N° 621

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 mai 2024

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur les personnels administratifs du ministère de l'Éducation nationale,

Par M. Olivier PACCAUD,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

L'ESSENTIEL

Si, numériquement, les enseignants constituent l'essentiel des agents du ministère de l'Éducation nationale, les personnels administratifs constituent la clef de voûte de la gestion des professeurs et des établissements scolaires. N'étant pas en contact direct avec les élèves et les familles, moins nombreux et historiquement moins mis en avant par le ministère, ils ont pu être qualifiés « d'oubliés » ou « invisibles » de l'Éducation nationale. Olivier Paccaud, rapporteur spécial des crédits de l'enseignement scolaire, a présenté à la commission des finances le 22 mai 2024 les conclusions de son travail de contrôle devant permettre de mieux connaître ces personnels.

I. QUI EST L'ADMINISTRATION DE L'ÉDUCATION NATIONALE ?

A. UNE ADMINISTRATION PEU NOMBREUSE DONT LES EFFECTIFS N'AUGMENTENT PAS

Les personnels administratifs sont des personnels non-enseignants de l'éducation nationale qui accomplissent les missions de l'ensemble des fonctions dites « support » (gestion des ressources humaines, gestion financière et comptable etc.). Ils représentent 4,3 % des effectifs totaux de l'éducation nationale, soit 51 757 emplois en équivalents temps plein (ETP) en 2022.

Il est fréquent dans le débat public de voir confondus personnels administratifs, personnels non-enseignants et personnels n'étant pas devant élèves. Or une part très majoritaire des non-enseignants sont « devant élèves » : c'est notamment le cas des personnels de vie scolaire, en premier lieu les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) et les assistants d'éducation (AED). Les personnels administratifs représentent seulement 17 % des personnels non-enseignants. C'est à cette dernière catégorie de personnels qu'est consacré le présent contrôle.

Répartition des personnels de l'éducation nationale

(en %)

Note : les AESH désignent les accompagnants des élèves en situation de handicap.
Les AED sont les assistants d'éducation et les personnels ITRF correspondent aux ingénieurs et techniciens de recherche et de formation. Les conseillers principaux d'éducation et les psychologues sont des personnels relevant de la vie scolaire.

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Les effectifs des personnels administratifs ont diminué de 21 % entre 2007 et 2022.

Ainsi, l'augmentation des effectifs des personnels non-enseignants depuis 2015 est liée au doublement du nombre de personnels relevant de la vie scolaire, hausse liée essentiellement aux recrutements d'AESH, et non aux personnels administratifs.

Évolution des effectifs des personnels non-enseignants entre 2015 et 2022

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Par ailleurs, les deux-tiers des personnels administratifs sont en poste au sein des établissements scolaires du second degré - il n'existe pas de personnel administratif dans les écoles - 20 % dans les rectorats et seulement 3 % d'entre eux dans l'administration centrale.

Répartition des personnels administratifs par type de lieu de travail

Note : EREA signifie établissements régionaux d'enseignement adapté et CIO centre d'information et d'orientation.

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

De ce fait, les personnels administratifs sont inégalement répartis, suivant en grande partie l'implantation des établissements du second degré sur le territoire. Il faut toutefois noter certaines variations locales : les académies de Créteil, Nantes ou encore de la Guyane ont des taux d'encadrement des élèves par les personnels administratifs de 3 pour 1 000, contre 5 pour 1 000 pour les académies de Corse, de Limoges ou encore de Paris. Les académies les moins bien dotées en proportion de personnels administratifs par élèves sont celle de Mayotte (2,8 pour 1 000) suivie de Rennes (2,9 pour 1 000).

B. UN TAUX D'ENCADREMENT DES ÉLÈVES PAR LES PERSONNELS ADMINISTRATIFS TRÈS FAIBLE PAR RAPPORT AUX AUTRES ADMINISTRATIONS

La direction du Budget a construit un indicateur permettant de calculer le taux d'administration des ministères, c'est-à-dire le nombre d'administratifs (gérants) sur le nombre total de personnels (gérés). Cet indicateur est de six pour mille concernant les personnels administratifs de l'Éducation nationale, soit une proportion cinq fois moins élevée qu'au ministère des armées. Il est de vingt pour mille au ministère de l'économie1(*).

Les personnels administratifs sont de plus globalement moins qualifiés que dans les autres administrations. Les fonctionnaires de catégorie C représentent 39 % des effectifs totaux de personnels administratifs, contre 18 % pour le reste de la fonction publique d'État, et les fonctionnaires de catégorie B, 30 % des effectifs contre seulement 20 % pour l'ensemble de la fonction publique d'État.

Un taux d'encadrement de

Les personnels administratifs sont composés à

Environ

 
 
 

personnes gérées

de fonctionnaires de catégorie C

des personnels administratifs ont un poste en établissement scolaire

Au vu du nombre total de personnels, dépassant le 1,2 million d'emplois, ainsi que du nombre d'établissements scolaires, le ministère de l'éducation nationale parait largement sous-administré par comparaison avec les autres ministères.

II. DES DÉPENSES LIMITÉES À 3,3 % DU BUDGET DU MINISTÈRE DE L'ÉDUCATION NATIONALE

A. UN COÛT DE 2,7 MILLIARDS D'EUROS MALGRÉ UNE STABILITÉ DES EMPLOIS

En 2023, la dépense totale consacrée aux personnels administratifs du ministère a atteint 2,745 milliards d'euros. Si ce montant est élevé en valeur absolue, les personnels administratifs ne représentent que 3,3 % des dépenses totales de la mission « Enseignement scolaire » en 2023 et 3,5 % des dépenses de personnel. Ainsi, le montant consacré aux autres personnels de soutien scolaire (assistants d'éducation et accompagnants d'élèves en situation de handicap) est nettement plus élevé : 3,7 milliards d'euros en 2023 et 5,4 milliards prévus à horizon 2025.

Depuis la rentrée 2020, les moyens budgétaires inscrits en loi de finances ne prévoient aucune création d'emplois pour les personnels administratifs. Cette stabilité fait suite à des années de réduction. La dernière hausse des plafonds d'emplois des personnels administratifs remonte à 2017 et a été suivie de deux baisses successives en 2018 et 2019, puis une stabilité jusqu'en 2024. En conséquence, les créations d'emplois ultérieures se sont essentiellement faites par redéploiement entre académies et par utilisation de plafonds d'emplois sous-consommés du fait du non recrutement d'enseignants.

On constate un renouvellement constant et extrêmement important des équipes administratives, facilité par l'accroissement du recours aux contractuels Le nombre de personnels contractuels augmente rapidement (+ 38 % entre 2013 et 2021) et atteint aujourd'hui 32 % des personnels administratifs (en personnes physiques). En 2021, 44 % des personnels administratifs contractuels avaient moins d'un an d'ancienneté. 78 % d'entre eux avaient moins de 5 ans d'ancienneté.

B. DES RÉMUNÉRATIONS INFÉRIEURES À CELLES DES AUTRES ADMINISTRATIONS

La rémunération des personnels administratifs de l'Éducation nationale est largement inférieure à celle ayant cours dans les autres administrations. Ainsi, la différence atteint 410 euros bruts par mois pour les personnels de catégorie B.

En moyenne, les personnels administratifs de l'Éducation nationale sont payés 360 euros bruts de moins par mois que les agents d'autres administrations.

Rémunération brute moyenne mensuelle des corps administratifs du ministère de l'Éducation nationale en 2023 et comparaison avec les autres administrations

(en euros)

Source : commission des finances d'après les données de la direction générale de l'administration et de la fonction publique et le ministère de l'Éducation nationale

Cet écart est le résultat d'une sédimentation historique et a commencé à se résorber. Le ministère de l'Éducation nationale a mis en oeuvre une politique de revalorisation des rémunérations au cours des dernières années. Entre 2021 et 2023, les revalorisations indiciaire et indemnitaire des agents de la filière administrative conduisent à un gain moyen par ETP de près de 3 620 euros bruts annuels. Entre 2020 et janvier 2024, la rémunération moyenne mensuelle brute des personnels administratifs a augmenté de 333 euros. Une part de cette revalorisation recouvre certes des mesures générales accordées à l'ensemble de la fonction publique, en particulier les deux revalorisations successives du point d'indice. Environ les deux-tiers de la hausse sont toutefois liées à des augmentations spécifiques pour ces personnels.

Cet effort financier doit être salué et constitue une reconnaissance de l'engagement des personnels administratifs.

La dynamique de rattrapage salarial entre l'Éducation nationale et les autres administrations est loin d'être aboutie et ne peut que s'avérer problématique s'agissant de l'attractivité du ministère.

Mis à part des gains localisés, notamment liés à la baisse de la démographie scolaire, les dépenses liées aux personnels administratifs laissent peu de marge de manoeuvre et ne sauraient véritablement constituer une piste viable d'économies budgétaires.

III. FACE À LA COMPLEXIFICATION DES MISSIONS, UN PILOTAGE DES PERSONNELS ADMINISTRATIFS À MODERNISER

A. DES TEXTES RELATIFS AU TEMPS DE TRAVAIL OBSOLÈTES

Les personnels administratifs bénéficient d'un régime de temps de travail dérogatoire, obsolète sur certains aspects. Une circulaire de 2002 permet ainsi de déroger au cadre juridique légal des 35 heures par semaine notamment en considérant le temps de pause comme du temps de travail.

L'ensemble des auditionnés a toutefois indiqué au rapporteur spécial que les personnels administratifs réalisaient 1607 heures de travail annuel effectif, conformément à la législation.

Le cadre juridique obsolète comportant des dérogations aux 1607 heures de travail annuel, peu appliqué dans la réalité, doit être abrogé.

B. DES MISSIONS EN FORTE ÉVOLUTION QUI NÉCESSITENT DAVANTAGE D'ACCOMPAGNEMENT DES PERSONNELS

Les missions des personnels administratifs ont été renouvelées sous l'effet des réformes et de la rénovation du coeur des missions dans le sens d'un accompagnement renforcé des parcours. En effet, les réformes pédagogiques impliquent souvent une évolution de l'organisation en établissement scolaire : groupes au collège, réforme du lycée, transformation de la voie professionnelle, etc. Le poids de l'ingénierie des réformes repose en partie sur les personnels administratifs.

Un mal-être au travail est associé à ces changements et pèse notamment sur les personnels les plus qualifiés. Parmi les facteurs d'insatisfaction, le niveau de rémunération et les perspectives de carrière sont particulièrement cités.

Une satisfaction au travail de

et de

 
 

sur 10 pour les fonctionnaires de catégorie A

sur 10 pour les fonctionnaires de catégorie B et C

Source : ministère de l'Éducation nationale

Comme sur bien des sujets propres au ministère de l'Éducation nationale, l'enjeu pour améliorer les conditions d'exercice des personnels administratifs est de passer d'un pilotage quantitatif, par grandes masses, à une gestion plus fine et davantage adaptée aux agents. Alors que les personnels administratifs sont en majorité des gestionnaires des ressources humaines pour le 1,2 million de personnels du ministère, le travail qualitatif attendu de ces personnels s'applique peu à leur propre filière.

LISTE DES RECOMMANDATIONS

Recommandation n° 1 : mettre en place au sein des rectorats des référents territoriaux facilement identifiables par les personnels en établissements scolaires, constituant une porte d'entrée vers les différents services (direction générale des ressources humaines - DGRH).

Recommandation n° 2 : moduler davantage le système de répartition des personnels administratifs entre académies afin de tenir compte plus finement des évolutions démographiques (DGRH, direction générale de l'enseignement scolaire - DGESCO).

Recommandation n° 3 : renforcer le soutien administratif aux directeurs d'école via un appui renforcé des services départementaux de l'éducation nationale et une implication des plus forte des inspecteurs de l'éducation nationale (DGRH, DGESCO).

Recommandation n° 4 : inclure dans les documents budgétaires un récapitulatif des emplois et des coûts relatifs à chaque filière au sein de la catégorie des personnels administratifs, techniques et de service (direction du budget et ministère de l'éducation nationale).

Recommandation n° 5 : renforcer le cadre national applicable aux personnels administratifs contractuels, afin de valoriser et faciliter leur recrutement pour répondre aux problématiques d'attractivité (DGRH).

Recommandation n° 6 : étendre le Pacte aux missions supplémentaires réalisées à titre exceptionnel en dehors de leur champ de compétences par des personnels administratifs présents en établissement scolaire (DGESCO).

Recommandation n° 7 : engager une réflexion sur la rémunération des missions complémentaires effectuées par les personnels administratifs par le biais d'heures supplémentaires (DGESCO, DGRH).

Recommandation n° 8 : préserver les moyens actuellement consacrés aux personnels administratifs afin de ne pas annuler les efforts de convergence indemnitaire avec les personnels comparables des autres administrations de l'État (direction du budget, DGRH).

Recommandation n° 9 : abroger le cadre juridique obsolète, en particulier la circulaire de 2002 relative au temps de travail des agents, afin de clarifier l'alignement du temps de travail effectif sur le régime de droit commun de la fonction publique (DGRH).

Recommandation n° 10 : renforcer le cadre effectif d'accès des personnels administratifs à la formation continue tout au long de leur carrière, notamment par le développement de formations d'initiative locale (DGRH).

I. DES EFFECTIFS DES PERSONNELS ADMINISTRATIFS STABLES DEPUIS 2015 AVEC UN TAUX D'ENCADREMENT DE SIX AGENTS POUR MILLE ÉLÈVES

A. LES PERSONNELS ADMINISTRATIFS : DES EFFECTIFS STABLES, ESSENTIELLEMENT FÉMININS ET INÉGALEMENT RÉPARTIS SUR LE TERRITOIRE FRANÇAIS

1. Une administration mal connue, y compris des enseignants

Si, numériquement, les enseignants représentent l'essentiel des agents du ministère de l'Éducation nationale, les personnels administratifs constituent la clef de voute de la gestion des professeurs et des établissements scolaires. N'étant pas en contact direct avec les élèves et les familles, ces agents sont peu connus. Historiquement moins nombreux et moins mis en avant par le ministère, ils ont pu être qualifiés « d'oubliés » ou « invisibles »2(*) de l'Éducation nationale. En outre, ces personnels font parfois l'objet de critiques relatives à une « sur-administration » supposée, résultant principalement de la méconnaissance du fonctionnement du système éducatif. Le ministère semble avoir pris conscience depuis quelques années de la nécessité d'un renversement culturel évoluant d'une vision autrefois centrée sur les enseignants à une vision plus large intégrant les agents supports de la communauté éducative.

Le rapporteur spécial note l'absence d'étude spécifique portant sur ces agents, alors qu'aucun rapport parlementaire, d'inspection générale ou de la Cour des comptes n'a été consacré au cours des vingt dernières années à l'administration de l'Éducation nationale, à la différence des analyses, pléthoriques, portant sur les enseignants. Le présent rapport a donc pour principal objectif de dresser un panorama de ces personnels, de leurs missions, de leurs lieux et conditions d'exercice ainsi que de leur coût budgétaire.

Plus étonnant, les travaux menés par le rapporteur spécial permettent de souligner que ces personnels sont mal identifiés par les enseignants eux-mêmes. Mis à part le cas particulier des personnels administratifs présents dans les établissements scolaires, l'impression qui demeure est celle d'une forte étanchéité entre le monde des enseignants et des autres personnels éducatifs et de vie scolaire d'une part, et l'administration d'autre part. Le rectorat est perçu par les équipes éducatives comme lointain, opaque ou encore complexe et n'est bien souvent un interlocuteur qu'en cas de problème grave ou dans le cas spécifique de l'organisation des examens. En outre, les personnels en établissement, y compris les personnels de direction, relèvent la distance qui les sépare du rectorat et la difficulté à identifier les interlocuteurs compétents.

À l'inverse, l'administration soulève fréquemment les efforts déployés afin d'améliorer le service à l'usager. En effet, les premiers usagers de l'administration de l'Éducation nationale ne sont pas les élèves, mais les enseignants. Afin de limiter les différences culturelles entre l'administration et les équipes éducatives, il serait souhaitable de s'inspirer des pratiques d'ores et déjà mises en place dans certaines académies afin de multiplier les échanges entre l'administration en rectorat et les établissements.

Dans l'académie de Créteil, de brefs séjours en immersion dans les établissements sont organisés pour les personnels du rectorat, permettant à ces derniers de mieux appréhender le quotidien des personnels qu'ils gèrent, mais également aux personnels en établissement d'identifier des interlocuteurs et de mieux comprendre les enjeux propres à l'organisation du rectorat. Si la généralisation de cet exemple impose la mise en place d'une logistique assez lourde et potentiellement coûteuse, le rapporteur spécial considère néanmoins qu'elle contribuerait à une fluidification des échanges.

D'autres exemples peuvent être développés. Ainsi, des référents pour les secrétaires en établissement scolaire ont été mis en place au sein de l'académie de Versailles dans chaque bassin de l'académie.

Le rapporteur spécial considère qu'une meilleure visibilité des personnels administratifs par les enseignants et les personnels de direction doit passer par le déploiement de référents territoriaux, sur le modèle de l'administration préfectorale. Ceux-ci constitueraient un point d'entrée pour les personnels en établissement afin de les orienter vers les services compétents au sein du rectorat et constituerait une première étape dans le nécessaire rapprochement entre le rectorat et ses usagers.

Recommandation n° 1 : mettre en place au sein des rectorats des référents territoriaux facilement identifiables par les personnels en établissements scolaires, constituant une porte d'entrée vers les différents services (Direction générale des ressources humaines)

2. Les effectifs des personnels administratifs, essentiellement féminins, sont stables depuis 2015 
a) Les effectifs des personnels administratifs sont stables depuis 2015

Les personnels administratifs sont des personnels non-enseignants de l'éducation nationale, chargés des missions d'administration. Fonctionnaires de catégories A, B ou C, ou encore contractuels, ils accomplissent les missions de l'ensemble des fonctions dites « support » de l'éducation nationale, telles que la gestion des ressources humaines, la gestion financière et comptable ou encore l'organisation logistique et matérielle des établissements scolaires.

