J. LE DÉBAT SUR L'INDISPENSABLE RÉEXAMEN DU DROIT DU TRAVAIL
L'intervention de M. Alain Milon, au nom du groupe PPE/DC
Monsieur le Président, Mes chers collègues,
Je veux tout d'abord remercier notre collègue Selin SAYEK BÖKE pour la justesse de son analyse concernant les enjeux d'adaptation des droits du travail. Je suis pour ma part convaincu de la place fondamentale du travail dans la construction de l'individu et dans la construction de la société.
La digitalisation du monde du travail avait déjà largement transformé nos modes d'organisation, tout comme la montée en puissance des plateformes Internet, mais la période de la covid-19 a constitué une rupture fondamentale dont il nous faut analyser les conséquences.
Rupture fondamentale en termes d'organisation, du fait d'un recours massif au télétravail qui met en tension toutes les organisations traditionnelles et fait en partie voler en éclat les cadres classiques des droits du travail. Je pense notamment aux horaires atypiques et au droit à la déconnexion, que le rapport évoque avec justesse. Le télétravail peut offrir à la fois une immense liberté et représenter un étroit filet de contraintes. J'ajoute que les conditions d'exercice du travail à domicile peuvent être parfois moins favorables et moins sécurisantes qu'au poste de travail habituel, où des normes de bien-être et de sécurité au travail s'appliquent le plus souvent. Il en va de même s'agissant de la sécurisation des données de communication. Le recours massif au télétravail conduit donc à rechercher de nouveaux équilibres qui doivent prendre en compte les besoins et les droits des travailleurs au même titre que l'intérêt économique des entreprises et leur nécessité de nouer une relation à distance confiante avec leurs collaborateurs.
Ce nouvel équilibre m'apparaît d'autant plus indispensable que la pandémie de covid-19 n'a pas seulement constitué une rupture en matière d'organisation du travail : elle a aussi entraîné une rupture dans la manière dont un certain nombre de concitoyens perçoivent leur rapport au travail.
C'est un phénomène qui doit donc être analysé de près car il met l'accent sur le sens que nos concitoyens souhaitent donner à leur vie, au travers, notamment, de leur activité professionnelle.
Je voudrais enfin évoquer les conventions fondamentales de l'OIT, auxquelles le rapport fait référence à de nombreuses reprises. Leur respect constitue un enjeu majeur et il me semble que nous devons faire preuve de cohérence, notamment au regard des demandes nouvelles exprimées par nos populations. Si nous devons réfléchir aux modes d'organisation du travail au sein de nos pays, nous devons aussi veiller à ne pas importer des produits dont les conditions d'élaboration ne respecteraient pas ces conventions fondamentales. Je me réjouis à cet égard que la stratégie politique de l'union commerciale de l'Union européenne ait été réorientée en ce sens. C'est un point auquel nous devons être extrêmement attentifs.
Je vous remercie.