LES DIFFICULTÉS SOULEVÉES DANS LA MISE EN oeUVRE DU DROIT À LA FORMATION
I. LE MANQUE D'OFFRE DISPONIBLE DANS CERTAINS TERRITOIRES ET LE CARACTÈRE FACULTATIF DE LA FORMATION
A. DES PROGRÈS RÉALISÉS EN MATIÈRE D'INFORMATION MAIS DES CARENCES QUI SUBSISTENT DANS CERTAINS TERRITOIRES S'AGISSANT DE L'OFFRE DE FORMATION DISPONIBLE
Si des progrès ont été réalisés quant à l'information des élus locaux sur les possibilités offertes par la loi en matière de formation, il peut arriver que, sur le terrain, l'offre ne suive pas. Un constat partagé par de nombreux élus locaux, en particulier ceux issus de la ruralité, comme le fait remarquer l'Association des maires ruraux de France (AMRF) : « L'offre de formation des organismes spécialisés n'est absolument pas adaptée aux besoins des élus ruraux. Les modules sont souvent pointus et loin des préoccupations du monde rural » .
La liste des organismes de formation agréés par le ministère de l'Intérieur est régulièrement mise à jour et disponible sur Internet 8 ( * ) . La Direction des retraites et de la solidarité de la CDC réalise aussi un remarquable travail d'information sur le DIF en mettant à disposition sur son site Internet 9 ( * ) les informations complètes 10 ( * ) sur le dispositif.
Le nombre d'organismes agréés donne une indication pertinente sur l'offre disponible . Actuellement, concernant les formations en lien avec l'exercice du mandat, le nombre d'organismes agréés est stable et se situe autour de 200 .
Parmi les opérateurs qui se partagent le marché, on note que les associations départementales de maires représentent une part importante des organismes agréés et qu'ils sont parfois les seuls susceptibles de couvrir les besoins en formation dans les départements.
Selon la DGCL : « Le CNFEL porte une attention particulière aux 23 départements qui ne disposent localement d'aucun organisme agréé au 31 décembre 2017 ».
Les organismes privés de formation (l'Institut Européen des politiques publiques, l'École des élus « SOLen », etc.) sollicitent également régulièrement les élus pour offrir leurs services en leur proposant des formations en lien avec leur mandat et en les informant du dispositif réglementaire qui leur est applicable.
Votre délégation salue également le travail accompli par les associations d'élus en matière d'information , telle l'AMF, à travers sa brochure « Statut de l'élu (e) local(e) » téléchargée des dizaines de milliers de fois, et qui fait état des modalités prévues par la loi en matière de formation. Cette information est également rappelée dans le cadre des universités des maires organisées dans tous les départements, chaque début de mandat. De même, en cours de mandat, lors de réunions d'information, l'AMF sensibilise ses adhérents à l'importance de la formation ainsi qu'aux possibilités offertes par les textes.
S'agissant du DIF, en revanche, pour ce qui concerne les formations éligibles au CPF (c'est-à-dire sans lien avec l'exercice du mandat) et le public visé dans ce cadre (salariés, élus, chômeurs...), les associations d'élus n'ont pas vocation à dispenser ce type de formation.
Parmi l'offre disponible pour les formations en lien avec l'exercice du mandat, les partis politiques , quelques universités (les instituts de préparation à l'administration générale) et des réseaux d'élus ( Élues locales, Femmes et Pouvoir ) complètent le marché.
Les textes en vigueur autorisent effectivement tout organisme public ou privé, indépendant ou non d'un parti politique, à solliciter un agrément pour dispenser des formations. Historiquement, la formation des élus était assurée par les partis politiques eux-mêmes. Cette internalisation de la formation des élus n'a pas totalement disparu puisque la plupart des partis ou mouvements politiques sont liés à un organisme de formation agréé. Ces organismes disposent néanmoins d'une personne morale distincte, consacrée à la formation .
Des interrogations sont parfois soulevées s'agissant des formations assurées par les partis politiques . Le rapport précité de notre collègue Antoine Lefèvre pointait déjà certaines « ambiguïtés » de la part de collectivités, consistant à « inscrire dans les crédits de la formation des dépenses correspondant à la participation d'élus à des manifestations organisées par les partis politiques, type universités d'été ».
Pour l'AMF, « si le contenu des formations dispensées par les partis politiques répond aux besoins des élus locaux et que celles-ci sont organisées dans le respect des textes, il n'y a aucune raison de les exclure ».
Encore une fois, c'est le CNFEL qui analyse les demandes d'agrément, selon les mêmes critères que pour les autres demandeurs, et qui veille à ce que ces organismes proposent une offre diversifiée, avec des formateurs dont la compétence et l'expérience (au sein ou à la tête d'une collectivité locale en tant qu'élu ou non) semblent significatives pour dispenser des formations de qualité. En ce sens, votre délégation estime que les missions de cette instance de régulation doivent être préservées .
Pour répondre, enfin, à la carence de l'offre disponible dans certains territoires, elle recommande le développement des formations à distance . Aujourd'hui, la plupart des élus privilégient l'organisation de formations de proximité et en présentiel . Les formations à distance sont peu proposées par les organismes de formation qui bénéficient actuellement de l'agrément.
Pourtant, certains dispositifs innovants tels que les enseignements numériques territorialisés en réseau ou les cours en ligne ouverts massifs (CLOM ou MOOC en anglais), sont proposés par certains organismes. La généralisation de ces dispositifs est encore limitée en raison des moyens techniques et financiers importants qu'ils requièrent pour leur mise en place. Lors de la table ronde consacrée à la formation, l'Assemblée des départements de France (ADF) soulignait pourtant l'importance de cet enjeu : « il est nécessaire de développer les possibilités de formation à distance, aujourd'hui insuffisantes. Nous commençons à concevoir des modules numériques avec l'Institut de formation et d'éducation permanente (IFEP) » .
Le « e-learning » ou « e-formation » peut surtout représenter une alternative moins coûteuse et plus pratique pour les élus confrontés à l'éloignement des structures de formation, en particulier dans les territoires ruraux.
Vos rapporteurs sont convaincus que l'utilisation du numérique pour accéder à des formations à distance s'imposera d'autant plus que la loi dispose, depuis le 7 novembre 2016, que toute collectivité puisse être saisie par voie électronique. Désormais, le numérique fait donc partie intégrante de la gestion des collectivités territoriales .
* 8 Site : www.collectivites-locales.gouv.fr . Lien : https://www.collectivites-locales.gouv.fr/liste-des-organismes-agrees-pour-formation-des-elus-par-departement .
* 9 Sur le site www.dif-elus.fr .
* 10 Le site compile les informations générales sur le dispositif (création du fonds, financement, bénéficiaires...), les instructions à destination des collectivités pour préciser la réglementation et le mode opératoire relatif au versement des cotisations, ainsi que les explications sur le droit à la formation. Sur ce dernier point, sont précisées les conditions pour bénéficier du DIF Élus, les règles relatives au compte d'heures et aux formations éligibles ainsi que les modalités pour effectuer les demandes, et enfin, les dispositions pour obtenir le remboursement des frais liés à l'hébergement ou aux déplacements.