B. POUR AMÉLIORER LA GESTION ET LE PILOTAGE DES ÉTABLISSEMENTS

1. Mettre en place un système d'information performant

L'enquête met en évidence l'inadaptation du système d'information des université s. L'Agence de mutualisation des universités et établissements (AMUE), chargée de fournir aux établissements un système d'information et une offre logicielle, ne parvient pas à répondre à leurs besoins. Dès lors, les universités utilisent et développent d'autres outils informatiques. Alors que « l'État finance [7,8 millions d'euros en 2012], directement et indirectement, une agence de mutualisation, la grande hétérogénéité et les carences des systèmes d'information constatées aujourd'hui sont particulièrement dommageables » selon la Cour des comptes. Cet état de fait conduit notamment à des lacunes dans le pilotage financier et stratégique des établissements.

Votre rapporteur spécial soutient donc tout particulièrement la recommandation de « rendre prioritaire la mise à niveau des systèmes d'information universitaires ».

2. Renforcer l'autonomie des universités dans la gestion des ressources humaines et mettre fin à certaines « dérives »

Votre rapporteur spécial a retenu avec attention les freins mis en lumière par l'enquête en matière de gestion des ressources humaines, en particulier le « cadre national contraignant », avec de multiples corps et statuts particuliers, la grande complexité des régimes indemnitaires, dont l'application aboutit parfois à des dérives, et des mesures réglementaires ou individuelles qui, prises par l'État, s'imposent aux établissements.

Il considère que les recommandations de la Cour des comptes sont de bon sens et doivent effectivement être retenues :

- « mettre en conformité la circulaire du ministre de l'éducation nationale relative aux obligations de service des personnels BIATSS 7 ( * ) avec le décret relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail dans la fonction publique ». L'enquête démontre, en effet, que l'application de la circulaire, qui permet de comptabiliser certains jours fériés non travaillés comme du temps de travail effectif 8 ( * ) , conduit actuellement les personnels non enseignants à effectuer un temps de travail limité à 1 551 heures annuel, voire à moins de 1 500 heures à la suite de certaines erreurs d'interprétation constatées par la Cour des comptes dans ses contrôles. Votre rapporteur spécial ne peut que souhaiter qu'il soit mis fin à de telles situations ;

- « poursuivre la simplification des cadres statutaires des personnels administratifs et techniques et harmoniser les modalités de gestion des différents corps » ;

- « clarifier et simplifier les régimes indemnitaires , notamment en vue de la mise en oeuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel » ;

- « faciliter la mise en oeuvre des dispositifs d'intéressement , en précisant le cadre d'utilisation de l'article L. 954-2 du code de l'éducation ».

Sur ce point, votre rapporteur spécial insiste sur l'importance d'un dispositif d'intéressement efficace, capable d'attirer et de valoriser les personnels qualifiés. Or, les contrôles réalisés par la Cour des comptes mettent en évidence un usage encore inégal du dispositif d'intéressement.

Il est nécessaire que le mérite et la performance soient pris en compte dans la rémunération et les parcours des enseignants . Dans l'enquête, la Cour des comptes constate que « la répartition des primes et indemnités est demeurée égalitaire pour la plupart des établissements ».

En revanche, votre rapporteur spécial soutient, bien évidemment, la Cour des comptes lorsqu'elle appelle à mettre fin aux « multiples irrégularités » qu'elle a pu constater lors de ses contrôles dans l'usage des régimes indemnitaires 9 ( * ) , y compris si ces pratiques ont pu avoir pour objectif de rétribuer les mérites individuels.

Votre rapporteur spécial fait également sienne la recommandation de la Cour des comptes tendant à demander aux universités d' « assurer un contrôle du respect des obligations de service des enseignants-chercheurs ». Il n'est pas admissible que cette vérification ne soit pas systématiquement réalisée, d'autant qu'elle est « indispensable pour déterminer le seuil d'application des heures complémentaires et pour garantir la juste reconnaissance des activités effectuées par les enseignants-chercheurs ».

