Rapport d'information n° 639 (2014-2015) de Mme Josette DURRIEU , fait au nom de la délégation à l'Assemblée du Conseil de l'Europe, déposé le 16 juillet 2015
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PREMIER CHAPITRE : ACTIVITÉS DE LA
DÉLÉGATION FRANÇAISE DEPUIS LA PRÉCÉDENTE
PARTIE DE SESSION
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SECOND CHAPITRE :
3ÈME PARTIE DE LA SESSION ORDINAIRE DE 2015
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I. ACTUALITÉS DE LA DÉLÉGATION
FRANÇAISE
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II. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE
DÉROULEMENT DE LA PARTIE DE SESSION
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III. LES ACTUALITÉS DU CONSEIL DE L'EUROPE
ET DE SON ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
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A. LE RAPPORT D'ACTIVITÉ DU BUREAU ET DE LA
COMMISSION PERMANENTE
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B. L'OBSERVATION DES ÉLECTIONS
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C. LES DÉBATS INTERACTIFS AVEC
L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
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1. La communication du Comité des Ministres,
présentée par M. Igor Crnadak, ministre des affaires
étrangères de la Bosnie-Herzégovine, président du
Comité des Ministres
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2. Le discours de Mme Marie-Louise Coleiro
Preca, Présidente de Malte
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3. Le discours de M. Ban Ki-moon,
Secrétaire général des Nations unies
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4. Les questions au Secrétaire
général du Conseil de l'Europe
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5. Le discours de M. Mladen Ivaniè,
Président de la présidence de Bosnie-Herzégovine
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1. La communication du Comité des Ministres,
présentée par M. Igor Crnadak, ministre des affaires
étrangères de la Bosnie-Herzégovine, président du
Comité des Ministres
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A. LE RAPPORT D'ACTIVITÉ DU BUREAU ET DE LA
COMMISSION PERMANENTE
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IV. LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN EUROPE ET
DANS LE MONDE
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V. LA PROCÉDURE DE SUIVI DE
L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
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VI. L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE ET LA
SITUATION INTERNATIONALE
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VII. DE NOUVEAUX DÉFIS POUR LES DROITS DE
L'HOMME
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A. DÉBAT CONJOINT : ACCROÎTRE LA
TRANSPARENCE DE LA PROPRIÉTÉ DES MÉDIAS ET LA
RESPONSABILITÉ ET LA DÉONTOLOGIE DES MÉDIAS DANS UN
ENVIRONNEMENT MÉDIATIQUE CHANGEANT
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B. VERS UN NOUVEAU MODÈLE SOCIAL
EUROPÉEN
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C. RECONNAÎTRE ET PRÉVENIR LE
NÉO-RACISME
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D. RENFORCER LA COOPÉRATION CONTRE LE
CYBERTERRORISME ET D'AUTRES ATTAQUES DE GRANDE AMPLEUR SUR INTERNET
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A. DÉBAT CONJOINT : ACCROÎTRE LA
TRANSPARENCE DE LA PROPRIÉTÉ DES MÉDIAS ET LA
RESPONSABILITÉ ET LA DÉONTOLOGIE DES MÉDIAS DANS UN
ENVIRONNEMENT MÉDIATIQUE CHANGEANT
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I. ACTUALITÉS DE LA DÉLÉGATION
FRANÇAISE
N° 639
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2014-2015
Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 juillet 2015 |
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom des délégués élus par le Sénat (1), sur les travaux de la délégation française à l' Assemblée parlementaire du Conseil de l' Europe au cours de la troisième partie de la session ordinaire 2015 de cette assemblée, adressé à M. le Président du Sénat, en application de l'article 108 du Règlement,
Par Mme Josette DURRIEU,
Sénatrice.
Cette délégation est composée de : Mme Maryvonne Blondin, M. Jean-Marie Bockel, Mmes Nicole Duranton, Josette Durrieu, MM. Bernard Fournier, François Grosdidier, délégués titulaires ; MM. Jacques Bigot, Jean-Claude Frécon, Guy-Dominique Kennel, Jacques Legendre, Yves Pozzo di Borgo, André Reichardt, délégués suppléants . |
PREMIER CHAPITRE : ACTIVITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE DEPUIS LA PRÉCÉDENTE PARTIE DE SESSION
Afin de mieux rendre compte des activités de la délégation française entre les parties de session de l'Assemblée parlementaire, le présent rapport expose, essentiellement sous forme de comptes rendus, les entretiens, déplacements et événements ayant concerné les membres de la délégation.
