C. UNE GOUVERNANCE SATISFAISANTE, EN PARTICULIER DANS LES TERRITOIRES
1. Une gouvernance essentiellement déconcentrée et satisfaisante malgré un pilotage complexe par plusieurs directions de l'administration centrale
La gouvernance des personnels administratifs repose essentiellement sur le rectorat. Les actes de gestion sont déconcentrés, y compris pour les personnels administratifs hors académie depuis 2022. Les rectorats arbitrent les attributions de personnels administratifs dans chaque EPLE, pour se rapprocher au mieux de la réalité quotidienne des établissements scolaires qui font face à des difficultés différentes et n'ont donc pas les mêmes besoins. Au sein des académies, les recteurs sont les supérieurs hiérarchiques des directeurs académiques de l'éducation nationale (DASEN) depuis 201214(*).
Un pilotage de la gestion des ressources humaines est toutefois assuré par l'administration centrale du ministère et est partagé entre plusieurs directions.
- La DGRH assure la gestion prévisionnelle des emplois, fixe les contingents de promotion et détermine la politique indemnitaire. Elle conserve certaines compétences résiduelles, notamment la fixation du tableau d'avancement hors classe et à l'échelon spécial, des règles de mobilité interacadémique ou encore les mises à disposition. Elle est en fait essentiellement chargée de conduire la politique de gestion des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale. Environ 15 ETP sont dédiés à la gestion des personnels administratifs au sein de la DGRH.
- la direction de l'encadrement (DE) est chargée de la détermination du cadre de gestion des ressources humaines pour les personnels de direction et d'inspection, soit environ 20 000 personnels. Elle existe depuis 2021, étant auparavant intégrée à la DGRH. La Direction de l'encadrement a été créée pour différencier davantage les règles de gestion des personnels d'encadrement et de direction par rapport aux autres personnels de l'éducation nationale. Toutefois, il parait étonnant de dissocier par exemple les personnels de direction des EPLE ou des écoles maternelles, élémentaires ou primaires des autres personnels administratifs notamment de catégorie A, leurs missions présentant des complémentarités.
- la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) intervient dans la gestion des personnels administratifs de catégorie A car elle a la tutelle des instituts régionaux d'administration (IRA). Le ministère de l'éducation nationale est en effet le principal employeur des diplômés des IRA en premier poste, à hauteur d'un tiers des promotions depuis cinq ans. La DGAFP est également chargée des dispositifs de reconversion, permettant notamment aux enseignants d'accéder à des emplois administratifs. Enfin, elle a un rôle de cadrage de la stratégie de recrutement et de concours des personnels administratifs.
- la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) élabore la politique éducative et pédagogique ainsi que la réglementation relative à l'organisation et au fonctionnement des écoles et des établissements du second degré, ce qui va concerner les personnels administratifs en poste en EPLE en particulier. La plupart des réformes pédagogiques ont une influence sur les conditions de travail des personnels administratifs, qui doivent en effet contribuer à leur mise en oeuvre. Les orientations en matière de formation continue pour les personnels administratifs sont donc fixées de manière conjointe par la DGRH et la DGESCO, afin de prendre en compte l'impact des réformes pédagogiques sur les personnels administratifs.
- Au sein du Secrétariat général du ministère de l'éducation nationale, le service de l'action administrative et des moyens, sous l'autorité directe du Secrétaire général, est chargé du pilotage du programme 214 - Soutien de la politique de l'éducation nationale assurant le fonctionnement des services administratifs des rectorats, des services départementaux et de l'administration centrale.
Le pilotage de la gestion des personnels administratifs parait relativement complexe, même si la déconcentration au niveau des rectorats de la gestion des différents programmes permet de remédier en partie à cette difficulté. Le pilotage des personnels administratifs en administration centrale pourrait toutefois être rationalisé, par exemple en rapprochant la DGRH et la direction de l'encadrement, dont la récente séparation peut laisser perplexe. Les personnels de direction en particulier font face à des difficultés parfois proches de celles des personnels administratifs, pouvant justifier le rapprochement de leurs règles de gestion.
2. La gouvernance au sein des établissements scolaires est globalement satisfaisante, mais le lien avec les collectivités territoriales reste distant
a) Les relations entre les personnels de direction et les personnels administratifs sont globalement satisfaisantes dans les établissements scolaires
Au sein d'un EPLE, l'équipe de direction comprend le chef d'établissement, le chef d'établissement adjoint ainsi que le secrétaire général d'EPLE15(*). Ce dernier, généralement un fonctionnaire de catégorie A, seconde le chef d'établissement dans la gestion matérielle, financière et administrative, participe au pilotage de l'établissement dans ses domaines de compétences spécifiques16(*). Sous l'autorité du chef d'établissement, il prend en charge les relations quotidiennes avec les personnels ATSS (administratifs, techniques, sociaux et de santé) et notamment l'organisation matérielle de leur travail. Il est également le correspondant de la collectivité territoriale de rattachement de l'établissement.
