II. UN DISPOSITIF COÛTEUX MAIS EFFICACE
Le SMV est un dispositif d'insertion sociale qui cible un public particulièrement défavorisé et propose un programme très intensif en milieu militaire afin de réinsérer ses bénéficiaires dans le marché du travail.
Son mode de fonctionnement en internat militaire, avec un niveau d'encadrement élevé entraine un coût de fonctionnement par bénéficiaire important.
Cependant, grâce à cette concentration des moyens, le SMV atteint de très bons résultats pour un public difficile, qui méritent d'être soulignés et qui sont reconnus, tant par la Cour des comptes12(*) que par les études économiques et sociologiques sur le SMV commandées par le ministère des armées.
A. LE RECRUTEMENT DES VOLONTAIRES : UN PROCESSUS PERMETTANT DE SÉLECTIONNER DES BÉNÉFICIAIRES RENCONTRANT DES DIFFICULTÉS D'INSERTION
Les modes de recrutement des volontaires sont variés, mais pâtissent globalement du manque de visibilité du SMV, rendant les objectifs de recrutement difficiles à tenir.
Le processus de recrutement en lui-même est relativement long et laisse une forte marge d'appréciation au recruteur du SMV.
1. Un recrutement de jeunes adultes aux origines variées
Les jeunes visés par le dispositif peuvent entrer en contact avec un centre de multiples façons : publicité, orientation par un organisme, bouche à oreille, etc...
La part respective des différents prescripteurs varie significativement d'un centre SMV à l'autre mais, au niveau national, les volontaires ont déclaré en 2022 avoir connu le SMV grâce :
- aux missions locales : 25,2 % ;
- à leur entourage (famille, anciens du SMV) : 21,6 % ;
- à une action de communication (Internet, salons, etc.) : 12,3 % ;
- à la journée défense et citoyenneté : 11 % ;
- aux centre d'information et de recrutement des forces armées : 6,1 % ;
- à Pôle emploi : 6,3 % ;
- aux associations, collectivités : 0,4 %.
Les candidatures spontanées représentent un peu plus de 13 % des candidatures.
Malgré des efforts importants de communication de la part des agents du SMV, le dispositif reste peu connu et il a du mal à recruter plus de 1 000 volontaires par an.
De plus, le SMV s'intègre dans le dispositif du Contrat d'Engagement Jeune (CEJ) lancé en mars 2022, dont il est une des modalités de réalisation. Un renforcement des recrutements grâce au CEJ est espéré par l'état-major du SMV.
2. Un processus de recrutement sérieux
Le recrutement des volontaires du SMV est échelonné dans le temps : les centres et régiments recrutent trois ou quatre cohortes de volontaires par an, ce qui permet de lisser les besoins d'encadrement et de logement dans le temps.
Après que le jeune a été orienté vers ou a décidé de s'inscrire au SMV, il doit réaliser un acte de candidature.
Les jeunes qui réunissent les prérequis pour devenir volontaire sont ensuite convoqués pour une demi-journée de sélection comprenant :
- une phase administrative, étant précisé que les critères administratifs d'accès au SMV sont volontairement souples : il faut être de nationalité française, âgé de 18 à 25 ans, avoir accompli sa journée défense et citoyenneté et ne pas être privé de ses droits civiques ;
- une évaluation de leur niveau scolaire, prévoyant notamment un test d'illettrisme ;
- un entretien de motivation et d'orientation, réalisé par une commission réunissant à la fois l'encadrement militaire, des spécialistes de la formation professionnelle ainsi que les psychologues associés au SMV et, au besoin, les assistantes de service social ;
- une visite d'aptitude médicale.
Les services du SMV demandent également une enquête à la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) au titre du contrôle élémentaire pour le recrutement.
Les dossiers sont examinés par les services du SMV, qui décident des incorporations. Les candidats non retenus peuvent être orientés vers d'autres dispositifs.
Le temps de traitement des dossiers de candidature est d'environ deux mois.
3. Un recrutement visant des jeunes en situation de précarité sociale
Les volontaires du SMV sont recrutés parmi des personnes très vulnérables :
- 60 % de non diplômés ;
- 20 % d'illettrés (dont 3 à 4 % d'illettrisme lourd) ;
- 5 % de jeunes ayant des antécédents judiciaires ;
- 20 % de jeunes issus d'une zone géographique prioritaire.
De manière générale les dossiers des personnes les plus précaires et les moins diplômées sont privilégiés. Une étude DESTINIE, menée en 2019, constatait que son groupe témoins, composé de candidats au SMV non incorporés différait de son groupe test, composé de jeunes incorporés par le SMV : « Ceux-ci sont plus diplômés, un peu plus âgés, ont plus souvent le permis B et ont un taux d'emploi supérieur de plus de 10 points à celui des jeunes incorporés ce qui confirme que l'absence d'emploi, le niveau de diplôme et l'âge ont été des critères de sélection des candidats. »13(*).
Ce profil est stable dans le temps : une seconde étude publiée par les mêmes chercheurs en 2022 avait conclu que « D'une cohorte à une autre, les jeunes changent, mais leurs caractéristiques se reproduisent à l'identique. »14(*).
Les différents responsables du SMV auditionnés insistent unanimement sur l'importance du processus de recrutement pour la réussite du SMV : il s'agit de trouver le bon équilibre au sein d'un public fragile et influençable permettant d'obtenir un amalgame qui pourra être transformé par la formation proposée par le SMV.
Au regard du profil moyen du volontaire stagiaire et des résultats d'intégration des jeunes par le SMV, le recrutement du SMV accompli, au moins sur le plan qualitatif, l'objectif qu'il s'est fixé.
* 12 Observations définitives de la Cour des comptes S2018-0917.
* 13 Denis Anne, Sylvain Chareyron, Yannick L'Horty. Les effets du Service Militaire Volontaire sur
l'insertion des jeunes : un bilan complet après deux années d'expérimentation. 2019. hal-02333857, p. 11.
* 14 Denis Anne, Yannick L'Horty, Formation emploi 2022/4 (n° 160), pages 7 à 29, Anatomie d'un programme de formation intensif : le service militaire volontaire.