II. UN RENFORCEMENT ET UNE MUTUALISATION DES MOYENS DE LUTTE QUI DOIVENT ÊTRE ANTICIPÉS AU PLUS TÔT
D'après l'IRSTEA, une extension de 30 % de la surface de zone à risque dans les 50 prochaines années entrainerait une hausse de 20 % du coût de la lutte et de la prévention 26 ( * ) . Un dérapage budgétaire pourrait donc avoir lieu dans les prochaines décennies si les investissements ne sont pas anticipés au plus tôt. À tout le moins, des mutualisations des ressources au niveau national ou européen doivent être développées.
A. UN ACCOMPAGNEMENT FINANCIER DES ACTEURS LOCAUX À ENVISAGER
L'acquisition des 6 nouveaux Dash est déjà une réponse financière et opérationnelle satisfaisante qui s'inscrit pleinement dans l'adaptation des moyens des luttes face à la probable extension des zones sensibles. Les inquiétudes pèsent donc moins du côté des capacités nationales que de celles des acteurs locaux sur ce plan.
1. Un renforcement nécessaire des moyens matériels des SDIS
Comme évoqué supra , les SDIS hors des zones habituellement touchées par les feux de forêts risquent de ne pas avoir suffisamment de ressources, matérielles notamment . Des tensions au cours des opérations de lutte ont déjà été observées au cours de l'été 2019. Par ailleurs, ces mêmes SDIS devront faire face à des incendies dans les départements dont ils relèvent et ne pourraient ainsi plus envoyer de colonnes de renforts dans les zones qui y ont fréquemment recours.
Deux pistes non concurrentes peuvent donc être envisagées pour éviter cet écueil .
La première consiste à poursuivre la démarche de massification des achats engagée par le service de l'achat de l'innovation et de la logistique du ministère de l'intérieur (SAILMI) . 27 ( * ) Lancée en 2015, cette démarche visait à « passer des marchés généraux pour des équipements techniques harmonisés, réduire les montant des investissements et le coût de renouvellement des équipements et développer l'interopérabilité des équipements, notamment pour les moyens » 28 ( * ) .
La seconde, malgré un cadre budgétaire contraint, consisterait en une augmentation de la dotation de soutien aux investissements structurants (DSIS) des services d'incendie et de secours, du programme 161 , afin d'accompagner les SDIS en difficulté dans l'acquisition de matériels.
Créée fin 2016, cette dotation a pris la suite du fonds d'aide à l'investissement des SDIS (FAI), progressivement supprimé entre 2013 et 2017 en raison d'un « saupoudrage » des crédits sur l'ensemble du territoire. Ce fonds avait pourtant contribué au renforcement des SDIS dans la lutte contre les feux de forêts, avec une subvention globale annuelle de 7 millions d'euros en moyenne . 29 ( * )
Cependant, ainsi qu'il a été rappelé, les dépenses d'investissement des SDIS ont régulièrement diminué au cours des dernières années. La DSIS a donc été mise en place afin de répondre à la demande d'une intervention de l'État pour soutenir l'investissement des SDIS, avec un montant de 25 millions d'euros en 2017 .
En 2018 et 2019, le montant de cette dotation a hélas été ramené à 10 millions d'euros , dont sept sont affectés au projet « NexSIS 18-112 ». Il serait opportun de revoir ce montant à la hausse ces prochaines années afin de renforcer la préparation matérielle des SDIS qui feront face au risque accru de feux de forêts dans leur département d'une part, et de préserver la capacité de lutte des SDIS qui sont déjà fortement impliqués qui pourraient ne plus bénéficier des renforts interdépartementaux d'autre part.
Recommandation n° 6 : afin d'encourager l'investissement des SDIS en équipements de lutte contre les incendies de forêts, envisager la création d'une enveloppe de soutien aux projets d'investissement en matière de feux de forêts au sein de la dotation de soutien aux investissements structurants des SIS à partir des crédits du programme 161. |
2. Un dispositif de prévention à consolider et à élargir dans le reste du territoire
En matière de prévention, la mission interministérielle de 2016 avait formulé une recommandation visant « à adopter une stratégie interministérielle nationale de DFCI dans la perspective du changement climatique, et la faire largement connaître à tous les acteurs et au grand public ». Cette recommandation mérite d'être ici réitérée alors qu'elle n'a, semble-t-il, pas été suivie d'effets.
Une telle stratégie pourrait s'appuyer sur les « bonnes pratiques » observées dans les départements méditerranéens ou aquitains. En effet, dans ces départements, le système de prévention et de lutte contre les feux évoqué supra produit de très bons résultats , du fait de l'ancienneté de la coopération des différents acteurs et de leur expérience face à un risque bien connu. Ce modèle mériterait d'être « exporté » progressivement dans les départements dont la sensibilité au risque d'incendie s'accroît afin d'éviter des interventions « éclatées » et sans cohésion des différents intervenants .
* 26 Audition de M. Thomas Curt, chercheur à l'IRSTEA par la Commission développement durable de l'Assemblée nationale le 27 septembre 2017.
* 27 Créé en septembre 2019, le SAILMI remplace le Service de l'achat, des équipements et de la logistique de la sécurité intérieure (SAELSI).
* 28 Rapport de la mission interministérielle d'évaluation relative à la défense de la forêt contre l'incendie, avril 2016
* 29 Rapport de la mission interministérielle, 2010.