II. SALTO, DERNIER ÉPISODE D'UNE SÉRIE DE PRISES DE PARTICIPATIONS SANS RÉEL INTÉRÊT

Les filiales ne résument pas toutes les activités commerciales de France Télévisions. Les prises de participation témoignent aussi de la volonté du groupe mais aussi de l'autorité de tutelle de diversifier ses activités, en investissant - souvent avec retard sur l'évolution technologique ou celle des usages - dans les nouveaux champs de l'audiovisuel : chaînes par satellite puis vidéo à la demande.

A. UN ABANDON À LA FOIS PROGRESSIF ET NÉCESSAIRE DES CHAÎNES THÉMATIQUES

Le contrat d'objectifs et de moyens 2013-2015 fixait notamment comme objectif à France Télévisions de compléter son offre de programmes « par des chaînes thématiques pour rencontrer l'ensemble des publics ».

L'acquisition de chaînes thématiques payantes diffusées sur les bouquets satellite devait notamment permettre de :

- dégager des recettes nouvelles ;

- développer un second marché et encourager ainsi la création ;

- offrir à des programmes emblématiques du service public une nouvelle exposition et s'ouvrir ainsi à de nouveaux publics.

La mise en avant de cet objectif vient confirmer une stratégie entamée par le groupe public en 1992 avec la création de France Supervision, progressivement dédiée à la musique. Rebaptisée Mezzo en 1998, son capital est alors ouvert à France Télécom qui en détient 50 %. Mezzo finit par fusionner avec sa concurrente Muzzik en 2002 et est alors détenue conjointement par Lagardère Active et le groupe Canal + (60 % du capital), France Telecom (20 %) et France Télévisions (20 %). Une déclinaison en haute définition - Mezzo HD - est lancée en 2010.

Le groupe public crée, en outre, avec neuf autres groupes publics audiovisuels européens et africain la société éditrice de la chaîne multilingue d'information Euronews - SECEMIE en 1993.

France Télévisions prend par ailleurs 34 % du capital de Planète + Thalassa en 2002, aux côtés du groupe Canal +, et monte, dans les mêmes proportions au capital de Planète + Justice (devenue depuis Planète + Crime) en 2007. Le groupe public avait également acquis 34 % de Gulli en 2005, chaîne jeunesse lancée avec le groupe Lagardère.

L'émergence de la télévision numérique terrestre, lancée en mars 2005 puis étendue en 2012, n'a, dans un premier temps, pas remis en question cette politique.

La fin du COM 2013-2015 coïncide cependant avec l'arrêt de cette diversification, la tutelle insistant désormais, à raison, sur le rapprochement entre les entités du service public et le développement de synergies. Ce changement d'orientation conduit France Télévisions à se lancer dans un mouvement de désengagement.

La volonté de transformer France 4, centrée jusqu'alors sur le spectacle vivant, la fiction et le sport, en chaîne dédiée à la jeunesse conduit France Télévisions à céder, dans un premier temps, sa participation dans Gulli à Lagardère Active en 2015. Comme ses homologues, le groupe public a également vendu sa participation majoritaire dans Euronews au groupe Media Global Network la même année. Elle dispose encore de 2,80 % du capital, avec une perspective de sortie totale à court terme.

La chaîne Planète + Thalassa a, quant à elle, cessé d'émettre, faute d'audience, le 31 décembre 2015.

France Télévisions a enfin cédé sa participation dans Mezzo en juillet 2019 lors de la vente de la société par le groupe Lagardère au groupe Les Échos - Le Parisien.

Reste aujourd'hui une participation de 34 % au sein du capital de Planète + Crime. France Télévisions a indiqué au rapporteur spécial sa volonté de céder celle-ci au groupe Canal+, qui n'a pas donné suite. Il convient de relever à ce stade que la chaîne dégage un résultat positif depuis sa création. Le groupe Canal+ refusant chaque année de distribuer un dividende aux actionnaires, cette participation n'apporte néanmoins aucun avantage particulier pour France Télévisions.

Encouragée un temps par la tutelle, la stratégie de diversification via les chaînes thématiques semble, par certains côtés, avoir préfiguré l'aventure SALTO dans laquelle s'est lancé le groupe public. Celui-ci a délaissé la recherche de synergies ou de lancement de nouveaux formats avec les autres sociétés de l'audiovisuel public, au prix de prises de participations dont il est aujourd'hui difficile de cerner les bénéfices qu'elles ont pu procurer.

Recommandation n° 9 (France Télévisions) : Céder la participation de France Télévisions au sein du capital de Planète + Crime à un acteur privé et privilégier désormais la recherche de nouveaux formats d'édition de programmes avec les autres sociétés de l'audiovisuel public.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page