Ces agents représentent 4,3 % des effectifs des personnels de l'éducation nationale, qui comprennent au total 1 204 631 emplois équivalents temps plein (ETP) en 2022.

Répartition des personnels de l'éducation nationale

Note : les AESH désignent les accompagnants des élèves en situation de handicap. Les AED sont les assistants d'éducation et les personnels ITRF correspondent aux ingénieurs et techniciens de recherche et de formation. Les conseillers principaux d'éducation et les psychologues de l'éducation nationale sont inclus des personnels relevant de la vie scolaire.

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Les effectifs des personnels administratifs de la mission « Enseignement scolaire » sont stables depuis 2015. Ils s'élevaient à 52 359 ETP en 2015 et atteignent 51 757 ETP en 2022, soit une baisse de 1 % en sept ans, correspondant à la suppression de 599 ETP.

Évolution des effectifs des personnels administratifs entre 2015 et 2022

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Contrairement à une vision fréquemment répandue, assimilant les personnels non-enseignants et l'administration, les personnels administratifs ne représentent en réalité que 17,1 % des effectifs des personnels non-enseignants.

Répartition des personnels non-enseignants de l'éducation nationale

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

À noter, les effectifs des personnels non-enseignants, s'élevant à 301 534 ETP en 2022, ont augmenté de 48 % depuis 2015, représentant 97 916 ETP, soit une croissance extrêmement forte.

Évolution des effectifs des personnels non-enseignants
entre 2015 et 2022

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

La hausse des effectifs des personnels non-enseignants est pratiquement exclusivement due à la mise en oeuvre de « l'école inclusive », qui a entrainé des recrutements importants de personnels relevant de la vie scolaire, et notamment des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH).

Évolution des effectifs des personnels non-enseignants et des personnels relevant de la vie scolaire entre 2015 et 2022

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Les effectifs des AESH ont ainsi été multipliés par 3,5 entre 2015 et 2022, correspondant à une hausse de 95 080 ETP, aboutissant à 121 419 AESH. Le traitement administratif (paie, congés etc.) de ces personnels a d'ailleurs constitué une charge de travail supplémentaire pour les personnels administratifs, qui a été absorbée à effectifs constants.

b) La stabilité observable des effectifs des personnels administratifs depuis 2015 fait suite à une forte baisse du nombre de personnels entre 2007 et 2015

La stabilité des effectifs des personnels administratifs depuis 2015 est d'autant plus frappante qu'ils avaient été fortement diminués auparavant. En quinze ans, les effectifs des personnels administratifs sont en effet passés de 65 870 ETP en 2007 à 51 757 ETP en 2022, soit une baisse de 21 % des effectifs. On peut ainsi souligner l'ampleur des pertes d'effectifs, dans un contexte de complexification et de diversification des missions de ces personnels, détaillé plus bas dans le présent rapport.

Évolution des effectifs des personnels administratifs entre 2007 et 2022

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

c) Les personnels administratifs sont majoritairement composés de fonctionnaires de catégorie C

Les personnels administratifs sont composés à 39 % d'agents et adjoints administratifs, c'est-à-dire de fonctionnaires de catégorie C, représentant l'effectif le plus important à hauteur de 20 338 ETP. Les fonctionnaires de catégorie B, soit les secrétaires administratifs, représentent 30 % des effectifs (15 409 ETP) alors que les fonctionnaires de catégorie A, soit les attachés d'administration de l'État, représentent seulement 17 % des effectifs (8 755 ETP). Les personnels administratifs comptent 14 % de contractuels (7 255 ETP).

Les fonctionnaires de catégorie C sont ainsi surreprésentés parmi les personnels administratifs. Par comparaison3(*), la fonction publique d'État comptait en 2021 48 % de fonctionnaires de catégorie A, 20 % de fonctionnaires de catégorie B et 18 % de catégorie C.

Répartition des personnels administratifs par catégorie

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale4(*)

d) Les effectifs des personnels administratifs sont essentiellement féminins

Les personnels administratifs sont composés à 84 % de femmes, dans des proportions stables depuis 2015. Les fonctionnaires de catégorie A de la filière administrative ont la proportion d'hommes la plus élevée (33 % des ETP sont des hommes) et les fonctionnaires de catégorie C comprennent 15 % d'hommes.

Répartition de la filière administrative entre femmes et hommes

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

3. Les personnels administratifs sont inégalement répartis dans les territoires français
a) La répartition des personnels administratifs est inégale selon les académies

Les personnels administratifs sont supposés être répartis entre académies en fonction des besoins. Les académies franciliennes concentrent ainsi le plus de personnels : 3 473 ETP administratifs dans l'académie de Versailles, 2 985 ETP dans l'académie de Créteil et 1 553 ETP dans l'académie de Paris en 2022. La Corse (264 ETP), la Guyane (254 ETP) et Mayotte (311 ETP) représentent le plus faible nombre d'ETP.

Répartition des personnels administratifs entre académies

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Pour autant, certaines académies, notamment les académies de Versailles et d'Aix-Marseille, dont les secrétaires généraux ont été entendus en audition par le rapporteur spécial, estiment que les emplois administratifs sont inégalement répartis entre les académies, au vu du nombre d'élèves à encadrer.

Les académies de Versailles, Créteil, Lyon, Nice, Nantes ou encore de la Guyane et Mayotte ont des taux d'encadrement des élèves par les personnels administratifs inférieurs ou égaux à 3 pour 1 000. À l'inverse, les académies de Corse, de la Guadeloupe, de la Martinique, de Limoges ou encore de Paris ont des taux d'encadrement des élèves par les personnels administratifs supérieurs à 5 pour 1000.

La petite taille de certaines de ces académies entraine des effets de seuil expliquant le taux élevé d'encadrement des élèves par des personnels administratifs : ainsi, 25 % des directions départementales comptent moins de 50 agents.

Ce n'est pas le cas de toutes les académies, notamment de celle de Paris. Le secrétaire général de l'académie de Normandie, entendu en audition par le rapporteur spécial, relevait par exemple que dans leur cas, le nombre relativement élevé de personnels administratifs (représentant 0,42 % des élèves) était lié à la double localisation du rectorat, partagée entre Caen et Rouen.

Répartition des personnels administratifs par académie rapportée au nombre d'élèves du premier et du second degré présents dans les académies

(en % du nombre d'élèves)

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Les mouvements de population récents, notamment vers les littoraux, peuvent expliquer en partie pourquoi les effectifs des personnels administratifs sont aujourd'hui plus faibles par rapport au nombre d'élèves dans les académies de Rennes, Nantes, Nice ou encore Aix-Marseille que dans l'académie de Nancy-Metz par exemple. Ainsi, la population en Loire-Atlantique (44) a augmenté de 0,8 % entre 2015 et 2021.

Certaines académies d'outre-mer, telles que la Guyane ou Mayotte, peuvent souffrir d'un manque d'attractivité lié à leurs conditions particulières.

Un autre facteur explicatif important des différences de taux d'emplois administratifs entre académies tient aux écarts de montant de la part indemnitaire dans les rémunérations, qui est fixée par le rectorat entre un plancher et un plafond commun à toutes les académies. Cet aspect est développé plus bas dans le rapport.

Les différences entre académies dans le nombre de personnels administratifs par rapport au nombre d'élèves sont sources d'inégalités territoriales. Elles devraient être corrigées par des redéploiements de personnels des académies les mieux dotées vers les académies moins bien dotées.

Recommandation n° 2 : moduler davantage le système de répartition des personnels administratifs entre académies afin de mieux tenir compte des évolutions démographiques (DGRH, DGESCO)

b) La répartition des personnels administratifs dans les établissements scolaires prend en compte les spécificités des établissements

Le rectorat constitue l'échelon essentiel de répartition des personnels au sein des académies : ainsi, les crédits et les emplois du programme 214, portant pour l'essentiel sur les personnels administratifs, sont délégués au niveau des recteurs de régions académiques qui eux-mêmes répartissent ces moyens entre les académies.

Si une part des personnels est affectée en administration centrale ou en rectorats, la répartition des moyens humains dans les 8 700 collèges et lycées constitue un exercice de gestion spécifique. L'enjeu est de parvenir à une répartition tenant compte à la fois de la taille des établissements et du cadre d'exercice très variable selon la nature de l'établissement et son implantation.

Au sein des établissements publics locaux d'enseignement (EPLE), les personnels administratifs sont affectés dans trois domaines : des missions de secrétariat, des tâches d'intendance et, le cas échéant, des missions de gestion à l'agence comptable de l'établissement.

Les rectorats utilisent un modèle de répartition des personnels administratifs dans l'académie. Celui-ci comporte une part fixe, qui est calculée en fonction de la taille de l'établissement, de la présence ou non d'une agence comptable et du type d'établissement (collège, lycée général ou technologique, etc...). Les emplois attribués aux établissements sont ensuite pondérés pour tenir compte des difficultés sociales des élèves, du classement en éducation prioritaire ou de l'implantation en zone rurale et enfin des besoins éducatifs spécifiques des élèves (voie technologique, voie professionnelle, élèves à besoins éducatifs particuliers).

En conséquence, les moyens administratifs ne sont pas proportionnels à la taille des établissements scolaires. D'une part, chaque établissement, même les plus petits collèges, implique un nombre minimal de personnels. Ainsi, en moyenne, un établissement public local d'enseignement (EPLE) accueillant moins de 300 élèves et ne comptant pas d'agence comptable compte 2,2 EPT de la filière administrative.

De ce fait, le nombre de personnels dans les départements les plus ruraux est inférieur à celui des zones urbaines denses, mais dans de moindres proportions que celle du nombre d'élèves. A contrario, les départements où sont présents un grand nombre d'établissements en éducation prioritaire se voient allouer davantage de personnels. Ainsi, 3 500 emplois administratifs sont présents en Île-de-France contre 2 000 dans les Hauts de France.

L'implantation ou non d'une agence comptable au sein d'un établissement constitue un facteur déterminant : s'il existe une agence comptable, le nombre de personnels administratifs est d'en moyenne 9 agents par établissement, contre 4 agents si l'établissement est rattaché à une autre agence comptable5(*). Sur les 7 719 EPLE publics, 15 % comptent une agence comptable.

Dans les cas les plus fréquents, le nombre de personnels administratifs par établissement varie de 5 à 12 personnes. Le rapporteur spécial souligne que cela reste peu, alors que la taille moyenne d'un collège public en 2022 était de 500 élèves, et celle d'un lycée général public de 1 046 élèves.

Nombre moyen de personnels administratifs par établissement en fonction des effectifs de l'établissement et de son rattachement à une agence comptable

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

4. Une porosité croissante entre le personnel administratif et le personnel enseignant : le cas des directeurs d'école du premier degré dont les tâches administratives sont en hausse

Il existe une porosité croissante entre le personnel administratif et le personnel enseignant. Le cas le plus représentatif est celui des directeurs d'école dans le premier degré. Les 43 600 écoles maternelles, primaires ou élémentaires ne disposent en effet pas d'emploi administratif et sont dirigées par un directeur d'école, bénéficiant d'une décharge partielle ou totale d'enseignement. Les tâches organisationnelles et administratives leur incombent totalement, en plus de leurs missions pédagogiques.

Suite au suicide d'une directrice d'école en Seine-Saint-Denis en septembre 2019, révélateur du malaise d'une partie de la profession, des réformes ont été conduites par le ministère. Les directeurs d'école ont notamment demandé à cette occasion davantage d'appui administratif.

Pour tenir compte des difficultés croissantes du métier, la part indemnitaire de la rémunération des directeurs d'école a été revalorisée de 675 euros à partir de la rentrée 2022. Les décharges6(*) des directeurs d'école ont été augmentées, pour leur permettre d'accomplir notamment leurs missions administratives : par exemple, les directeurs des écoles comprenant de 1 à 3 classes ont bénéficié de 2 jours supplémentaires de décharge par an, les directeurs des écoles de 9 classes ont bénéficié d'une demi-décharge de service. De plus, depuis la rentrée de 20207(*), un référent direction d'école a été installé auprès du directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN) afin de venir en appui aux autres directeurs d'école. Enfin, la loi du 21 décembre 20218(*) prévoit une délégation de compétences de l'autorité académique pour le bon fonctionnement des écoles aux directeurs d'école ainsi qu'une autorité fonctionnelle dans le cadre des missions qui leur sont confiées.

Décharges accordées aux directions d'école primaire à la rentrée 2022

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Ces mesures sont toutefois insuffisantes pour répondre aux besoins administratifs des directeurs d'école, et constitue une forme d'injustice vis-à-vis du second degré. La vision d'un enseignant primaire dans une petite école qui en assurerait facilement la gestion administrative grâce au faible nombre d'élèves en tant que directeur déchargé apparaît aujourd'hui obsolète dans des écoles dont la taille est parfois supérieure à celle de petits collèges.

L'exécution des tâches administratives se fait au détriment de la mission d'encadrement pédagogique du directeur de l'école, qui devrait pourtant constituer le coeur de métier de cette profession. En ce sens, la mise en oeuvre d'un accompagnement administratif renforcé des directeurs d'école du premier degré au niveau des services départementaux de l'éducation nationale, avec une aide des inspecteurs de l'éducation nationale, est souhaitable. Un appui centralisé par les services départementaux permettrait de mutualiser entre plusieurs écoles certaines des missions. La possibilité de créer des postes de secrétaires administratifs « volants », mutualisés entre plusieurs écoles au niveau départemental, pourrait être étudiée pour décharger davantage les directeurs d'école de leurs tâches administratives.

Recommandation n° 3 : renforcer le soutien administratif aux directeurs d'école du premier degré via un appui renforcé des services départementaux de l'éducation nationale et une implication plus forte des Inspecteurs de l'éducation nationale (Direction générale des ressources humaines, Direction générale de l'enseignement scolaire)

Le cas des conseillers pédagogiques est différent. Ils ont vocation à exercer des missions d'ordre pédagogique essentiellement et ne peuvent être rapprochés en ce sens de la filière administrative. Leurs missions comprennent l'accompagnement pédagogique des enseignants du premier degré, leur formation initiale et continue et la mise en oeuvre de la politique éducative. Selon le ministère de l'éducation nationale, le conseiller pédagogique peut prendre part aux tâches administratives liées au programme de travail pédagogique de la circonscription ou du département, mais cela ne représente qu'une part limitée de son activité.

B. DES PERSONNELS ADMINISTRATIFS GLOBALEMENT PEU NOMBREUX AU REGARD DE LA DIVERSITÉ DES MISSIONS À ACCOMPLIR ET DU NOMBRE DE PERSONNES À ENCADRER

1. Des missions particulièrement diverses et propres au lieu de travail
a) Des missions différenciées selon le lieu de travail

Les personnels administratifs exercent des missions très diverses selon leur catégorie (A, B, C, non titulaires) et leur lieu de travail (administration centrale, rectorat, EPLE).

Plus de la moitié des personnels administratifs (61 % des effectifs) ont un poste en établissement. Les effectifs restants se répartissent essentiellement entre les postes en rectorat (à hauteur de 20 %) et les services départementaux et les circonscriptions (à hauteur de 13 % des effectifs). La répartition des effectifs est globalement stable depuis 2015.

Il est à noter que seul un très faible nombre de personnels administratifs, soit 1 758 ETP représentant 3 % des effectifs, est présent au sein de l'administration centrale.

Répartition des personnels du ministère de l'éducation nationale
et des personnels administratifs par type de lieu de travail

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Ainsi, 30 % des personnels administratifs sont en poste en collège, 30 % dans les lycées, 20 % dans les rectorats et 13 % dans les services départementaux et les circonscriptions.

Répartition des personnels administratifs par type lieu de travail

Note : EREA signifie établissements régionaux d'enseignement adapté et CIO centre d'information et d'orientation. Les conseillers principaux d'éducation sont inclus

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

b) Des missions différenciées selon la catégorie d'emploi

Les personnels administratifs sont chargés de l'ensemble des fonctions support en administration centrale et déconcentrée, ainsi qu'en établissement. Ils constituent l'un des rouages essentiels permettant l'accès à l'enseignement des élèves. Ils exercent ainsi des missions de gestion des ressources humaines, de gestion budgétaire et financière de direction et de pilotage des politiques publiques ou encore d'achats. Ils peuvent contribuer à l'organisation de l'enseignement et de la formation ou faire partie du service des affaires juridiques. Certaines missions, notamment dans les EPLE, les amènent à entrer en contact avec l'usager.

Les missions des personnels administratifs diffèrent en outre selon leur catégorie statutaire.

Ainsi, les attachés d'administration de l'État, fonctionnaires de catégorie A, se voient confier sous l'autorité du chef d'établissement la gestion administrative, matérielle, financière et comptable d'un ou plusieurs établissements9(*). Ils peuvent également avoir la fonction d'agent comptable. Ils exercent principalement des fonctions de gestionnaire en EPLE (secrétaire général ou gestionnaire délégué), de chargé d'études ou d'encadrement de proximité dans les services centraux et déconcentrés.

Les secrétaires administratifs de l'éducation nationale, fonctionnaires de catégorie B, sont chargés des tâches administratives d'application, notamment dans les domaines des ressources humaines, logistiques, financiers ou comptables10(*). Ils exercent principalement des fonctions de secrétaire d'intendance voire de secrétaire général en EPLE et de gestionnaire dans les services centraux et déconcentrés.

Les adjoints administratifs de l'éducation nationale, fonctionnaires de catégorie C, sont chargés des fonctions administratives d'exécution et peuvent avoir des fonctions d'accueil et de secrétariat11(*). Ils exercent principalement des fonctions d'adjoint d'intendance en EPLE et d'assistant de direction dans les services centraux et déconcentrés.

