Les conditions financières de construction de nouvelles casernes locatives par les collectivités territoriales et les organismes d'habitations à loyer modéré (organismes HLM) constituent un enjeu ayant une incidence directe sur la capacité de la gendarmerie de mener à bien ses objectifs de recrutement de personnels et de création de nouvelles brigades.

En effet, la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) du 24 janvier 2023 prévoit la création de 200 nouvelles brigades de gendarmerie36(*), sous la forme de brigades fixes ou de brigades mobiles. Les lieux d'implantations de ces « 200 nouvelles brigades », qui ont même été portées à 238 nouvelles brigades37(*), ont été diffusés par le ministère de l'intérieur en octobre 2023.

Au regard des contraintes budgétaires qui ont été rappelées et de la faible disponibilité des crédits immobiliers d'investissement pour réaliser des dépenses de construction ou d'acquisition, la gendarmerie a fait le choix de retenir une solution locative pour l'intégralité des 238 nouvelles brigades.

Par suite, la gendarmerie prévoit une manoeuvre immobilière séquencée en deux phases. Pendant une première phase transitoire, entre 2024 et 2029, les nouvelles brigades seront installées dans des bâtiments pris à bail à la fois pour le logement des gendarmes et les locaux de service et techniques. À partir de 2030, en phase définitive, une partie des logements et des locaux de service et techniques des nouvelles brigades seront transférés dans des nouvelles casernes locatives, construites pendant la phase transitoire sous la maîtrise d'ouvrage d'une collectivité territoriale ou d'un organisme HLM et pris à bail par la gendarmerie sous le régime du décret de 199338(*) ou du décret de 201639(*).

En phase définitive, c'est-à-dire à partir de 2030, la gendarmerie estime que le coût en loyers correspondant à l'extension du parc locatif pour répondre à la création des 238 nouvelles brigades sera de 31 millions d'euros par an, dont 24 millions d'euros soit 77 % du coût pour la location des logements des gendarmes et de leurs familles.

Répartition du coût immobilier lié à la création
des « 200 nouvelles brigades »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Le rapporteur relève que la mise en oeuvre de la manoeuvre immobilière prévue par la gendarmerie nationale nécessite la construction de 135 nouveaux immeubles de casernement sur l'ensemble du territoire pour accueillir les nouvelles brigades en phase définitive. La conduite de la programmation immobilière suppose par conséquent que les collectivités territoriales et les organismes HLM concernés, soient incités à réaliser ces investissements immobiliers.

Or les règles de détermination des conditions financières de réalisation de ces investissements ne sont plus adaptées aux coûts réels qu'ils induisent.

En effet, le montant du loyer annuel est fixé, en application des décrets40(*) et circulaires41(*) applicables, en appliquant un taux entre 6 % et 7 % aux dépenses réelles de construction de l'immeuble dans la limite d'un « coût-plafond » par unité-logement42(*), qui tient compte de la situation spécifique de la région parisienne et des territoires ultramarins et insulaires. Le montant des coûts-plafonds, fixé dans les décrets de 1993 et de 2016, est réévalué chaque trimestre selon l'évolution de l'indice du coût de la construction (ICC) publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).

Cependant, les représentants des collectivités auditionnés par le rapporteur ainsi que la direction générale de la gendarmerie nationale s'accordent à dire que, malgré l'indexation des coûts-plafonds sur l'ICC, le montant des coûts-plafonds et par suite des loyers proposés aux maître d'ouvrage de gendarmeries locatives est inférieurs aux coûts réels de construction et de maintien en état des casernes. En particulier, l'indice d'actualisation retenu ne tient pas compte des spécificités immobilières liées à la construction des locaux de service et techniques des gendarmeries qui correspondent à des usages atypiques au regard notamment de la sécurisation et de la présence de locaux de sûreté. La direction générale de la gendarmerie nationale estime que les coûts-plafonds applicables sont inférieurs de 30 % à 50 % aux coûts réels supportés par le maître d'ouvrage.

Pour répondre à ce risque de désincitation des collectivités territoriales et des organismes HLM à investir dans les bâtiments de la gendarmerie, un groupe de travail associant les services du ministère des finances et les services du ministère de l'intérieur a été constitué en 2019 sur ce sujet. Il s'est prononcé en faveur d'un rééquilibrage des conditions financières d'investissement immobilier pour la gendarmerie au profit des collectivités et des organismes HLM.

Nonobstant, le rapporteur relève que les coûts-plafonds n'ont toujours pas été révisés plus de trois ans après la sécurisation législative de la participation des collectivités territoriales à l'extension du parc locatif de la gendarmerie. Pour assurer les investissements locatifs programmés et indispensables dans le cadre du déploiement des « 200 nouvelles brigades », le rapporteur spécial recommande de faire rapidement aboutir les travaux de révision des coûts-plafonds applicables aux loyers versés par la gendarmerie nationale aux collectivités territoriales et aux organismes HLM.

Recommandation n°2. Réviser le montant des coûts-plafonds pour la fixation des loyers versés par la gendarmerie aux collectivités territoriales et aux organismes d'habitations à loyer modéré pour garantir la viabilité des projets d'extension du parc locatif de la gendarmerie (DGGN, DB).

2. La mobilisation de financements innovants constitue aussi un levier d'accélération des travaux de rénovation énergétique des bâtiments de la gendarmerie nationale

Au regard de l'importance de son parc immobilier, aussi bien domanial que locatif, la modernisation et l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments occupés par l'État constitue l'un des quatre axes structurant de la politique immobilière de l'État43(*).

En effet, l'usage des bâtiments représente le quatrième facteur d'émission de gaz à effet de serre (GES) en France avec 64 millions de tonnes équivalent dioxyde de carbone (MtCO2éq) émises en 2022, soit 16 % des émissions sur le territoire français.

La gendarmerie nationale, dont la politique immobilière doit composer avec des contraintes budgétaires liées à l'insuffisance des crédits pour garantir le maintien en état de son parc domanial, intègre l'objectif d'amélioration de la performance énergétique de ses bâtiments et de réduction des émissions de son parc. La gendarmerie nationale mobilise à ce titre des sources de financement alternatives aux crédits du programme 152 « Gendarmerie nationale ».

Dans la période récente, la gendarmerie s'est notamment appuyée sur les dispositifs de cofinancement pilotés par la direction de l'immobilier de l'État (DIE) et financés par les programmes 362 « Écologie » et 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs ».

En premier lieu, dans le cadre du plan « France Relance », la conférence nationale de l'immobilier public a sélectionné en décembre 2020 plus de 4 000 projets de rénovation énergétique dans le périmètre du parc immobilier de l'État et de ses opérateurs. La gendarmerie a bénéficié de ce financement exceptionnel à hauteur de 135 millions d'euros pour mener à bien 328 opérations de rénovation.

En second lieu, la direction de l'immobilier de l'État a réalisé en 2023 un appel à projets « Résilience II » pour financer des travaux de réduction de la consommation d'énergie. La gendarmerie a présenté 338 projets à cet appel à projets pour bénéficier d'un cofinancement du programme 348.

Si l'apport de financements complémentaires est un levier essentiel qui permet à la gendarmerie nationale de mener à bien des travaux de rénovation malgré les contraintes budgétaires qui pèsent sur sa politique immobilière, les personnes auditionnées par le rapporteur lui ont indiqué que les termes retenus dans les appels à projets relatifs aux travaux de rénovation énergétique ne permettaient pas toujours de rendre éligibles les bâtiments de la gendarmerie nationale.