Pour conclure, l'autonomie de gestion des universités devrait concerner davantage les modalités de recrutement, d'avancement et de promotion des personnels , lesquels relèvent encore, pour une très large part, de l'État.

3. Permettre aux universités de disposer d'une meilleure connaissance pluriannuelle de leurs ressources et de leurs besoins

- L'enquête met en évidence le fait que, si les universités semblent désormais disposer d'informations suffisantes pour prendre des décisions éclairées à court terme, elles sont toutefois susceptibles de manquer d'une vision stratégique de plus long terme .

- Ainsi en est-il notamment pour la gestion des ressources humaines , avec une gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC) restant de fait très largement « embryonnaire ». Ainsi, « aucune université de l'échantillon [de la Cour des comptes] ne dispose [...] à ce jour de plan pluriannuel de recrutement ou de schéma directeur des emplois et des compétences ».

- De même, en matière d'investissement , la Cour des comptes recommande de « prévoir un plan de financement dans le plan pluriannuel d'investissement, et [de] l'intégrer dans le cadre contractuel unique » afin de mettre en place une gestion prévisionnelle efficace.

S'agissant plus spécifiquement de la gestion du patrimoine immobilier, les universités ne disposent pas non plus « d'une visibilité pluriannuelle sur les niveaux d'investissement (issus en grande partie des CPER) et de maintenance (issus de la dotation budgétaire annuelle) nécessaires à leurs projets immobiliers, ni sur leurs propres capacités à assurer un financement interne . »

4. Poursuivre l'amélioration de la gestion du patrimoine : la dévolution du patrimoine, une bonne solution malheureusement trop coûteuse pour être généralisée dans un contexte budgétaire contraint

- Les universités doivent poursuivre leurs efforts de rationalisation des usages de leur patrimoine immobilier , par une meilleure mutualisation des locaux. En ce sens, votre rapporteur spécial comprend la recommandation de la Cour des comptes de définir « la stratégie immobilière dans le cadre de la politique de site », même s'il reste attaché à ce que les établissements conservent également leur autonomie.

- Il juge également intéressante la recommandation de la Cour des comptes de créer des « budgets annexes spécifiques » à la politique immobilière afin de mieux identifier à la fois les moyens qui lui sont consacrés et les dépenses engendrées pour sa gestion.

- Votre rapporteur spécial partage enfin l'analyse selon laquelle « le transfert de la propriété du patrimoine constituerait une étape supplémentaire et logique dans l'acquisition de l'autonomie des universités . » Il estime que la dévolution des biens immobiliers devrait notamment contribuer à une meilleure gestion ainsi qu'à une rationalisation des surfaces.

Cette question est d'autant plus cruciale que l'investissement immobilier dans l'enseignement supérieur est également lié aux capacités des collectivités territoriales à y participer , dans un contexte de baisse générale des dotations.

Pour autant, compte tenu de son coût , évalué à 850 millions d'euros par an, la généralisation de la dévolution semble, à court terme, difficilement envisageable au regard de la contrainte budgétaire. Votre rapporteur spécial invite le Gouvernement à étudier les conditions dans lesquelles elle pourrait toutefois se poursuivre , par exemple en étendant l'expérimentation à davantage d'universités.


* 7 Personnels BIATSS : personnels de bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniques, social et de santé.

* 8 Selon la Cour des comptes, « cette réduction du temps de travail ne semble pas fondée sur des sujétions particulières liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail, qui seules, en application de la réglementation, pourraient justifier un régime dérogatoire ».

* 9 Exemples d'irrégularités constatées par la Cour des comptes : « cumul de primes pourtant exclusives ; dépassement de plafond ; versement de primes à des catégories de personnels non prévues par les textes ; absence de consultation du conseil d'administration sur la définition ou la revalorisation des régimes de primes ; versement déguisé de primes sous forme de contrat d'expertise ou de prestations diverses ; attributions de vacations sans contrepartie réelle et sérieuse ; utilisation de coefficient multiplicateur pour les heures complémentaires ; paiement de conventions de prestations d'enseignement à des auto-entrepreneurs ou à des sociétés, permettant de s'affranchir des niveaux de rémunération des heures complémentaires, etc. ».

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