Emplois exercés par les personnels administratifs
selon leur catégorie statutaire et leur lieu de travail

 

Fonctions en administration centrale

Fonctions dans les services déconcentrés

Fonctions en EPLE

Attachés d'administration de l'État

(Catégorie A)

Chef de bureau

Adjoint au chef de bureau

Chef de section

Chargé de mission

Chargé d'études

Chef de division ou adjoint au chef de division

Chef de bureau

Chargé de missions

Chargé d'études

Secrétaire général d'EPLE

Agent comptable

Gestionnaire délégué

Fondé de pouvoir de l'agent comptable

Secrétaires administratifs de l'éducation nationale

(Catégorie B)

Assistant de direction

Gestionnaire

Assistant de direction

Secrétaire médical

Adjoint au chef de bureau

Chef de section

Gestionnaire

Assistant de direction

Secrétaire d'intendance

Adjoints administratifs de l'éducation nationale

(Catégorie C)

Assistant de direction

Aide gestionnaire

Assistant de direction

Secrétaire médical

Gestionnaire

Assistant de direction

Adjoint d'intendance/de scolarité

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du ministère de l'éducation nationale

Ces personnels, quelle que soit leur catégorie, sont considérés comme étant polyvalents : ils n'ont la plupart du temps pas de spécialité, à l'exception de certains attachés d'administration de l'État, et peuvent être affectés à tout type de poste relevant de leur statut.

Au vu de la complexification des missions des personnels administratifs, détaillée plus bas dans le rapport, la direction générale des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale12(*) a créé en 2023 des nouvelles fiches de postes pour les personnels administratifs. Les postes de gestionnaire délégué en EPLE, de gestionnaire expert des concours et examens et de gestionnaire expert chargé de la gestion administrative ont été créés. L'adjoint gestionnaire est devenu le secrétaire général d'EPLE et ses missions ont été adaptées pour tenir compte des évolutions du contexte professionnel, concernant notamment la gestion des ressources humaines. La création de ces métiers participe d'une revalorisation de la filière administrative, compte-tenu des objectifs de repyramidage évoqués plus bas dans le rapport.

2. Les personnels administratifs sont peu nombreux au regard du nombre de personnes qu'ils encadrent, y compris par comparaison avec les autres administrations

Les personnels administratifs, comprenant 51 757 ETP en 2022, ont vocation à assurer les fonctions permettant l'accès à l'enseignement de 12 076 634 élèves, soit un taux de quatre emplois administratifs pour mille élèves. Ce ratio d'encadrement est particulièrement bas.

Ratio de personnels administratifs par rapport à l'ensemble des personnels
du ministère et par rapport au nombre d'élèves

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Le nombre d'emplois administratifs par rapport à la masse d'élèves et de personnels du ministère de l'éducation nationale est particulièrement faible y compris en comparaison des autres ministères. Ainsi, l'indicateur du nombre de gérants sur le nombre de gérés, construit par la direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, est de six pour mille. Par comparaison, cet indicateur est cinq fois moins élevé à l'Éducation nationale qu'au ministère des armées. Il est de vingt pour mille au ministère de l'économie13(*). Le ministère de l'éducation nationale parait ainsi largement sous-administré par comparaison avec les autres ministères.

C. UNE GOUVERNANCE SATISFAISANTE, EN PARTICULIER DANS LES TERRITOIRES

1. Une gouvernance essentiellement déconcentrée et satisfaisante malgré un pilotage complexe par plusieurs directions de l'administration centrale

La gouvernance des personnels administratifs repose essentiellement sur le rectorat. Les actes de gestion sont déconcentrés, y compris pour les personnels administratifs hors académie depuis 2022. Les rectorats arbitrent les attributions de personnels administratifs dans chaque EPLE, pour se rapprocher au mieux de la réalité quotidienne des établissements scolaires qui font face à des difficultés différentes et n'ont donc pas les mêmes besoins. Au sein des académies, les recteurs sont les supérieurs hiérarchiques des directeurs académiques de l'éducation nationale (DASEN) depuis 201214(*).

Un pilotage de la gestion des ressources humaines est toutefois assuré par l'administration centrale du ministère et est partagé entre plusieurs directions.

- La DGRH assure la gestion prévisionnelle des emplois, fixe les contingents de promotion et détermine la politique indemnitaire. Elle conserve certaines compétences résiduelles, notamment la fixation du tableau d'avancement hors classe et à l'échelon spécial, des règles de mobilité interacadémique ou encore les mises à disposition. Elle est en fait essentiellement chargée de conduire la politique de gestion des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale. Environ 15 ETP sont dédiés à la gestion des personnels administratifs au sein de la DGRH.

- la direction de l'encadrement (DE) est chargée de la détermination du cadre de gestion des ressources humaines pour les personnels de direction et d'inspection, soit environ 20 000 personnels. Elle existe depuis 2021, étant auparavant intégrée à la DGRH. La Direction de l'encadrement a été créée pour différencier davantage les règles de gestion des personnels d'encadrement et de direction par rapport aux autres personnels de l'éducation nationale. Toutefois, il parait étonnant de dissocier par exemple les personnels de direction des EPLE ou des écoles maternelles, élémentaires ou primaires des autres personnels administratifs notamment de catégorie A, leurs missions présentant des complémentarités.

- la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) intervient dans la gestion des personnels administratifs de catégorie A car elle a la tutelle des instituts régionaux d'administration (IRA). Le ministère de l'éducation nationale est en effet le principal employeur des diplômés des IRA en premier poste, à hauteur d'un tiers des promotions depuis cinq ans. La DGAFP est également chargée des dispositifs de reconversion, permettant notamment aux enseignants d'accéder à des emplois administratifs. Enfin, elle a un rôle de cadrage de la stratégie de recrutement et de concours des personnels administratifs.

- la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) élabore la politique éducative et pédagogique ainsi que la réglementation relative à l'organisation et au fonctionnement des écoles et des établissements du second degré, ce qui va concerner les personnels administratifs en poste en EPLE en particulier. La plupart des réformes pédagogiques ont une influence sur les conditions de travail des personnels administratifs, qui doivent en effet contribuer à leur mise en oeuvre. Les orientations en matière de formation continue pour les personnels administratifs sont donc fixées de manière conjointe par la DGRH et la DGESCO, afin de prendre en compte l'impact des réformes pédagogiques sur les personnels administratifs.

- Au sein du Secrétariat général du ministère de l'éducation nationale, le service de l'action administrative et des moyens, sous l'autorité directe du Secrétaire général, est chargé du pilotage du programme 214 - Soutien de la politique de l'éducation nationale assurant le fonctionnement des services administratifs des rectorats, des services départementaux et de l'administration centrale.

Le pilotage de la gestion des personnels administratifs parait relativement complexe, même si la déconcentration au niveau des rectorats de la gestion des différents programmes permet de remédier en partie à cette difficulté. Le pilotage des personnels administratifs en administration centrale pourrait toutefois être rationalisé, par exemple en rapprochant la DGRH et la direction de l'encadrement, dont la récente séparation peut laisser perplexe. Les personnels de direction en particulier font face à des difficultés parfois proches de celles des personnels administratifs, pouvant justifier le rapprochement de leurs règles de gestion.

2. La gouvernance au sein des établissements scolaires est globalement satisfaisante, mais le lien avec les collectivités territoriales reste distant
a) Les relations entre les personnels de direction et les personnels administratifs sont globalement satisfaisantes dans les établissements scolaires

Au sein d'un EPLE, l'équipe de direction comprend le chef d'établissement, le chef d'établissement adjoint ainsi que le secrétaire général d'EPLE15(*). Ce dernier, généralement un fonctionnaire de catégorie A, seconde le chef d'établissement dans la gestion matérielle, financière et administrative, participe au pilotage de l'établissement dans ses domaines de compétences spécifiques16(*). Sous l'autorité du chef d'établissement, il prend en charge les relations quotidiennes avec les personnels ATSS (administratifs, techniques, sociaux et de santé) et notamment l'organisation matérielle de leur travail. Il est également le correspondant de la collectivité territoriale de rattachement de l'établissement.

Dans les EPLE de plus petite taille et de moindre complexité, les fonctions de secrétaire général d'EPLE peuvent être exercées par des fonctionnaires de catégorie B expérimentés, ayant vocation à être promus après quelques années à ce type de poste.

Comme indiqué plus haut dans le rapport, le métier de secrétaire général d'EPLE a été réformé en 2023.

De plus, le nouveau métier de « Gestionnaire délégué », créé en même temps, consiste à exercer tout ou partie de la gestion administrative, juridique, financière, comptable, matérielle et logistique de l'établissement, en assistant le secrétaire général de l'EPLE plus spécifiquement dans l'un des domaines de gestion. L'objectif est de rompre l'isolement professionnel des secrétaires généraux d'EPLE, notamment les plus jeunes, qui peut être une source de désaffection pour les métiers de l'EPLE et provoquer des départs vers d'autres départements ministériels.

Les relations entre les personnels de direction d'établissement scolaire et les personnels administratifs semblent globalement satisfaisantes.

b) Le lien entre les établissements scolaires et les collectivités territoriales reste distant malgré un rapprochement dû à la loi 3DS

La loi17(*) du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « loi 3DS », a instauré une autorité fonctionnelle de la collectivité de rattachement à l'égard du secrétaire général d'EPLE, dans l'optique d'assurer une meilleure articulation entre les établissements et les collectivités territoriales. Dans ce cadre, chaque EPLE doit théoriquement signer avec la collectivité territoriale à laquelle il est rattaché une convention bilatérale déterminant les conditions d'exercice de cette autorité fonctionnelle. L'objectif est de renforcer le pilotage des EPLE par les collectivités territoriales dans l'exercice de leurs compétences.

Cette réforme avait suscité des interrogations au sein des personnels des EPLE, et plus spécifiquement des personnels administratifs, très attachés au principe d'autonomie des EPLE. Les secrétaires généraux d'EPLE craignaient également d'être mis dans une position peu favorable par rapport au chef d'établissement, qui conserve l'autorité hiérarchique. Toutefois, aucune des personnes entendues par le rapporteur spécial n'a fait remonter de difficultés particulières sur ce point.

Interrogé à ce sujet, le ministère de l'éducation nationale ne dispose pas d'un recensement de l'ensemble des conventions passées entre les EPLE et leurs collectivités territoriales de rattachement.

L'existence d'une convention entre un EPLE et une collectivité territoriale est visiblement très variable d'un territoire à l'autre. Ainsi, dans l'académie de Versailles, la région Ile-de-France, le Val d'Oise et l'Essonne ont signé des conventions avec les EPLE, à l'inverse des Yvelines et des Hauts-de-Seine. Dans l'académie de Nancy-Metz, trois départements (la Meuse, la Meurthe-et-Moselle et les Vosges) ont signé des conventions avec les EPLE. Certaines collectivités territoriales n'ont pas souhaité encore signer de conventions, estimant parfois qu'une autorité fonctionnelle uniquement sur les EPLE reste insuffisante pour leur permettre d'exercer pleinement leurs compétences18(*).

Le secrétaire général de l'Académie d'Aix-Marseille a estimé que l'académie avait été étroitement associée au processus de signature de l'ensemble des conventions, ce qui avait contribué à un renforcement significatif des relations entre collectivités et rectorat.

Les conventions entre collectivités territoriales et EPLE permettent de renforcer le pilotage par les collectivités des établissements qu'elles financent en partie. Elles peuvent servir à favoriser le dialogue entre EPLE et collectivités. Toutefois, laisser de la souplesse aux collectivités pour signer une convention quand le besoin s'en fait sentir parait adapté aux réalités du territoire.

Le lien entre les collectivités territoriales et les EPLE gagnerait toutefois à être approfondi sur d'autres aspects, notamment concernant l'organisation du temps périscolaire. Les élèves bénéficieraient des initiatives partagées entre les collectivités et les établissements. De plus, les collectivités pourraient avoir l'usage des bâtiments des établissements scolaires lors des vacances scolaires en particulier d'été, au bénéfice de tout le territoire. Des échanges fréquents entre les collectivités et les EPLE doivent être favorisés.

II. UN COÛT ANNUEL DE 2,7 MILLIARDS D'EUROS LIMITÉ PAR LA FAIBLESSE DES RÉMUNÉRATIONS DES PERSONNELS

A. UN COÛT BUDGÉTAIRE REPRÉSENTANT 3,3 % DES DÉPENSES DE LA MISSION « ENSEIGNEMENT SCOLAIRE »

1. Le coût des personnels administratifs : une part limitée des dépenses de personnel de l'Éducation nationale

En 2023, la dépense totale consacrée aux personnels administratifs du ministère a atteint 2,745 milliards d'euros, en hausse de 160 millions d'euros par rapport à 2022. L'intégralité de ces dépenses figure sur le programme 214 - Soutien de la politique de l'Éducation nationale en premier lieu et, quoique dans une moindre mesure, sur le programme 141 - Enseignement public du second degré. Les personnels administratifs représentent ainsi trois-quarts du montant total du programme 214, soit 2,2 milliards d'euros et rassemble la majeure partie des personnels en administration centrale et en services déconcentrés. Le programme 141 ne finance quant à lui que les rémunérations des personnels présents dans les établissements scolaires (y compris agents comptables).

Dépense totale liée aux personnels administratifs du ministère
de l'Éducation nationale en 2023

(en millions d'euros et en %)

 

Coût budgétaire par programme

Part du programme dans la dépense liée aux personnels administratifs

Montant total des dépenses du programme

Part des dépenses liées aux personnels administratifs dans les dépenses du programme

214 - Soutien de la politique de l'Éducation nationale

2 221

80,9 %

2 966

74,9 %

141 - Enseignement public du second degré

524

19,1 %

38 424

1,4 %

Total

2 745

 

41 390

6,6 %

Source : commission des finances d'après le ministère de l'éducation nationale

Si ce montant est élevé en valeur absolue, il doit être mis en regard avec le budget total de l'Éducation nationale, premier poste de l'État. Les personnels administratifs représentent 3,3 % des dépenses totales de la mission « Enseignement scolaire » en 2023 et 3,5 % des dépenses de personnel (titre 2).

Ainsi, le montant consacré aux autres personnels de soutien scolaire (assistants d'éducation et accompagnants d'élèves en situation de handicap) est nettement plus élevé : 3,7 milliards d'euros en 2023 et 5,4 milliards prévus à horizon 2025.

Près de la moitié des dépenses à destination des personnels administratifs concernent les rémunérations d'agents de catégorie A, plus élevées, contre respectivement 28 % et 23 % pour les catégories B et C.

Répartition par programme et par catégorie de la dépense budgétaire
à destination des personnels administratifs en 2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'éducation nationale

Le ministère de l'Éducation nationale effectue un suivi fin des personnels de la filière administrative et, en tant que responsables de programmes, la DGESCO et la DGRH disposent d'informations suffisantes sur ces personnels. En revanche, s'agissant de la direction du budget - par ailleurs entendue par le rapporteur spécial - celle-ci se contente d'un pilotage par grande masse qui ne lui permet pas d'isoler le coût de ces personnels. Il est cependant surprenant que le ministère des comptes publics ne soit pas en capacité de se prononcer sur le sujet. En effet, s'il est vrai que, comparé au volume des emplois enseignants, le poids des personnels administratifs peut sembler accessoire, il n'en reste pas moins qu'ils représentent un budget annuel de près de 3 milliards d'euros. À ce titre, la direction du budget devrait être en capacité d'isoler les coûts selon les filières auxquels se rattachent les emplois, au-delà de la distinction enseignants / personnel d'encadrement / personnel administratif, technique et de service / personnel éducatif et médico-social qui est celle présentée dans les documents budgétaires. Il est nécessaire que le suivi soit effectué au niveau d'une maille plus fine en ventilant les emplois et les dépenses entre les personnels administratifs stricto sensu, les personnels techniques et la filière médico-sociale.

Recommandation n° 4 : inclure dans les documents budgétaires un récapitulatif des emplois et des coûts relatifs à chaque filière au sein de la catégorie des personnels administratifs, techniques et de service (direction du budget et ministère de l'éducation nationale)

Le coût moyen annuel par équivalent temps plein travaillé (ETPT) d'un personnel administratif titulaire est d'environ 200 000 euros par an, dont environ un tiers au titre de la contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions ». Si le ministère n'a pas fourni au rapporteur spécial les données liées aux pensions des seuls personnels administratifs, celles-ci devraient entraîner un coût en 2024 d'environ 600 millions d'euros sur le programme 214.

Sur le programme 141, l'essentiel de la dépense est concentré sur les actions de pilotage et d'encadrement (327 millions d'euros), la nature des dépenses étant bien plus diversifiée sur le programme 214 (à titre d'exemple, les principaux postes de dépenses sont les suivants : 400 millions d'euros pour les missions d'évaluation et de contrôle ; 323 millions d'euros pour la construction des politiques éducatives ; 274 millions d'euros sur la politique des ressources humaines et un montant identique pour la gestion de l'informatique et de l'immobilier du ministère).

Ventilation par action de la dépense
à destination des personnels administratifs en 2023 

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'éducation nationale

S'agissant des comparaisons internationales, il est très difficile de parvenir à une estimation de la proportion de dépenses liées aux personnels administratifs dans la mesure où peu de pays de l'Union européenne distinguent la dépense allouée aux enseignants de celle allouée aux autres personnels (y compris les personnels de support et autres personnels pédagogiques). La France, la Lituanie et Malte allouent plus de 20 % de la dépense totale au titre des établissements aux personnels de l'éducation hors enseignants. La dépense pour le paiement de ces personnels représente 15 % en Italie, 10,7 % en Finlande et 9,2 % en Espagne de la dépense totale au titre des établissements, du préélémentaire au second cycle du secondaire. Pour le cas spécifique des personnels administratifs, ces chiffres sont peu signifiants dans la mesure où la dépense française est tirée non pas uniquement par l'administration mais par le poids de l'école inclusive et la rémunération des AESH.

