EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 27 septembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de M. Dominique de Legge, rapporteur spécial, sur le service de santé des armées (SSA).

M. Claude Raynal, président. - Nous allons entendre la communication de M. Dominique de Legge, rapporteur spécial des crédits consacrés à la Défense, sur le service de santé des armées (SSA).

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. - Le service de santé des armées intervient en opération selon le principe « premiers arrivés, derniers sortis ». Alors que le renouvellement sénatorial vient d'avoir lieu et que nous reprenons nos travaux, il me semble que ce principe pourrait parfaitement s'appliquer à ma communication d'aujourd'hui : je ne sais pas, en effet, si je suis le premier projeté ou le dernier rapatrié parmi les membres de notre commission avant la reconstitution des instances du Sénat...

En matière de défense, l'année 2023 a été marquée par l'adoption d'une nouvelle loi de programmation militaire (LPM) prévoyant un effort financier important en faveur de nos armées : 413,3 milliards d'euros sur la période 2024-2030.

Il faut dire que notre outil de défense s'est trouvé considérablement fragilisé par les choix budgétaires des décennies passées. Il est aujourd'hui loin du niveau requis pour soutenir durablement un engagement des forces dans un conflit de haute intensité.

Pour répondre au défi de la remontée en puissance de nos armées, le soutien santé constitue un enjeu décisif, à ne surtout pas sous-estimer. Sans lui, aucune projection de forces, aucune opération, aucune mission n'est envisageable. Des soignants sont présents dans chaque base, sur chaque théâtre d'opérations, dans chaque frégate, dans chaque sous-marin.

Comme tout service de soutien, le SSA est placé sous l'autorité du chef d'état-major des armées. Il est doté d'un budget de 1,6 milliard d'euros, dont environ 1,2 milliard d'euros de dépenses de personnels, soit un peu moins de 4 % du budget total des armées.

Ses effectifs s'élèvent à plus de 14 000 équivalents temps plein (ETP), dont environ deux tiers de militaires et - chose rare dans les armées - environ deux tiers de femmes. S'y ajoutent un peu plus de 4 000 réservistes.

L'ambition du SSA est de proposer un modèle de soutien santé complet, qui s'articule autour de quatre composantes principales : la médecine des forces, au plus près des troupes ; un réseau de huit hôpitaux militaires, dits « hôpitaux d'instruction des armées » (HIA) ; le ravitaillement médical ; et la formation et la recherche.

Le SSA a subi de plein fouet la cure d'austérité imposée aux armées dans les années 2010. Sous la LPM 2014-2019, le SSA a connu une diminution sèche et brutale de ses ressources budgétaires et une baisse de 10 % de ses effectifs.

La profonde restructuration de la composante hospitalière en a fait la principale sacrifiée. À cet égard, la fermeture en 2016 de l'hôpital du Val-de-Grâce, établissement emblématique, a constitué, pour le SSA, un traumatisme encore perceptible.

Dans ce contexte, la remontée en puissance des effectifs des forces armées - et donc des militaires à soigner -, décidée au lendemain des attentats de 2015, a rapidement placé le SSA dans une situation d'effet ciseaux, alors que ses propres ressources humaines continuaient de diminuer.

Si la prise de conscience de la nécessité de renforcer un service de santé au bord de la rupture s'est rapidement fait jour au ministère des armées, la traduction pratique de cette volonté s'est avérée difficile. En effet, le service est confronté à une conjoncture de très fortes tensions sur les compétences, qui affecte l'ensemble du secteur de la santé. Les moyens budgétaires augmentent bien depuis 2019, mais permettent tout juste de « stopper l'hémorragie » sans parvenir à renforcer les effectifs.

En résumé, la politique de déflation a structurellement et durablement fragilisé le SSA, de telle sorte que, malgré la hausse des budgets, la reconstitution de ses capacités ne se décrète pas du jour au lendemain. Je note au passage que ce constat est applicable à la plupart des capacités militaires.