Depuis la 2 ème partie de la session de 2015, qui s'était tenue du 20 au 24 avril, la délégation a ainsi effectué un déplacement à Strasbourg, les 5 et 6 mai 2015, où elle s'est entretenue avec des responsables de différents organes du Conseil de l'Europe, et a apporté son soutien à l'organisation par l'APCE d'une conférence parlementaire sur la mise en oeuvre du droit à des élections libres dans les pays du Partenariat oriental.
I. RENCONTRES AVEC DIFFÉRENTS ORGANES DU CONSEIL DE L'EUROPE À STRASBOURG
Avec le souci de mieux appréhender le travail de différents organes du Conseil de l'Europe, des membres de la délégation se sont rendus à Strasbourg, les 5 et 6 mai derniers, pour rencontrer le président, M. Gianni Buquicchio, et le directeur, M. Thomas Markert, de la Commission européenne pour la démocratie par le droit, dite « Commission de Venise », la directrice de la Direction européenne de la qualité du médicament, le Docteur Susanne Keitel, et plusieurs de ses collaborateurs, au cours d'une visite de ce qui est autrement appelé « la Pharmacopée ». Des rencontres ont également été organisées avec M. Roberto Olla, directeur exécutif d'Eurimages, M. Stéphane Leyenberger, secrétaire exécutif de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ) et des représentants du Conseil de l'Europe en charge de la politique pénale, avec qui ont été notamment évoquées la Convention Médicrime et celle ayant pour objet de lutter contre le trafic d'organes.
Quelques constats peuvent relier ces visites :
- une relation de réelle complémentarité avec l'Union européenne ;
- un champ de compétences qui s'étend bien souvent au-delà du continent européen ;
- ces organes sont le fruit d'une coopération « sur mesure » entre États ;
- le coût de cette coopération est faible, et ce encore plus si on la mesure à l'aune de l'Union européenne ;
- les résultats sont assez impressionnants.
C'est à travers cette « grille de lecture » que seront présentées ici de manière synthétique les activités de ces organes.
I - La Commission de Venise
Les échanges avec les responsables de la Commission de Venise ont permis de retracer l'historique de la création de cet organe devenu aujourd'hui l'un des plus emblématiques du Conseil de l'Europe avec 60 États membres, dont la Corée, les États-Unis et Israël, un État associé, la Biélorussie, cinq observateurs et trois membres à statut spécial, dont l'Union européenne et l'Autorité palestinienne.
Les États membres du sud de la Méditerranée sont l'Algérie, le Maroc et la Tunisie. La Commission coopère également avec la Jordanie, même si elle n'est pas membre. La mission principale de la Commission est d'émettre des avis sur des projets de loi ou des lois en vigueur à la demande des États, du Conseil de l'Europe et de diverses organisations internationales. Elle rend également des avis sur des questions de droit constitutionnel et de droit international. Elle publie des études de référence et organise des conférences et séminaires
Les institutions de l'Union européenne, Commission et Parlement européen, font régulièrement référence à ses travaux. L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe l'a fréquemment saisie.
Qui peut saisir la Commission de Venise ? 1 ( * )
États membres ï Parlements ï Gouvernements ï Chefs d'État |
Conseil de l'Europe ï Secrétaire général ï Comité des Ministres ï Assemblée parlementaire ï Congrès des pouvoirs locaux et régionaux |
Organisations internationales ï Union européenne ï OSCE/BIDDH ï autres organisations internationales participant aux travaux de la Commission |
Comment la Commission de Venise prépare un avis ? 1
Saisine
de la Commission d'un (projet de)
texte constitutionnel ou législatif
?
Composition d'un
groupe de travail
?
Projet d'avis
sur la conformité du
texte en question avec les normes internationales
? Visite dans le pays pour des entretiens avec les autorités, la société civile et d'autres acteurs intéressés Projet d'avis définitif ?