Le rapporteur recommande à ce titre d'accorder une attention particulière aux spécificités du parc de la gendarmerie nationale, qui sont directement liées à leurs contraintes opérationnelles, pour garantir l'adaptation des critères retenus dans les appels à projets de la direction de l'immobilier de l'État aux bâtiments des forces de sécurité intérieure et plus particulièrement de la gendarmerie.

Recommandation n°3. Adapter les critères de cofinancement des travaux de rénovation énergétique des bâtiments pour garantir leur adéquation aux spécificités du parc de la gendarmerie nationale (DIE).

Parallèlement, le législateur a créé par la loi du 30 mars 202344(*) un instrument de financement innovant permettant d'accélérer la réalisation de travaux de rénovation énergétique dans un contexte de disponibilité contrainte des crédits budgétaires disponibles pour les investissements immobiliers.

En effet, la loi du 30 mars 2023, qui résulte d'une initiative parlementaire déposée à l'Assemblée nationale et soutenue par le Sénat45(*), créé à titre expérimental et pendant une durée de cinq ans une nouvelle catégorie de contrats, les marchés globaux de performance énergétique à paiement différé (MGPE-PD)46(*).

L'objectif de cette nouvelle catégorie de contrat, qui vient s'ajouter aux catégories existantes dont notamment les marchés globaux de performance et les marchés de partenariat, est d'accélérer les investissements publics en matière de rénovation énergétique des bâtiments en permettant aux maîtres d'ouvrage public d'engager des travaux dont le préfinancement est assuré par le titulaire du contrat. Le titulaire du contrat se voit alors confier un marché global qui associe la réalisation des travaux à la maintenance pour répondre à des objectifs chiffrés de performance.

Par surcroît, cette catégorie de contrat a pour caractéristique principale de déroger au principe d'interdiction des paiements différés dans les marchés publics47(*). La possibilité de différer le paiement, qui est étroitement encadrée pour tenir compte du fait que le recours à un tiers financement est coûteux pour le maître d'ouvrage public, a pour conséquence de permettre d'engager des travaux rapidement malgré des ressources budgétaires contraintes, et d'étaler dans le temps le paiement des travaux. Ces derniers sont remboursés par le versement d'un triple loyer qui couvre les coûts d'investissement, les coûts de fonctionnement et les coûts de financement.

Eu égard d'une part à l'importance des travaux de rénovation énergétique à réaliser dans le parc domanial de la gendarmerie nationale et d'autre part aux fortes contraintes budgétaires qui pèsent sur le budget d'investissement immobilier de la gendarmerie, la mobilisation de cet instrument de financement innovant est un levier d'accélération de la rénovation des casernes et, partant, d'amélioration de la qualité de vie au travail des gendarmes et de la qualité de vie de leurs familles.

Recommandation n°4. Mobiliser les marchés globaux de performance énergétique à paiement différé (MGPE-PD) pour accélérer la rénovation énergétique des bâtiments de la gendarmerie nationale (DGGN, DB).

B. LA RÉFORME DU PILOTAGE DES INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS DE LA GENDARMERIE RENFORCERAIT SA CAPACITÉ À MAINTENIR EN ÉTAT SON PARC DOMANIAL

1. Le déficit d'investissement dans la maintenance du parc domanial peut être corrigé en priorisant les investissements à court terme et en sécurisant une trajectoire pluriannuelle d'investissements

Le sous-investissement chronique de la gendarmerie en matière de maintenance et de réhabilitation des immeubles de son parc domanial se traduisent pas un risque de vétusté des logements et des locaux de service des gendarmes qui peut se traduire par une dégradation immédiate de leurs conditions de vie et de travail.

En effet, la « dette grise » de 2 208 millions d'euros accumulée entre 2014 et 2023 sur le parc domanial se traduit nécessairement par la dégradation de certains immeubles domaniaux occupés par la gendarmerie. La gendarmerie nationale a indiqué à ce titre que 1 092 bâtiments du parc domanial comportaient au moins un composant considéré comme vétuste48(*).

Le rapporteur, qui a constaté lors de ses déplacements le niveau de dégradation de certains casernements, aussi bien dans les locaux de service et techniques que dans certains logements particulièrement anciens, souligne que le maintien en état du parc immobilier de la gendarmerie est un enjeu en lien direct avec l'efficacité opérationnelle de la gendarmerie. En effet, dans une période de relance des recrutements de la gendarmerie nationale qui correspond à la création de nouvelles brigades territoriales, il est indispensable d'être en mesure de fournir aux gendarmes un cadre de travail et de vie adapté. L'investissement en matière de maintien en état du parc domanial est à ce titre également un investissement au soutien de l'attractivité de la gendarmerie pour attirer et conserver les personnels nécessaires à son fonctionnement.

Pour apporter une réponse rapide aux situations les plus graves de vétusté de certains immeubles, la gendarmerie a déjà engagé des exercices d'identification des « points noirs immobiliers » (PNI) du parc, c'est-à-dire des bâtiments à traiter en priorité. En particulier, le plan « poignée de porte » réalisé en 2020 à l'initiative du ministre de l'intérieur et à l'échelle de l'ensemble du ministère a permis à la gendarmerie de financer 1 700 opérations courantes pour un montant global de 15 millions d'euros. Si ce plan a permis de réaliser des opérations utiles, le rapporteur relève son caractère ponctuel et l'absence d'outil de suivi en continu et systématique des points noirs immobiliers du parc de la gendarmerie.

Au regard de l'importance de rendre visible pour les gendarmes et leurs familles la prise en compte de leur qualité de vie dans l'élaboration de la politique immobilière de la gendarmerie, le rapporteur estime qu'un plan d'intervention d'urgence sur les « points noirs » du parc domanial pourrait être reconduit chaque année. À cet effet, il recommande d'établir un outil de centralisation des « points noirs immobiliers » constatés dans les casernes par le commandement de proximité.

À partir de cet instrument d'identification, et pour assurer un suivi administratif et politique, sur le temps long, de cette dynamique de réinvestissement pour améliorer le quotidien des gendarmes et de leurs familles, le rapporteur recommande de publier49(*) au début de chaque année une liste de « points noirs » à traiter en cours d'exercice, ce qui permettrait de rendre à la fois visibles et objectifs les efforts faits par la gendarmerie pour répondre aux situations immobilières les plus critiques.

Recommandation n°5. Identifier les investissements prioritaires d'entretien à court terme en publiant chaque année une liste de « points noirs immobiliers » correspondant aux urgences bâtimentaires devant être traités et en garantissant un suivi transparent des actions (DGGN).

Corrélativement au traitement visible et rapide des situations d'urgence bâtimentaire pour améliorer le quotidien des gendarmes et de leurs familles, il est impératif de corriger le déficit structurel d'investissement dans le maintien en état du parc domanial de la gendarmerie. En effet, la vétusté de certains bâtiments qui sont occupés par la gendarmerie est le résultat d'un phénomène de long terme qui est le sous-investissement dans la maintenance du parc domanial. L'accumulation des années de sous-investissement a abouti à une dette grise qu'il est nécessaire de stabiliser puis de résorber. Par ailleurs, le traitement des « points noirs immobiliers » doit être réalisé parallèlement à une dynamique de réinvestissement dans la maintenance des immeubles de la gendarmerie pour répondre aux causes structurelles de la vétusté de certains bâtiments en même temps qu'à ses manifestations les plus visibles.