Face à ce constat, on était en droit de se demander si le SSA était en mesure de remplir son contrat opérationnel. Ma principale interrogation, lorsque j'ai choisi de me pencher sur ce sujet, était de savoir s'il arrivait que des opérations soient reportées ou même annulées faute de pouvoir déployer le soutien médical adéquat. Sur ce point, les états-majors m'ont fourni une réponse claire et nette : non, cela n'arrive jamais. Même si cela est au prix d'arbitrages difficiles, qui peuvent générer des tensions importantes dans les centres médicaux des armées, le SSA est toujours au rendez-vous des opérations. Pour autant, il est clair que ses capacités seraient très rapidement dépassées en cas d'engagement majeur des forces. L'exercice Orion, mené un peu plus tôt cette année, a clairement montré que le SSA était loin de pouvoir traiter un afflux de blessés comparable à ceux qu'on observe, par exemple, de part et d'autre du front russo-ukrainien.

Les principaux leviers pour amener le SSA au niveau requis par la haute intensité sont aujourd'hui bien identifiés.

La hausse des crédits est bien sûr nécessaire, elle est prévue par la LPM. Sur la période de programmation, les crédits hors titre 2 connaîtraient une croissance annuelle moyenne de 12 %.

De l'aveu de l'ensemble des acteurs que j'ai auditionnés, la bataille prioritaire est celle des ressources humaines, de la reconquête des compétences et de la fidélisation des effectifs, dans le contexte de fortes tensions que j'ai déjà évoqué. La LPM porte un objectif ambitieux d'augmentation des effectifs de 460 ETP.

Pour l'atteindre, tous les leviers doivent être mobilisés, à la fois financiers et non financiers. Les hôpitaux militaires éprouvent aujourd'hui de grandes difficultés à attirer des médecins civils. Non seulement ils peinent à s'aligner sur les rémunérations proposées dans le privé, mais, en plus, du fait d'une procédure lourde et très centralisée, les délais de recrutement sont si longs qu'ils découragent les candidats. Un vrai effort de simplification est donc ici à mener.

J'ai également acquis la conviction que la valorisation de l'identité militaire du SSA peut constituer un puissant élément d'attractivité. Les soignants qui rejoignent le SSA ont l'honneur de servir leur pays et accèdent à une pratique singulière et passionnante de la médecine, caractérisée par une technicité de très haut niveau, mais également par une certaine rusticité, qui tranche avec la tendance à l'hyperspécialisation qu'on observe dans la médecine civile.

Sur ce point, le SSA ne doit pas se mettre « à la remorque » du civil, mais au contraire affirmer son identité. Autrement, il serait à craindre que les besoins civils ne fragilisent la résilience de l'armée.

Ensuite, la composante hospitalière du SSA doit impérativement être consolidée. Cela suppose un effort financier conséquent. En effet, dans un contexte budgétaire extrêmement contraint, l'entretien des infrastructures a longtemps constitué la seule variable d'ajustement disponible pour les hôpitaux militaires, qui ont donc constitué une importante « dette grise ».

Le mouvement de remise à niveau a commencé, avec notamment le lancement du projet de remplacement par un établissement neuf de l'hôpital Laveran de Marseille, où je me suis rendu. Le projet, qui doit aboutir à l'horizon 2031, représente un coût aujourd'hui estimé à 300 millions d'euros. À titre personnel, je crains que ce soit bien le minimum. Le mouvement doit désormais être poursuivi dans les autres hôpitaux militaires, en particulier Percy de Clamart et Clermont-Tonnerre à Brest, où l'état de dégradation des infrastructures est également avancé.

Le second enjeu pour les hôpitaux militaires est le rééquilibrage de la relation avec le système civil. Celui-ci comporte deux dimensions.

En premier lieu, il convient de sortir de la logique qui a prévalu dans la période récente, où la principale question était de se demander dans quelle mesure le SSA pouvait aider la santé publique. S'ils ne représentent en effet que 0,5 % de l'offre de soins, les hôpitaux militaires apportent un concours qualitatif précieux : ils sont largement ouverts à la patientèle civile, à laquelle ils peuvent offrir un large éventail de spécialités, parfois rares, avec un haut niveau de performance. Dans le contexte de la pandémie de covid-19, l'opération Résilience a également montré l'utilité, en situation de crise, du SSA.

Cependant, dans la perspective de la préparation à des conflits de haute intensité et donc à un possible afflux de blessés excédant les capacités d'accueil du SSA, il est temps d'inverser la logique et de se demander comment le système civil peut apporter son concours à la politique de défense. Un protocole pluriannuel signé en 2022 entre les ministères des armées, de la santé, et du budget vise à encadrer la coopération en ce sens. Il conviendra d'évaluer celui-ci, lorsque le recul sera suffisant, notamment à l'aune des retours d'expériences issus d'exercice de type Orion. J'ajoute que le SSA me paraît particulièrement adapté à l'accueil de jeunes en service national.

