B. LA NÉCESSITÉ DE LA CONCERTATION SUR LES VOIES ET MOYENS DE LA RÉFORME, ASSORTIE D'ÉTUDES D'IMPACT DIGNES DE CE NOM
L'élaboration de la loi de programmation prônée par votre mission, si elle devra être relativement rapide, devra néanmoins être précédée d'une concertation avec l'ensemble des acteurs de la justice , afin de prendre en compte la diversité des points de vue : conférences des chefs de cour et de juridiction, organisations syndicales de magistrats et de fonctionnaires des services judiciaires et pénitentiaires, représentants des auxiliaires de justice et des professionnels du droit, organisations diverses de la société civile...
Cette concertation devra porter sur les objectifs de la réforme de la justice autant que sur les propositions concrètes de réforme envisagés, ainsi que sur les modalités de leur mise en oeuvre.
Pour être réussie et fructueuse, cette concertation devra se dérouler, sur quelques mois, selon une méthodologie transparente et un calendrier précis. Elle devra s'appuyer, dans toutes ses étapes, sur des études d'impact sérieuses, approfondies et régulièrement actualisées , pour permettre aux différents acteurs de la concertation de connaître les moyens humains et budgétaires nécessaires à la mise en oeuvre effective des réformes proposées.
Compte tenu de son ambition, cette concertation devra relever d'un pilotage de nature politique , et pas simplement technique ou administratif. Un comité de la réforme de la justice pourrait être mis en place, pour piloter cette phase de concertation, veiller à la qualité des études d'impact et de leur actualisation et rendre compte des ajustements ou des évolutions apportés aux propositions de réforme envisagées initialement.
Plus largement, l'élaboration de cette loi de programmation pourra aussi servir d'expérimentation afin de concevoir, pour l'avenir, une méthode permanente plus rigoureuse de conception des réformes judiciaires.
C. LE VOLET ORGANIQUE DE LA RÉFORME DE LA JUSTICE
Plusieurs propositions de votre mission exigent une modification des deux textes organiques relatifs à l'institution judiciaire , prévus aux articles 64 et 65 de la Constitution : d'une part, l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature et, d'autre part, la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature 391 ( * ) .
Dans ces conditions, le projet de loi de programmation appelé de ses voeux par votre mission devrait s'accompagner d'un projet de loi organique, traduisant ces propositions et comportant les mesures de réforme de valeur organique, qui ne pourraient être incluses dans la loi de programmation. Le rapport annexé à la loi de programmation devrait toutefois s'étendre à ces mesures de niveau organique.
Relèveraient ainsi de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée les mesures suivantes :
- la modification des règles de mobilité des magistrats, comportant la mise en place de durées minimale et maximale dans les fonctions ;
- le renforcement des obligations de formation des chefs de cour et de juridiction ainsi que des magistrats recrutés par les voies latérales ;
- les conséquences statutaires de la création du tribunal de première instance, dont la suppression de la fonction spécialisée de juge d'instance.
Relèveraient de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 précitée la fixation de critères de sélection pour la nomination des chefs de cour et de juridiction par le Conseil supérieur de la magistrature, concernant en particulier la prise en compte prioritaire de leurs capacités d'administration.
Par ailleurs, la proposition consistant à sanctuariser les crédits que le Parlement alloue à l'autorité judiciaire, pour la consacrer d'un point de vue budgétaire et l'exonérer des mesures de gel budgétaire, suppose de modifier la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.
En vertu des articles 46 et 61 de la Constitution, l'ensemble de ces dispositions donneraient lieu à un examen obligatoire de leur conformité à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Votre mission considère qu'elles ne soulèvent aucun problème de constitutionnalité, ainsi qu'elle l'a exposé en présentant les propositions correspondantes dans le présent rapport.
* 390 En milliards d'euros.