Envoi du projet d'avis définitif
à tous les membres de la Commission
? Débat sur le projet au sein d'une sous-commission ainsi qu'avec les autorités nationales (si nécessaire) ? Discussion et adoption (*) de l'avis en session plénière ? Envoi de l'avis à l'instance qui l'a demandé ? Mise du texte définitif de l'avis sur le site web de la Commission www.venice.coe.int
(*) La Commission « entérine » un projet d'avis
préparé par les rapporteurs lorsque deux conditions sont
remplies:
|
II - La Pharmacopée
La Direction européenne de la qualité du médicament et des soins de santé, appelée souvent « Pharmacopée européenne », a été créée en 1964 par huit États, et comporte aujourd'hui 38 membres, dont l'Union européenne, ainsi que 25 observateurs, dont l'OMS. Elle est chargée d'édicter des normes obligatoires sur la qualité des médicaments, c'est-à-dire de ce dont ils sont composés. Ces normes sont définies dans les « monographies » qui définissent des normes de qualité, qu'il s'agisse de la version initiale du médicament ou du générique, des formes de présentation (comprimés, gélules, etc...) et des méthodes d'analyse. Elle est également chargée de la surveillance des médicaments commercialisés et distribués en Europe, via le réseau européen des laboratoires officiels de contrôle des médicaments (OMCL).
De son côté, l'Union européenne est responsable du développement du médicament, de sa mise sur le marché et de la surveillance d'effets indésirables.
La Pharmacopée participe à la lutte contre la contrefaçon des médicaments.
La DEQM a également des responsabilités dans le domaine de la transfusion sanguine et de la transplantation d'organes, de tissus et de cellules.
S'agissant de la transfusion sanguine, elle entend garantir la qualité et la sécurité tout en promouvant le principe du don volontaire non rémunéré.
Le cas des dons d'organe :
Source : DEQM
III - Médicrime
La délégation a rencontré M. Oscar Alarcón Jiménez, responsable du secrétariat de la Convention « Médicrime » du Conseil de l'Europe et M. Carlo Chiaromonte, chef de la division du droit pénal et de la division du terrorisme.
Cette convention sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique, dite « Convention Médicrime », a été signée à Moscou le 14 octobre 2011. Ce texte se donne pour ambition de combattre le commerce de médicaments contrefaits ou falsifiés, qui représenterait 5 à 10 % du marché pharmaceutique mondial. Par ailleurs, 90 % des médicaments commercialisés par Internet seraient faux.
Les risques et les dommages à la santé publique et à la sécurité des citoyens européens générés par ce trafic très lucratif pour les organisations criminelles qui le pratiquent justifiaient un tel accord international contraignant. La Convention « Médicrime » constitue en effet le premier instrument international qui contraint les États parties à ériger en infraction pénale, dans leurs législations, les quatre actions suivantes : la fourniture, l'offre de fourniture et le trafic des produits médicaux contrefaits ; la falsification de documents ; enfin, la fabrication ou la fourniture non autorisée de produits médicaux et la mise sur le marché de dispositifs médicaux ne remplissant pas les exigences de conformité.
Cette Convention entrera en vigueur lorsque cinq États, dont trois membres du Conseil de l'Europe, l'auront ratifiée. Si un total de vingt-trois États, dont dix-neuf membres du Conseil de l'Europe l'ont déjà signée, seuls quatre l'ont ratifiée : Ukraine, Espagne, Hongrie et Moldavie.
Les interlocuteurs de la délégation ont donc fait valoir toute l'importance d'une prochaine ratification de la Convention par un cinquième État, la France, qui dès le départ en a appuyé le principe et en fut l'un des premiers signataires. La législation française en la matière, bien que déjà très élaborée au moment de la signature de la Convention en 2011, devrait cependant être complétée afin de répondre aux prescriptions de la Convention.
En 2012, 2013 et 2014, six textes législatifs ont permis de combler les lacunes existant jusqu'alors.
C'est pourquoi le Gouvernement a pu déposer sur le bureau du Sénat, le 5 janvier 2015, le projet de loi autorisant l'approbation de la Convention « Médicrime » qui, au mois de juillet 2015, n'a cependant pas encore été inscrit à l'ordre du jour de la Haute Assemblée.
