LISTE DES RECOMMANDATIONS
LA SOUVERAINETÉ PAR UN
APPROVISIONNEMENT SÉCURISÉ
EN INTRANTS INDUSTRIELS, MINIERS ET
AGRICOLES
Recommandation n° 1 :
Établir une cartographie complète des dépendances critiques en intrants industriels de la France et de l'Union européenne, en :
- menant, sous l'égide du Conseil national de l'industrie (CNI) et en lien avec les Comités stratégiques de filière (CSF), un travail transversal et exhaustif de cartographie des dépendances et des vulnérabilités de l'approvisionnement de la France en intrants et biens intermédiaires industriels ;
- poursuivant au niveau européen l'effort amorcé par la Commission européenne de réalisation d'une cartographie des dépendances stratégiques, chaîne de valeur par chaîne de valeur ;
- introduisant au niveau européen des obligations de traçabilité pour une liste de produits stratégiques ou vulnérables, afin d'améliorer la connaissance des chaînes de valeur et des flux d'échange, et en facilitant l'accès aux données d'échanges intra-européennes existantes ;
- incluant dans l'ensemble de ces travaux une analyse de la criticité des produits pour l'économie européenne et une analyse des risques, y compris géopolitiques, pesant sur l'approvisionnement actuel, à l'échelle tant nationale qu'agrégée (en prenant en compte les dépendances indirectes).
Recommandation n° 2 :
Confier aux filières stratégiques un rôle accru dans la sécurisation de l'approvisionnement industriel, à l'initiative et avec l'appui de l'État :
- identifier les besoins communs en intrants industriels au sein des entreprises d'une même filière ou de filières différentes ;
- lorsque cela paraît pertinent, et dans le cadre défini par le droit de la concurrence, mettre en place des structures d'achats mutualisés afin de rééquilibre les relations commerciales des entreprises industrielles françaises, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME) vis-à-vis de leurs fournisseurs et de mettre en oeuvre des stratégies de diversification ;
- sensibiliser les chefs d'entreprises à l'enjeu de la diversification des sources d'approvisionnement et identifier le potentiel de diversification existant pour les entreprises de la filière ;
- dans le respect du droit de la concurrence, favoriser le recours à des contrats de fourniture de long terme, offrant une meilleure visibilité sur l'approvisionnement en intrants industriels.
Recommandation n° 3 :
Modifier le traitement fiscal de l'actif des entreprises industrielles, afin de rendre plus incitative la constitution de stocks d'intrants et de produits intermédiaires stratégiques, dont la liste sera établie sur la base d'une cartographie des intrants stratégiques ( voir recommandation n°1 ).
Recommandation n° 4 :
Développer le soutien public, par le biais de fonds ou de garanties, aux projets d'investissement des entreprises françaises dans des producteurs d'intrants à l'étranger, afin de contribuer à la sécurisation des chaînes de valeur.
Recommandation n° 5 :
- Améliorer l'évaluation continue et ex post des aides à la « relocalisation », afin de garantir l'efficacité de la dépense publique et le bon ciblage des aides ;
- Mieux cibler sur les intrants critiques ces aides publiques à la « relocalisation » d'activités productives, ainsi que les aides à l'innovation, en s'appuyant sur les résultats des cartographies réalisées par les filières sous l'égide du CNI (voir recommandation n° 1) ;
- En fonction des résultats de ces évaluations, donner à la France un cap clair en faveur de la réindustrialisation à un horizon de dix ans, en fixant des cibles chiffrées de réduction de la dépendance à certains intrants stratégiques importés, couplées à des cibles de production nationale.
Recommandation n° 6 :
Amplifier et accélérer la mise en oeuvre de projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC) permettant d'investir dans des maillons clés des chaînes de valeur européennes, notamment en :
- pérennisant les aménagements pertinents apportés au cadre juridique européen des PIIEC durant la crise liée à la pandémie de Covid-19, et en étudiant la possibilité d'assouplir davantage la réglementation relative aux aides d'État ;
- accompagnant l'émergence de nouveaux projets grâce à un dialogue renforcé entre industriels et États membres ;
- augmentant les moyens humains et financiers des directions générales de la Commission européenne chargées d'accompagner ces projets ;
- améliorant la défense des intérêts français au sein des instances européennes grâce à des simplifications administratives et une action plus volontariste de l'exécutif, afin d'exploiter pleinement les opportunités industrielles ouvertes par les PIIEC.