S'agissant du coût de l'administration au sein des académies, celui-ci varie principalement en fonction de la démographie, et, dans une moindre mesure, des rémunérations pouvant légèrement varier selon les académies19(*).

Quelques exemples du coût des personnels administratifs par académie en 2024 (sur la base des rémunérations 1er trimestre 2024)

(en millions d'euros et en ETP)

Académie

Nombre de personnels par académie

Programme 141

Programme 214

Total

Coût par ETP

Normandie

2 412

63,7

33,1

96,9

0,04

Nancy-Metz

1 650

76

56

132

0,08

Créteil

2 985

151,2

80,8

232,2

0,07

Source : commission des finances d'après les données fournies par les académies

2. Une réduction tendancielle du nombre d'emplois malgré un recours accru aux contractuels
a) Une stabilité des plafonds d'emplois après plusieurs années de diminution

Depuis la rentrée 2020, les moyens budgétaires inscrits en loi de finances ne prévoient aucune mesure d'emplois pour les personnels administratifs. Cette stabilité fait cependant suite à des années de réduction des emplois administratifs. D'après les données fournies par la DGRH, la dernière hausse des plafonds d'emplois des personnels administratifs remonte à 2017 et a été suivie de deux baisses successives en 2018 et 2019.

Évolution des plafonds d'emplois des personnels administratifs

(en ETPT)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'éducation nationale

Ces suppressions de postes ne sont pas la conséquence d'ouvertures surnuméraires au cours des années précédentes mais s'inscrivent au contraire dans un mouvement constant de réductions des emplois administratifs. Ainsi, le rapport de la commission d'enquête du Sénat sur la gestion des personnels enseignants et non enseignants de l'Éducation nationale, indiquait déjà en 1999 que « l'administration déconcentrée avait perdu 1 500 postes administratifs au cours des quinze dernières années »20(*).

Auditionnés par le rapporteur spécial, les représentants des personnels administratifs ont indiqué que la révision générale des politiques publiques (RGPP) s'était traduite par la suppression de 8 000 postes de personnels administratifs. Interrogée sur ce point, la direction du budget n'a pu ni infirmer ni confirmer ce chiffre et s'est bornée à constater que, si tel était le cas, il était vraisemblable que ces emplois aient été rouverts dans les années suivantes mais pour des postes d'enseignants.

D'après le secrétaire général du ministère, environ la moitié des postes supprimés au cours des dernières années ont été compensés par la transformation en gestion de postes d'enseignants non consommés du fait des difficultés de recrutement en postes administratifs.

Déclinaison par programme des plafonds d'emplois des personnels administratifs21(*) et des personnels d'encadrement en loi de finances pour 2024

(en ETPT)

 

Personnels d'encadrement

Personnels administratifs

Programme 140 - Enseignement public du premier degré

1 554

0

Programme 141 - Enseignement public du second degré

16 298

31 021

Programme 230 - Vie de l'élève

0

1 287

Programme 214 - Soutien

2 009

24 562

Total

19 861

56 870

Source : commission des finances d'après le ministère de l'éducation nationale

En conséquence, les créations d'emplois se sont essentiellement faites par redéploiement entre académies. Cela permet d'une part un rééquilibrage entre les académies les mieux dotées en personnels administratifs et celles qui sont moins bien dotées et, d'autre part, entre académies en croissance démographique et celles où le nombre d'élèves - et donc d'établissements - diminuent. Certaines académies, notamment celle d'Aix-Marseille, ont ainsi souligné que, dans les académies où la population scolaire continue de croître, les années de stabilité des emplois entrainent un désajustement entre les dotations en personnels administratifs et les besoins croissants. À l'inverse, des académies dans lesquelles la démographie est moins favorable (à l'exemple de celle de Nancy-Metz) ont indiqué disposer de moyens humains suffisants dans l'ensemble pour faire face à leurs missions.

Au niveau académique, les seules créations de postes ont lieu - sauf exception - lors de l'ouverture d'un nouvel établissement au travers de la création de seulement deux postes, un de catégorie A et un de catégorie C. La création d'un établissement passe généralement par la mise en place en amont d'une mission de préfiguration réalisée par un agent de catégorie A, elle-même faiblement rémunérée à hauteur d'environ 200 euros mensuels. En conséquence, on constate une sous-dotation structurelle lors de la création d'un établissement, dans la mesure où les plus petits d'entre eux accueillent généralement 3 personnels administratifs, et jusqu'à 12 en moyenne pour les plus grands. Ainsi, la majorité des emplois affectés à un établissement nouvellement créé sont couverts par des redéploiements internes à l'académie.

Le rapporteur spécial note ainsi que les difficultés, qui sont nombreuses et seront développées plus bas, sont autant en lien avec une absence de croissance des emplois qu'avec la problématique plus générale de l'adaptation des moyens aux évolutions démographiques entre académies et infra-académiques.

b) Un recours accru aux contractuels

Suivant la tendance générale de l'enseignement scolaire et plus largement de la fonction publique, le nombre de personnels contractuels augmente rapidement : en 8 ans, le nombre de personnels administratifs contractuels est passé de 6 230 à 8 58522(*). Cette évolution a été considérablement accélérée depuis l'adoption de la loi de transformation de la fonction publique de 201923(*). En 2021, dernière année pour laquelle les données ont été transmises, les contractuels représentaient un tiers des personnels administratifs du ministère. La situation est cependant variable d'une académie à l'autre. À titre d'exemple, dans l'académie de Normandie, on dénombrait 450 contractuels sur l'ensemble des 2 700 personnels administratifs de l'académie, soit environ 16 %.

Évolution du nombre de contractuels parmi la filière administrative

(en ETP)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'éducation nationale

La part des titulaires diminue quand le niveau hiérarchique augmente : la part de contractuels atteint près de la moitié des agents administratifs de catégorie C. Il est cependant à noter que la filière administrative comporte une proportion de contractuels très largement inférieure aux autres personnels non enseignants du ministère : ainsi, seuls 17 % des agents de la filière santé (y compris assistants sociaux de l'Éducation nationale) sont titulaires.

Répartition des personnels administratifs de l'Éducation nationale
par statut en 2021

(en nombre de personnes physiques et en %)

 

Catégorie statutaire

Total

A

B

C

Nombre de titulaires

8 451

15 261

21 362

45 074

Nombre de contractuels

1 796

3 261

9 403

14 460

Proportion de contractuels

21,25 %

21,37 %

44,02 %

32,08 %

Source : commission des finances d'après le ministère de l'éducation nationale

Les intervenants rencontrés par le rapporteur spécial mettent en avant un renouvellement constant et extrêmement important des équipes administratives, facilité par l'accroissement du recours aux contractuels. Les données du ministère de l'Éducation nationale confirment ce constat : en 2021, 44 % des personnels administratifs contractuels avaient moins d'un an d'ancienneté. 78 % d'entre eux avaient moins de 5 ans d'ancienneté. Les contrats sont fréquemment de courte durée : seuls 14 % des personnels administratifs contractuels bénéficiaient en 2021 d'un contrat à durée indéterminée (CDI).

Ce renouvellement fréquent découle, comme cela sera développé plus bas, de conditions de travail perçues comme peu attractives. Dans l'académie de Nancy, sur les 1 230 postes administratifs ouverts en établissement scolaire, 10 % étaient vacants à la rentrée 2023 et ont donc dû être pourvus par des contractuels.

Les intervenants entendus par le rapporteur spécial soulignent l'inadaptation partielle du cadre général applicable aux administratifs contractuels : contrats prévus sur une durée inférieure à la durée de l'année scolaire, régime de rémunération inadapté à la concurrence des autres administrations et surtout des collectivités territoriales, en particulier pour les postes de gestionnaires, prorogation pendant des années de contrats sans titularisation sans accroissement de rémunération malgré l'ancienneté, etc...

Afin notamment d'attirer des contractuels sur des postes à profils, les académies sont contraintes d'accroître les rémunérations et donc de mettre en place un régime indemnitaire ad hoc. Il existe des adaptations locales, notamment pour les académies de Versailles, Créteil et Paris qui ont mis en place un régime indemnitaire local pour leurs contractuels, mais sans réponse nationale. En conséquence, il est nécessaire de prévoir au niveau du ministère un cadre de gestion adapté, permettant notamment une évolution des rémunérations au cours des différents contrats successifs et la mise en place d'adaptations indemnitaires pour faire face au déficit de personnels sur certains postes.

Il est également nécessaire de former en continu ces nouveaux personnels, alors que la formation continue s'avère déjà insuffisante pour les personnels titulaires. Des formations spécifiques doivent être envisagées pour les contractuels, ce qui est déjà le cas dans certaines académies.

Recommandation n° 5 : renforcer le cadre national applicable aux personnels administratifs contractuels, afin de valoriser et faciliter leur recrutement pour répondre aux problématiques d'attractivité (DGRH)

B. DES RÉMUNÉRATIONS LARGEMENT INFÉRIEURES À CELLES DES AUTRES ADMINISTRATIONS MALGRÉ LES HAUSSES RÉCENTES

1. Un niveau de rémunération inférieur de 11 % en moyenne à celui des personnels administratifs des autres ministères

Le coût des personnels administratifs est quasiment intégralement constitué de dépenses de rémunération. La rémunération nette moyenne au 1er janvier 2024 pour l'ensemble des personnels administratifs et techniques est de 2 320 euros.

La rémunération des agents administratifs est composée d'une part du traitement indiciaire, commun à l'ensemble de la fonction publique, et du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'État (RIFSEEP), variable selon la fonction des agents24(*).

Les cas spécifiques des primes accordées aux agents
exerçant en éducation prioritaire et en outre-mer

Les enseignants présents dans établissement situé en éducation prioritaire (REP ou REP +) bénéficient d'un régime indemnitaire spécifique, composé d'une part fixe et d'une part modulable attribuée sur la base d'objectifs collectifs d'engagements professionnels fixés au niveau national et dont l'atteinte est évaluée localement. Les personnels administratifs bénéficient également de ce régime25(*). Le montant maximum de la part variable est fixé à 702 euros, celui de la part fixe à 5 114 euros en REP+ et 1 734 euros en REP.

Les agents en outre-mer, enseignants comme administratifs, disposent également d'avantages spécifiques. En application de l'article L741-1 du code général de la fonction publique, le traitement du fonctionnaire de l'État en service dans les départements d'outre-mer est majoré de 25 %, à l'exception de Mayotte où il est majoré de 40 %. S'y ajoute, sauf pour Mayotte, un complément temporaire compris entre 10 % et 15 %. Dans les collectivités d'outre-mer, le traitement des agents est également majoré suivant un coefficient spécifique.

Outre les majorations de traitement, les personnels en outre-mer bénéficient également d'indemnités spécifiques, communes à l'ensemble de la fonction publique :

- l'indemnité de sujétion géographique ;

- l'indemnité d'éloignement ;

- l'indemnité forfaitaire d'isolement en Guyane ;

- les indemnités de remboursement partiel des loyers.

Source : commission des finances

Lors de la mise en place du RIFSEEP en 2012, les académies ont eu une latitude dans le choix des montants indemnitaires dont certaines se sont emparées afin de procéder à des revalorisations pour leurs personnels. Ce choix a eu pour conséquence une divergence des rémunérations entre académies, pouvant être justifiée par des difficultés d'attractivité et de pouvoir d'achat (en particulier en région parisienne) mais parfois désincitative à la mobilité interacadémique.

La part indemnitaire est principalement composée de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE). La part indemnitaire de la rémunération brute représente en moyenne 23 % de la rémunération et 18 % pour les agents de catégorie C.

Exemples de différences de rémunération entre académies
pour des agents administratifs de catégorie C

(en euros)

 

IFSE mensuelle dans l'académie de Normandie

IFSE mensuelle dans l'académie de Nancy-Metz

IFSE mensuelle dans les académies de Versailles, Créteil et Paris

Groupe 1 (secrétariat du recteur, technicien comptable...)

444,9

414,6

531

Groupe 2 (gestionnaires administratifs, secrétariat de direction)

406,2

381,2

498

Source : commission des finances d'après les académies

Les montants versés au titre du RIFSEEP des agents administratifs du ministère de l'Éducation nationale sont largement inférieurs à ceux des agents d'autres ministères26(*). Le décalage est, pour l'année 2022 et à catégorie identique, de 2 264 euros et culmine à 3 618 euros pour les agents de catégorie A. En volume, le décalage est le plus important pour les agents de catégorie C, pour lequel le régime indemnitaire est inférieur d'un quart à la moyenne des autres ministères.

Régime indemnitaire (RIFSEEP) moyen annuel par ETPT en 2022 

(en euro et en %)

Source : commission des finances d'après la direction générale de l'administration et de la fonction publique et les chiffres du ministère de l'Éducation nationale

Indépendamment de la pyramide des corps, le ministère de l'Éducation nationale a admis être « très en retard » par rapport à la moyenne des ministères sur la part indemnitaire27(*).

Conséquence de ce décalage, la rémunération des personnels administratifs de l'Éducation nationale est désormais largement inférieure à celle ayant cours dans les autres administrations. Ainsi, la différence atteint 410 euros bruts par mois pour les personnels de catégorie B. En moyenne, les personnels administratifs de l'Éducation nationale sont payés 360 euros bruts de moins par mois que les agents d'autres administrations, et ce malgré les dernières revalorisations accordées au cours des dernières années.

Rémunération brute moyenne mensuelle des corps administratifs du ministère de l'Éducation nationale en 2023 et comparaison avec les autres administrations

(en euros)

Source : commission des finances d'après la direction générale de l'administration et de la fonction publique et le ministère de l'Éducation nationale

Cet écart est le résultat d'une sédimentation historique, et comme cela sera développé ci-dessous, a commencé à se résorber. Il n'en demeure pas moins que la dynamique de rattrapage entre le ministère de l'Éducation nationale et les autres ministères est loin d'être aboutie et ne peut que s'avérer problématique s'agissant de l'attractivité du ministère. Comme l'a indiqué au rapporteur spécial le secrétaire général du ministère de l'Éducation nationale, « un agent de catégorie B du ministère de l'Intérieur est mieux payé qu'un personnel de catégorie A du ministère de l'Éducation nationale »28(*).

De même, alors que la rémunération des attachés et des certifiés était historiquement alignée, les dernières revalorisations des enseignants ont entraîné un décalage, de sorte qu'il est fréquent que le secrétaire général d'un établissement scolaire soit moins bien rémunéré qu'une grande partie des enseignants de son établissement. Ainsi, en 2023, la rémunération brute d'un attaché était de 3 890 euros et celle d'un secrétaire administratif (ce qui est encore le cas d'un certain nombre de secrétaires généraux d'établissement scolaire) de 2 570 euros. La rémunération moyenne brute d'un enseignant devrait approcher de 3 600 euros en 2024 à la suite des revalorisations consécutives et donc être quasiment équivalente à celle des administratifs de catégorie A et supérieure de près d'un millier d'euros à celle des administratifs de catégorie B.

2. Des dépenses supplémentaires depuis 2020 liées aux mesures indiciaires générales et à des revalorisations indemnitaires

Face d'une part au constat des disparités entre les rémunérations à l'intérieur du ministère de l'Éducation nationale et celles des administrations d'autres ministères et d'autre part aux demandes réitérées lors du Grenelle de l'Éducation en 2020 d'un alignement, le ministère de l'Éducation nationale a mis en oeuvre une politique de revalorisation des rémunérations au cours des dernières années. Entre 2021 et 2023, les revalorisations indiciaire et indemnitaire des agents de la filière administrative conduisent à un gain moyen par ETP de près de 3 620 euros bruts annuels. Entre 2020 et janvier 2024, la rémunération moyenne mensuelle brute des personnels administratifs a augmenté de 333 euros.

Gain moyen mensuel entre 2020 et 2024 de rémunération
par catégorie de personnels

(en euros)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'Éducation nationale

Une part importante de cette revalorisation recouvre cependant des mesures générales accordées à l'ensemble de la fonction publique, en particulier les deux revalorisations successives du point d'indice (+ 3,5 % au 1er juillet 2022 et + 1,5 % au 1er juillet 2023) et dans une moindre mesure l'octroi de 5 points d'indice majoré au 1er janvier 2024.

Le ministère estime que 40 % de la hausse accordée en moyenne aux personnels sont imputables aux revalorisations indiciaires générales, et 60 % aux revalorisations indemnitaires spécifiques à la filière administrative.

Les mesures générales de revalorisation

Face à la baisse de pouvoir d'achat des agents publics du fait de la forte inflation constatée au cours des deux dernières années, plusieurs mesures, outre celles touchant à la revalorisation du point d'indice, ont été mises en place :

- relèvements successifs en 2021, 2022 et 2023 de l'indice minimal de la fonction publique ;

- mise en place en 2021 d'une indemnité forfaitaire de télétravail plafonnée à 253 euros par an ;

- prise en charge depuis janvier 2022 de la protection sociale complémentaire des agents du ministère de l'Éducation nationale à hauteur de 15 euros par mois ;

- en 2023, versement aux agents éligibles de la prime de pouvoir d'achat exceptionnelle échelonnée entre 300 euros et 800 euros bruts ;

- depuis septembre 2023, remboursement des abonnements transport domicile-travail à 75 % ;

- depuis janvier 2024, revalorisation de l'indemnisation des jours épargnés sur un compte-épargne-temps (CET).

Source : commission des finances

Depuis 2020, le ministère a en outre mis en place un processus de revalorisation indemnitaire destiné à rapprocher progressivement les rémunérations des agents administratifs du ministère des moyennes interministérielles, conformément aux engagements pris lors du Grenelle de l'éducation.

