II. ELÉMENTS DE SYNTHÈSE PUBLIQUE EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX
Comme évoqué précédemment, le présent rapport public s'accompagne de procès-verbaux adressés à chaque service récipiendaire afin de réaliser un compte-rendu des missions de contrôle effectuées et spécifier pour chaque administration les préconisations formulées par la Commission. Seul un résumé non confidentiel sera ici publié.
A. POUR UNE REVALORISATION DU BUDGET DES FONDS SPÉCIAUX
La CVFS, dans le cadre de ses missions de contrôle, a pu constater que l'emploi des fonds spéciaux répondait - à de très rares et mineures exceptions - à la doctrine qu'elle a élaborée depuis 14 ans, à savoir que ces dotations ne sauraient être utilisées dans un autre objectif que le financement d'activités nécessitant de rester confidentielles ou requérant une grande réactivité opérationnelle. Ces considérations conduisent d'ailleurs à marquer un réel étonnement concernant la stabilité de l'enveloppe consacrée aux fonds spéciaux : alors que les budgets octroyés aux services de renseignement ont connu une progression appréciable et conforme à la reconnaissance de la fonction stratégique assumée ainsi qu'à la hausse de leur activité, la Commission constate que les fonds spéciaux n'ont pas bénéficié d'une revalorisation alors même qu'ils financent la partie la plus sensible de l'activité de ces administrations. Elle attire donc l'attention du Premier ministre sur l'impérieuse nécessité de revaloriser au moins à hauteur de 50% le montant octroyé aux services de renseignement [recommandation n°10] .
B. POUR UN USAGE RATIONALISÉ DES FONDS SPÉCIAUX
Pareille revalorisation viendrait en soutien d'un surcroît d'activité opérationnelle ou d'une politique ambitieuse et proactive conduite par les services afin de répondre à leurs missions, d'entraver les menaces qui pèsent sur notre pays et d'anticiper celles qui pourraient survenir dans les prochaines années [recommandation n°11] . Elle répondrait également aux coûts croissants qu'engendrent la recherche de l'anonymat ou la préservation de la confidentialité de certaines actions. Elle permettrait enfin de tenir compte de la constitution d'un deuxième cercle de la communauté du renseignement composé notamment du Service central du renseignement territorial (SCRT), de la Direction du renseignement de la préfecture de police (DRPP) et de la Sous-direction à l'anticipation opérationnelle de la Gendarmerie nationale (SDAO). Certains de ces services pourraient ainsi être destinataires d'une dotation destinée à financer leur action qui s'inscrit en soutien des services du premier cercle [recommandation n°12] . De fait, la CVFS estime que l'accès de ces services aux techniques de recueil du renseignement, témoignage de leur contribution au renseignement de souveraineté, doit logiquement s'accompagner d'une dotation en fonds spéciaux.
Néanmoins, la Commission souhaite que l'octroi de fonds spéciaux réponde à une activité opérationnelle et des projets budgétés avec soin et non à une routine administrative [recommandation n°13] . Dans cet esprit, elle rappelle qu'aucune dérogation autre que coutumière n'a été instaurée au principe d'annualité budgétaire des fonds spéciaux (une modification législative serait en ce sens souhaitable (121 ( * )) , cf. les propositions formulées dans le tableau ci-avant) [recommandation n°14] . Dès lors, elle juge que la constitution d'importants reliquats au sein des services s'écarte de l'épure du droit et des règles de bonne gestion lorsqu'ils représentent une part trop significative de la dotation annuelle [recommandation n°15] . En effet, la CVFS comprend la nécessité de conserver une trésorerie afin de faire face à des imprévus ou des versements qui interviennent à échéance du premier trimestre de l'année, mais elle souhaite que celle-ci soit contenue. Elle estime que la non consommation des crédits par un service récipiendaire doit conduire le Premier ministre à examiner la nature de la demande budgétaire réalisée et à s'assurer qu'elle vient en appui à des activités constatées ou des projets formulés.
Cette rigueur budgétaire implique nécessairement de nouvelles modalités de gestion des fonds spéciaux qui devraient passer par un dialogue plus soutenu avec les services du Premier ministre ainsi qu'une parfaite réactivité de leur part. Ainsi la CVFS souhaite-t-elle que les premiers versements en fonds spéciaux interviennent dès la fin du mois de janvier [recommandation n°16] . En outre, elle plaide en faveur de la constitution d'une enveloppe de précaution afin de faire face à des sollicitations imprévues [recommandation n°17] . Si cette option n'était pas retenue, elle sollicite un recours plus aisé aux décrets de dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI) au profit de tous les services de la communauté du renseignement lorsqu'ils sont confrontés à des impératifs opérationnels soudains [recommandation n°17 bis] . La question du montant de ces DDAI comme facteur d'éligibilité ne lui paraît pas pertinente au regard d'exemples passés.
* (121) Jusqu'à la réforme de 2001, les crédits inusités devaient être annulés pour être reversés au budget général en application de l'article 42 de loi de 1946 (sur ce point, se référer à David Biroste, « Les fonds spéciaux : contribution à l'étude des marges du droit (seconde partie) », Revue française de finances publiques, mars 2003, n°81, p. 315). Mais cette règle n'était pas appliquée comme l'évoque le rapport Logerot, op. cit., p. 9.