Recommandation n° 7 :
- Accentuer le soutien, par le biais des aides à la réindustrialisation et à l'innovation, le développement ou l'émergence de filières françaises de recyclage, en particulier concernant les intrants stratégiques ou vulnérables ;
- Évaluer l'impact des obligations introduites par la loi « Économie circulaire » en matière d'écoconception, de réparabilité et de recyclage des produits ainsi que d'utilisation de matériaux recyclés, et le cas échéant les renforcer de manière ciblée ;
- Faciliter le recyclage des produits usagés, en apportant le cas échéant des modifications au statut juridique des déchets.
Recommandation n° 8 :
Consolider l'effort public consenti en direction de l'exploration, de la recherche, de l'innovation et de l'investissement miniers, en :
- débloquant au moins 100 M€ pour l'actualisation de l'inventaire du sous-sol français, en veillant à inclure la France hexagonale mais aussi les Outre-mer et les fonds marins ;
- investissant dans l'ensemble des champs scientifiques requis (cycle de vie des matières minérales, exploration et exploitation du sous-sol, méthodes d'extraction, recyclage, approvisionnement, gouvernance) ;
- consacrant des aides publiques pérennes, en investissement comme en fonctionnement, en accordant une attention spécifique aux entreprises (PME et ETI) et aux étapes (phases pilotes) présentant le plus de vulnérabilités ;
- instituant un inter-groupe dédié aux métaux critiques au sein du Conseil national de l'industrie (CNI), assurant le lien entre les différents comités stratégiques de filières (CSF) existants (mines et métallurgie, nouveaux systèmes énergétiques, plateforme automobile).
Recommandation n° 9 :
Garantir la sécurité d'approvisionnement en métaux critiques, en :
- évaluant et compensant l'impact de la guerre en Ukraine sur les entreprises, dans les stratégies française (Plan de résilience) et européenne (Plan RePowerUE ) de sortie de la dépendance aux importations d'hydrocarbures russes ;
- étudiant, dans ce cadre, la mise en oeuvre de contrats de long-terme, de groupements d'achat, de prises de participation ou de stocks stratégiques ;
- favorisant, en complément de ce cadre, l'extraction ou la transformation sur le territoire national ou européen des métaux critiques nécessaires aux filières énergétiques, nucléaire comme renouvelable, à l'instar du lithium, composant de certaines batteries électriques.
Recommandation n° 10 :
Accélérer la relocalisation de l'activité minière, dans le respect d'un haut niveau d'exigences environnementales, en :
- promouvant la constitution de chaînes de valeur en métaux critiques, à l'instar du lithium, en inscrivant les besoins miniers du système énergétique dans les stratégies française (Loi quinquennale sur l'énergie de 2023, Programmation pluriannuelle de l'énergie, Stratégie nationale bas-carbone) et européenne (Paquet Ajustement à l'objectif 55) ;
- accélérant la délivrance de permis d'exploration et d'exploitation minières, en veillant à la proportionnalité des procédures, à la sécurité juridique des contentieux, à l'équilibre du régime de responsabilité et à l'association des collectivités territoriales, dans le cadre de l'application législative et règlementaire de la réforme du code minier ;
- intégrant le concept de « mine durable » dans la législation française (Réforme du code minier) et européenne (Taxonomie verte européenne), afin de favoriser une approche durable de l'activité minière ;
- soutenant la mise en oeuvre par les professionnels d`infrastructures de collecte et de transformation et intégrer les enjeux miniers au critère du « bilan carbone » conditionnant l'accès des projets d'énergies renouvelables aux dispositifs de soutien publics, afin de promouvoir le recyclage des métaux critiques.
