B. LA STABILITÉ DU VOISINAGE SUD DE L'EUROPE FACE À DE MULTIPLES CRISES

Dans un contexte marqué par un afflux de migrants à la frontière entre la Grèce et la Turquie, la 16ème conférence interparlementaire sur la PESC-PSDC a insisté sur l'importance d'agir pour la sécurité et la prospérité du voisinage méridional de l'Europe . Les pays du « groupe méditerranéen » (Chypre, Espagne, France, Grèce, Italie, Malte, Portugal), qui forment un sous-groupe informel au sein de cette conférence, ont insisté pour que cette problématique soit pleinement prise en compte. L'instabilité en Syrie, en Libye et au Sahel est particulièrement préoccupante. L'Europe doit agir et ne pas laisser le champ libre à d'autres puissances car c'est sa sécurité qui est en jeu. La nouvelle opération maritime de l'UE (Eunavfor Irini) en Méditerranée, au large de la Libye, est pour cette raison bienvenue. L'Afrique doit être une priorité de la politique étrangère et de sécurité de l'Union.

S'agissant du Sahel , où la France mène une action multidimensionnelle en partenariat et à la demande des pays africains, pour lutter contre les groupes terroristes, le récent sommet de Pau a permis des avancées. La dimension européenne de cette action a été renforcée par la création de la task force Takuba , qui regroupera les forces spéciales de sept pays, à l'initiative de la France, afin d'accompagner les forces armées maliennes. Cette task force doit être déployée courant 2020. Plus généralement, l'UE et ses États membres doivent jouer un rôle accru dans cette région, notamment au sein de la Coalition pour le Sahel. Le nouveau Haut-Représentant de l'Union européenne, Josep Borrell, travaille à une stratégie de l'UE pour l'Afrique. C'est d'autant plus urgent que la Chine, la Russie, la Turquie développent des politiques d'influence sur ce continent.

C. LA DÉFENSE EUROPÉENNE : UN TOURNANT À CONFIRMER

Les progrès récents de la défense européenne doivent être concrétisés dans le prochain cadre financier pluriannuel de l'Union, par un financement à la hauteur des enjeux. Lors de la conférence interparlementaire précitée, le ministre croate de la défense a paru très favorable au Fonds européen de la défense (FEDef), soutenant le budget de 13 milliards d'euros initialement proposé par la Commission (soit 11,4 Mds€ en euros constants de 2018). La proposition du président du Conseil européen Charles Michel (7 Mds€ constants 2018), bien que supérieure à celle de la présidence finlandaise, reste très décevante . Le risque est grand que la défense ne soit, au moins en partie, oubliée dans la dernière phase de négociation, face aux deux piliers traditionnels de l'Union européenne que sont la politique agricole commune et la politique de cohésion, qui représentent 70 % du budget européen, et compte tenu de l'impact budgétaire défavorable du Brexit (qui s'élève à 12 milliards d'euros par an).

Une Revue stratégique de la coopération structurée permanente (PESCO) est en cours : elle devra permettre de traiter du respect par les États de leurs engagements, de la cohérence du processus européen de développement capacitaire et de sa compatibilité avec celui de l'OTAN.

Au cours de cette conférence interparlementaire, la délégation britannique est intervenue pour indiquer son ambition de continuer à participer aux travaux de réflexion sur la PSDC. Et, en effet, peut-on envisager sérieusement d'avancer vers l'autonomie stratégique européenne sans le Royaume-Uni ? La politique étrangère et de défense n'est pas un sujet de négociation prioritaire pour le Premier ministre Boris Johnson. Mais il serait absurde, sur le plan stratégique, de ne pas avancer de concert avec le Royaume-Uni : des modes d'association devront être trouvés notamment sur les sanctions, les missions et opérations de la PSDC et pour le développement des capacités de défense du continent.

La prochaine Conférence interparlementaire sur la PESC-PSDC doit se dérouler à Berlin en septembre prochain. La présidence allemande permettra-t-elle d'accélérer l'effort en faveur de la défense ? Lors d'une réunion à Berlin le 2 mars 2020, la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat a plaidé auprès des membres du Bundestag en ce sens, souhaitant un approfondissement de la vision stratégique franco-allemande et de la coopération de défense, capacitaire et opérationnelle, entre les deux pays.

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