Cette revalorisation est notamment passée par une mesure de convergence indemnitaire, ciblée sur l'IFSE perçue par les agents relevant des corps des attachés d'administration de l'État et des secrétaires administratifs. Une dotation globale pour l'ensemble des ministères avait été allouée pour un montant de 121 millions d'euros, dont 57 millions d'euros ont bénéficié aux personnels administratifs de l'Éducation nationale. Cette mesure aura permis d'augmenter en moyenne l'IFSE des attachés de 3 000 euros annuels et celle des secrétaires d'administration de 2 000 euros. Pour les agents de catégorie C, la hausse de l'IFSE aura entraîné un gain de rémunération de 56 euros par mois, soit 675 euros annuels.

En outre, le RIFSEEP des agents de la filière administrative a été réévalué à plusieurs reprises, une première fois en 2019 (+ 5 % pour la catégorie C, + 4 % pour la catégorie B, + 3 % pour la catégorie A), puis en 2021 au 1er janvier 2022 pour les attachés et secrétaires administratifs. Pour les agents de catégorie A, la revalorisation du RIFSEEP a entraîné un gain d'environ 2 100 euros par an. Pour les agents de catégorie B, la hausse varie entre 2 000 euros et 1 300 euros selon les métiers.

Cet effort financier doit être salué et constitue une reconnaissance de l'engagement des personnels administratifs. D'après le ministère de l'Éducation nationale, sur la période 2021-2023, les gains indemnitaires s'élèvent à 4 450 euros bruts annuels pour les attachés, 2 480 euros pour les secrétaires administratifs et 1 875 euros pour les adjoints administratifs.

Cependant, comme l'indiquent les chiffres précédents, la revalorisation de ces personnels ne peut être considérée comme achevée.

Premièrement, dans la mesure où une part des hausses de rémunération n'est pas liée à des mesures de convergence indemnitaire mais à des mesures ayant concerné l'ensemble de la fonction publique, l'alignement entre les rémunérations des personnels administratifs du ministère et celles des autres administrations n'est pas complet : l'écart à la moyenne a certes été réduit mais demeure important. L'écart du RIFSEEP des agents de l'Éducation nationale à la moyenne interministérielle a certes été réduit de 5 points entre 2022 (26 % d'écart à la moyenne) et 2023 (21 % d'écart à la moyenne à fin 2023) mais il demeure considérable. Dans les réponses au questionnaire du rapporteur spécial, le ministère note seulement que « l'effort reste à poursuivre en 2024 et au-delà pour parvenir à rejoindre la moyenne interministérielle ».

D'autre part, une partie non négligeable de cette hausse, accordée en période de forte inflation, n'a pas entraîné un gain de pouvoir d'achat aussi important qu'attendu mais a été érodé par la hausse des prix. Les hausses ont surtout permis de stabiliser le pouvoir d'achat des personnels administratifs, là où celui des agents des autres administrations a été davantage érodé. Ainsi, entre 2018 et 2023, en euros constants, la rémunération des agents du ministère de l'Éducation nationale a cru entre 3 % et 8 %, alors que celles des agents comparables d'autres ministères a baissé d'entre 6 % et 1 % sur la même période.

Évolution de la rémunération des principaux corps administratifs
entre 2018 et 2023

(en euros en EQTP et en %)

Catégorie

Périmètre

Corps administratifs

Nombre d'emplois titulaires

Rémunération mensuelle brute en 2023

Évolution de la rémunération 2023/2018 en euros courants

Évolution de la rémunération 2023/2018 en euros constants

A

Hors ministère de l'éducation nationale

Attaché d'administration de l'État

19 240

4 280 

10,5 %

-3,4 %

Ministère de l'éducation nationale

Attaché d'administration de l'État

8 750

3 890 

17,2 %

3,3 %

B

Hors ministère de l'éducation nationale

Secrétaires administratifs de l'intérieur et de l'outre-mer

11 320

2 800 

10,2 %

-3,7 %

Secrétaire administratif des administrations de l'État

10 750

3 150 

7,6 %

-6,3 %

Moyenne hors Éducation nationale

22 060

2 980 

8,3 %

-5,6 %

Ministère de l'éducation nationale

Secrétaires administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur

14 810

2 570 

16,8 %

2,9 %

C

Hors ministère de l'éducation nationale

Corps d'adjoint administratif des administrations de l'État

46 620

2 380 

12,6 %

-1,3 %

Agent administratif des finances publiques

20 340

2 460 

10,1 %

-3,8 %

Moyenne hors Éducation nationale

66 960

2 400 

11,7 %

-2,2 %

Ministère de l'éducation nationale

Adjoints administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur

18 610

2 110 

22,0 %

8,1 %

Source : commission des finances d'après les données de la DGAFP

Enfin, les relèvements successifs de l'indice minimal de la fonction publique ont entraîné un tassement des grilles et une quasi stabilité des rémunérations pendant l'essentiel de la carrière. Si le ministère a tenté de réintroduire une progressivité dans les grilles des plus bas salaires par un changement de correspondance des indices bruts et indices majorés29(*), les grilles de carrière des agents administratifs demeurent très plates.

Ainsi, pour un agent de catégorie C (adjoint administratif), il faut 19 ans d'ancienneté pour voir sa rémunération brute mensuelle être supérieure de 100 euros à celle obtenue en début de carrière. Pour un agent de catégorie B, il faudra 8 ans pour voir sa rémunération croître de 100 euros bruts mensuels et 26 ans pour gagner environ 700 euros de plus qu'en début de carrière.

Enfin, le déploiement à la rentrée 2023 du Pacte enseignant, permettant à des enseignants d'être rémunérés pour la réalisation de missions supplémentaires, a pu contribuer au décalage entre les équipes administratives des établissements et les enseignants. En effet, plusieurs cas ont été transmis au rapporteur spécial de missions assurées bénévolement par les personnels administratifs des établissements qui auraient pu, si elles avaient été réalisées par des enseignants, donner lieu à une rémunération supplémentaire au titre du pacte (missions d'animation et de coordination notamment). Or le pacte est réservé aux équipes éducatives (y compris les conseillers principaux d'éducation) et par conséquent inaccessible aux personnels administratifs. Il serait souhaitable que, dans le cas où un agent administratif réalise une mission pouvant déjà être rémunérée au titre du Pacte, et qui ne serait pas une mission entrant déjà dans son champ de compétences, celui-ci puisse bénéficier des mêmes avantages que les enseignants, ce qui permettrait d'éclairer les missions que peuvent réaliser les personnels administratifs en établissement et valoriser leurs missions.

Recommandation n° 6 : étendre le Pacte aux missions supplémentaires réalisées à titre exceptionnel en dehors de leur champ de compétences par des personnels administratifs présents en établissement scolaire (DGESCO).

Plus largement, la question du Pacte rejoint celle de la reconnaissance de l'engagement de certains personnels. La majorité des intervenants entendus par le rapporteur spécial déplorent que les heures supplémentaires effectuées par les personnels administratifs ne puissent être rémunérées. S'il est actuellement difficile d'objectiver combien de personnes sont concernées par cette situation, le manque de personnels administratifs dans certains établissements et académies semble se traduire fréquemment par un report non rémunéré de la charge de travail sur les personnels en place. Faute de rémunération des heures supplémentaires, ces missions ne sont pas reconnues et valorisées financièrement. En conséquence, il serait opportun, en l'absence de revalorisation indemnitaire globale, d'ouvrir une réflexion sur la possibilité pour le ministère de l'Éducation nationale de se saisir de ce levier.

Recommandation n° 7 : engager une réflexion sur la rémunération des missions complémentaires effectuées par les personnels administratifs par le biais d'heures supplémentaires (DGESCO, DGRH).

Le rapporteur spécial considère que, mis à part des gains de performance, notamment liés à la baisse de la démographie scolaire dans certains départements, les dépenses liées aux rémunérations des personnels administratifs laissent peu de marge de manoeuvre et ne sauraient véritablement constituer une piste viable d'économies budgétaires. Il convient au contraire de s'assurer que les efforts budgétaires déployés depuis 2021, qui doivent être salués, ne soient pas annulés au cours des prochaines années.

Recommandation n° 8 : préserver les moyens actuellement consacrés aux personnels administratifs afin de ne pas annuler les efforts de convergence indemnitaire avec les personnels comparables des autres administrations de l'État (direction du budget, DGRH)

C. AMÉLIORER L'ATTRACTIVITÉ DE LA FILIÈRE ADMINISTRATIVE DU MINISTÈRE

1. Une attractivité qui s'érode en particulier pour les agents de catégorie A

Alors que l'ensemble de la fonction publique est touché par un déficit d'attractivité, les métiers de la filière administrative de l'Éducation nationale n'échappent pas à la règle générale. Les difficultés sont cependant loin d'être comparables à celles observées pour le recrutement des enseignants.

Il est certain que les inscriptions (- 35 %) et les présents (- 21 %) aux concours administratifs du ministère de l'Éducation nationale ont significativement diminué entre les sessions 2018 et 2023. La situation n'est cependant pas considérée comme critique par le ministère, dans la mesure où le nombre d'inscriptions par poste (12,2 à la session 2023) et celui de présents par poste (6,8) restent élevés, permettant une sélectivité satisfaisante et limitant le nombre de postes non pourvus. Il convient cependant d'être attentifs à ce que ce ratio ne se dégrade pas davantage au cours des prochaines années.

Les difficultés de recrutement se cristallisent pour l'instant sur certains postes et certains territoires, en particulier ruraux et très ruraux. Comme pour les enseignants, quelques académies sont particulièrement touchées : Créteil et Versailles ainsi qu'en outre-mer Mayotte et la Guyane. Concernant les deux premières, il est d'autant plus difficile de pourvoir les postes que les académies franciliennes représentent à elles seules 22 % des recrutés en 2023.

Ces difficultés sont accrues dans certains territoires spécifiques. Ainsi, au cours de son déplacement dans l'académie de Nancy-Metz, le rapporteur spécial a-t-il eu l'écho d'agents administratifs du ministère ayant démissionné afin d'être recrutés au sein du système scolaire luxembourgeois, dans lequel les rémunérations pour un agent au sein d'une agence comptable scolaire (soit un agent de catégorie B) sont d'environ 7 000 euros par mois.

S'agissant du cas spécifique des agences comptables, la tendance est à l'augmentation de la taille des agences, du fait de la difficulté à recruter des agents comptables. Sur les 712 agences comptables, certains gèrent des budgets conséquents pour près d'une dizaine d'établissements. Le rapporteur spécial a ainsi rencontré un agent comptable gérant un montant annuel d'environ 13 millions d'euros.

Les difficultés de recrutement existent principalement pour les attachés en sortie d'IRA (l'Éducation nationale représentant près des deux-tiers des postes offerts en IRA annuellement) pour des postes en établissements scolaires (secrétaire général, agent comptable), dont les spécificités sont parfois éloignées de la culture de jeunes attachés. À l'inverse, les dispositifs permettant aux enseignants de rejoindre l'Éducation nationale sont un succès en termes de facilité de recrutement.

Un succès en termes d'attractivité : le parcours Passerelle
à destination des enseignants

Le Parcours Passerelle permet l'accueil en détachement dans le corps des attachés d'administration de l'État de personnels appartenant aux corps des enseignants mais aussi des conseillers principaux d'éducation (CPE) et des psychologues de l'éducation nationale. Ces personnels volontaires bénéficient d'une formation dispensée par les IRA pour préparer l'accès à leurs nouvelles missions.

Ce dispositif répond à l'objectif de recruter d'avantage d'attachés au sein des ministères afin de répondre aux besoins d'évolution des missions et des métiers. Les secrétaires généraux d'académies entendus par le rapporteur spécial soulignent l'intérêt de cette passerelle, le nombre de candidatures étant très largement supérieur au nombre de postes pourvus.

Pour l'année scolaire 2023-2024, on dénombrait plus de 954 candidatures pour 132 attachés finalement acceptés en détachement.

2. Une requalification progressive de la filière par des efforts de repyramidage des emplois devant être saluée

Comme indiqué en première partie, la filière administrative se caractérise par la très forte proportion des agents de catégorie C (représentant en 2021 la moitié des agents), qui est pour l'essentiel le résultat de l'histoire. Or, l'évolution des métiers a conduit nombre d'agents de catégorie C à exercer des missions de catégories B, ces derniers exerçant à leur tour des missions de catégories A. Face à ce constat, le ministère a mis en place, parallèlement à la revalorisation indiciaire, un plan de requalification des emplois sur la période 2021-2026. L'objectif de ce plan est de réduire de 9 points la proportion d'agents de catégorie C sur 5 ans, et d'augmenter corollairement celles des A de 6 points et des B de 3 points.

Évolution de la répartition des personnels administratifs par catégories

(en %du nombre de personnels)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'Éducation nationale

D'après le ministère, les postes requalifiés sont les postes de catégorie B et C qui ont été transformés vers la catégorie supérieure ; l'évolution de leurs missions, l'importance de leurs enjeux ou leur complexité ayant justifié ce niveau de qualification supérieur. Chaque année, le plan pluriannuel de requalification fixe ainsi un objectif de création de 490 emplois d'attachés (A) et 260 emplois de secrétaires (B) correspondant à la disparition de 750 emplois d'adjoints (C) ou de personnels contractuels. D'après les informations transmises au rapporteur spécial, ces cibles semblent avoir été atteintes en 2022.

Le plan de requalification implique un accroissement du nombre de postes offerts aux recrutements d'attachés à la sortie des instituts régionaux d'administration (+ 120 postes par an) et par les détachements (+ 100 également), résultant en des créations de postes. S'agissant des secrétaires administratifs, une augmentation des volumes de promotions proposables par liste d'aptitude (+ 170 postes) a été prévue. Les nominations d'agents de catégorie B par la liste d'aptitude ont doublé en 2022 par rapport à l'année précédente. En conséquence, les postes ont pour l'essentiel été requalifiés, bénéficiant aux personnels en place, les postes créés constituant une minorité. Sur les 914 postes concernés par le plan de requalification pour les deux années 2021 et 2022, seuls 6 % ont été créés, les autres ayant été requalifiés.

Répartition des postes pourvus dans le cadre du plan de requalification
entre 2021 et 2022

(en ETPT)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'Éducation nationale

D'après les informations fournies par le ministère de l'Éducation nationale, 44 % des postes d'attachés pourvus par concours interne en 2022 l'ont été par des agents auparavant secrétaires administratifs et 5 % par des agents auparavant adjoints administratifs (catégorie C). 68 % des postes de secrétaires administratifs pourvus par concours interne la même année l'ont été par d'anciens adjoints administratifs.

L'ensemble des personnes entendues par le rapporteur spécial soulignent les aspects positifs du plan de requalification, qui a permis de limiter la dynamique de décorrélation entre les missions effectuées et les catégories de personnels. Dans nombre de cas, ce plan a permis de reconnaître les compétences des agents, en particulier dans les établissements scolaires où il était courant, y compris dans des établissements de grande taille, d'avoir un secrétaire général de catégorie B.

III. FACE À LA COMPLEXIFICATION DES MISSIONS, UN PILOTAGE DES PERSONNELS ADMINISTRATIFS À MODERNISER

A. LA COMPLEXIFICATION DES MISSIONS ENTRAINE UNE PERCEPTION DÉGRADÉE DES CONDITIONS DE TRAVAIL

1. Un régime de temps de travail historiquement dérogatoire en raison des contraintes propres aux missions des personnels administratifs
a) Un régime de temps de travail adapté aux contraintes particulières d'exercice en établissement scolaire des personnels administratifs

Les personnels administratifs sont soumis au même régime de temps de travail que celui s'appliquant à l'ensemble des personnels de l'éducation nationale. Comme rappelé par la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique30(*), le décompte du temps de travail de tous les agents de l'État, incluant les personnels de l'éducation nationale, est fixé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures31(*), soit 35 heures par semaine.

Toutefois, au vu des contraintes spécifiques s'appliquant aux personnels exerçant leurs missions en établissement scolaire, l'arrêté du 15 janvier 200232(*) prévoit que la réduction de la durée hebdomadaire du travail doit s'opérer « sur la base de 9 semaines de congés [soit 45 jours] dans les situations de travail les plus courantes ». En effet, dans leurs diverses fonctions en support du système éducatif, les personnels administratifs accomplissent leurs missions dans le cadre du calendrier scolaire, alternant des temps de présence des enseignants devant les élèves et des temps de congés scolaires.

Conformément à la définition de cycles de travail prévus à l'article 4 du décret ARTT du 25 août 200033(*), chaque chef de service organise le temps de travail selon les nécessités du service. L'organisation du temps de travail dit « annualisé » dans les établissements scolaires - et dans une moindre mesure dans les services académiques - est fondée sur le principe d'un temps de travail hebdomadaire supérieur à 35 heures compensé par un surcroît de jours de congés ou de jours dits aménagement et réduction du temps de travail (ARTT). Cette organisation est conforme à l'obligation des 1 607 heures de travail annuel et permet de concilier les nécessités de services et d'accueil des usagers avec l'obligation légale des 35 heures hebdomadaires.

b) Des textes obsolètes mettant en place un régime dérogatoire de temps de travail des personnels administratifs sans réel impact sur le temps de travail effectif

Suite à l'accord-cadre34(*) ministériel du 16 octobre 2001, négocié avec les organisations syndicales, une circulaire35(*) de 2002 formule deux mesures d'adaptation de l'obligation légale annuelle des 1 607 heures, d'une part sur les modalités de comptabilisation de la pause quotidienne réglementaire de 20 minutes, et d'autre part sur la prise en compte des jours fériés.