Recommandation n° 11 :
- Élaborer un « plan de résilience » de la chaîne alimentaire pour mieux prévenir les crises, incluant un meilleur suivi de stocks dits stratégiques pour les denrées agricoles ;
- Renforcer la planification territoriale de l'alimentation, par le biais notamment des projets alimentaires territoriaux.
Recommandation n° 12 :
Amender la stratégie européenne « de la Ferme à la fourchette » afin de trouver un meilleur équilibre entre les objectifs quantitatifs en matière de production pour renforcer la souveraineté alimentaire du continent et les objectifs environnementaux.
Recommandation n° 13 :
Renforcer la transparence sur l'origine des produits agricoles et des denrées alimentaires pour garantir un affichage systématique des principaux ingrédients primaires des produits transformés en modifiant le règlement européen INCO.
Recommandation n° 14 :
Maximiser les aides agricoles et investir dans l'innovation des productions les plus menacées par une substitution par les importations.
Recommandation n° 15 :
Renforcer le plan Protéines végétales pour réduire notre dépendance en protéines végétales, notamment dans l'alimentation animale, en l'axant principalement sur des aides à l'investissement pour l'acquisition du matériel nécessaire à la production et à la transformation, qui demeure aujourd'hui un des principaux freins à l'essor de la filière oléo-protéagineuse.
R ecommandation n° 16 :
- S'abstenir de mettre en place dans le contexte actuel le mécanisme fiscal portant sur les engrais prévu dans la loi Climat et résilience ;
- Publier enfin le plan « Eco'Azot », en le tournant résolument vers la reconquête d'une souveraineté en matière d'engrais.
Recommandation n° 17 :
Adapter notre droit en vigueur au niveau européen et français pour sécuriser la propriété des données agricoles qui sont d'importance stratégique (propriété et portabilité des données des agriculteurs, sécurisation des données clés par l'État).
LA SOUVERAINETÉ PAR L'INDÉPENDANCE DES INFRASTRUCTURES ÉNERGÉTIQUES ET NUMÉRIQUES
Recommandation n° 18 :
Garantir la sécurité d'approvisionnement en électricité l'hiver prochain et les suivants, en :
- appuyant l'effort des professionnels pour répondre aux difficultés du parc nucléaire, en particulier le phénomène de « corrosion sous contrainte » ;
- soutenant le système électrique dans son ensemble (économies d'énergie et mécanismes de flexibilité) ;
- répondant à la crise gazière (régulation des prix, obligation de stockage, groupements d'achat, production de biométhane).
Recommandation n° 19 :
Afin de donner un cap clair à la filière nucléaire et de répondre aux besoins croissants d'électricité, sans remettre en cause l'essor des énergies renouvelables, s'affranchir de la limitation a priori de la production d'énergie nucléaire à 50 % d'ici à 2035 dans la planification énergétique (loi quinquennale sur l'énergie de 2023, Programmation pluriannuelle de l'énergie, Stratégie nationale bas-carbone).
Recommandation n° 20 :
Garantir un mode de financement robuste à la filière nucléaire, en :
- intégrant le financement et la réalisation des projets de nouveaux réacteurs nucléaires à la loi quinquennale sur l'énergie de 2023 ;
- consolidant le soutien public aux projets de recherche et de développement nucléaires, dans le cadre du Plan de relance et du Plan d'investissement ;
- limitant le coût de l'électricité pour les consommateurs, en les protégeant de la hausse des prix, tout en évaluant et prévenant l'impact sur les fournisseurs, à commencer par le groupe EDF, dont il faut garantir la durabilité, dans son financement comme dans son organisation, afin qu'il demeure l'un des acteurs majeurs de la filière nucléaire ;
- intégrant pleinement l'énergie nucléaire à la taxonomie verte européenne, en levant les verrous posés (champ, délais, conditions).
Recommandation n° 21 :
Accorder une attention spécifique à la fermeture du cycle du combustible, en mobilisant les financements publics et privés en direction du MOX, des SMR, des réacteurs de 4 e génération et du projet ITER.