Par ailleurs, M. Carlo Chiaromonte a évoqué la Convention du Conseil de l'Europe contre le trafic d'organes humains, qui a été ouverte à la signature le 25 mars 2015. Quatorze États l'ont signée à ce jour, aucun ne l'ayant encore ratifiée. La France ne l'a pas encore signée. Ce texte est pourtant au coeur des droits de l'Homme les plus élémentaires et, selon certaines informations, ce trafic contribuerait au financement du terrorisme. Pour ces raisons, il serait opportun que la France soit l'un des premiers États à signer et ratifier cette Convention.
IV - Eurimages, un petit budget mais une grande réussite
Eurimages est né d'un constat dans les années 1980 : les films produits en Europe ne voyagent guère au-delà de leur pays d'origine. Ce qui était à l'époque la Communauté économique européenne n'avait que peu de compétences culturelles et il n'y avait pas de consensus au sein des États membres pour mener une politique dans ce domaine.
En revanche, un accord engageant les seuls États intéressés a pu se conclure au niveau du Conseil de l'Europe sous la forme d'un accord partiel, qui a débuté en 1988 avec 12 États pour arriver à 36 aujourd'hui. L'Arménie pourrait être le 37 ème État membre.
Le rôle d'Eurimages est de soutenir les coproductions, c'est-à-dire les films impliquant au moins deux États. Il ne soutient que les films diffusés dans les cinémas.
L'objectif d'Eurimages est de permettre à des films de qualité de boucler leur financement sans renier leur ambition. Le fonds intervient donc à la fin du processus. Au moins 50 % du financement doit être déjà assuré dans chacun des pays co-producteurs.
Au maximum, Eurimages peut apporter 500 000 euros, et, en tout état de cause, une contribution qui ne saurait excéder 17 % du budget total du film.
(1) Source : Eurimages
Ce soutien est cumulable avec celui que l'Union européenne peut apporter dans d'autres domaines, en particulier la distribution.
Les récompenses obtenues témoignent de la pertinence des choix opérés par Eurimages.
Eurimages permet le maintien de la diversité des opinions. Il ne peut soutenir l'industrie du cinéma dans sa globalité, mais plutôt des « films de niche ».
Les chiffres cités lors de cet entretien sont intéressants : l'Europe produit environ 1 500 longs métrages chaque année contre 700 à 800 aux États-Unis. Sur ces 1 500, il faut compter 300 à 400 co-productions, Eurimages en soutenant 60 à 70.
Eurimages offre chaque année un prix au développement de la coproduction. Son budget est alimenté par les contributions des États membres, selon deux clés de répartition, la richesse (PIB) et la population, d'une part, et le nombre de coproductions, d'autre part. Plus un pays a de coproductions et plus il contribue et inversement. Un pays ayant peu de coproductions n'aurait en effet guère de chance de bénéficier de beaucoup de financements d'Eurimages. En outre, Eurimages récupère en moyenne annuelle deux millions d'euros venant des recettes des films soutenus.
Ce fonds illustre l'intérêt de la technique des accords partiels, qui lui permettent de fonctionner un peu comme une agence autonome. Les frais de fonctionnement ne consomment que 10 % du budget d'Eurimages.
V - La Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ)
Dans le respect de l'indépendance de la justice, la CEPEJ se préoccupe de la qualité du fonctionnement de ce service public spécifique.
La CEPEJ s'efforce de mieux faire connaître l'action du Conseil de l'Europe dans le domaine judiciaire, et notamment celle de la Cour européenne des droits de l'Homme et les recommandations du Comité des Ministres. Elle s'efforce ensuite de placer le justiciable au coeur de la justice et, enfin, de signaler les dysfonctionnements de ce service public, à l'origine de nombreux litiges devant la Cour. À travers ses questionnaires, la CEPEJ a accumulé plus de trois millions de données. L'utilisation de ces données impose de respecter un certain nombre de précautions méthodologiques, ainsi, notamment, de comparer des États comparables. Le Comité des Ministres a soutenu le travail de la CEPEJ, le considérant comme une priorité, et la Commission européenne la finance à hauteur de 200 000 euros par an. Le système fonctionne en bonne intelligence avec les États membres, chacun d'entre eux désignant un correspondant. La France a mis à disposition de la CEPEJ un magistrat pour une durée de deux années.
Tous les deux ans, la CEPEJ présente un rapport très détaillé sur le fonctionnement des systèmes judiciaires sur notre continent, le dernier datant de 2014 sur la base des données de 2012.
