II. UN EFFORT DE PRISE EN CHARGE QUI RESTE À AMÉLIORER

A. LE GPSE : UNE STRUCTURE AU SERVICE DES AGRICULTEURS QUI SUSCITE TOUTEFOIS DES CRITIQUES

• Une instance qui a poursuivi son action en dépit du désengagement de l'État

Claude Allo a rappelé l'historique du GPSE. À la suite de la publication en juillet 1998 d'un rapport commandé par le ministère de l'agriculture relatif à l'influence des champs électromagnétiques sur les élevages, un protocole a été signé en 1999 entre le ministère de l'agriculture et EDF prévoyant la mise en place du groupe permanent de sécurité électrique (GPSE) présidé alors par le Professeur Henri Gallouin d'AgroParisTech.

À son démarrage, et pendant plus de 10 ans, le GPSE a fonctionné sous la forme d'un groupe de travail, sans structure formelle, en application de protocoles d'accord conclus entre le ministère de l'agriculture et EDF, puis EDF et RTE. Le premier protocole signé en 1999 s'est achevé à la fin 2003 et a été renouvelé en 2006 jusqu'à la fin 2008.

Durant cette période, le GPSE a procédé à un inventaire des connaissances disponibles, mis en évidence les problèmes électriques existants dans les exploitations agricoles et proposé une méthodologie pour résoudre les cas litigieux avec EDF.

À l'issue de cette période, s'est posée la question du renouvellement des protocoles conclus entre l'État et les opérateurs électriques. Présenté en 2010, le rapport de l'Office relatif aux effets des champs électriques sur la santé et l'environnement soulignait le travail accompli par le GPSE et recommandait que « l'État reprenne fortement son rôle ».

Le ministère de l'agriculture a préféré préconiser la création « d'un protocole d'échange entre les représentants des producteurs agricoles et des distributeurs d'électricité », limitant son rôle à « la facilitation du dialogue entre les parties autant que de besoin ».

Cette situation a entrainé la constitution en 2014 du GPSE sous forme d'association privée, nommée groupe permanent pour la sécurité électrique en milieu agricole, avec pour membres fondateurs RTE, Enedis et l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA). Se sont joints à l'association le Syndicat des énergies renouvelables (SER) et France énergie éolienne. Les ministères concernés (agriculture, développement durable, énergie) sont membres du conseil d'administration sans droit de vote. L'association n'a pas de mission de service public mais propose son expertise aux éleveurs confrontés à une suspicion de courants parasites liés à un équipement électrique extérieur à l'exploitation. Elle n'intervient pas sur les troubles supposés liés aux antennes relais.

• Une approche globale des dossiers

Claude Allo a insisté sur le fait que les interventions du GPSE se font dans le cadre d'une démarche amiable. Deux types d'interventions sont proposés : des interventions rapides, sans protocole, qui visent à établir un diagnostic électrique indépendant ; des interventions approfondies, formalisées par un protocole signé par les parties concernées, qui visent à établir un diagnostic complet de l'exploitation confrontée à un problème complexe. La chambre d'agriculture compétente doit faire la demande d'intervention auprès du GPSE et accompagne systématiquement l'éleveur durant la procédure.

Partant du constat que les symptômes provoqués par les courants électriques parasites ne sont pas spécifiques et que les problèmes rencontrés dans les élevages sont toujours multifactoriels, la méthode d'investigation appliquée par le GPSE s'appuie sur trois volets d'expertise : audit électrique, bilan sanitaire complet, expertise zootechnique. Selon Guillaume Langlet, les préconisations du GPSE portent quasi systématiquement sur des mises aux normes des installations privées ; une fois ces actions effectuées, une amélioration est généralement constatée. Delphine Porfirio et Claude Allo ont toutefois reconnu que la suppression des courants parasites, qu'ils proviennent des installations privées des agriculteurs ou des infrastructures publiques électriques, ne permet pas toujours de faire disparaître toutes les difficultés. Sur les 49 interventions opérées entre avril 2014 et octobre 2020 8 ( * ) , 35 sont considérées comme achevées. 18 ont été menées dans le cadre d'un protocole mais 5 n'ont pas pu résoudre les problèmes observés.

• Une instance qui n'échappe pas aux critiques

Deux critiques sont adressées au GPSE : son intervention tardive et sa dépendance vis-à-vis des opérateurs électriques pour le financement de ses expertises.

L'intervention du GPSE intervient plusieurs années après le déclenchement des difficultés : trois ans dans le cas des deux élevages situés à proximité du parc éolien des Quatre-Seigneurs, six ans dans le cas décrit par Alain Crouillebois. Si le GPSE n'est pas responsable de ce délai, il n'en demeure pas moins qu'au moment où il est saisi, les difficultés de l'élevage ont pris une forte dimension multifactorielle. Le défaut électrique, quelle que soit son origine, s'est surajouté à d'autres difficultés, conduisant à une profonde dégradation sanitaire du troupeau à laquelle il devient difficile de remédier en quelques mois. C'est ce qui explique que seulement 1 % des dépenses du GPSE soit consacré à la mise en conformité des installations tandis que les dépenses liées aux expertises vétérinaires et aux actions sanitaires absorbent 39 % du budget.

Le GPSE ne disposant pas de financement propre 9 ( * ) , les travaux sont entièrement financés par les opérateurs électriques dans le cadre des accords conclus lors de la signature des protocoles après discussion au cas par cas. Comme l'a fait remarquer Claude Allo, il peut arriver que les financements soient insuffisants pour mener une étude à son terme, voire qu'ils soient refusés si l'opérateur estime que l'intervention du GPSE n'est pas justifiée. L'indépendance de l'expertise est également contestée par certains éleveurs, dans la mesure où son financement est assuré par l'entreprise potentiellement responsable du trouble.


* 8 Sur les 72 demandes adressées au GPSE.

* 9 Un « fonds partenarial » alimenté par l'ensemble des membres du conseil d'administration existe depuis 2019 pour financer les interventions rapides.

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