C. COMPLÉMENTARITÉ PLUTÔT QUE CONCURRENCE AVEC LES PRODUCTIONS DE DENRÉES ALIMENTAIRES

À partir de 2008 , dans la mesure où était constatée sur les marchés internationaux une envolée du prix des matières premières agricoles, des critiques se sont fait jour sur la compétition existant entre la production de biocarburants et celle de denrées alimentaires.

Le rapporteur estime que le débat ne doit pas être biaisé par des erreurs méthodologiques : le développement des surfaces destinées aux biocarburants ne se traduit pas par une réduction équivalente des surfaces destinées aux productions alimentaires dans la mesure où ces surfaces permettent la production de coproduits (drêches et tourteaux) qui favorisent un approvisionnement protéique pour l'alimentation animale. En résumé : si ces surfaces n'étaient pas couvertes par des cultures permettant à la fois la production de biocarburants et de denrées destinées à l'alimentation animale, elles seraient couvertes par des cultures destinées à la production de denrées animales uniquement.

FranceAgriMer, dans une étude de 2010 124 ( * ) , estime que « la valorisation des coproduits des biocarburants entraîne donc une réduction des utilisations des céréales (orge et blé) mais une progression du maïs. Au total, le recul des usages des céréales représente l'équivalent de 3 à 4 % des superficies nationales céréalières. »

Peut-on parler de concurrence alimentaire quand la production de blé en France n'a pas reculé ces dernières années ?

Selon une étude réalisée en 2007 par le Comité Biocarburants et Biomasse de FranceAgriMer, la France dispose, au reste, d'un potentiel de terres arables suffisant pour répondre à l'objectif d'incorporation de 7 % de biocarburants dans les carburants tout en garantissant la satisfaction des besoins alimentaires internes et en maintenant, si nécessaire, un courant d'exportation dans et hors UE.

Par ailleurs, les tourteaux de colza et drêches issus des biocarburants se substituent au moins en partie aux tourteaux de soja. Ils réduisent considérablement le déficit chronique de la France en la matière et renforce ainsi la souveraineté protéique de notre pays.

Le rapport précité du CGEDD et du CGAAER rappelle, à ce titre, que : « l'autosuffisance de la France est passée de 25 % dans les années 80 à plus de 50 % aujourd'hui, évitant principalement l'importation de soja américain et brésilien, dont les externalités négatives en matière de déforestation sont connues » 125 ( * ) .

Au total, les surfaces mobilisées en France permettent la production de plus de 3 millions de tonnes de co-produits destinés à l'alimentation animale (tourteaux de colza, de tournesol, drêches de blé et de maïs, pulpes de betteraves), soit près de 16 % de matières premières utilisées pour la fabrication d'aliments composés.

C'est pourquoi il importe de mesurer la surface agricole utile en la corrigeant des surfaces qui auraient été utilisées pour produire des aliments pour animaux. FranceAgriMer s'est prêté à l'exercice 126 ( * ) et a conclu que la surface agricole utile nette, utilisée pour la production de biocarburants en France, est de 2,39 % 127 ( * ) .


* 124 FranceAgriMer, les synthèses, coproduits des biocarburants en France : perspectives et conséquences en alimentation animale (2010).

* 125 CGEDD, CGAAER, Durabilité de l'huile de palme et des autres huiles végétales, décembre 2016.

* 126 Les surfaces prises en compte dans cette estimation correspondent aux surfaces effectivement consacrées aux cultures destinées aux biocarburants, déduction faite de la surface théorique nécessaire à la production des coproduits issus des biocarburants et destinés à l'alimentation animale (tourteaux d'oléagineux, drêches de céréales et pulpes de betteraves).

* 127 FranceAgriMer, « Facteurs de compétitivité sur le marché mondial des biocarburants. Veille concurrentielle 2018 (données 2017) », 2018.

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