B. UN RÉGIME INSUFFISAMMENT PROTECTEUR
1. Le cas de la retraite supplémentaire des élus de centres de gestion et de services départementaux d'incendie et de secours
Si l'adhésion à un régime de retraite facultative par rente est ouverte à la plupart des élus locaux, elle n'est en revanche pas permise par la loi pour ce qui concerne les présidents et les vice-présidents des conseils d'administration des Services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) et les délégués du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).
Leurs cas ne sont en effet pas expressément visés aux articles du CGCT encadrant l'adhésion à un régime de retraite supplémentaire. Ces articles précisent, comme vos rapporteurs l'ont indiqué précédemment, que la constitution de la rente incombe pour moitié à l'élu et pour moitié à la collectivité concernée. Le législateur n'a donc pas prévu que les SDIS, établissements publics à caractère administratif, participent à la constitution de la rente pour la retraite de leurs présidents et vice-présidents. Les SDIS qui acceptent de participer à la constitution d'une retraite par rente facultative s'exposent à des sanctions de la Chambre régionale des comptes.
Les présidents et vice-présidents des conseils d'administration des SDIS, qui perçoivent des indemnités pour l'exercice effectif de leurs fonctions, sont affiliés au régime complémentaire de retraite Ircantec depuis un amendement gouvernemental à la loi du 13 août 2004, suite à une demande de l'Association des présidents de conseil d'administration de SDIS. L'article 29 du décret du 5 octobre 1987 relatif au CNFPT dispose que les délégués du CNFPT « peuvent percevoir des indemnités de fonctions dans les cas, les conditions et les limites définis par l'arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre des collectivités locales prévu à l'article 19 ». Le fait de percevoir une indemnité de fonction permet aux délégués régionaux et interdépartementaux du CNFPT d'être affiliés à l'Ircantec.
Ces élus cotisent donc à l'Ircantec mais ne peuvent adhérer à un régime de retraite supplémentaire. Cette situation avait été déplorée à la fois par les représentants du régime FONPEL et du régime CAREL lors de l'audition conduite par vos rapporteurs. Vos rapporteurs n'ont toutefois pas opté pour une évolution du CGCT permettant l'adhésion aux régimes de retraite supplémentaire aux élus de SDIS et de Centres de gestion (CDG). Tout d'abord, celle-ci leur semble particulièrement défavorable pour les autres élus qui ne seraient pas membres de SDIS et CDG. Ils craignent par ailleurs qu'une telle proposition provoque un appel d'air et que l'adhésion aux régimes de retraite supplémentaire soit ensuite étendue aux membres des Conseils économique, social et environnemental régional (CESER), alors même que ceux-ci ne sont pas des élus.
2. Le cas du statut de salarié protégé
La chambre sociale de la Cour de cassation a confirmé, lors de la Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) n° 16-40223 du 14 septembre 2016, que les dispositions, détaillées précédemment, sur le statut de salarié protégé n'étaient pas anticonstitutionnelles, en précisant toutefois que l'élu en question devait veiller à signaler cette qualité « au plus tard lors de l'entretien préalable de licenciement ».
Dans son rapport annuel de 2016, au titre des suggestions nouvelles de réforme en matière civile, la Cour de cassation a constaté l'absence de reprise des dispositions inscrites dans le CGCT au sein du code du travail, dont le livre IV de la deuxième partie, relatif aux salariés protégés, comprend notamment un titre premier « Cas, durée et périodes de protection » et un titre II « Procédures d'autorisation applicables à la rupture ou au transfert du contrat ».
L'absence de reprise de ces dispositions dans le code du travail apparaît ainsi comme une source de difficulté pour la détermination des dispositions effectivement applicables aux élus locaux, par exemple la procédure applicable ou les sanctions pénales. Cette insuffisance mène à certains contentieux inutiles au regard de la protection dont doivent bénéficier les élus locaux.
La Cour de cassation rappelle en effet que « l'objet même de la protection implique donc in fine que les inspecteurs du travail apprécient l'existence d'un éventuel lien entre la mesure de licenciement envisagée et l'exercice du mandat par le salarié. S'il apparaît que le licenciement est, en fait, motivé par l'exercice d'un tel mandat ou son appartenance politique, le refus de licenciement s'impose à l'inspecteur du travail. »
La simple assimilation figurant dans le CGCT ne semble, en l'état, pas permettre l'effective mise en oeuvre de la protection de l'élu salarié. Vos rapporteurs proposent donc de compléter le code du travail par des dispositions dédiées à la situation des élus locaux. Ce sera également l'occasion de préciser la durée pendant laquelle le statut de salarié protégé continue à s'appliquer après la fin du parcours électif. En effet, un délégué syndical est toujours salarié protégé durant les douze mois suivant la cessation de ses fonctions conformément à l'article L. 2411-3 du code du travail. En revanche, un membre de la délégation du personnel du comité social économique, bénéficie de cette protection uniquement pendant les six premiers mois suivant l'expiration de son mandat ou la disparition de l'institution, comme le prévoit l'article L. 2411-5 du code de travail.
Or, l'article L. 2123-9 du CGCT, pour le cas des élus communaux, précise que « lorsqu'ils n'ont pas cessé d'exercer leur activité professionnelle, les élus mentionnés au premier alinéa du présent article sont considérés comme des salariés protégés au sens du livre IV de la deuxième partie du code du travail. », sans donc signifier expressément à quel cas de salarié protégé est assimilé celui des élus locaux.
Compléter le code du travail serait donc également l'occasion de clarifier ce type de dispositions encore floues et de mieux faire connaître auprès des élus cette protection qui leur est offerte.
Recommandation n° 10 : Compléter les titres I er et II du code du travail afin que les dispositions sur le statut de salarié protégé des élus locaux soient précisées. |