Le rapporteur relève à ce titre que le sous-investissement dans la maintenance immobilière n'est pas récent et que l'écart significatif et répété entre les besoins d'investissement du parc domanial et les investissements effectivement réalisés témoigne de la difficulté structurelle à maintenir en état les immeubles de la gendarmerie au regard des contraintes budgétaires existantes. Il est regrettable à cet égard que les crédits budgétaires de maintenance immobilière soit utilisés comme une « variable d'ajustement » pour dégager des marges de manoeuvre en cas de dépenses imprévues. L'annulation fréquente des crédits mis en réserve pour la maintenance immobilière illustre ce risque qui explique une partie du sous-investissement de la gendarmerie dans le maintien en état de ses bâtiments. En 2023, alors que les besoins de financement pour maintenir le parc domanial était estimé à 77 euros par m2, la gendarmerie n'a dépensé que 23 euros par m2 ce qui contribue à la poursuite d'une trajectoire de dégradation de la « dette grise » de son parc immobilier.

Il est à relever que les investissements dans la maintenance des bâtiments ont pour particularité, à la différence de l'inauguration d'un nouvel immeuble ou de l'achat de matériels, de ne pas être immédiatement visibles des usagers. Cette « invisibilité » à court terme des investissements de maintenance immobilière explique le déficit d'investissement qui se traduit à long terme par des surcoûts pour l'État et la gendarmerie, laquelle se voit contrainte d'abandonner des casernes domaniales dont l'état de criticité ne permet pas la réhabilitation.

Dépenses de maintenance du parc domanial de la gendarmerie en 2023

(en euros par m2)

Source : commission des finances, d'après les données de la gendarmerie nationale

Pour corriger le sous-investissement chronique de la gendarmerie en matière de maintenance de son parc immobilier, et engager une dynamique de réinvestissement sur le long terme pour stabiliser puis réduire la dette grise du parc domanial, la programmation et la gestion des dépenses de maintenance immobilière de la gendarmerie devrait évoluer.

En particulier, il est nécessaire de rendre visible la dette grise du parc domanial, d'en assurer le suivi, et de faire apparaître chaque année les conséquences du sous-investissement dans la maintenance de ce parc. L'objectif de ce suivi est de limiter le recours aux crédits de maintenance immobilière comme variable d'ajustement budgétaire. Pour renforcer la visibilité des investissements de maintenance immobilière, la publication annuelle, dans le cadre de la documentation budgétaire50(*), d'une trajectoire triennale des dépenses de maintenance immobilière aurait pour conséquence de permettre un contrôle plus transparent de l'effort en matière de maintien en état des bâtiments de la gendarmerie, et notamment d'un contrôle annuel de l'exécution de cette trajectoire à l'occasion de l'examen du projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année. Dans ces conditions, tout écart à la trajectoire programmée devrait faire l'objet d'une justification, ce qui aurait un effet désincitatif sur le sous-investissement en matière de maintenance immobilière.

Recommandation n°6. Sécuriser une trajectoire triennale d'investissements immobiliers en maintenance et réhabilitation du parc domanial, en l'intégrant chaque année à la documentation budgétaire relative au programme 152 « Gendarmerie nationale » (DGGN, DB).

2. L'expérimentation d'une foncière du ministère de l'intérieur enrichirait les travaux actuels sur la réforme de la politique immobilière de l'État

Le rapporteur relève que certains des problèmes soulevés par la gestion du parc immobilier de la gendarmerie nationale, et en particulier le déficit d'investissement en matière de maintenance des bâtiments, ne sont pas propres à la gendarmerie nationale ni au ministère de l'intérieur et résultent du modèle de financement de la politique immobilière de l'État.

En effet, le sous-investissement chronique en matière de maintenance bâtimentaire est le résultat d'une prise en compte insuffisante des intérêts de l'État-propriétaire dans le processus de programmation et d'exécution budgétaire de chaque ministère et de chaque service. Les réformes de gouvernance de la politique immobilière de l'État intervenue en 2006 avec la création du service « France Domaine » puis en 2016 avec la création de la direction de l'immobilier de l'État avaient pour objectif de mieux garantir la défense des intérêts de l'État-propriétaire. Ces réformes successives n'ont toutefois pas modifié le schéma de financement qui repose sur la prise en charge directe des travaux de maintenance et de réhabilitation par chaque ministère pour son parc domanial.

Partant, le sous-investissement en matière de maintenance n'a pas été résorbée et le comité interministériel de la transformation publique continuait de constater en 2018 que « le parc immobilier souffre d'un manque chronique d'entretien, au détriment de la qualité de l'environnement de travail des agents ». Ce constat peut également être fait dans le champ de l'immobilier de la gendarmerie, avec la particularité que pour les gendarmes concernés et leurs familles, ce sont non seulement les conditions de travail mais également les conditions de vie qui sont dégradées par le mauvais état de santé du parc domanial.

Le rapporteur relève à ce titre que le modèle français d'occupation gratuite du parc immobilier public de l'État par ses services et ses opérateurs n'est pas un modèle majoritaire en Europe. Dans la plupart des pays européens, et notamment en Allemagne, en Grèce ou en Suède, la fonction de maintenance du parc immobilier est confiée à un ou plusieurs organismes indépendants qui peuvent être publics ou privés, avec dans certains cas un transfert de la propriété des immeubles à l'organisme concerné. L'objectif de ces modèles alternatifs est de garantir la préservation des intérêts de l'État-propriétaire en assurant le financement des travaux de maintenance et de réhabilitation par les recettes versées par les administrations occupant les bâtiments concernés.

Au regard de l'objectif impérieux de rehausser le niveau d'investissement dans la maintenance du parc domanial du ministère de l'intérieur, qui implique de mieux tenir compte des intérêts de l'État-propriétaire pour les bâtiments concernés, le ministère de l'intérieur a soutenu l'hypothèse d'une expérimentation d'un modèle de « foncière ministérielle » en vue d'une réforme du modèle de gestion de sa politique immobilière.

En particulier, le Livre blanc de la sécurité intérieure de novembre 2020 évoque la possibilité d'expertiser « l'hypothèse de création d'une société foncière »51(*). Le rapporteur relève que cette orientation a été confirmée par le vote de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) du 24 janvier 202352(*) dont le rapport annexé mentionne une réforme d'ampleur correspondant à « la création d'une structure dédiée à la gestion et à l'entretien » du patrimoine immobilier du ministère.

Le rapporteur relève que cette orientation est cohérente avec l'un des trois scénarios évoqués par la Cour des comptes dans un rapport publié en 2023 sur la politique immobilière de l'État qui envisage de « confier le pilotage de la gestion du propriétaire à une structure extérieure aux occupants » (scénario 2). Dans cette hypothèse, les crédits pourraient continuer à être inscrits dans chaque programme budgétaire, par exemple dans le programme 152 « Gendarmerie nationale » dans le cas de la gendarmerie, et abonder le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » en plaçant les dépenses correspondantes sous la responsabilité de la nouvelle structure publique de pilotage de la gestion du propriétaire. Cette structure ne serait pas unique à l'échelle de l'État mais pourrait être spécialisée par région, par type de bâtiment ou par ministère conformément à l'hypothèse de mise en place d'un « gestionnaire immobilier indépendant » sur le périmètre du ministère de l'intérieur.