En second lieu, les agences régionales de santé (ARS) doivent mieux comprendre, dans le cadre des coopérations territoriales menées avec le SSA, l'impératif de préserver, dans les hôpitaux militaires, les compétences médicales indispensables à la réalisation de ses missions. On parle ici de compétences dites « projetables », qui répondent aux besoins opérationnels prioritaires des armées, telles que la chirurgie, la réanimation, ou encore, et de plus en plus, la psychiatrie.

J'insiste à cet égard sur le cas d'un hôpital militaire particulier : l'hôpital Clermont-Tonnerre à Brest, dont la mission est de soutenir la dissuasion nucléaire. Les médecins projetés dans les sous-marins nucléaires lanceurs d'engin (SNLE) sont issus de cet hôpital. Leur expertise permet ainsi de réduire par un facteur de huit à dix les évacuations médicales réalisées depuis les SNLE par rapport à la moyenne des autres embarcations, et donc les remontées à la surface des sous-marins. Ils contribuent donc pleinement à la réalisation des missions de la force océanique stratégique. En d'autres termes, le médecin projeté fait partie intégrante du système d'armes du SNLE. Pour cette raison, il est indispensable de renforcer l'hôpital Clermont-Tonnerre, en menant bien sûr les investissements nécessaires, mais aussi en préservant les compétences médicales présentes. La confrontation des médecins de l'hôpital à une large variété de pathologies est essentielle pour maintenir leur niveau de performance. Il y va de la crédibilité de notre dispositif de dissuasion.

Pour résumer mon propos : si la composante hospitalière du SSA peut concourir à la politique d'offre de soins, il faut rappeler que, par essence, elle n'est pas un instrument de santé publique, mais, avant toute chose, un outil de défense.

Un autre axe de montée en puissance identifié est la reconstitution de capacités de soutien médical sur les théâtres d'opérations qui soient adaptées aux conflits de haute intensité.

Il nous faut recréer une capacité à déployer à l'arrière du front un hôpital de campagne dimensionné pour soutenir un engagement de niveau divisionnaire. La LPM prévoit de la constituer à l'horizon 2030, ce qui me paraît tardif eu égard à l'enjeu géostratégique.

Il faut également accélérer le renforcement en cours des capacités d'évacuation médicale aérienne, mais aussi terrestre, car cette dernière peut constituer la seule option lorsque la maîtrise du ciel est disputée. Ce renforcement est lié au programme Scorpion de modernisation de l'armée de terre : on peut regretter les décalages dont il a fait l'objet dans le cadre de la nouvelle LPM. Je m'étais longuement exprimé sur ce sujet lors de l'examen du texte au Sénat.

Enfin, il faut mener les investissements indispensables à la modernisation de la chaîne de ravitaillement et favoriser la mise à l'étude de certains modes d'action innovants prometteurs, tels que la télé-chirurgie ou l'approvisionnement en produits sanguins par drone.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je vous remercie pour cet éclairage et pour vos recommandations. Je voulais vous interroger sur les raisons expliquant la pénurie de personnels au sein du SSA. Ces tensions sont-elles le miroir de celles que l'on observe généralement dans toutes les professions de santé ? Est-ce uniquement une question de nombre de médecins et de manque de candidats ? Ou bien le manque d'attrait du SSA est-il dû aux rémunérations ? Les hôpitaux d'instruction des armées forment-ils assez de personnes ? Ces dernières restent-elles dans l'armée ou ont-elles tendance à partir dans le civil dans une proportion plus importante que jadis ?

M. Marc Laménie. - Notre rapporteur a mis en lumière un service que l'on ne connaît pas toujours. Le volet humain est essentiel. Vous mettez aussi l'accent, dans vos recommandations, sur la rénovation des infrastructures. Que signifie à cet égard la « dette grise » ? Quel est le montant des travaux à réaliser, selon vous, dans les hôpitaux ?

Existe-t-il un nombre réglementaire de médecins et d'infirmières par régiment ? Enfin, vous avez évoqué la psychiatrie. La question du mal-être est importante et d'actualité. L'armée dispose-t-elle d'assez de psychologues pour accompagner les militaires ?

