III. METTRE À DISPOSITION DES LYCÉENS UN SERVICE PUBLIC AMBITIEUX DE L'ACCOMPAGNEMENT À L'ORIENTATION : LE PENDANT INDISPENSABLE À PARCOURSUP ET À LA RÉFORME DU LYCÉE

A. UN ACCOMPAGNEMENT À L'ORIENTATION DES LYCÉENS INÉGALITAIRE ET HÉTÉROGÈNE

Des travaux de recherche sur Parcoursup et, plus globalement, sur l'orientation au lycée, qui ont été présentés au rapporteur en audition15(*), il ressort clairement que tous les élèves ne disposent pas du même capital de conseil et d'accompagnement. Le poids du milieu socio-culturel familial sur les aspirations d'études et sur l'accompagnement à la construction du projet d'orientation est très important. Plus la catégorie socio-professionnelle des parents (CSP) est élevée, plus leur mobilisation pour aider l'enfant dans son choix d'orientation augmente. Une étude révèle ainsi que dans les familles appartenant aux CSP+, 80 % des élèves font appel à leurs proches pour les conseiller dans la maturation de leur projet d'études.

À ces inégalités sociales familiales viennent s'ajouter des inégalités dans la qualité et l'intensité du service d'accompagnement à l'orientation mis en place par les lycées. Les recherches menées sur le sujet montrent que les pratiques de suivi des élèves pour leur orientation sont en effet très hétérogènes d'un établissement à l'autre. Alors que certains sont particulièrement impliqués, d'autres renvoient davantage cette question aux familles. Cette hétérogénéité des politiques d'accompagnement à l'orientation s'exprime à trois niveaux :

· au niveau de la précocité du service délivré : certains établissements, notamment ceux situés dans un environnement social favorisé, mettent en place un accompagnement à l'orientation dès la dernière année de collège ou dès la seconde, alors que d'autres, généralement moins favorisés socialement, attendent l'année de première voire de terminale ;

· au niveau de l'intensité de l'accompagnement : c'est également dans les établissements les plus favorisés que le suivi des élèves apparaît beaucoup plus serré et régulier que dans les établissements qui le sont moins ;

· au niveau de sa qualité : dans les lycées favorisés, le service d'accompagnement est aussi plus individualisé, alors qu'il repose davantage sur des pratiques collectives dans les lycées moins favorisés.

Les raisons à cette hétérogénéité sont multiples : caractéristiques de l'ancrage social et territorial de l'établissement, degré d'implication plus ou moins grand des enseignants, notamment des professeurs principaux (facteur dépendant lui-même des incitations dont ces derniers peuvent bénéficier), effectifs plus ou moins importants des autres professionnels scolaires (conseillers d'orientation, psychologues scolaires, conseillers principaux d'éducation)...

Le rapporteur alerte sur le fait que les lacunes et l'hétérogénéité du service public de l'accompagnement à l'orientation au lycée alimentent l'essor d'un marché privé. Même si celui-ci est, à ce jour, difficilement quantifiable, plusieurs études font état de signaux très dynamiques comme l'augmentation du nombre de structures privées proposant des services de coaching scolaire ou la présence de plus en plus importante de ces entreprises dans les salons d'orientation. Or le développement de ce secteur privé de l'accompagnement à l'orientation contribue à aggraver les inégalités sociales entre lycéens, puisqu'y ont majoritairement recours ceux issus de milieux favorisés, compte tenu des tarifs pratiqués.


* 15 Mmes Marie-Paule Couto et Marion Valarcher, sociologues, autrices de l'étude « La motivation au pied de la lettre. Construction et expression des aspirations scolaires sur Parcoursup » ; Mme Agnès Van Zanten, sociologue de l'éducation, directrice de recherche CNRS/Sciences Po/Centre de recherche sur les inégalités sociales (CRIS) ; Mme Anne-Claudine Oller, sociologue, autrice du livre « Le coaching scolaire. Un marché de la réalisation de soi ».

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