En dépit des orientations inscrites dans la LOPMI, il a été indiqué au rapporteur que la direction de l'immobilier de l'État menait depuis 2023 un travail de préfiguration en vue de mettre en place une expérimentation relative à la création d'une foncière interministérielle, dans le seul périmètre des fonctions tertiaires des directions départementales interministérielles et en excluant les forces de sécurité intérieure.

Si cette expérimentation apporterait un retour d'expérience précieux sur la faisabilité technique et l'efficacité du modèle de foncière interministérielle, elle ne permettrait pas de comparer les résultats de ce modèle avec celui promu pour le ministère de l'intérieur par la LOPMI correspondant à la création d'un « gestionnaire immobilier indépendant » à l'échelle du ministère de l'intérieur.

À ce titre, le rapporteur estime que la mise en place d'une expérimentation, sur un territoire et pour une période limités, du modèle de « gestionnaire immobilier indépendant » à l'échelle du ministère de l'intérieur, en incluant les forces de sécurité intérieure et donc l'immobilier de la gendarmerie nationale, apporterait un éclairage complémentaire à l'expérimentation actuellement envisagée. Le rapporteur relève par ailleurs que la conduite d'une évaluation approfondie de cette expérimentation serait nécessaire pour compléter les enseignements tirés de l'expérimentation relative à la foncière interministérielle et établir un diagnostic complet sur les différentes voies de réforme possibles de la gestion de la politique immobilière de l'État, du ministère de l'intérieur et de la gendarmerie nationale.

Recommandation n°7. Expérimenter la création d'un « gestionnaire immobilier indépendant » sur le périmètre du ministère de l'intérieur et en assurer une évaluation approfondie (Secrétariat général du ministère de l'intérieur et des Outre-mer, DIE).

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 10 juillet 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de M. Bruno Belin, rapporteur spécial, sur l'immobilier de la gendarmerie nationale.

M. Claude Raynal, président. - Nous en venons à une communication de notre collègue Bruno Belin, rapporteur spécial de la mission « Sécurités », sur l'immobilier de la gendarmerie nationale.

M. Bruno Belin, rapporteur spécial. - Le sujet que nous abordons nous parlera sans aucun doute à tous puisque, sur tous nos territoires, se posent des sujets liés aux casernes de gendarmerie et aux militaires qui y exercent.

Je débuterai ma présentation par une question simple : comment espérer attirer de futurs gendarmes sans pouvoir proposer à ces candidats des conditions de vie et de travail décentes ? À Dijon, l'hiver dernier, des centaines de gendarmes ont été affectés par des coupures de chauffage, voire d'eau chaude dans leur logement ; l'entreprise de maintenance a dû intervenir cinquante fois pour les rétablir tant bien que mal. Proposer des conditions de vie correctes constitue tout de même le minimum à fournir à nos gendarmes et à leurs familles, elles aussi soumises à rude épreuve du fait du logement en caserne.

Je ne m'étends pas sur la vétusté avérée de certains bâtiments. Vous connaissez tous, dans chacun de vos départements, des casernes plus ou moins bien entretenues. Vous avez l'habitude d'échanger avec les brigades de gendarmerie de vos territoires. Par conséquent, vous avez conscience de l'investissement exemplaire des gendarmes et vous savez qu'il n'est pas dans leur habitude de se plaindre de leurs conditions, même si nous avons des progrès très importants à faire sur l'immobilier de la gendarmerie à l'échelle nationale.

Dans le cadre de ce contrôle budgétaire, j'ai découvert de nombreuses emprises de la gendarmerie et visité une dizaine de casernes réparties dans quatre départements. Je tiens à souligner que le constat de la situation dégradée du parc immobilier de la gendarmerie est partagé par l'ensemble des parties prenantes. En particulier, le haut commandement de la gendarmerie est pleinement investi sur ce sujet. Pour reprendre l'expression du général Christian Rodriguez, directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), nous avons une « responsabilité collective » dans la situation actuelle de dégradation de l'immobilier de la gendarmerie. J'ajoute pour ma part que nous avons également la responsabilité collective de trouver les voies et moyens pour redresser cette situation.

En préambule, avant de détailler les problèmes financiers de la politique immobilière de la gendarmerie, j'aimerais attirer votre attention sur la spécificité de ce parc. À la différence de l'immense majorité des agents publics, les militaires de la gendarmerie nationale sont soumis à une obligation de logement en caserne, le cas échéant avec leurs familles. L'attribution d'un logement à chaque officier et sous-officier est à la fois un droit et une sujétion rattachée au statut de militaire d'active. Par conséquent, les problèmes soulevés par la dégradation des bâtiments occupés par la gendarmerie dépassent le cadre habituel des conditions de travail de nos agents publics.

Une gendarmerie vétuste pose au moins trois séries de problèmes qui peuvent nuire à la qualité du service rendu : premièrement, les gendarmes voient leurs conditions de travail dégradées lorsqu'ils sont contraints de réaliser leurs tâches quotidiennes dans des bâtiments qui n'y sont plus adaptés ; deuxièmement, le public reçu dans la gendarmerie est affecté lorsque la disposition du bâtiment ne se prête pas à un accueil approprié, en particulier pour les victimes potentielles ; troisièmement, les conditions de vie des gendarmes et de leurs familles dépendent du bon entretien des casernes.

Il faut souligner à ce titre que cette obligation de logement en caserne revêt une importance déterminante pour la gendarmerie et son efficacité opérationnelle. Sur le terrain, les équipes nous ont montré comment on pouvait mobiliser une cinquantaine de personnes en dix minutes, car elles étaient déjà présentes sur place. En effet, la gendarmerie doit assurer le maintien de l'ordre dans une zone très vaste qui recouvre 95 % de notre territoire et 50 % de ses habitants. L'obligation de logement en caserne ne peut par conséquent être détachée de l'obligation particulière de disponibilité, à laquelle les gendarmes sont soumis en qualité de militaire.

À partir d'un réseau dense de 3 700 casernes réparties sur l'ensemble du territoire, en particulier dans les zones rurales et périurbaines, la disponibilité des gendarmes et leur obligation de logement en caserne constituent la clé de voûte de la permanence de la posture opérationnelle de la gendarmerie nationale.

Pour ces différentes raisons, la question immobilière ne saurait être reléguée à une « fonction support » de la gendarmerie nationale, étant une composante indispensable à son efficacité opérationnelle et, par conséquent, une fonction stratégique.

Une fois exposé ce préambule, j'aimerais vous présenter succinctement les deux constats structurants de mon contrôle budgétaire. Le premier, qui fait malheureusement l'objet d'un consensus depuis longtemps sans avoir été corrigé, est le sous-investissement massif et chronique dans le maintien en état du parc domanial de la gendarmerie nationale, lequel, possédé par l'État, regroupe 649 casernes et une surface totale de 5,2 millions de mètres carrés. Ce patrimoine historique comporte des bâtiments très anciens, comme les immeubles du quartier Delpal, sur le plateau de Satory, construits en 1933, ou encore de nombreuses casernes construites dans les années 1970.