M. Michel Canévet. - Le SSA est une composante des armées souvent oubliée et qui a été délaissée dans les précédentes LPM. Ses effectifs ont fortement baissé et il est temps aujourd'hui de changer de braquet en matière de ressources humaines. Mais la remise à niveau prendra du temps, car on ne forme pas des professionnels de santé du jour au lendemain, alors même que notre pays en manque déjà cruellement.

Je soutiens la recommandation n° 3 : il est important de renforcer les capacités de l'hôpital d'instruction des armées Clermont-Tonnerre de Brest, établissement essentiel qui participe au service public de santé. Il faut aussi soutenir les autres établissements à proximité, comme l'hôpital de Carhaix, notamment pour son service des urgences.

M. Antoine Lefèvre. - Le SSA est peu connu ; ce service est pourtant une pièce maîtresse de notre système de défense. Notre rapporteur propose de dynamiser les ressources humaines : existe-t-il des passerelles entre la médecine de ville et le SSA ? Est-il envisagé de créer ce type de dispositif pour les internes en médecine? Le recrutement de contractuels devrait être facilité.

Mme Christine Lavarde. - Lors de l'examen de loi de programmation militaire, notre rapporteur spécial avait évoqué des réflexions pour dégager d'éventuelles recettes supplémentaires pour les armées. Le SSA peut-il être mobilisé dans cette perspective ? Ce service est ouvert sur l'extérieur et des civils peuvent venir s'y faire soigner. Le SSA retire-t-il des bénéfices de son activité ?

M. Christian Klinger. - Pourquoi faudra-t-il attendre 2030 pour disposer de la capacité de déployer un hôpital de campagne digne de ce nom ? Ce délai est-il imputable à des facteurs financiers, humains ou techniques ? Un tel établissement peut être utilisé à d'autres fins que des fins militaires : souvenez-vous de l'hôpital de campagne de Mulhouse construit pendant la crise du covid-19. Comment expliquer ces délais ?

M. Claude Raynal, président. -Ma question portera sur votre recommandation no 4 : quels équipements et quels services doivent-ils être réservés à l'armée ? À l'inverse quels sont ceux qui peuvent être d'utilité générale et mis à disposition des armées uniquement lorsque cela est nécessaire ? Derrière cette question se pose celle de la mutualisation et des coûts. Dans une guerre à haute intensité, si les protocoles ont été bien préparés en amont, on peut mettre tous les services de la nation au service de l'armée. Notre rapporteur est-il capable de faire cette distinction - subtile, j'en conviens- entre ce qui relève spécifiquement du militaire et ce qui relève du domaine général ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. - Malheureusement, monsieur le président, je ne suis pas en mesure de fournir la clé pour opérer cette distinction très subtile, car elle dépendra forcément des circonstances sanitaires et militaires. Mais je vais essayer de vous donner quelques éléments.

Au fond, une question pourrait être la suivante : a-t-on besoin d'un SSA ? En effet, un patient, qu'il soit militaire ou civil, est toujours un patient. Mais la bonne question, me semble-t-il, est plutôt celle-ci: comment fait-on en temps de guerre pour soigner les blessés ? Les militaires souffrent-ils de pathologies spécifiques - auquel cas le SSA pourrait s'apparenter à un service de médecine du travail ? Plus fondamentalement, les armées ont besoin d'une médecine qui lui soit propre parce qu'en raison de la singularité de leur mission, leur rapport au risque est différent du reste de la société. La société civile exige un service public de la santé totalement sûr, qui apporte le maximum de sécurité. Il ne peut en aller de même pour la médecine militaire qui, par essence, doit accepter une dose de risque. Comme l'a souligné le major général de la Marine lorsque je l'ai entendu, un sous-marin ne peut accueillir à bord, faute de place, qu'un seul médecin et non plusieurs spécialistes de différentes pathologies !

Comment faire dès lors ? Les médecins du SSA ont une connaissance particulière d'un certain nombre de disciplines qui sont essentielles pour traiter les blessures occasionnées au combat. C'est le cas notamment de la traumatologie. Dans l'armée de l'air et de l'espace, les militaires ont parfois des pathologies liées aux variations de pression et à leurs effets sur le coeur. Les médecins du SSA ont acquis une vraie compétence en ce domaine, tout comme dans celui de l'infectiologie pour traiter les maladies rencontrées dans les opérations extérieures, notamment en Afrique. Ces expertises sont mises au service des civils en cas de besoin.