Recommandation n° 22 :
Renforcer la planification et le cadre juridique du stockage de l'énergie, en :
- intégrant pleinement le stockage à la planification énergétique (loi quinquennale sur l'énergie de 2023, Programmation pluriannuelle de l'énergie, Stratégie nationale bas-carbone), en veillant à couvrir l'ensemble des modes de stockage et à consacrer les projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC) ;
- apportant un cadre juridique complet au stockage de l'énergie, en garantissant une neutralité technologique pour l'hydrogène (« Taxonomie verte » européenne et Paquet ajustement à l'objectif 55) et en favorisant le réemploi des batteries (règlement sur les batteries électriques).
Recommandation n° 23 :
Consolider les dispositifs de soutien au stockage, en veillant à leur application (garanties d'origine sur l'hydrogène issues de la loi Énergie-Climat et appel d'offres sur le stockage issu de la loi Climat-Résilience), à leur harmonisation (compléments de rémunération sur les énergies renouvelables et réductions de TICFE et de TURPE), à leur pérennité (appels d'offres existants sur l'hydrogène et les batteries) ainsi qu'à leur complétude (appel d'offres attendu sur les STEP).
Recommandation n° 24 :
Accélérer le déploiement des énergies renouvelables, en :
- engageant un chantier de simplification des normes, en étroite association avec les élus locaux (institution de guichets et d'autorisations uniques, utilisation du foncier, procédures d'appels d'offres, conditions de raccordement, modalités de raccordement, délais de recours, planification territoriale) ;
- consolidant les dispositifs de soutien (budgétaires, extrabudgétaires et fiscaux) ;
- relevant les objectifs (dont hydroélectricité, biogaz ou biocarburants).
Recommandation n° 25 :
Élaborer une proposition de règlement européen sur la contribution des plateformes au financement des réseaux de télécommunications permettant à l'Organe des régulateurs européens des communications électroniques de :
- collecter les informations nécessaires à la détermination de la méthodologie de calcul de la contribution financière envisagée ;
- fixer des tarifs harmonisés pour tous les opérateurs européens de télécommunications ;
- réviser régulièrement la méthodologie de calcul et les tarifs fixés ;
- établir une procédure unifiée de règlement des litiges.
Recommandation n° 26 :
Évaluer la faisabilité de constituer un réseau indépendant de câbles sous-marins de télécommunications reliant la France et les pays de l'Union européenne entre eux afin d'améliorer la résilience des infrastructures, la redondance des flux de données et la continuité du trafic Internet en cas d'incidents ou de menaces extérieures.
Recommandation n° 27 :
Confier au Comité interministériel de la mer une mission de simplification de la procédure de demande de pose de câbles sous-marins sur le sol national, en particulier pour les territoires ultramarins.
Recommandation n° 28 :
Amender la proposition de règlement européen établissant des règles harmonisées en matière d'accès loyal aux données et d'utilisation équitables des données ( Data Act ) pour rendre obligatoire la localisation des données à caractère personnel des citoyens européens et des données des entreprises européennes sur le territoire de l'Union européenne.
LA SOUVERAINETÉ PAR
L'INVESTISSEMENT DANS LES COMPÉTENCES
ET LES MÉTIERS DE
DEMAIN
Recommandation n° 29 :
Faire entrer l'industrie dans les écoles, et les écoles dans l'industrie. Encourager l'organisation de visites scolaires ou de stages en entreprise industrielle et de présentation des métiers industriels au sein des établissements, dans le cadre de l'enseignement primaire et secondaire. Refaire de l'orientation un temps fort de la scolarité.
Recommandation n° 30 :
- Mener à bien les études sur les filières et diplômes d'aujourd'hui et de demain et en tirer les conséquences concrètes sur l'enseignement secondaire et supérieur, pour combler les carences sur certaines filières d'éducation et de formation initiale ;
- Repenser en particulier l'offre de formation dans les secteurs de l'électronique, de la métallurgie, du nucléaire et des outils numériques ;
- Confier au ministère chargé de l'industrie la compétence de la conception des filières de formation industrielle et le pilotage de l'enseignement professionnel et technique.