En tant que propriétaire, la gendarmerie ne paie pas de loyers pour occuper ces bâtiments. En revanche, elle doit prendre à sa charge non seulement l'entretien courant, mais également les dépenses à la charge du propriétaire, en particulier les travaux lourds de maintenance et de réhabilitation des immeubles vieillissants. Or les dotations budgétaires de la gendarmerie ne lui permettent pas de le faire, ce qui entraîne une dégradation de ce patrimoine immobilier. Par exemple, pour l'exercice 2023, les besoins d'investissement ont été estimés à 400 millions d'euros, pour seulement 118 millions d'euros dépensés pour la maintenance et la réhabilitation du parc - près de quatre fois moins que ce qu'il aurait fallu !

La conséquence directe de ce sous-investissement est une dégradation lente des bâtiments, qui aboutit aux situations de vétusté que j'évoquais au début de mon propos. J'ajoute que cette situation n'est pas nouvelle et résulte de plusieurs décennies de sous-investissement.

Pour mesurer ce retard, j'ai demandé à la gendarmerie des données recouvrant la dernière décennie pour comparer l'écart annuel entre les besoins d'investissements et les investissements réalisés. Il en ressort que depuis 2014, les dix derniers exercices budgétaires ont donné lieu à un sous-investissement systématique dans la maintenance et la réhabilitation du parc domanial. Sur cette décennie, la gendarmerie a constitué une « dette grise » cumulée de 2,2 milliards d'euros, qui correspond au retard significatif pris par rapport aux investissements identifiés pour maintenir en état le patrimoine immobilier de la gendarmerie, qui appartient en définitive à la collectivité.

Le deuxième constat structurant de mon contrôle concerne le coût croissant des loyers dans les dépenses immobilières de la gendarmerie nationale. En effet, pour compléter son parc domanial, la gendarmerie occupe 3 000 casernes locatives, souvent des emprises plus petites, réparties sur l'ensemble du territoire. Elles appartiennent en général à des collectivités territoriales ou à des organismes d'habitations à loyers modéré et sont plus récentes et mieux entretenues que celles du parc domanial. La gendarmerie nationale négocie avec le bailleur un loyer annuel dont le montant ne peut être révisé pendant les neuf premières années d'occupation. Ce schéma de financement présente plusieurs avantages, ce qui explique que l'extension du parc immobilier de la gendarmerie résulte principalement de la construction de nouvelles casernes locatives.

En premier lieu, ce montage permet à la gendarmerie d'étendre son parc immobilier sans investissement immédiat en capital, ce que ses marges de manoeuvre financières actuelles ne lui permettraient pas. En effet, la charge du financement de la construction des bâtiments repose, le cas échéant en recourant à l'emprunt, sur la collectivité ou sur l'organisme HLM concerné, qui dispose en tout état de cause d'une source fiable de revenus pour rembourser son emprunt par les loyers versés par la gendarmerie.

En second lieu, le décret du 28 janvier 1993 permet aux collectivités territoriales qui construisent des casernes de bénéficier d'une subvention à l'investissement, qui réduit leur dépense sans diminuer la valeur du patrimoine qu'elles constituent.

Néanmoins, au regard de la dégradation du parc domanial que j'ai évoquée, le poids grandissant du parc locatif dans le parc total de la gendarmerie se traduit par une charge croissante des loyers versés aux bailleurs. En 2023, la gendarmerie a ainsi consacré 590 millions d'euros au versement de ses loyers, c'est-à-dire 64 % de l'ensemble de ses dépenses immobilières. Sans un mouvement de stabilisation, voire de rééquilibrage en faveur du parc domanial, il existe un risque réel que la dynamique des loyers à verser aux bailleurs n'efface toute marge de manoeuvre budgétaire.

Partant de ces constats structurants, je formule sept recommandations dont l'objectif est d'engager une dynamique de redressement de la situation bâtimentaire de la gendarmerie. J'insiste, pour conclure, sur trois d'entre elles.

Premièrement, j'invite la gendarmerie à mobiliser des modes de financement innovants, en particulier le marché de partenariat. Comme vous le savez, le principe du marché de partenariat, ou partenariat public-privé (PPP), est de confier à un opérateur privé une mission globale de conception, de construction et de maintenance d'un immeuble en amortissant cet investissement par le versement de loyers sur une longue période, d'une trentaine d'années environ. Dans le cas de la gendarmerie, au regard de l'impasse de financement dans laquelle se trouve actuellement le ministère pour réaliser des investissements structurants dans le parc domanial, il apparaît comme l'instrument de financement adéquat.

En effet, en faisant porter le coût du financement par l'opérateur, le marché de partenariat permet à la gendarmerie d'étendre son parc domanial malgré son absence de marge de manoeuvre financière. Au regard des enjeux opérationnels de la gendarmerie, les opérations immobilières - dont nos déplacements ont confirmé l'importance - sur le plateau de Satory et à Dijon me semblent être deux projets prioritaires pour lesquels le recours au marché de partenariat doit être rapidement confirmé.

Deuxièmement, j'invite le ministère des finances et plus particulièrement la direction du budget à faire avancer les travaux de révision des coûts-plafonds commencés en 2019. En effet, mes interlocuteurs au sein des collectivités territoriales comme de la gendarmerie nationale m'ont confirmé que la formule actuelle de fixation des loyers versés par la gendarmerie nationale n'était plus adaptée aux coûts réels supportés par les collectivités.

Or la gendarmerie se trouve dans une phase d'extension de son parc locatif pour répondre à l'installation des 200 nouvelles brigades prévues par la loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi). Pour éviter les risques de blocage de certains projets de construction de caserne du fait de conditions financières déséquilibrées, les travaux de révision des coûts-plafonds doivent être rapidement conclus.

Enfin, troisièmement, j'invite le ministère à réitérer annuellement l'exercice d'identification des situations immobilières d'urgence à traiter en priorité, alors que certaines sont reportées depuis les années 1980... En 2020, le plan « poignées de porte » avait permis 1 700 opérations de travaux courants. Toutefois l'amélioration du quotidien de nos gendarmes est un travail de longue haleine et il est souhaitable que cette démarche soit systématisée pour assurer un suivi transparent de ces investissements.

Le redressement de la situation bâtimentaire de la gendarmerie est une responsabilité collective et il nous appartient d'engager une dynamique de réinvestissement.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. -Là où la situation bâtimentaire est dégradée, on observe un fort turnover des gendarmes, qui font parfois tout pour se sauver au plus vite... Dans certains territoires éloignés des villes, les gendarmeries sont souvent plus petites, avec un fort besoin d'investissement. Or, pour rénover, il y a besoin de recourir au locatif, mais les organismes HLM n'ont pas toujours de réponse. Nous sommes donc dans une impasse.

Nous sommes à la croisée des chemins entre une compétence complètement régalienne - et la gendarmerie a intelligemment réorganisé sa présence territoriale et ses moyens - et une compétence partagée. J'entends ce que vous dites sur les marchés de partenariats. Sur la question des loyers, le délai de neuf ans sans renégociation peut être bloquant et c'est une question qu'il faudra retravailler. L'État dispose d'institutions financières comme la Caisse des dépôts et consignations (CDC) avec lesquelles nous pourrions par ailleurs échanger.

