II. LES DIFFICULTÉS LIÉES À L'INSUFFISANCE DU RÉGIME SOCIAL : UNE COUVERTURE SOCIALE À RENFORCER
A. UN RÉGIME INSUFFISANT DANS SES PRESTATIONS
Nombre d'élus consultés se plaignent notamment du montant insuffisant de leurs pensions de retraite. Certains élus proposaient néanmoins la fin de la double cotisation des élus locaux, qui peuvent parfois cotiser à la fois au titre de leur activité hors mandat et au titre de leur mandat électif. Or il semble délicat, au vu du trop faible montant des retraites, de formuler une telle évolution. La double cotisation, certes pénible et peu lisible, permet en effet d'améliorer sensiblement ce montant.
Une revalorisation du montant des retraites perçues par les élus locaux devra donc mécaniquement résulter de l'augmentation des indemnités versées à ces élus, proposition formulée dans le tome II du présent rapport.
Au-delà de la question du montant des retraites, de nombreux élus, notamment de petites villes, s'interrogent sur les conséquences de l'absence d'affiliation au régime général dès le début de leur mandat, certes entamé avant la loi de financement de la sécurité sociale. L'Association des petites villes de France (APVF) a ainsi alerté vos rapporteurs sur les cas d'élus, qui se consacrent à temps plein à l'exercice de leurs fonctions antérieurement à 2013, mais qui subissent du coup une perte sèche de trimestres validés pour la retraite. Quand l'élu peut remplir les conditions nécessaires au rachat des trimestres manquants pour les années incomplètes, le coût peut largement excéder le montant des indemnités de fonction perçues. Par ailleurs, aucune disposition ne semble actuellement permettre une participation de la commune ou d'un autre fonds public au rachat de ces trimestres de cotisations de retraites manquants, du fait de la cessation d'activité professionnelle d'élus pour se consacrer à leur mandat. En outre, une fois les trimestres validés, la cotisation des élus de petites communes est très limitée, de par leurs faibles indemnités. Cela a naturellement un impact négatif sur le montant de leur retraite.
Cette proposition, ainsi que la recommandation n° 12, seront cependant susceptibles d'évoluer à l'aune de la réforme, plus générale, des retraites, qui abordera ces cas spécifiques.
Recommandation n° 8 : Envisager la participation de la collectivité ou d'un fonds public au rachat des trimestres de cotisations manquants d'un élu à plein temps. Cette participation concernerait uniquement les trimestres de cotisations de retraites liés à l'affiliation au régime général. |
Pour compenser le faible montant de leurs retraites, les élus peuvent choisir de cotiser à la retraite facultative complémentaire par capitalisation en optant pour le FONPEL ou la CAREL. Néanmoins, nombreux sont les élus de petites collectivités à renoncer à cette possibilité. Ces derniers craignent que cette adhésion génère une charge impossible à supporter pour leur collectivité, celle-ci étant tenue de participer financièrement à la même hauteur. Rendre obligatoire la cotisation des élus locaux à la retraite supplémentaire permettrait toutefois d'établir une équité entre tous les élus indemnisés. Lors de leur audition par vos rapporteurs, les représentants du FONPEL, comme ceux de la CAREL, s'étaient exprimés en faveur de cette évolution sous certaines conditions, afin de conserver une souplesse dans les modalités d'application :
- la possibilité pour chaque élu de choisir l'organisme auquel il souhaite adhérer ;
- la possibilité de changer d'organisme si l'élu le souhaite ;
- la faculté de choisir le taux de cotisation (pour rappel, les taux disponibles sont aujourd'hui de 4%, 6% ou 8% de l'indemnité brute) en fonction de ses moyens et de ses besoins.
Il est à noter que, parmi les élus
répondant à la délégation,
55,2% avaient
jugé utile de rendre obligatoire l'adhésion des élus
locaux à un régime de retraite par rente.
Comme rappelé précédemment, l'élu peut racheter des points au titre des années d'exercice d'un mandat antérieurement à son affiliation. Un rapport d'information de l'Assemblée nationale de 2013 18 ( * ) appelait déjà à la vigilance au sujet des dépenses induites pour les collectivités ou EPCI, qui doivent participer à la même hauteur, dépenses aussi importantes qu'imprévisibles. Il faudrait donc étudier si le passage d'une cotisation facultative à une cotisation obligatoire ne devrait pas, comme suggéré par l'Assemblée nationale à l'époque, s'accompagner d'une suppression de la possibilité de rachat de points pour une période antérieure à l'entrée en vigueur de l'obligation de cotisation.
Néanmoins ce coût serait non négligeable pour les collectivités. Les indemnités représentant un volume total de 1,6 milliard d'euros, les investissements pourraient s'étendre de 64 millions d'euros (si l'ensemble des élus cotisaient à hauteur de 4%) à 128 millions d'euros (si l'ensemble des élus cotisaient à hauteur de 8%). Cette estimation ne tient toutefois pas compte des indemnités des élus déjà adhérents aux régimes de retraite supplémentaire, qui ne représenteraient donc pas une nouvelle dépense pour les collectivités.
Recommandation n° 9 : Faire évoluer le CGCT pour rendre obligatoire la cotisation à la retraite supplémentaire par capitalisation type FONPEL ou CAREL obligatoire, tout en veillant à laisser le choix de l'organisme et du taux de cotisation, ainsi que la possibilité de changer d'organisme, le cas échéant, et à supprimer la possibilité de rachat de points pour une période antérieure à l'entrée en vigueur de cette obligation (suppression concernant uniquement la retraite supplémentaire). |
* 18 Rapport d'information n° 1161 (2012-2013) de MM. Philippe Doucet et Philippe Gosselin, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république, en conclusion des travaux d'une mission d'information sur le statut de l'élu, déposé le 19 juin 2013.