Recommandation n° 31 :
- Accroître le financement de l'apprentissage en France, au regard du nombre croissant d'apprentis et dans l'objectif d'une réindustrialisation durable du pays ;
- Accentuer les efforts d'orientation vers l'apprentissage au sein des lycées professionnels et envers les métiers de niveau Bac pro ou BTS.
Recommandation n° 32 :
Améliorer encore la formation aux métiers, en début et au cours de la carrière, en :
- simplifiant le recours aux actions de formation en situation de travail (AFEST), consacrées par la loi en 2018, au potentiel encore sous-exploité ;
- faisant évoluer les dispositifs de formation continue afin d'accroître leur ciblage sur les métiers en tension et ceux offrant de fortes chances d'accès à l'emploi, par exemple en encourageant à développer des modes de co-financement des formations par l'entreprise lorsqu'elles visent à répondre à un besoin fort de compétences.
Recommandation n° 33 :
Renforcer l'offre nationale de formation aux métiers du cloud pour sortir de la dépendance aux GAFAM en la matière, en :
- augmentant, jusqu'à bac + 3, le nombre de licences professionnelles et de diplômes universitaires technologiques spécialisés dans l'informatique ;
- augmentant, à compter de bac + 4, le nombre de mastères spécialisés dans les métiers du cloud ;
- facilitant les passerelles et les formations complémentaires entre les écoles d'ingénieurs et celles d'informatique ;
- poursuivant, pour la formation initiale et continue tout au long de la vie, le développement des établissements supérieurs d'autoformation en programmation informatique.
Recommandation n° 34 :
Amender la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles harmonisées en matière d'accès loyal aux données et d'utilisation équitables des données ( Data Act ) pour :
- limiter la durée et les montants des « crédits cloud » accordés aux jeunes pousses ;
- encadrer les conditions de changement de plateformes d'hébergement des données et de logiciels cloud vers d'autres entreprises ;
- garantir l'interopérabilité des services d'informatique en nuage et la portabilité des données transférées.
Recommandation n° 35 :
Préserver et consolider les politiques publiques favorisant le travail saisonnier en France à court terme, tout en réduisant notre dépendance à la main d'oeuvre saisonnière étrangère :
- Soutenir l'emploi de saisonniers par une pérennisation définitive du dispositif dit « TO-DE » ;
- Accompagner les filières dans le recensement et la structuration de l'offre de saisonniers, en anticipant en amont les besoins administratifs ou de logement ;
- Réduire la dépendance tout en gagnant en compétitivité, en favorisant à long terme le recours à la mécanisation.
LA SOUVERAINETÉ PAR UNE
POLITIQUE COMMERCIALE
ET DE CONCURRENCE
RÉÉQUILIBRÉE
Recommandation n° 36 :
S'engager à mieux faire respecter les normes minimales de production requises au sein de l'Union européenne en :
- poursuivant le déploiement de clauses miroirs dans les législations européennes en matière agricole, notamment dès 2023 sur les textes relatifs au bien-être animal ou aux additifs destinés à l'alimentation des animaux, ainsi que dans les accords de libre-échange ;
- s'engageant plus activement dans les instances internationales de normalisation (notamment Codex Alimentarius ) afin de faire évoluer l'ensemble des pratiques agricoles.
Recommandation n° 37 :
Durcir les contrôles sur les denrées alimentaires importées pour garantir le respect des normes minimales requises au sein de l'Union européenne en agissant :
- à court terme, au niveau national pour relever le niveau d'exigences, notamment i) en augmentant les effectifs des contrôles nationaux, profitant du transfert de la compétence sanitaire de la DGCCRF à la DGAL pour constituer une vraie « police sanitaire nationale » ; ii) en renforçant le nombre de contrôles aléatoires intégrés au plan de contrôle et en durcissant le contenu des analyses, notamment en renforçant le nombre de substances actives effectivement contrôlées par les laboratoires nationaux ;
- à moyen terme, au niveau européen en promouvant la constitution d'une task force européenne sur la sécurité alimentaire pour des interventions harmonisées au niveau européen, afin d'éviter les comportements de détournement des contrôles franco-français par une entrée dans d'autres pays.