Puisque nous parlons d'un bras armé, il serait logique que la CDC, la banque des territoires, soit aux côtés de la gendarmerie et des collectivités pour trouver des solutions. Il est anormal de faire appel à des intercommunalités, qui sont hors de leur champ de compétences, alors qu'elles croulent sous les responsabilités. Nous parlons d'une fonction régalienne ! À l'inverse, lorsque les casernes sont récentes, les gendarmes restent davantage, même dans des territoires a priori peu attractifs. C'est gagnant-gagnant.

Il fut un temps où le PPP s'est fait aux dépens des collectivités. Les investisseurs prennent leurs marges de sécurité.

M. Marc Laménie. - Merci à Bruno Belin pour son travail d'investigation. Dans bien des départements - notamment celui des Ardennes, dont je suis issu -, la gendarmerie est la première force de sécurité. Majoritairement, les casernes sont locatives, souvent la propriété des conseils départementaux. Pour de petits travaux de maintenance, comme en plomberie, cela entraîne une forte complexité et des délais de plusieurs mois.

Comment sont organisées les créations de nouvelles gendarmeries ? Interrogé par le préfet, j'appelais plutôt à compléter les effectifs des brigades existantes dans les territoires ruraux, où il manque trois gendarmes en moyenne. Construire de nouvelles casernes aggravera la situation et augmentera encore le patrimoine immobilier, souvent en mauvais état.

Je prends enfin l'exemple de la centrale nucléaire de Chooz - le département de Bruno Belin, la Vienne, en a une aussi -, laquelle a besoin d'un peloton spécialisé de protection de la gendarmerie (PSPG). La commune d'accueil de la centrale, de 1 000 habitants, en a financé la totalité, pour une construction dans un temps record, de qualité exceptionnelle...

Mme Sylvie Vermeillet. - Quant au sous-investissement chronique, le constat est-il le même partout ? Dans mon département du Jura, mais aussi dans le Doubs, les communautés de communes, comme l'a rappelé le rapporteur général, ont pris à bras-le-corps le problème du sous-investissement. C'était pire il y a quinze ans. C'est grâce à elles que nous avons beaucoup de casernes neuves. Le pas a été franchi. Y a-t-il plus d'urgence dans certains territoires ?

M. Stéphane Sautarel. - Je souscris moi aussi aux recommandations de notre collègue, notamment sur le recours aux financements innovants. Le casernement maintient une population sur le territoire. C'est parfois le dernier service public à le faire, d'où une exigence d'investissement et de qualité de l'accueil - ce n'est pas toujours le cas dans le plan des 200 nouvelles brigades. Le Cantal, mon département, doit recevoir une brigade fixe et une brigade mobile. Or l'implantation de la première dépend de l'apport de foncier par la commune d'implantation et de l'engagement de l'opérateur HLM sur le montage foncier. Travailler sur le blocage des loyers est indispensable.

Enfin, seulement 18 millions d'euros ont été consacrés à l'acquisition et la construction de nouvelles gendarmeries à l'échelle nationale : le confirmez-vous ? Ce montant démontre la situation de carence absolue dans laquelle nous sommes.

M. Grégory Blanc. - Je remercie à mon tour le rapporteur spécial et souscris à ses recommandations. Ce qui met nos territoires en tension est la demande aux collectivités locales d'assumer de plus en plus des compétences liées aux fonctions régaliennes de l'État, dans un moment d'illisibilité. Le Beauvau de la sécurité n'a pas été à son terme, et l'État demande aussi aux communes d'assurer davantage de missions de police municipale. Les communes doivent payer l'immobilier de l'État et assurer davantage la tranquillité publique, voire exercer des missions de police judiciaire !

Il y a donc besoin de clarification sur la question fondamentale de l'ordre public et républicain. Il faut évoquer l'immobilier dans cet indispensable grand débat, car l'incompréhension contribue à la situation actuelle.

Je rejoins Sylvie Vermeillet : dans mon département de Maine-et-Loire, il y a quinze ans, le grand plan de la société publique locale d'aménagement, dont la CDC est actionnaire, a bien fonctionné et couvert tout le territoire. Depuis la fin du plan, ce sont les communes qui portent les projets, avec des plans d'investissement non couverts par les loyers. Dans mon canton, il y a un projet d'implantation d'une prison en zone gendarmerie. La commune devra assumer les coûts, conséquents, d'implantation de la gendarmerie correspondante, sans réponse de l'État. Or il y va de l'acceptabilité par la population de la prison elle-même ! Certains, toujours les mêmes, devront payer pour l'ensemble des autres.

M. Michel Canévet. - Je partage les recommandations de Bruno Belin, qui s'illustrent aussi dans le Finistère. Sur le PPP, je rappelle le cas de l'ensemble Fontenoy-Ségur, l'État récupérant trente ans après la propriété du bâti. Votre recommandation n° 1 va-t-elle en ce sens ?

Sur la recommandation n° 7, privilégiez-vous une spécialisation pour la gendarmerie ou une mutualisation des moyens consacrés aux bâtiments de l'État ?

L'obligation d'habiter en caserne soumet certains militaires à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS). Ne peut-on envisager une dispense ?

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. - J'ai moi aussi un doute sur le recours aux marchés de partenariat pour financer des services au coeur du régalien. Cela a pu être fait par le passé, y compris pour financer des prisons, mais j'ai une réserve de principe, sachant que cela coûte parfois plus cher in fine.

Sur la recommandation n° 2, relative à la révision des coûts-plafonds, j'ai consulté le décret de 2016 : les montants initiaux font l'objet de mécanismes de revalorisation annuelle. Cette indexation est-elle insatisfaisante ?

Mme Christine Lavarde. - J'ai écouté cette communication avec beaucoup d'intérêt, étant membre du Conseil de l'immobilier de l'État.

Depuis la séparation des zones police et gendarmerie, la gendarmerie n'utilise plus certains bâtiments - c'est le cas d'un édifice désaffecté dans ma ville. Quelle est la politique menée pour ce type de bâtiments ?

S'agissant des locaux qui sont propriété de la gendarmerie, comment est perçue la création de la foncière d'État ?

Les crédits d'investissement du ministère font-ils partie des crédits gelés, c'est-à-dire des crédits qui sont bien visibles dans Chorus, mais ne peuvent être consommés ? Si oui, quel niveau représentent-ils pour 2024 ?

M. Bernard Delcros. - Votre rapport fait écho à ce que nous vivons dans les territoires. J'ai visité des gendarmeries quasi insalubres, certains gendarmes devant parfois être logés à l'extérieur, ce qui pose la question de l'offre locative locale...

Pour redresser la situation, avez-vous évalué le montant annuel nécessaire, qu'il soit sous forme de PPP - je relève les réserves de mes collègues -, de loyer ou de remboursement d'emprunt ?

M. Raphaël Daubet. - Je m'interroge sur la conduite des projets, complexes, contraignants. L'inertie administrative aggrave le sous-investissement chronique. À Souillac, un projet de construction de gendarmerie est envisagé depuis dix ans, dont la première pierre n'a pas été posée... N'y a-t-il pas un enjeu d'assistance à la maîtrise d'ouvrage ou d'opérationnalité ?

Mme Isabelle Briquet. - Votre rapport reflète notre vécu dans l'ensemble des territoires. Sur la recommandation n° 2, les échanges avec la DGGN et la direction du budget révèlent-ils une nécessité de réviser les coûts-plafonds ? Sur le terrain, cela remet en effet de nombreux projets en cause, entre les exigences de la gendarmerie et les capacités des organismes HLM et des collectivités. Le surcoût par rapport aux projets classiques doit se traduire dans les loyers. Or beaucoup d'organismes ne donnent pas suite.