Dans les EPLE de plus petite taille et de moindre complexité, les fonctions de secrétaire général d'EPLE peuvent être exercées par des fonctionnaires de catégorie B expérimentés, ayant vocation à être promus après quelques années à ce type de poste.
Comme indiqué plus haut dans le rapport, le métier de secrétaire général d'EPLE a été réformé en 2023.
De plus, le nouveau métier de « Gestionnaire délégué », créé en même temps, consiste à exercer tout ou partie de la gestion administrative, juridique, financière, comptable, matérielle et logistique de l'établissement, en assistant le secrétaire général de l'EPLE plus spécifiquement dans l'un des domaines de gestion. L'objectif est de rompre l'isolement professionnel des secrétaires généraux d'EPLE, notamment les plus jeunes, qui peut être une source de désaffection pour les métiers de l'EPLE et provoquer des départs vers d'autres départements ministériels.
Les relations entre les personnels de direction d'établissement scolaire et les personnels administratifs semblent globalement satisfaisantes.
b) Le lien entre les établissements scolaires et les collectivités territoriales reste distant malgré un rapprochement dû à la loi 3DS
La loi17(*) du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « loi 3DS », a instauré une autorité fonctionnelle de la collectivité de rattachement à l'égard du secrétaire général d'EPLE, dans l'optique d'assurer une meilleure articulation entre les établissements et les collectivités territoriales. Dans ce cadre, chaque EPLE doit théoriquement signer avec la collectivité territoriale à laquelle il est rattaché une convention bilatérale déterminant les conditions d'exercice de cette autorité fonctionnelle. L'objectif est de renforcer le pilotage des EPLE par les collectivités territoriales dans l'exercice de leurs compétences.
Cette réforme avait suscité des interrogations au sein des personnels des EPLE, et plus spécifiquement des personnels administratifs, très attachés au principe d'autonomie des EPLE. Les secrétaires généraux d'EPLE craignaient également d'être mis dans une position peu favorable par rapport au chef d'établissement, qui conserve l'autorité hiérarchique. Toutefois, aucune des personnes entendues par le rapporteur spécial n'a fait remonter de difficultés particulières sur ce point.
Interrogé à ce sujet, le ministère de l'éducation nationale ne dispose pas d'un recensement de l'ensemble des conventions passées entre les EPLE et leurs collectivités territoriales de rattachement.
L'existence d'une convention entre un EPLE et une collectivité territoriale est visiblement très variable d'un territoire à l'autre. Ainsi, dans l'académie de Versailles, la région Ile-de-France, le Val d'Oise et l'Essonne ont signé des conventions avec les EPLE, à l'inverse des Yvelines et des Hauts-de-Seine. Dans l'académie de Nancy-Metz, trois départements (la Meuse, la Meurthe-et-Moselle et les Vosges) ont signé des conventions avec les EPLE. Certaines collectivités territoriales n'ont pas souhaité encore signer de conventions, estimant parfois qu'une autorité fonctionnelle uniquement sur les EPLE reste insuffisante pour leur permettre d'exercer pleinement leurs compétences18(*).
Le secrétaire général de l'Académie d'Aix-Marseille a estimé que l'académie avait été étroitement associée au processus de signature de l'ensemble des conventions, ce qui avait contribué à un renforcement significatif des relations entre collectivités et rectorat.
Les conventions entre collectivités territoriales et EPLE permettent de renforcer le pilotage par les collectivités des établissements qu'elles financent en partie. Elles peuvent servir à favoriser le dialogue entre EPLE et collectivités. Toutefois, laisser de la souplesse aux collectivités pour signer une convention quand le besoin s'en fait sentir parait adapté aux réalités du territoire.
Le lien entre les collectivités territoriales et les EPLE gagnerait toutefois à être approfondi sur d'autres aspects, notamment concernant l'organisation du temps périscolaire. Les élèves bénéficieraient des initiatives partagées entre les collectivités et les établissements. De plus, les collectivités pourraient avoir l'usage des bâtiments des établissements scolaires lors des vacances scolaires en particulier d'été, au bénéfice de tout le territoire. Des échanges fréquents entre les collectivités et les EPLE doivent être favorisés.
* 14 D'après le décret n° 2012-16 du 5 janvier 2012 relatif à l'organisation académique.
* 15Conformément au décret n°2011-1716 du 1er décembre 2011 relatif à l'organisation et au fonctionnement des établissements publics locaux d'enseignement.
* 16 Conformément à l'article D422-10 du Code de l'éducation.
* 17Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.
* 18 Selon l'audition de la Secrétaire générale de l'Académie de Nancy-Metz.