Recommandation n° 38 :
Renforcer la base juridique et le caractère opérationnel du MACF et améliorer la prise en compte des enjeux de compétitivité des filières européennes, en :
- prévoyant une affectation intégrale des recettes du MACF aux politiques environnementales, en cohérence avec son ambition en faveur de la décarbonation et gage de bonne foi de la démarche européenne vis-à-vis de l'OMC et de nos partenaires commerciaux ;
- reportant à 2033 l'extinction des quotas gratuits tant qu'une évaluation ex post des effets du MACF n'aura pas été rendue, et permettre jusqu'à cette date le maintien de quotas gratuits à leur niveau actuel pendant la montée en charge du MACF ; ou en maintenant à défaut une allocation de quotas gratuits pour les exportations des 30 % des installations productrices les moins émissives couvertes par le marché carbone ;
- élargissant le champ des secteurs couverts par le MACF, afin de mieux en répartir l'impact au long des chaînes de valeur européennes. Faire porter cet élargissement sur l'ensemble des biens couverts par le marché carbone européen et à de nouveaux secteurs (produits agricoles, hydrogène...) et sur les produits finis, qui devront préalablement être intégrés dans le marché carbone européen.
Recommandation n° 39 :
- Prévoir la ratification systématique des accords commerciaux mixtes par les parlements nationaux, à commencer par le CETA, pour assurer la transparence et le contrôle démocratique sur ces accords ;
- Évaluer de façon transversale et exhaustive, filière par filière, les effets potentiels des accords commerciaux, à commencer par l'accord avec le Mercosur, à l'aune des résultats constatés des précédents accords. Évaluer l'articulation des traités à venir avec les traités passés et leur impact cumulé.
Recommandation n° 40 :
Pousser les États tiers à donner accès à leur commande publique aux entreprises européennes en :
- abaissant le seuil des marchés entrant dans le champ d'application de l'instrument pour la réciprocité dans les marchés publics (IPI) ;
- permettant aux États, comme à la Commission qui le pourra déjà, de prendre des mesures de rétorsion sous réserve de notification à la Commission ;
- étudiant l'opportunité de prendre des mesures de rétorsion contre des États non coopératifs, même lorsque l'UE est juridiquement engagée avec eux dans le cadre d'un accord sur l'accès aux marchés publics.
LA SOUVERAINETÉ PAR DAVANTAGE DE PROTECTION
DE NOS
ENTREPRISES FACE AUX INFLUENCES ÉTRANGÈRES
Recommandation n° 41 :
Accélérer la création d'un projet important d'intérêt européen commun (PIIEC) pour soutenir le développement des filières industrielles française et européenne de l'informatique en nuage.
Recommandation n° 42 :
- Établir un bilan économique complet des mesures extraterritoriales subies par les acteurs économiques européens, afin de mieux chiffrer l'ampleur des coûts induits par le défaut de protection de nos entreprises et ainsi accélérer les actions de l'UE en la matière.
- Confier au Service de l'information stratégique et de la sécurité économiques (SISSE), en lien avec l'Agence française anticorruption, TRACFIN et le réseau des services économiques régionaux, le soin d'établir une revue périodique nationale de l'exposition aux risques de l'extraterritorialité, croisant en particulier les aires géographiques, secteurs d'activité et législations en cause, rendue publique et diffusée auprès des entreprises françaises, pour les aider à s'orienter et limiter les pratiques de sur-conformité dommageables à notre économie.
Recommandation n° 43 :
Renforcer le caractère dissuasif du règlement de blocage à l'occasion de sa révision pour mieux protéger les entreprises françaises, en :
- étendant son application aux filiales des sociétés européennes ;
- établissant des seuils minimaux de sanctions pour les entreprises se conformant à des mesures extraterritoriales d'États tiers ;
- envisageant de permettre à une entreprise de se retourner contre un partenaire commercial qui n'aurait pas respecté le règlement de blocage en transigeant avec les autorités d'un État tiers.