Concernant la pause quotidienne réglementaire de 20 minutes, le décret ARTT du 25 août 2000 précité dispose que « aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre six heures sans que les agents bénéficient d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes ». Toutefois, la circulaire précitée de 2002 précise de façon dérogatoire que ce temps de pause est inclus dans les obligations de service quotidiennes des personnels et est dès lors comptabilisé comme du temps de service effectif. Dans son relevé d'observations définitives36(*) portant sur les personnels administratifs des universités, gérés par le secrétariat général commun aux ministères de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, publié en octobre 2023, la Cour des comptes estime que cette modalité n'est pas conforme aux dispositions juridiques en vigueur.

De plus, la circulaire du 21 janvier 2002 précitée précise que les jours fériés sont décomptés comme du temps de travail effectif lorsqu'ils sont précédés ou suivis d'un jour travaillé. Dans le relevé d'observations définitives précité, la Cour des comptes mentionne « [qu'] aucune disposition légale ou réglementaire ne permet de procéder à une prise en compte des jours fériés pour le calcul du temps de travail ».

Un rapport37(*) de l'Inspection générale des finances (IGF), paru en 2019, recommandait également de supprimer la pratique des « jours de fractionnement », soit des jours de congés supplémentaires prévus pour l'ensemble des fonctionnaires, conformément au décret38(*) du 26 octobre 1984.

L'ensemble des auditionnés a toutefois estimé que les personnels administratifs réalisaient 1 607 heures de travail annuel effectif, voire davantage au vu de la complexification des missions exercées. Ces dispositifs dérogatoires ne semblent pas être appliqués dans la réalité.

En conséquence, la circulaire du 21 janvier 2002 constitue un texte obsolète, fragile en termes juridiques - dans la mesure où il n'est pas possible de déroger à une loi par un texte réglementaire sans disposition spécifique - et dont l'abrogation ne devrait pas entrainer une hausse du temps de travail réel des personnels administratifs.

À noter, il est dans les faits impossible de mesurer le temps de travail effectif des personnels administratifs en EPLE, en l'absence de systèmes de badge permettant de décompter le temps de travail. Ce système est en place uniquement dans certains rectorats, notamment à l'académie de Nancy-Metz. Il serait de toute façon difficile de le généraliser à l'ensemble des EPLE, qui ne comptent parfois que deux emplois administratifs.

La DGRH39(*) a indiqué avoir engagé une réflexion sur le sujet du temps de travail des personnels notamment administratifs, mais indique qu'une telle réforme n'est faisable « qu'en l'accompagnant de mesures de compensation financière ». Un rapport sur le temps de travail des personnels de l'éducation nationale devrait être publié par le Gouvernement à brève échéance. Le rapporteur spécial sera attentif à ses conclusions.

Recommandation n° 9 : abroger le cadre juridique obsolète, en particulier la circulaire de 2002, afin d'aligner le temps de travail effectif et le régime applicable aux personnels administratifs de l'éducation nationale (DGRH).

2. La complexification des missions des personnels administratifs est source de diminution de leur bien-être au travail
a) Les missions des personnels administratifs sont de plus en plus complexes

Les missions des personnels administratifs ont été renouvelées ces dernières années sous l'effet de diverses réformes. En effet, les réformes pédagogiques impliquent souvent une évolution de l'organisation en EPLE : groupes au collège, réforme du lycée, transformation de la voie professionnelle, etc. Le poids de l'ingénierie des réformes repose en partie sur les personnels administratifs.

Ainsi, à titre d'illustration, dans le cadre de la réforme de la voie professionnelle, la mise en place de la gratification des périodes de stage lors du parcours de formations en milieu professionnel (PFMP) a eu des incidences pour les personnels administratifs en lycée professionnel. Depuis la rentrée 2023, à la suite du décret40(*) du 11 août 2023, ces personnels participent à la mise en oeuvre du versement d'une allocation en faveur des lycéens de la voie professionnelle.

On peut également citer la mise en oeuvre du Pacte enseignant : à titre d'exemple, rien n'a été prévu dans les logiciels informatiques pour permettre le paiement des « briques » du Pacte enseignant dans le premier degré.

De même, les modes de recrutement des enseignants ont évolué, notamment du fait de recrutement massif d'enseignants contractuels, impliquant une professionnalisation accrue et rapide des services des rectorats dédiés aux recrutements. La population des AESH a été multipliée par trois entre 2015 et 2022, impliquant une augmentation des tâches liées à la gestion de ces personnels.

Plus fondamentalement, le coeur des missions des personnels administratifs a été rénové : ils ont maintenant dans les textes une véritable mission d'accompagnement des parcours des personnels, impliquant d'assurer la paie, de mettre en oeuvre les avancements d'échelon mais aussi de répondre aux sollicitations de l'ensemble des personnels. Le ministère insiste sur le fait que le métier d'un grand nombre de personnels administratifs comporte une dimension importante de service rendu à l'usager, ce dernier étant dans la plupart des cas un autre personnel du ministère. Cependant, si ces ambitions sont louables, le rapporteur spécial s'interroge sur la concrétisation de cette approche centrée sur l'usager. En réalité, dans bien des cas et comme cela sera développé plus bas, les moyens limités des services académiques limitent les possibilités de mettre en place un traitement individualisé des agents.

En plus des changements de nature des missions de ces personnels, l'évolution des systèmes informatiques a impliqué le déploiement d'applications informatiques nouvelles, dont la prise en main a été difficile pour les personnels administratifs, occasionnant des surcroîts de travail. Deux programmes applicatifs ont particulièrement cristallisé les difficultés des personnels administratifs :

- le programme RenoiRH, application interministérielle, est un système d'information de gestion des ressources humaines et qui a impliqué un changement de métier et d'organisation important pour de nombreux personnels administratifs, en particulier en rectorat.

- le programme Op@le, application développée par Capgemini, sert à la gestion financière et comptable et est déployée essentiellement dans les EPLE. Contrairement au logiciel précédemment utilisé, Op@le durcit l'application des règles de gestion budgétaire et comptable, ce qui avait été recommandé par différents rapports de l'inspection générale des finances (IGF) et de l'inspection générale de l'éducation nationale et de la recherche41(*) (IGAENR). L'application a été déployée par vagues successives dans les EPLE depuis 2022. Un soutien a été mis en place par certains rectorats pour le déploiement de ce logiciel depuis 2023. Ce soutien repose toutefois essentiellement sur un système de tutorat par des personnels administratifs ayant parfois tout juste acquis la connaissance relative à l'utilisation du logiciel.

De façon plus générale, des problèmes d'outils informatiques parfois obsolètes ont été largement évoqués par les auditionnés.

L'ensemble de ces évolutions entraine des enjeux de conduite du changement, afin de préparer les personnels administratifs et de les accompagner dans la mise en oeuvre de ces évolutions, qui gagneraient à être mieux pris en compte et anticipés par les rectorats et par l'administration centrale.

Ces enjeux de conduite de changement sont d'autant plus importants que les personnels administratifs titulaires ont une ancienneté au travail élevée, contrairement aux personnels contractuels. Entre 2015 et 2022, la part de personnels administratifs titulaires avec 20 à 25 ans d'ancienneté a augmenté de 16 %.

Ancienneté au travail des personnels administratifs fonctionnaires

Source : commission des finances du Sénat d'après les chiffres du ministère de l'éducation nationale

Un agent avec une longue expérience du métier constitue un atout pour l'administration de l'éducation nationale, mais implique que les changements majeurs d'exercice des missions doivent faire l'objet d'un accompagnement particulier et spécifique. Les évolutions liées aux logiciels Op@le et RenoiRH ont été sources de frustrations d'autant plus importantes que les personnels avaient une longue habitude des anciennes applications.

b) La complexification des missions des personnels administratifs est source de mal-être au travail

Les enquêtes menées par le ministère de l'éducation nationale sur le ressenti au travail révèlent une insatisfaction au travail des personnels par rapport au reste de la population. Selon la DEPP42(*), l'ensemble des personnels de l'éducation nationale attribuent la note moyenne de 6,1 sur 10 pour évaluer leur satisfaction professionnelle (0 signifiant « pas du tout satisfait », 10 « tout à fait »), alors que la moyenne s'élève à 7,1 sur 10 pour l'ensemble des Français.

Au sein des personnels administratifs, les agents de catégorie A déclarent une satisfaction au travail globalement moins élevée (5,8 sur 10) que les personnels de catégorie B et C (6,4 sur 10).

Le niveau de rémunération, noté 5,2 par les personnels de catégorie A et 3,3 pour les personnels de catégorie B et C, et les perspectives de carrière, notées 4,2 par les personnels de catégorie A et 3,2 pour les personnels de catégorie B et C, constituent des sources d'insatisfaction marquée pour les personnels administratifs exerçant en EPLE. Les personnels administratifs en sont toutefois moins insatisfaits que l'ensemble des personnels de l'éducation nationale, qui évaluent à 3,2 le niveau de rémunération et à 2,8 les perspectives de carrière.

Concernant les améliorations à apporter à leur poste, 55 % des personnels administratifs de catégorie B et C évoquent la rémunération, soit une proportion comparable à celle de l'ensemble des personnels de l'éducation nationale (59 %). Toutefois, on peut noter que 59 % des personnels administratifs de catégorie A estiment que la charge de travail devrait être allégée, alors que seuls 41 % estiment leur rémunération inadaptée. Parmi les personnels de l'ensemble de l'éducation nationale, seuls 44 % évoquent une charge de travail inadaptée. Ainsi, pour les personnels administratifs les plus qualifiés, une part importante de leur mal-être est liée à la charge de travail en hausse constante du fait des évolutions permanentes de leurs missions. Enfin, 32 % des personnels de catégorie A et 35 % des personnels administratifs de catégorie B et C souhaiteraient une amélioration des perspectives de carrière.

Déclarations des personnels sur les domaines à améliorer prioritairement
pour l'exercice de leur métier

(en %)

 

Pouvoir d'achat

Charge de travail

Perspectives de carrière

Santé au travail

Formation professionnelle et continue

Personnels administratif catégorie A en EPLE

41

59

32

19

23

Personnels administratifs de catégorie B et C en EPLE

55

35

35

20

15

Ensemble des personnels de l'éducation nationale en EPLE

59

44

27

15

20

Note : plusieurs réponses sont possibles pour chaque répondant.

Source : commission des finances d'après la DEPP

L'enquête menée par Georges Fotinos et José Mario Horenstein43(*), intitulée Les personnels d'administration, les invisibles du système administratif, relevait également que 77,5 % des personnels administratifs interrogés évoquaient une augmentation du temps de travail depuis quatre ans. L'inadaptation des outils informatiques était relevée par 45 % des fonctionnaires de catégorie A et par 35 % des fonctionnaires de catégorie C. Près de 4 personnels sur 10 estiment délaisser le coeur de leur métier pour effectuer des tâches de gestion numérique. Les enjeux de conduite du changement en matière numérique sont donc essentiels pour la gestion des personnels administratifs.

Il faut noter toutefois de manière générale que les personnels administratifs apprécient travailler dans leur établissement. Les personnels de catégorie A évaluent à 6,6 sur 10 leur satisfaction et les personnels de catégorie B et C à 7,1, contre 7,2 pour l'ensemble de l'éducation nationale.

Les personnels administratifs sont aussi peu sollicités dans la conception des évolutions pédagogiques. L'idée de les impliquer davantage a ainsi émergé. Le Conseil national de la refondation propose aux EPLE de construire des projets éducatifs en vue d'améliorer la réussite et le bien-être des élèves. Ces projets doivent être le résultat des réflexions de l'ensemble de la communauté éducative, y compris des personnels administratifs. Ils peuvent bénéficier, le cas échéant, du soutien financier des autorités académiques et des crédits du Fonds d'innovation pédagogique. Il s'agit d'une initiative intéressante permettant d'associer les personnels administratifs à des évolutions dont ils accompagnent la mise en oeuvre dans leurs missions.

B. LA GESTION DES PERSONNELS ADMINISTRATIFS, SYMPTÔME D'UNE POLITIQUE MINISTÉRIELLE DES RESSOURCES HUMAINES À AMÉLIORER

1. Un pilotage des ressources humaines centré sur les enseignants
a) Une gestion des carrières des personnels administratifs peu individualisée

Dans l'organisation des rectorats, les services chargés de la gestion des personnels administratifs sont généralement confondus avec ceux chargés des personnels de direction, c'est-à-dire les principaux, proviseurs et leurs adjoints, ainsi que des personnels d'inspection. Moins nombreux et moins identifiés, les personnels administratifs font peu l'objet d'une gestion individualisée. Ainsi, les secrétaires généraux d'académies entendus par le rapporteur spécial reconnaissent les limites de leur gestion, indiquant « ne pas être en mesure d'accorder aux agents la considération attendue d'un employeur »44(*), faute de moyens suffisants. À titre d'exemple, le service gérant les 3 299 personnels administratifs de l'académie de Créteil comportait 15 agents, dont 12 gestionnaires s'occupant uniquement de la paie et 3 des actes liés à la carrière des personnels (mutations et avancement essentiellement).

S'agissant de l'exemple des mutations, les mobilités sont rendues d'autant plus complexes que les académies sont très différemment attractives, ce qui est commun à l'ensemble de la fonction publique, mais également qu'elles offrent des niveaux de rémunération inégaux. En conséquence, les académies les plus attractives (Aix-Marseille notamment) se contentent de leur propre vivier de recrutement et recrutent peu de personnels extérieurs à leur académie. A contrario, les académies franciliennes voient leurs difficultés de recrutement croître annuellement.

Ainsi, les mouvements interacadémiques des personnels administratifs sont de moins en moins fluides et de plus en plus fragmentés. Le nombre de mutations obtenues par les personnels administratifs de catégorie A a été quasiment divisé par deux en trois ans, du fait d'une baisse du nombre de mutations liées à une diminution du nombre de postes ouverts dans les académies les plus demandées. Le taux de satisfaction des mutations est relativement stable entre 2019 et 2022 pour les catégories A et B, malgré une forte baisse entre 2021 et 2022.

Synthèse des opérations de mutation des personnels administratifs
entre 2019 et 2022

(en nombre de postes et en %)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'Éducation nationale

S'agissant des autres dispositifs de gestion des carrières, leur place reste anecdotique. Pour 22 académies, seuls 293 personnels administratifs, santé et social ont mobilisé sur l'année scolaire 2021-2022 leur compte personnel de formation (CPF). Pire encore, seuls 61 personnels ont bénéficié d'un congé personnel de formation.

Alors que les personnels administratifs sont en majorité des gestionnaires des ressources humaines pour le 1,2 million de personnels du ministère, le travail qualitatif attendu de ces personnels s'applique peu à leur propre filière.

b) Une gestion « RH de proximité » bénéficiant essentiellement aux enseignants

Depuis 2019, le ministère tente de mettre en place une gestion des ressources humaines (GRH) de proximité45(*). L'objectif de cette réforme est de densifier les liens entre les agents du ministère et les services des ressources humaines en rectorat et en centrale. D'après le ministère, cette politique d'accompagnement personnalisé s'adresse à l'ensemble des personnels, y compris les personnels administratifs.

Si le dispositif est ambitieux sur le papier, dans un ministère où la gestion des ressources humaines est rendue complexe par la masse des personnels en jeu, la création des 350 conseillers RH de proximité pour 1,2 million de personnels n'a cependant pas permis une transformation en profondeur, d'autant plus qu'elle a été effectuée à moyens constants.

Les conseillers RH de proximité n'exercent pas de compétences en matière de gestion des carrières (avancements, promotions, etc.) ni en matière d'intervention sociale. D'après une enquête menée en 2021-2022 par la DGRH, les personnels administratifs représentent 13 % des sollicitations auprès des conseillers RH de proximité, dont la plupart pour des reconversions professionnelles.

Ces données sont cohérentes avec celles de l'enquête menée par Georges Fotinos et José Mario Horenstein46(*), indiquant qu'en 2022, 82 % des répondants n'avaient pas fait appel à la GRH de proximité au cours de l'année passée. Lors de son audition, la direction des ressources humaines a indiqué que, du fait de leur faible nombre, les conseillers RH de proximité sont dans les faits davantage mobilisés pour les personnels les plus en difficulté, détournant ainsi l'objectif initial d'un accompagnement de qualité à destination de l'ensemble des personnels.

2. Face à la complexification des missions, l'indispensable amélioration de la formation continue

Les différents rapports de la commission des finances47(*) ont mis en avant l'insuffisance de la formation continue des enseignants. Ce constat est également valable pour les personnels administratifs du ministère.

D'un point de vue quantitatif, le nombre de jours de formation des personnels administratifs est inférieur à celui des enseignants dans de nombreuses académies : 8,4 % des premiers ont suivi une formation dans l'année contre 75 % pour les seconds dans l'académie de Versailles, 34 % contre 80 % dans l'académie d'Aix-Marseille48(*). Au niveau national, 29 % des personnels administratifs ont assisté à une formation en 2023. Cette proportion est globalement stable aux cours des dernières années, exception faite de la crise sanitaire. En proportion de leur population, les agents des catégories A et B sont davantage formés que les agents de catégorie C.

Accès des personnels administratifs à la formation continue de 2018 à 2023

(en nombre de personnes ayant assisté à une formation)

Source : commission des finances d'après le ministère de l'Éducation nationale (enquête nationale DGESCO)

Comme souvent s'agissant de formation continue, celle-ci se concentre, outre les prises de postes, sur certains personnels volontaires, d'autres n'étant pas ou très peu concernés par l'accès à la formation. D'après les études précédemment mentionnées menées auprès des personnels par Georges Fotinos et José Mario Horenstein, près d'un quart (23 %) des personnels ont déclaré n'avoir suivi aucune formation au cours des cinq dernières années. 36 % ont déclaré avoir suivi une à deux formations sur la même période et environ un quart (23 %) plus de deux formations.

Sur le plan qualitatif, c'est-à-dire s'agissant de la qualité et du contenu des formations, 32 % des personnels, aux termes de cette même enquête, considèrent que la formation n'est pas adaptée au métier. D'après la DEPP49(*), la formation continue constitue l'un des domaines à améliorer prioritairement pour 23 % des agents de catégorie A et pour 15 % des agents des catégories B et C.