M. Bruno Belin, rapporteur spécial. - Je vous appelle à visiter vos gendarmeries sur le terrain, accompagnés de la presse quotidienne générale : leur état est souvent lamentable, parfois scandaleux. Nous avons observé un peloton motorisé abrité dans un bâtiment exigu au bord d'une autoroute sans sanitaires différents pour chaque sexe, dans lesquels tout le monde était reçu dans la même pièce, y compris pendant le covid. Une deuxième ou troisième personne en garde à vue ne dispose pas d'un lieu de sûreté adapté, en 2024, dans la sixième puissance mondiale !

Nous avons vu des gendarmerie sans aucun gendarme ! Ainsi, une ville de 1 000 habitants est sans couverture. Les conjoints de gendarmes commencent à faire passer des messages, relevant par exemple l'absence d'eau chaude. Les gendarmes sont souvent logés ailleurs, louant à leurs frais une maison à dix minutes du village...

Tirons une cartouche politique : à Dijon, un règlement intérieur non écrit prévoit que les gendarmes ne lèvent pas les volets avant 7 heures du matin et ne les abaissent pas après 22 heures. Ils doivent limiter l'usage des interrupteurs et des toilettes dans certains créneaux horaires - en 2024, à Dijon, en France. Le gendarme lui-même, par discipline, ne dit rien.

À Satory, avec l'élite de la gendarmerie, les centaures et le groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), nous n'avons pas les moyens de nos ambitions. Si l'on veut des gens compétents, disponibles, qui vivent bien avec leur famille, il faut répondre aux questions d'immobilier. Le guide Michelin des gendarmeries est déplorable... Cela joue sur les mutations. Pour votre information, nous avons intégré dans le rapport d'information une carte régionale sur l'état bâtimentaire des casernes.

Je confirme le montant de 400 millions d'euros identifiés comme les investissements annuels nécessaires pour assurer le maintien en état du parc domanial, mais c'est surtout l'état de la gendarmerie qui pose question. Pour le gel, Christine Lavarde, je confirme que le budget immobilier de la gendarmerie entre bien dans le périmètre des crédits qui sont gelés en début d'année par le responsable de programme. Cependant, je ressens une forte bonne volonté de la gendarmerie pour apporter des réponses.

J'ai moi aussi, comme président de département, expérimenté des PPP. Dans le périmètre de la gendarmerie, le siège de la DGGN à Issy-les-Moulineaux est une belle réussite de PPP.

Les immeubles vides sont gérés par les services du domaine, c'est-à-dire la direction de l'immobilier de l'État, qui s'efforce de les valoriser.

Sur les nouvelles gendarmeries, il n'y a pas d'argent pour construire de nouvelles casernes domaniales ! Nous avons auditionné le maire de Dompierre-sur-Mer, près de la Rochelle, où une brigade est annoncée : c'est à lui de trouver le capital pour investir, de demander au département... On bascule la responsabilité sur les collectivités. Les élus, de bonne volonté et réactifs, se révèlent agiles. Cependant, les offices HLM, très ponctionnés voilà quatre ou cinq ans, sont désormais plus réservés et attendent un accord des conseils départementaux, dont il est inutile de rappeler l'état...

Du fait du zéro artificialisation nette (ZAN) et des plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi), les élus se tournent vers l'existant. Sur les 90 projets de la première vague prévus pour 2027, on pourra compter ceux qui sont achevés sur les doigts de la main...

La foncière de l'État est une bonne idée. Tant que les gendarmes seront de bonne volonté et dans la discipline militaire, cela se passera bien. Mais l'exemple de Dijon, où les familles ne peuvent aller aux toilettes après 22 heures, ne sera pas tenable longtemps...

Nous avons donc une responsabilité collective face à ce sous-investissement. Pour accompagner cette force indispensable, il faut lui apporter une publicité, des crédits et des moyens !

Mme Isabelle Briquet. - Sur la recommandation n° 1, je reste réservée quant au recours aux partenariats public-privé.

La commission a adopté les recommandations du rapporteur spécial et autorisé la publication de sa communication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de l'intérieur et des outre-mer - Direction de l'évaluation de la performance, de l'achat, des finances et de l'immobilier (DEPAFI)

- M. Pierre CHAVY, directeur.

Ministère de l'économie, des finances et de la relance - Direction de l'immobilier de l'État

- M. Alain RESPLANDY-BERNARD, directeur ;

- Commandant Sébastien CERISIER, officier de liaison gendarmerie.

Association des maires de France (AMF)

- M. Guillaume KRABAL, maire de Dompierre-sur-mer.

LISTE DES DÉPLACEMENTS

Déplacement à la Direction générale de la gendarmerie nationale (Issy-les-Moulineaux) le 7 mai 2024

- Général Christian RODRIGUEZ, directeur ;

- M. François DESMADRYL, chef de la direction des soutiens et des finances ;

- Général Christian BORIE, sous-directeur.

Déplacement dans la Vienne le 14 mai 2024

- Colonel Philippe-Alexandre ASSOU, commandant du groupement de gendarmerie de la Vienne.

Déplacement à Dijon le 27 mai 2024

- Général de division Sylvain LANIEL, commandant de la région de gendarmerie Bourgogne-Franche-Comté et du groupement de gendarmerie départemental de la Côte-d'Or ;

- Général Hubert CHARVET, commandant de l'école de gendarmerie de Dijon.

Déplacement sur le plateau de Satory (Versailles) le 28 mai 2024

- Général de brigade Olivier DUBOIS, chef de la mission des marchés de partenariat de la gendarmerie nationale.

TABLEAU DE MISE EN oeUVRE ET DE SUIVI (TEMIS)

N° de la proposition

Proposition

Acteurs concernés

Calendrier prévisionnel

Support

1

Confirmer le recours au marché de partenariat pour financer une nouvelle génération de projets immobiliers structurants de la gendarmerie nationale dont en priorité les opérations immobilières sur le plateau de Satory et à Dijon

Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), Direction de l'immobilier de l'État (DIE), Direction du budget (DB)

Second semestre 2024

Tous moyens

2

Réviser le montant des coûts-plafonds pour la fixation des loyers versés par la gendarmerie aux collectivités territoriales et aux organismes d'habitations à loyer modéré pour garantir la viabilité des projets d'extension du parc locatif de la gendarmerie

DGGN, DB

Premier semestre 2025

Décret et circulaire

3

Adapter les critères de cofinancement des travaux de rénovation énergétique des bâtiments pour garantir leur adéquation aux spécificités du parc de la gendarmerie nationale

DIE

Second semestre 2024

Cahiers des charges des appels à projets

4

Mobiliser les marchés globaux de performance énergétique à paiement différé (MGPE-PD) pour accélérer la rénovation énergétique des bâtiments de la gendarmerie nationale

DGGN, DB

Premier semestre 2025

Marchés publics passés par la DGGN

5

Identifier les investissements prioritaires d'entretien à court terme en publiant chaque année une liste de « points noirs immobiliers » correspondant aux urgences bâtimentaires devant être traités et en garantissant un suivi transparent des actions

DGGN

Premier semestre 2025

Publication annuelle sur le site du ministère de l'intérieur en début et en fin d'exercice budgétaire

6

Sécuriser une trajectoire triennale d'investissements immobiliers en maintenance et réhabilitation du parc domanial, en l'intégrant chaque année à la documentation budgétaire relative au programme 152 « Gendarmerie nationale »

DGGN, DB

Second semestre 2024

Projet annuel de performances (PAP) et rapport annuel de performances (RAP) du programme 152 « Gendarmerie nationale »

7

Expérimenter la création d'un « gestionnaire immobilier indépendant » sur le périmètre du ministère de l'intérieur et en assurer une évaluation approfondie

Secrétariat général du ministère de l'intérieur et des Outre-mer, DIE

Second semestre 2025

Tous moyens


* 1 Art. L. 4145-2 du code de la défense.