Recommandation n° 44 :
Inclure l'ensemble des sanctions extraterritoriales dans le champ du nouvel instrument anti-coercition, et étendre son application aux mesures coercitives illégales visant à modifier le comportement des entreprises européennes.
Recommandation n° 45 :
Négocier une convention sur les sanctions secondaires, en tirant parti de l'amélioration de nos relations avec les États-Unis.
Clarifier dans ce cadre la nature et l'étendue du lien de rattachement de nos entreprises avec les États-Unis, en garantissant plus de transparence et un droit au recours ( judicial review ) dans le cadre des transactions conclues par nos entreprises avec la justice américaine.
Recommandation n° 46 :
Poursuivre le renforcement du contrôle des investissements étrangers, en :
- abaissant de façon pérenne, de 25 % à 10 %, le franchissement du seuil de détention des droits de vote par un investisseur hors-UE déclenchant un contrôle de l'investissement, et appliquer ce nouveau seuil à toutes les sociétés stratégiques françaises, qu'elles soient cotées ou non. Une modification réglementaire du 3° de l'article R. 151-2 du code monétaire et financier est nécessaire pour cela ;
- actualisant la liste des activités sensibles et stratégiques figurant à l'article R. 151-3 du code monétaire et financier pour y intégrer le secteur des médias au sens large ainsi que les infrastructures électorales.
Recommandation n° 47 :
Appuyer la mise en oeuvre du DMA et renforcer la lutte contre les acquisitions prédatrices en France, en :
- évaluant l'opportunité d'autoriser l'Autorité de la concurrence, lorsqu'elle renvoie à la Commission européenne l'examen d'une opération située sous les seuils nationaux et que la Commission européenne n'y donne pas suite, d'instruire elle-même l'opération en question ;
- envisageant une notification à l'Autorité de la concurrence des opérations de concentration sous les seuils nationaux mais dont la valeur de transaction dépasse un certain montant, dans l'optique d'un renvoi possible de l'opération concernée, par l'Autorité de la concurrence, à la Commission européenne.
Recommandation n° 48 :
Adapter et moderniser les outils du droit européen de la concurrence afin de l'articuler au mieux avec les exigences d'une politique industrielle ambitieuse, en :
- faisant rapidement aboutir l'actualisation des lignes directrices de la Commission européenne en matière de marché pertinent, afin de saisir au mieux les évolutions rapides de ce concept induites par le développement fulgurant du numérique ;
- clarifiant les composantes du critère de « bien-être du consommateur » au regard duquel la Commission analyse les opérations de concentration, et y intégrer de nouvelles composantes comme la compétitivité, le maintien de l'emploi ou la souveraineté numérique ;
- allongeant l'horizon temporel des analyses de la Commission, en le portant de deux à cinq ans sauf exception, et clarifier la doctrine de la Commission en matière de concurrence potentielle future, dans le but que des opérations ne soient pas rejetées alors que des menaces potentielles à moyen terme semblent élevées.
Recommandation n° 49 :
S'assurer d'un contrôle effectif, harmonisé et efficace des subventions étrangères en cas de concentration ou de procédure de passation d'un marché public, en :
- promouvant, dans les discussions entre co-législateurs européens, la fixation de seuils de notification qui soient moins élevés que ceux aujourd'hui envisagés, afin d'étendre le champ d'application du règlement en cours de négociation ;
- en clarifiant, au niveau européen et français, l'articulation entre le nouveau contrôle des subventions et celui des investissements étrangers aujourd'hui à l'oeuvre en France, dans l'objectif de minimiser les divergences de pratique et d'interprétation potentiellement sources de contentieux et de longueurs dans l'analyse de l'impact des subventions étrangères.
Recommandation n° 50 :
Augmenter significativement la représentation, d'ici 2030, des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance des grandes entreprises et améliorer encore la formation de ces représentants des salariés.