En outre, les formations restent axées sur la prise de poste, mais demeurent largement inférieures à celles mises en place par d'autres ministères. Ainsi, les agents comptables (en catégorie C) bénéficient-ils dans l'académie de Nancy de quatre jours de formation lors de leur prise de poste, contre quinze jours de formation pour les agents ayant un poste équivalent à la direction départementale des finances publiques.

Les difficultés actuelles liées aux systèmes d'information (RenoiRH et Op@le en particulier) mettent au jour, outre la nécessité d'une formation renforcée sur la prise en main des outils, un besoin plus large de formation sur le contenu même des emplois. À titre d'exemple, les reproches faits à Op@le sont parfois liés au fait que le logiciel ne permet plus de prendre les mêmes souplesses qu'auparavant avec les règles de la comptabilité publique, de sorte que, pour être efficace, la formation à l'outil doit être cumulée avec des formations « métiers » juridiques.

En outre, les grandes priorités du ministère, en particulier en matière de lutte contre le harcèlement ou de laïcité, impliquent de former à grande échelle et rapidement les agents administratifs, en particulier ceux présents en établissements scolaires.

Lors de l'audition de la DGRH, les représentants du ministère ont reconnu le caractère « très disparate » de la formation continue, notamment du fait de la priorisation des moyens de formation pour les personnels non enseignants de certaines académies vers les personnels de direction (proviseurs, principaux et leurs adjoints). Le ministère semble être conscient des difficultés : « un sondage mené par la DGRH sur le pilotage de la formation de cette filière, les profils des formateurs et leur formation, a confirmé une hétérogénéité du pilotage ainsi que la nécessité de professionnaliser la filière et les formateurs50(*) ».

Pour tenter de répondre à ces critiques, les enjeux de formation continue ont été inclus dans les réflexions sur le plan de requalification de la filière administrative de 2021. Désormais, chaque plan académique de formation déployé dans les écoles académiques de la formation continue (EAFC) doit comporter un volet dédié aux personnels administratifs.

L'intégration des personnels administratifs dans les plans académiques
de la formation continue

Chaque académie a désigné un référent qui a en charge de concevoir et mettre en oeuvre le plan de formation des personnels administratifs. Ce référent est de préférence un binôme, qui doit porter une vision stratégique de la formation, bien connaître les métiers de la filière administrative et disposer de compétences en ingénierie de formation. Ces référents constitueront à terme un réseau national.

Sous l'impulsion de la DGRH, ils participent depuis mai 2023 à la formation « Concevoir le plan de formation de la filière administrative », proposée par l'institut des hautes études de l'éducation et de la formation (IH2EF). Cette action doit se poursuivre jusqu'à l'été 2024. Il s'agit d'une formation action qui a pour objectif de permettre aux binômes de construire en une année un plan de formation élaboré.

Source : DGRH

Si cela constitue un progrès, la prise en compte des agents administratifs dans les plans académiques de formation ne saurait constituer l'intégralité de la réponse du ministère. En particulier, les réponses transmises par la DGRH montrent que l'ensemble des formations spécifiques se centrent sur la formation à la prise de poste : « Il s'agit en premier lieu de former l'ensemble des nouveaux collaborateurs, titulaires ou contractuels recrutés pour exercer des emplois permanents. [...] Le second volet concerne la formation aux futures fonctions exercées des nouveaux arrivants ». Une attention spécifique est également portée sur les personnels contractuels. Mais peu d'efforts sont accordés à l'heure actuelle au développement des compétences et de formations métiers qualitatives. Les formations d'initiative locale (FIL), c'est-à-dire demandées par les personnels à l'échelle d'un établissement ou d'un bassin scolaire, commencent à se développer y compris pour les personnels administratifs. Le rapporteur spécial estime qu'il est indispensable d'aller plus loin sur cet aspect, afin de partir des besoins du terrain dans la construction des formations, premier pas indispensable à la mise en place de formations de qualité.

Pour ce faire, il est indispensable d'accroître le vivier de formateurs, dans la mesure où leur manque est fréquemment souligné. Afin de valoriser l'action des personnels référents et formateurs, le ministère pourrait engager une réflexion sur la mise en place d'une certification spécifique. À l'heure actuelle, les formateurs administratifs ne peuvent être certifiés, contrairement aux enseignants formateurs qui bénéficient de certifications spécifiques. Il serait opportun de réfléchir à la mise en place d'une certification spécifique.

Enfin, les aspects tenant à la formation continue s'inscrivent dans l'enjeu plus général de professionnalisation de la gestion des ressources humaines du ministère. Comme sur bien des sujets propres au ministère de l'Éducation nationale, l'enjeu est de passer d'un pilotage quantitatif, par grandes masses, à une gestion plus fine et davantage adaptée aux agents.

Recommandation n° 10 : renforcer le cadre effectif d'accès des personnels administratifs à la formation continue tout au long de leur carrière, notamment par le développement de formations d'initiative locale (DGRH)

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 22 mai 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial, sur les personnels administratifs du ministère de l'Éducation nationale.

M. Claude Raynal, président. - Nous entendons maintenant une communication de notre collègue Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la mission « Enseignement scolaire », sur les personnels administratifs du ministère de l'éducation nationale.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. - Au cours de l'examen du dernier projet de loi de finances, vous avez été nombreux à m'interroger sur l'administration de l'éducation nationale. Afin de pouvoir répondre à vos questions sur ce sujet important, j'ai souhaité consacrer mon travail de contrôle budgétaire aux personnels administratifs du ministère de l'éducation nationale.

Le premier constat que je dresse est le suivant : cette administration est peu ou mal connue. Elle est mal connue des élèves et des familles, qui sont peu en contact avec elle, mais parfois aussi des enseignants, qui n'ont de contacts fréquents qu'avec une administration : celle de leur établissement scolaire. Depuis vingt-cinq ans, aucun travail approfondi n'a été produit sur la question : ni rapport parlementaire ni enquête, qu'elle provienne de la Cour des comptes ou d'une inspection générale. Le dernier écrit d'importance consacré à l'administration de l'éducation nationale figure dans le rapport d'une commission d'enquête sénatoriale présidée par Adrien Gouteyron, en 1999. Le rapport que je vous présente fera donc, je l'espère, oeuvre utile.

Il faut d'abord savoir qui compose l'administration et garder en tête la distinction entre personnels administratifs, personnels n'étant pas devant élèves et personnels non-enseignants. L'essentiel des 300 000 personnels non-enseignants sont devant élèves. C'est le cas des personnels de vie scolaire, notamment des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) et des assistants d'éducation (AED). Les personnels administratifs proprement dits ne représentent qu'une part très marginale des personnels du ministère, 4,3 %, soit environ 51 000 emplois. C'est sur eux que se concentre mon rapport. S'ils sont peu nombreux et souvent invisibles, l'éducation nationale ne fonctionnerait pas sans eux.

Ensuite, il faut savoir si ces personnels sont trop nombreux au regard des missions qu'ils doivent accomplir. Il convient de noter que les effectifs des personnels administratifs ont légèrement diminué depuis 2015 et qu'ils ont baissé de 21 % depuis 2007. On constate donc une chute d'un cinquième des effectifs en quinze ans, qui sont passés de 65 000 à 51 000. La hausse du nombre de personnels non-enseignants à laquelle la presse a fait référence est liée quasiment exclusivement à la mise en oeuvre de l'école inclusive. En effet, le nombre d'AESH a triplé depuis 2015 et s'élève désormais à plus de 120 000 emplois.

Pour évaluer la taille de l'administration de l'éducation nationale, la comparaison avec les autres ministères est frappante. La direction du budget a établi un ratio du nombre de gérants pour le nombre de gérés, qui est de six pour mille à l'éducation nationale. Il est cinq fois plus élevé au ministère des armées et trois fois plus au ministère de l'économie. Le nombre de personnels administratifs de l'éducation nationale est donc loin d'être surdimensionné. De plus, il faut prendre en compte l'ampleur des missions à accomplir : gérer 1,2 million de personnels et permettre l'accès à l'éducation pour 12,7 millions d'élèves.

L'administration de l'éducation nationale est peu nombreuse, mais aussi inégalement répartie sur le territoire national, le ratio d'administration variant de un à trois selon les académies. Des redéploiements de personnels sont parfois nécessaires pour limiter ces inégalités territoriales.

L'administration de l'éducation nationale est enfin peu qualifiée. Ainsi, les personnels administratifs comptent 40 % de fonctionnaires de catégorie C, contre 18 % en moyenne dans la fonction publique d'État. Les missions accomplies par les personnels administratifs sont pourtant de plus en plus complexes, ce qui génère des frustrations et un sentiment d'injustice, alors même qu'ils accomplissent des tâches ne relevant pas de leur catégorie statutaire.

Vous me permettrez également d'évoquer le cas particulier des écoles du premier degré, dans lesquelles aucun personnel administratif n'est présent. Les tâches administratives y sont accomplies intégralement par les directeurs d'école, qui bénéficient de peu de décharges dans les petites écoles. L'ampleur des tâches ne relevant pas de la mission pédagogique du directeur, mais simplement de la gestion logistique de l'établissement, engendre un mal-être bien compréhensible. Le directeur d'école doit pouvoir disposer de temps pour piloter son école d'un point de vue pédagogique. Une réflexion devrait être engagée pour mutualiser certaines tâches administratives au sein des directions départementales et mobiliser des inspecteurs de l'éducation nationale.

J'en viens aux enjeux budgétaires. Évidemment, dès qu'il s'agit de l'éducation nationale, les montants en valeur absolue sont impressionnants. Pour 2024, le coût annuel des personnels administratifs de l'éducation nationale s'élève à 2,745 milliards d'euros. Cependant, ce montant ne représente que 3,3 % des dépenses totales de la mission « Enseignement scolaire » et 3,5 % des dépenses de personnel. À titre de comparaison, les rémunérations des AESH devraient coûter près de 5,5 milliards d'euros en 2025.

Depuis la rentrée 2020, les moyens budgétaires inscrits en loi de finances ne prévoient aucune mesure d'emploi pour les personnels administratifs, de sorte que les nouveaux établissements scolaires ne sont pourvus que par redéploiement.

Si les crédits dédiés ont augmenté de 160 millions d'euros entre 2023 et 2024, cette hausse est due pour moitié à des mesures de revalorisation concernant l'ensemble de la fonction publique, notamment aux deux augmentations du point d'indice. Cette hausse est également liée à une politique de revalorisation salariale de ces personnels, qui paraissait nécessaire. Le ministère de l'éducation nationale a admis être « très en retard » par rapport à la moyenne des administrations pour la rémunération de ses personnels administratifs. En moyenne, ces derniers sont payés 360 euros bruts de moins par mois que les agents d'autres administrations. La différence atteint 410 euros bruts par mois pour les personnels de catégorie B.

Cet écart est le résultat d'une sédimentation historique et a commencé à se résorber. Le ministère a mis en place une politique de convergence indemnitaire, financée à hauteur de 57 millions d'euros. Cette mesure aura permis d'augmenter en moyenne les agents de catégorie A de 3 000 euros annuels et celle des catégories B de 2 000 euros. Pour les agents de catégorie C, cette hausse aura entraîné un gain de rémunération de 56 euros par mois, soit 675 euros annuels.

En outre, les grilles de carrière sont très plates : il faut 19 ans d'ancienneté à un agent de catégorie C pour voir sa rémunération brute mensuelle augmenter de 100 euros par rapport à celle qu'il obtenait en début de carrière.

Le ministère a également mis en place un plan de requalification pour la période 2021-2026. L'objectif de ce plan est de réduire de neuf points la proportion d'agents de catégorie C sur cinq ans, ce qui permettra de reconnaître les compétences de ces personnels.

Il n'en demeure pas moins que l'objectif de rattrapage entre le personnel du ministère de l'éducation nationale et les autres ministères est loin d'être atteint et que ce décalage entraîne des difficultés de recrutement. Les inscriptions aux concours administratifs du ministère de l'éducation nationale ont significativement diminué entre les sessions 2018 et 2023, baissant de 35 % en cinq ans. Cette baisse doit également être reliée aux conditions de travail de ces personnels.

Les missions des personnels administratifs sont de plus en plus complexes et diversifiées. Le coeur du métier des personnels administratifs se transforme progressivement, même si les effets concrets de cette réorientation des missions tardent à être perçus par les autres personnels de l'éducation nationale. De plus, de récents développements informatiques ont représenté des sources de frustrations très importantes pour ces personnels. Ainsi, la satisfaction au travail des personnels administratifs de l'éducation nationale est inférieure d'un point par rapport à la moyenne des actifs français. Un meilleur accompagnement doit être assuré par le ministère, qui doit notamment accentuer sa stratégie de conduite du changement.

J'en viens enfin à la question du temps de travail des personnels administratifs de l'éducation nationale, qui a pu faire l'objet de controverses. Il convient de noter que le régime de temps de travail des personnels administratifs est identique à celui des autres personnels de l'éducation nationale. Il est conçu pour adapter le régime légal des 1 607 heures de travail annuelles aux contraintes spécifiques du calendrier scolaire. Les personnels administratifs doivent réaliser davantage d'heures de travail en période scolaire que pendant les congés.

Toutefois, une circulaire de 2002 permet aux personnels de déroger à la règle des 1 607 heures annuelles, notamment en comptant les jours fériés suivis ou précédés de jours travaillés comme des jours de travail. Ces dispositions sont obsolètes, fragiles juridiquement et doivent être abrogées pour aligner l'ensemble du cadre juridique du temps de travail des personnels administratifs sur celui du reste de la population.

Je signalerai toutefois que l'ensemble des personnes que j'ai entendues à ce sujet, au ministère et dans les établissements, ont estimé que les personnels administratifs réalisaient effectivement 1 607 heures de travail annuelles. L'abrogation du cadre juridique obsolète ne permettra pas de diminuer le nombre de personnels administratifs.

Le constat était sans doute un peu long, mais il était nécessaire de présenter ces personnels dans le détail avant d'aborder les recommandations découlant de mes travaux. Celles-ci sont au nombre de dix et je ne les citerai pas toutes. Certaines sont techniques, comme la recommandation, tenant à l'information du Parlement, qui vise à inclure un suivi de ces personnels dans les documents budgétaires. D'autres recommandations correspondent à des cas rencontrés sur le terrain, lors des deux déplacements que j'ai effectués à Créteil et dans l'académie de Nancy-Metz. À titre d'exemple, des missions assurées bénévolement par les personnels administratifs des établissements auraient pu donner lieu à une rémunération supplémentaire, au titre du pacte enseignant mis en place à la rentrée 2023. Or le pacte est réservé aux équipes éducatives et reste inaccessible aux personnels administratifs. Si un agent administratif réalise une mission pouvant être rémunérée au titre du pacte, il serait souhaitable qu'il puisse bénéficier des mêmes avantages que les enseignants. Il s'agit d'une mesure de justice, qui porte sur des cas marginaux. Nous devons également conduire une réflexion sur la place de l'administration dans le premier degré, en apportant un soutien administratif aux directeurs d'école, afin de leur permettre de remplir leur mission de pilotage pédagogique.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sur cette dernière question, pour bien évaluer les enjeux, il faudrait comparer les charges de travail administratif dans une école de 300 élèves et dans un petit collège situé en territoire rural, qui n'accueille que 200 élèves. Le second bénéficie d'un appui administratif, mais non la première, ce qui pose question. Il faudrait déterminer si un modèle est plus performant que l'autre.

Le rapport permet de mesurer les écarts qui demeurent entre les académies en matière de nombre de personnels administratifs. On constate un ratio de un à trois entre académies les mieux et les moins bien dotées, ce qui pourrait certes être pire, mais dont nous ne pouvons nous satisfaire.

En matière de qualification et de rémunération, nous apprenons que 40 % de ces personnels administratifs sont des agents de catégorie C et qu'il peut leur falloir vingt ans pour progresser de 100 euros sur la grille indiciaire, ce qui paraît d'une autre époque. Ce rapport souligne bien les efforts qui restent à fournir en la matière. Je note aussi qu'un plan de requalification est mis en place, qui doit participer à l'encadrement de l'ensemble de la communauté éducative, y compris des personnels administratifs, souvent mal identifiés par les parents, les enseignants et même les enfants.

Très en amont de nos discussions à venir sur le budget, ce rapport nous permet de développer nos connaissances sur ces agents, qui représentent moins de 5 % des personnels de l'éducation nationale, et de mieux comprendre à quoi correspondent les 25 % de personnels non-enseignants, chiffre que l'on retrouve fréquemment dans le débat public.

M. Stéphane Sautarel. - Je partage les recommandations présentées dans ce rapport, qui a le mérite de donner des chiffres sur un sujet souvent évoqué. Ma remarque portera toutefois non sur les personnels administratifs mais sur les 75 % d'enseignants que compte l'éducation nationale. Cette proportion comprend des enseignants qui ne sont pas devant élèves ; pourrait-on en savoir davantage à leur sujet ?

Mme Christine Lavarde. - Quelles fonctions remplissent ces personnels administratifs ? Quelle part représentent-ils parmi les personnels des directions des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN)= ?

S'agissant du temps de travail, le mot « obsolète » semble effectivement adapté. Pourquoi ces personnels sont-ils soumis au calendrier de l'éducation nationale alors qu'ils ne sont pas tous devant élèves ? Sont-ils tous soumis au régime des 36 semaines scolaires ou peuvent-ils choisir un temps de travail plus classique ? Y a-t-il une durée maximale de temps travaillé par jour ?

M. Arnaud Bazin. - Le rapport réfute l'idée d'une suradministration de l'éducation nationale. Cependant, on peut se poser la question des tâches effectuées par ces agents ; font-elles toutes sens ? Quel est l'impact de la numérisation sur les besoins en personnel et sur les tâches elles-mêmes ?