* 2 Art. L. 4145-1 du code de la défense.

* 3 L'hébergement se distingue du logement car il consiste à attribuer à un militaire d'un local d'hébergement rattaché aux locaux de service et techniques qui ne procure pas la jouissance privative et personnelle et ne bénéficie pas à la famille du militaire qui est hébergé en célibataire.

* 4 Art. L. 4145-2 du code de la défense.

* 5 Art. 3 du décret n° 2008-946 du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des officiers de la gendarmerie et art. 2 du décret n° 2008-952 du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de la gendarmerie.

* 6 Art. L. 4145-2 du code de la défense.

* 7 Art. R. 2124-65 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 8 Art. D. 2124-75 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 9 Le code du domaine de l'État reste en vigueur dans les collectivités d'outre-mer (COM), à Mayotte, aux Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) et en Nouvelle-Calédonie, sous réserve des compétences en matière domaniale de ces collectivités.

* 10 Art. R. 94 du code du domaine de l'État.

* 11 Instruction n° 35000 du 13 décembre 2018 relative à la concession d'un logement par nécessité absolue de service des militaires de la gendarmerie.

* 12 Haut Comité d'évaluation de la condition militaire (HCECM), décembre 2023, Revue annuelle de la condition militaire (17e rapport).

* 13 C'est-à-dire à la fois les casernes domaniales appartenant à la gendarmerie et celles louées à un bailleur.

* 14 Ministère de l'intérieur, novembre 2020, Livre blanc de la sécurité intérieure.

* 15 Loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, rapport annexé.

* 16 Sénat, commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, 29 octobre 2008, n° 66 (2008-2009), rapport sur le projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale, au rapport de M. Jean Faure.

* 17 Art. L. 4121-5 du code de la défense.

* 18 Réponse de la direction générale de la gendarmerie nationale au questionnaire du rapporteur.

* 19 Réponse de la sous-direction de l'immobilier et du logement (SDIL) au questionnaire du rapporteur.

* 20 Ce montant correspond aux loyers de droit commun et ne tient pas compte des charges liées aux partenariats publics privés (PPP) qui sont réparties entre des charges de fonctionnement et des charges d'investissement.

* 21 Eau, gaz, fioul, électricité, réseau de froid et de chaud.

* 22 Réunion interministérielle du 16 juin 2019.

* 23 Les locaux destinés à l'hébergement des gendarmes adjoints volontaires, qui ne sont pas des logements, sont également considérés comme relevant des locaux de service et techniques (LST).

* 24 Le diagnostic technique consiste à attribuer à chaque bâtiment une note entre 1 et 4, la note 1 étant attribuée à un bâtiment vétuste et la note 4 étant attribuée à un bâtiment en très bon état.

* 25 Art. 5 de la loi n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

* 26 Art. 5 de la loi n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

* 27 Art. 259 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

* 28 Circulaire du 28 janvier 1993 relative aux conditions de prise à bail par l'État des locaux destinés aux unités de gendarmerie départementale, édifiés par les collectivités territoriales.

* 29 Décret n° 93-130 du 28 janvier 1993 relatif aux modalités d'attribution de subventions aux collectivités territoriales pour la construction de casernements de gendarmerie.

* 30 Décret n° 2016-1884 du 26 décembre 2016 relatif aux conditions de réalisation et de financement d'opérations immobilières par les offices publics de l'habitat et les sociétés d'habitations à loyer modéré financées par des prêts garantis par les collectivités territoriales et leurs groupements, destinées aux unités de gendarmerie nationale, aux forces de police nationale, aux services départementaux d'incendie et de secours et aux services pénitentiaire.

* 31 Ministère de l'intérieur, novembre 2020, Livre blanc de la sécurité intérieure.

* 32 Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics.

* 33 Art. L. 1112-1 du code de la commande publique.

* 34 Loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure.

* 35 Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics.

* 36 Loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, 2.1.1 du rapport annexé.

* 37 Dont 93 brigades fixes et 145 brigades mobiles.

* 38 Décret n° 93-130 du 28 janvier 1993 relatif aux modalités d'attribution de subventions aux collectivités territoriales pour la construction de casernement de gendarmerie.

* 39 Décret n° 2016-1884 du 26 décembre 2016 relatif aux conditions de réalisation et de financement d'opérations immobilières par les offices publics de l'habitat et les sociétés d'habitations à loyer modéré financées par des prêts garantis par les collectivités territoriales et leurs groupements, destinées aux unités de gendarmerie nationale, aux forces de police nationale, aux services départementaux d'incendie et de secours et aux services pénitentiaires.

* 40 Décret n° 2016-1884 du 26 décembre 2016 relatif aux conditions de réalisation et de financement d'opérations immobilières par les offices publics de l'habitat et les sociétés d'habitations à loyer modéré financées par des prêts garantis par les collectivités territoriales et leurs groupements, destinées aux unités de gendarmerie nationale, aux forces de police nationale, aux services départementaux d'incendie et de secours et aux services pénitentiaires.

* 41 Circulaire du 28 janvier 1993 relative aux conditions de prise à bail par l'État des locaux destinés aux unités de gendarmerie départementale, édifiés par les collectivités territoriales.

* 42 La notion d'unité-logement est une unité de mesure normalisée qui recouvre le logement du gendarme et une quote-part des locaux de service et techniques.

* 43 Projet de loi de finances pour 2024, document de politique transversale (DPT), Politique immobilière de l'État.

* 44 Loi n° 2023-222 du 30 mars 2023 visant à ouvrir le tiers financement à l'État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique.

* 45 Sénat, commission des lois, 8 février 2023, n° 321 (2022-2023), Rapport sur la proposition de loi visant à ouvrir le tiers-financement à l'État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique, au rapport de Mme Jacqueline Eustache-Brinio.

* 46 Art. 1 de la loi n° 2023-222 du 30 mars 2023 visant à ouvrir le tiers financement à l'État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique.

* 47 Article L. 2191-5 du code de la commande publique.

* 48 Parmi les composants techniques suivants : éléments porteurs, planchers, façades, charpente, toiture, menuiseries extérieures.

* 49 La liste des 3 700 opérations d'entretien et de travaux du plan « poignée de porte » de 2020 a été publiée sur le site du ministère de l'intérieur.

* 50 Dans le projet annuel de performance (PAP) du programme 152 « Gendarmerie nationale ».

* 51 Ministère de l'intérieur, novembre 2020, Livre blanc de la sécurité intérieure, p. 321.

* 52 Loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, rapport annexé.

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