II. UN PROGRAMME DE TRAVAIL EN FAVEUR DE L'EUROPE PUISSANCE ?
Plusieurs dispositions contenues dans le programme de travail devraient participer de l'affirmation de l'Union européenne sur la scène internationale, tout en contribuant à renforcer le projet politique européen.
A. L'ÉMERGENCE D'UN DROIT À LA SÉCURITÉ
1. La lutte contre le terrorisme et la protection des frontières extérieures
La sécurité intérieure est au coeur des préoccupations de la Commission. Le programme de travail pour 2017 insiste sur la mise en oeuvre du plan d'action destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme. Plusieurs textes ont déjà été présentés fin 2016 : harmonisation des infractions de blanchiment et des sanctions correspondantes, reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation d'avoirs criminels, lutte contre les mouvements d'argent liquide illicites et contre le commerce illicite de biens culturels, système européen d'information et d'autorisation concernant les voyages .
La réponse opérationnelle que doit apporter l'Union européenne à la question du terrorisme doit cependant être plus ambitieuse et reprendre les positions que nous avions exprimées avec nos collègues de six autres États membres 15 ( * ) puis relayées dans une résolution européenne relative à la lutte contre le terrorisme et tendant à l'adoption d'un Acte pour la sécurité intérieure de l'Union européenne 16 ( * ) . Vos rapporteurs rappellent le souhait exprimé à cette occasion que la Commission européenne propose le renforcement des moyens financiers et humains de la section d'Europol consacrée à la recherche et au partage avec les États membres d'informations ayant trait au terrorisme djihadiste sur internet et que soit mis en place dans un délai rapide un parquet européen collégial et décentralisé aux compétences élargies à la criminalité grave transfrontière.
La Commission a également inscrit trois stratégies à son programme de travail pour 2017. Elles concernent la Syrie, le partenariat avec l'Afrique, et l'aide au développement. Celles-ci rejoignent l'une des autres priorités de la Commission, à savoir l'élaboration d'une nouvelle politique migratoire. L'année 2017 devrait être consacrée à l'examen à mi-parcours de l'agenda européen en matière de migration et le suivi des dispositifs adoptés en vue de juguler les flux, en particulier l'accord Union européenne - Turquie de mars 2016. La Commission européenne rappelle par ailleurs que la plupart des instruments destinés à renforcer la protection des frontières et à gérer les flux migratoires n'ont pas encore été adoptés par les législateurs : réforme du système européen d'asile, mise en place d'une Agence de l'Union européenne pour l'asile, renforcement du système Eurodac et cadre de l'Union pour la réinstallation.
2. La protection des données personnelles
Le droit à la sécurité n'est pas contraire à la promotion du droit à la protection des données à caractère personnel. La Commission devrait ainsi présenter en 2017 une proposition de révision de la directive de 2002 sur la vie privée et les communications électroniques, en vue de l'adapter aux dernières évolutions technologiques 17 ( * ) . Elle entend également mettre en place un cadre applicable aux échanges de données à caractère personnel avec des pays tiers.
Vos rapporteurs saluent cette double ambition. Ils insistent sur la nécessité de préciser le statut des données personnelles dans les mandats de négociation des accords commerciaux. Il est en effet apparu, dans le cadre des négociations sur le partenariat transatlantique, que, si le mandat de négociation européen excluait les données personnelles, le mandat américain inclut quant à lui les « données commerciales ». Or les données commerciales, et notamment les données de consommation des clients, sont des données personnelles. Il existe donc une contradiction entre les objectifs des négociateurs, de part et d'autre de l'Atlantique, au risque de fragiliser la réglementation européenne.
S'agissant de la révision de la directive de 2002, il est indispensable que celle-ci soit cohérente avec le règlement relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, adopté en avril 2016 18 ( * ) . Les failles de sécurité sont traitées dans les deux textes ; les dispositions ne sont pas exactement identiques selon qu'il s'agit d'une faille de sécurité des opérateurs de télécommunications ou d'une faille traitée par le règlement européen. Dans le règlement européen, les dispositions sur les failles de sécurité s'appliquent à tous les acteurs, quel que soit le secteur industriel ou commercial concerné.
* 15 Déclaration conjointe sur la lutte contre le terrorisme du 30 mars 2015 des présidents et représentants des commissions des affaires européennes du Bundesrat de la République fédérale d'Allemagne, des Cortès du Royaume d'Espagne, du Sénat de la République française et de la Saeima de la République de Lettonie, du Parlement du Royaume du Danemark.
* 16 Résolution européenne du Sénat n°88 (2014-2015), 1 er avril 2015.
* 17 Directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques.
* 18 Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données).