Mme Florence Blatrix Contat. - Je suis frappée par la sous-rémunération des agents par rapport aux personnels des autres administrations, créant un problème d'attractivité. Les revalorisations relativement faibles pour les catégories C sont aussi sources d'inégalité.

En ce qui concerne l'accompagnement administratif des directeurs d'école que vous proposez, je soulignerai un biais possible : placer des administratifs dans les écoles, pour prendre en charge des tâches qu'il n'est pas toujours simple de différencier des tâches pédagogiques, risque d'aboutir à des regroupements d'écoles et à la disparition de certains établissements dans nos communes rurales.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. - Le rapporteur général nous engage à comparer un petit collège à une école. Le premier est dirigé par un principal : il s'agit, non pas d'un personnel administratif, mais d'un personnel de direction, qui est entouré, au minimum, d'un secrétaire et d'un gestionnaire, dénommé « secrétaire général », soit deux personnels administratifs. Au sein de l'école primaire, le directeur est seul et il est plus ou moins déchargé, selon la taille de l'établissement - la décharge est totale uniquement à partir de douze classes ou plus. En la matière, je préconise non pas de placer un personnel administratif dans toutes les écoles, mais éventuellement de réfléchir à la mutualisation de secrétaires volants, qui pourraient venir de l'administration rectorale ou des DSDEN afin d'accompagner les directeurs dans le travail purement administratif.

Quant aux disparités entre académies, elles sont effectivement très fortes et le rapport donne des chiffres précis. Entre Versailles ou Créteil d'une part et la Corse d'autre part, le ratio est bien supérieur à celui de un à trois. Certes, des considérations démographiques entrent en ligne de compte, mais elles n'expliquent pas la totalité de ces disparités. Le redéploiement n'a pas forcément été bien mené et certaines académies sont sur-dotées, comme celle de Limoges.

Monsieur Sautarel, les enseignants qui ne sont pas devant les élèves représentent 1,5 % des enseignants dans le premier degré et ce pourcentage se décompose ainsi : 1,1 % sont en congé de longue maladie et 0,4 % bénéficient d'une décharge syndicale ou sont élus. Dans le second degré, ce taux s'élève à 3,2 % et 1,8 % sont en congé en maladie.

Qui sont ces personnels administratifs ? D'abord, 61 % travaillent dans des établissements publics locaux d'enseignement (EPLE), 20 % au rectorat, 3 % au ministère et d'autres encore au Centre national d'enseignement à distance (Cned), dans le réseau Canopé ou à l'Office national d'information sur les enseignements et les professions (Onisep).

Dans les collèges, ces personnels ont des fonctions de gestion et de secrétariat. Ils accomplissent parfois des tâches auxquelles on ne pense pas. À titre d'exemple, ils peuvent gérer les gratifications des stages en lycée professionnel. Dans les gros établissements, interviennent des agents comptables, qui ont la charge de plusieurs collèges ou lycées. J'ai ainsi rencontré lors d'un déplacement un agent comptable dont l'agence gérait un budget total de 13 millions d'euros.

De nouveaux logiciels informatiques, relativement complexes, ont été mis en place, avec, parfois, des formations lacunaires. Un système de référents a été instauré pour aider à l'appréhension de ces nouveaux logiciels. Certains des outils informatiques sont parfois un peu vieillots. Sur cette question, je signale que le directeur d'école doit payer lui-même une partie de son ordinateur. Il touche désormais une prime à cet effet ; à raison de 150 euros par an, celle-ci est insuffisante pour obtenir du matériel de qualité, que les municipalités fournissent parfois.

Vous avez raison, madame Blatrix Contat, si nous commençons à rencontrer un problème de recrutement, c'est parce que ces personnels ne sont pas très bien payés. Les revalorisations effectuées vont dans le bon sens, mais restent insuffisantes. À titre d'exemple, les personnels de Moselle sont souvent démarchés par le Luxembourg, où ils touchent jusqu'à trois fois plus. On trouve de moins en moins de directeurs d'écoles, parce que le travail est conséquent et la prime de direction relativement ridicule. Des efforts doivent être fournis, que détaillent les recommandations, notamment sur les heures supplémentaires.

S'agissant du temps de travail, ces personnels administratifs accomplissent bien 1 607 heures annuelles, tout le monde en convient. Les personnels administratifs n'ont pas les mêmes vacances que les enseignants, mais travaillent plus en période scolaire, a fortiori ceux, majoritaires, présents dans les établissements scolaires. Le maximum réglementaire est de 40 heures par semaine. Certains font plus, les surcharges de travail étant difficiles à absorber à certains moments de l'année.

La commission a adopté les recommandations du rapporteur spécial et a autorisé la publication de sa communication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Secrétariat général du ministère de l'éducation nationale

- M. Thierry LE GOFF, secrétaire général ;

- Mme Marine CAMIADE, directrice des affaires financières ;

- M. Thomas LEPAGE, sous-directeur du pilotage et du dialogue de gestion.

Direction générale des ressources humaines du ministère de l'Éducation nationale

- M. Boris MELMOUX-EUDE, directeur général ;

M. David HERLICOVIEZ, chef du service des personnels ingénieurs, administratifs, techniques, pédagogiques, sociaux et de santé et des bibliothèques.

Direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP)

- Mme Mathilde ICARD, cheffe de service de la synthèse statutaire, du développement des compétences et de la donnée ;

- M. Olivier CHARDON, chef du département des études et des statistiques au sein de la sous-direction des études, des statistiques et des systèmes d'information.

Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance
(DEPP)

- Mme Magda TOMASINI, directrice ;

- Mme Guillemette BUISSON, cheffe du bureau des études statistiques sur les personnels.

Direction du Budget - 3e sous-direction - bureau 3 BEN (Bureau de l'éducation nationale)

- Mme Alicia SAOUDI, sous-directrice de la troisième sous-direction ;

- Mme Julie DUBROUX, cheffe du bureau 3BEN.

Direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO)

- M. Christophe GÉHIN, chef du service du budget et des politiques éducatives territoriales.

Table ronde des syndicats

Syndicat national de l'administration scolaire universitaire et des bibliothèques SNASUB -FSU

- M. Philippe LALOUETTE, co-secrétaire général.

Syndicat de l'Administration et de l'Intendance A&I Unsa

- M. Dominique CHASSAGNE, secrétaire national ;

- M. Boris FAURE, secrétaire national.

Union Nationale des Syndicats de l'Éducation Nationale CGT - CGT Educ'Action

- Mme Christèle RISSEL ;

- Mme Sylvie AEBISCHER.

Syndicat national des lycées, collèges, écoles et du supérieur SNALC

- M. Frédéric KELDER.

Table-ronde des secrétaires généraux

- M. Benoît VERSCHAEVE, secrétaire général de l'académie de Versailles ;

- M. François FOSELLE, secrétaire général de l'académie de Normandie ;

- M. Bruno MARTIN, secrétaire général de l'académie d'Aix-Marseille.

M. Georges FOTINOS, auteur d'une étude intitulée « Les personnels d'administration, les invisibles du système éducatif ».

Contribution écrite

Fédération des Syndicats généraux de l'Éducation nationale SGEN-CFDT

LISTE DES DÉPLACEMENTS

Déplacement dans l'académie de Nancy-Metz

Secrétariat général de l'académie de Nancy-Metz

- Mme JEANNIN, secrétaire générale d'académie ;

- M. DELMET, secrétaire général d'académie adjoint et directeur de l'organisation et de la performance ;

- M. DUBOIS-POT, contrôleur de gestion.

Direction des services départementaux de l'Éducation nationale

- M. NOEL, secrétaire général de la DSDEN 54 ;

- Mme Édith BISSAT, cheffe du pôle de gestion des professeurs des écoles des départements du 54, 55 et 88 ;

- Mme GRANDJEAN-DELOY, cheffe du service du 1er degré.

Direction des ressources humaines du rectorat de Nancy

- Mme DIDION, directrice des ressources humaines ;

- Mme COLLIN, cheffe de la DPAE par intérim ;

- Mme LAMBERT, cheffe de la DPE ;

- Mme VOGIN, gestion des personnels administratifs.

M. BOURY, secrétaire général et agent comptable du lycée La Briquerie à THIONVILLE

Lycée des métiers entre Meurthe et Sânon à Dombasle

- M. KOPFERSCHMITT, proviseur ;

- M. MANGEL, proviseur adjoint ;

- M. GRANDJEAN, secrétaire et agent comptable ;

- Membres de l'équipe éducative du lycée.

Collège Albert Camus à Jarville la Malgrange

- Mme FEUGIER Manuelle, principale ;

- M. DELACOUR, secrétaire général.

Déplacement dans l'académie de Créteil

Mme BENETTI, rectrice de l'académie de Créteil.

Secrétariat général de l'académie de Créteil

- M. CHERFI, secrétaire général de l'académie de Créteil ;

- M. BERAHA, secrétaire général adjoint chargé de la direction des ressources humaines ;

- Mme CHARLES, adjointe au secrétaire général chargé de la direction des ressources humaines ;

- M. LEROUX, chef du DACSES ;

- Mme TANGUY, cheffe de la DPAE ;

- Mme MARCI, directrice de la DAFOR.

Collège Edouard Herriot à Maisons-Alfort

- Mme CAIJO, directrice ;

- M. PETIT, directeur adjoint ;

- Mme TOUSSAINT, secrétaire générale ;

- Mme AGATINE, assistante de gestion ;

- Mme CANIEZ, secrétaire.

Lycée Eugène Delacroix à Maisons-Alfort

- Mme LENOBLE, proviseure ;

- Mme LASSALMONIE, secrétaire générale et agent comptable ;

- M. CARRE, secrétaire général adjoint ;

- M. BERQUIER, secrétaire administratif.

TABLEAU DE MISE EN oeUVRE ET DE SUIVI (TEMIS)

N° de la proposition

Proposition

Acteurs concernés

Calendrier prévisionnel

Support

1

Mettre en place au sein des rectorats des référents territoriaux facilement identifiables par les personnels en établissements scolaires, constituant une porte d'entrée vers les différents services.

DGRH

Rentrée 2024

Circulaire ministérielle

2

Moduler davantage le système de répartition des personnels administratifs entre académies afin de tenir compte plus finement des évolutions démographiques.

DGRH, DGESCO

Construction des budgets pour la rentrée 2025

Instructions ministérielles

3

Renforcer le soutien administratif aux directeurs d'école via un appui renforcé des services départementaux de l'éducation nationale et une implication des plus forte des inspecteurs de l'éducation nationale.

DGRH, DGESCO

Année scolaire 2024-2025

Circulaire ministérielle

4

Inclure dans les documents budgétaires un récapitulatif des emplois et des coûts relatifs à chaque filière au sein de la catégorie des personnels administratifs, techniques et de service.

Direction du budget et ministère de l'éducation nationale

PLF 2025

Documents annexés au PLF

5

Renforcer le cadre national applicable aux personnels administratifs contractuels, afin de valoriser et faciliter leur recrutement pour répondre aux problématiques d'attractivité.

DGRH

Rentrée 2024

Circulaire ministérielle

6

Étendre le Pacte aux missions supplémentaires réalisées à titre exceptionnel en dehors de leur champ de compétences par des personnels administratifs présents en établissement scolaire.

DGESCO

Rentrée 2024

Circulaire ministérielle

7

Engager une réflexion sur la rémunération des missions complémentaires effectuées par les personnels administratifs par le biais d'heures supplémentaires.

DGRH, DGESCO

Rentrée 2025

PLF, décision du Gouvernement

8

Préserver les moyens actuellement consacrés aux personnels administratifs afin de ne pas annuler les efforts de convergence indemnitaire avec les personnels comparables des autres administrations de l'État.

Direction du budget et DGRH

PLF 2025

PLF

9

Abroger le cadre juridique obsolète, en particulier la circulaire de 2002 relative au temps de travail des agents, afin de clarifier l'alignement du temps de travail effectif sur le régime de droit commun de la fonction publique.

DGRH

Année scolaire 2024-2025

Circulaire ministérielle

10

Renforcer le cadre effectif d'accès des personnels administratifs à la formation continue tout au long de leur carrière, notamment par le développement de formations d'initiative locale.

DGRH

Année scolaire 2024-2025

Instructions ministérielles


* 1 Données mentionnées lors de l'audition du Secrétaire général du ministère de l'éducation nationale.

* 2 Georges FOTINOS et José Mario HORENSTEIN, Les personnels d'administration, les invisibles du système éducatif, 2022.

* 3 Selon le rapport annuel Fonction publique. Chiffres clés 2023 de la Direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP).

* 4 Il s'agit des effectifs présents au 30 novembre 2022.

* 5 Audition de la direction générale de l'enseignement scolaire.

* 6 Circulaire du 2-4-2021 et décret n° 2022-541 du 13 avril 2022 fixant le régime des décharges de service des directeurs d'école.

* 7 En application de la circulaire du 25 août 2020.

* 8 Loi n° 2021-1716 du 21 décembre 2021 créant la fonction de directrice ou de directeur d'école.

* 9 D'après le décret n°2011-1317 du 17 octobre 2011 portant statut particulier du corps interministériel des attachés d'administration de l'État.

* 10 D'après le décret n°2010-302 u 19 mars 2010 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l'État et à certains corps analogues relevant du décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'État.

* 11 D'après le décret n°2006-1760 du 23 décembre 2006 relatif aux dispositions statutaires communes applicables aux corps d'adjoints administratifs des administrations de l'État.

* 12 D'après la note de la direction générale des ressources humaines (DGRH) du 28 juillet 2023.

* 13 Ces données ont été mentionnées lors de l'audition du Secrétaire général du ministère de l'éducation nationale.

* 14 D'après le décret n° 2012-16 du 5 janvier 2012 relatif à l'organisation académique.

* 15Conformément au décret n°2011-1716 du 1er décembre 2011 relatif à l'organisation et au fonctionnement des établissements publics locaux d'enseignement.

* 16 Conformément à l'article D422-10 du Code de l'éducation.

* 17Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

* 18 Selon l'audition de la Secrétaire générale de l'Académie de Nancy-Metz.

* 19 Cf. infra.

* 20 Rapport de la commission d'enquête sur la situation et la gestion des personnels enseignants et non enseignants de l'Éducation nationale, Mieux gérer, mieux éduquer, mieux réussir, MM. Francis GRIGNON, Jean-Claude CARLE et André VALLET, n° 328 (1998-1999), avril 1999.

* 21 Entendus non au sens de la filière administrative au sens strict, mais au sens plus large des personnels administratifs techniques et de service.

* 22 Enquête de la DGRH, Les contractuels exerçant des fonctions de personnels ingénieurs, administratifs, techniques, pédagogiques, sociaux et de santé (IATPSS) dans l'enseignement scolaire et les sports en 2021, 2022.

* 23 Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

* 24 Décret n° 2012-624 du 3 mai 2012 pris en application de l'article 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et fixant les modalités et les limites de la prime d'intéressement à la performance collective des services dans les collectivités territoriales et leurs établissements publics.

* 25 Décret n° 2015-1087 du 28 août 2015 portant régime indemnitaire spécifique en faveur des personnels exerçant dans les écoles ou établissements relevant des programmes « Réseau d'éducation prioritaire renforcé » et « Réseau d'éducation prioritaire ».

* 26 Moyenne interministérielle calculée en excluant le ministère de l'Éducation nationale et de la jeunesse.

* 27 Audition de la DGRH.

* 28 Audition du secrétariat général.

* 29 Décret n° 2023-519 du 28 juin 2023.

* 30 Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

* 31 Conformément à l'article L. 3121-27 du code du travail.

* 32 Arrêté du 15 janvier 2002 portant application, dans les services déconcentrés et établissements relevant du ministère de l'éducation nationale, du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État.

* 33 Décret n°2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État et dans la magistrature.

* 34 Accord cadre du 16 octobre 2001 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail pour le personnel IATOSS et d'encadrement - Cadrage national.

* 35 Circulaire n° 2002-007 du 21 janvier 2002.

* 36 Relevé d'observations définitives n° S2023-1127 relatif au temps de travail des personnels non enseignants des universités : suivi des suites du référé du 19 septembre 2019.

* 37 Rapport n°2018-M-096-03 sur les régimes dérogatoires aux 35 heures dans la fonction publique de l'État.

* 38 Décret n° 84-972 du 26 octobre 1984 relatif aux congés annuels des fonctionnaires de l'État.

* 39 Audition du directeur général des ressources humaines.

* 40 Décret n° 2023-765 du 11 août 2023 relatif au versement d'une allocation en faveur des lycéens de la voie professionnelle dans le cadre de la valorisation des périodes de formation en milieu professionnel.

* 41 Rapport n°2016-071 de novembre 2016 de l'IGAENR intitulé « L'évolution de la carte comptable : de la croisée des chemins à de nouveaux défis à relever ».

* 42 Rade É, 2024, Bien-être au travail des personnels de l'Éducation nationale : des résultats stables en 2023, note d'information, n° 24.03, DEPP.

* 43 Georges FOTINOS et José Mario HORENSTEIN, Les personnels d'administration, les invisibles du système éducatif, 2022.

* 44 Académie de Créteil.

* 45 Circulaire n° 2019-105 du 17 juillet 2019.

* 46 Georges FOTINOS et José Mario HORENSTEIN, Les personnels d'administration, les invisibles du système éducatif, 2022.

* 47 Réveiller la formation continue des enseignants, rapport d'information n° 869 (2022-2023), M. Gérard LONGUET, juillet 2023.

* 48 Audition des secrétaires généraux d'académie.

* 49 DEPP, Baromètre du bien-être au travail des personnels de l'éducation nationale, printemps 2023.

* 50 Réponses du ministère de l'Éducation nationale au questionnaire du rapporteur spécial.

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