L'enjeu est de trouver le meilleur moyen pour que nos militaires puissent avoir accès aux meilleurs spécialistes, quel que soit l'endroit du globe où ils sont déployés. Les militaires fondent beaucoup d'espoir sur la télémédecine, voire la télé-chirurgie, qui permettrait aux médecins des armées présents sur les théâtres d'opérations d'être accompagnés, à distance, par des spécialistes pour soigner ou même opérer.

En conclusion, je serais tenté de dire que si l'on n'a pas forcément besoin d'une médecine militaire en temps de paix, on a besoin, en revanche, en temps de guerre, de pouvoir disposer, dans l'urgence, d'expertises particulières sur des pathologies précises. Il est difficile de penser que l'on pourra déployer des spécialistes de toutes les disciplines, en nombre, suffisant, sur tous les théâtres d'opérations.

Vous avez été nombreux à m'interroger sur la capacité des armées à recruter des personnels de santé, alors que l'on peine, dans de nombreux territoires, à trouver des médecins et à accéder aux soins. La médecine militaire rencontre les mêmes difficultés de recrutement. Le volet humain est essentiel : je rappelle que les dépenses de personnel représentent trois quart du budget du SSA ! La vraie question est celle de la fidélisation des professionnels de santé. En vertu de leur statut militaire, ils ne peuvent exercer que pendant un certain nombre d'années, tandis que plusieurs d'entre eux sont tentés de rejoindre le privé qui offre de meilleures rémunérations, après avoir accompli la durée minimale de service exigée.

Madame Lavarde, les hôpitaux militaires ne représentent que 0,5 % de l'offre de soins : leur concours est donc marginal, tandis que plus de 70 % de leurs patients sont civils. C'est pourquoi, lorsque nous avons voté la loi de programmation militaire, nous avons tenu compte des recettes versées par la sécurité sociale à raison de l'activité civile des hôpitaux militaires.

Monsieur Klinger, je me demande comme vous pourquoi il faudra attendre 2030 pour pouvoir disposer d'un hôpital de campagne ! Ces délais sont dus tout simplement à des arbitrages réalisés dans le cadre de la loi de programmation militaire qui font que la construction ne pourra pas intervenir avant ! En attendant, il faut continuer de développer en parallèle nos dispositifs d'évacuation médicale. Il est toutefois possible, je crois, de transformer des avions militaires de transport en hôpitaux de premiers secours.

Monsieur Lefèvre, des passerelles entre les médecines civiles et militaires existent, même si elles nourrissent plutôt les fuites de médecins militaires vers le civil... La réponse est la télémédecine : celle-ci permet au médecin généraliste engagé sur le front de recevoir les conseils d'une sorte de back office, installée à l'arrière, pour soigner au plus près.

Michel Canévet a raison : l'hôpital de Brest joue un rôle crucial dans notre système de dissuasion nucléaire. Les médecins projetés dans les sous-marins nucléaires lanceurs d'engin sont issus de cet hôpital. Leur présence à bord permet aux sous-marins de rester en immersion plus longtemps.

Marc Laménie, la « dette grise » est une dette différée : il s'agit des investissements qui ont été reportés, mais qu'il faudra bien réaliser un jour. En attendant, les bâtiments et les équipements continuent à se dégrader. Je n'ai malheureusement pas d'évaluation précise à vous communiquer sur les moyens nécessaires pour procéder à une remise à niveau des hôpitaux militaires dans leur ensemble.

En ce qui concerne la psychiatrie, les besoins en médecins psychiatres sont considérables et l'armée a du mal à en recruter. On pourrait croire que les militaires sont endurcis, mais en réalité la guerre reste traumatisante. Les opérateurs qui réalisent un tir de missile et qui savent, grâce aux écoutes, ce qu'il se passe lorsqu'il atteint sa cible, peuvent être fortement affectés.

Enfin, monsieur Husson, il existe des tensions en matière de recrutement de médecins militaires. Au risque de ne pas être politiquement correct, la forte féminisation du SSA engendre de nombreux congés maternité pendant lesquels les postes ne sont pas couverts à temps plein. Un autre frein aux recrutements tient à la rémunération, souvent inférieure à celle proposée dans le civil, et aux lourdes contraintes de ces postes, qui exigent une très grande disponibilité.

M. Claude Raynal, président. - Je vous remercie.

La commission a adopté les recommandations du rapporteur spécial et a autorisé la publication de sa communication sous la forme d'un rapport d'information.

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