À titre d'exemple, un extrait du rapport sur un aspect peu connu en France :
« Une participation accrue de l'usager au coût du service public de la justice 2 ( * )
Les frais de justice perçus par les tribunaux sont désormais une caractéristique forte des systèmes judiciaires d'Europe : le contribuable n'est pas seul à financer le système, il est demandé à l'usager de contribuer également. Seuls la France et le Luxembourg prévoient la gratuité de l'action en justice. Les recettes générées par les frais de justice représentent entre moins de 1 % et plus de 50 % du budget de fonctionnement des tribunaux, et même, pour certains États, plus de la moitié du budget du système judiciaire. Dans la majorité d'entre eux, ces recettes représentent une ressource notable, qui couvre une importante partie des frais de fonctionnement de la justice - en Autriche , elles génèrent même un revenu supérieur au coût de fonctionnement de l'ensemble du système judiciaire. Ces ressources proviennent notamment des ressources liées à la tenue des registres du commerce et foncier. Un tel système s'inscrit dans la tendance actuelle en matière de gestion publique visant à rééquilibrer en partie la charge des frais de fonctionnement des services publics entre usagers et contribuables. Dans ce domaine, il est toutefois important de distinguer les frais exigés pour obtenir des informations, apporter des modifications de nature foncière ou en matière de registres du commerce ou d'autres registres et les frais relatifs aux procédures judiciaires elles-mêmes : il est important, pour garantir l'effectivité de l'accès à la justice, que les frais de justice ne soient pas un obstacle à l'effectivité du droit d'intenter une action pour le citoyen. »
II. III. CONFÉRENCE PARLEMENTAIRE SUR LA MISE EN oeUVRE DU DROIT À DES ÉLECTIONS LIBRES DANS LES PAYS DU PARTENARIAT ORIENTAL
« Les élections sont l'expression de la démocratie, sa pierre angulaire, et elles restent une condition nécessaire mais pas suffisante pour faire vivre la démocratie », ont conclu quelque 80 participants à la conférence parlementaire sur la mise en oeuvre du droit à des élections libres dans les pays du Partenariat oriental, organisée par l'APCE, les 4 et 5 juin, à Paris, en coopération avec l'Assemblée nationale française et la Commission de Venise.
Ils ont rappelé que le droit à des élections libres doit être parfaitement mis en oeuvre sur le continent européen et que le Conseil de l'Europe, avec ses différents organes statutaires, jouait un rôle central dans la codification du droit électoral, dans l'observation électorale et dans l'assistance aux États membres pour améliorer leurs processus électoraux.
Rappelant les normes et standards du Conseil de l'Europe en matière d'élections démocratiques ainsi que les mécanismes de monitoring , les intervenants ont également identifié les principaux défis à l'application de ces obligations afin d'améliorer l'organisation des élections dans les pays du Partenariat oriental à travers la mise en oeuvre de bonnes pratiques électorales, la finalité étant l'amélioration des processus électoraux pour une meilleure gouvernance démocratique.
« Mais nos démocraties traversent une phase de doute, une perte de passion démocratique. La participation électorale décroit et les institutions démocratiques traversent une crise de confiance. Il est primordial de faire progresser la démocratie, l'État de droit et le respect des libertés fondamentales sur le continent, sans quoi il n'y a ni sécurité ni stabilité possible. Cette dimension est d'autant plus importante pour les six pays du Partenariat oriental dont les traditions démocratiques ne sont pas encore enracinées. Pour ce faire, la coopération et la concertation entre l'APCE et différentes organes du Conseil de l'Europe, l'Union européenne et l'OSCE sont incontournables pour renforcer les institutions démocratiques de ces pays » ont-ils conclu.
Cette conférence était la première d'une série de conférences parlementaires, financées par l'Assemblée parlementaire et par le Cadre programmatique de coopération UE-CoE avec les pays du Partenariat oriental, et dont les pays bénéficiaires sont l'Azerbaïdjan, l'Arménie, la Géorgie, l'Ukraine, la République de Moldavie et la Biélorussie.
Ont participé à la conférence des membres de parlements, y compris des représentants de l'opposition, des présidents et des représentants des administrations électorales, des ONGs, impliquées d'une manière active dans l'observation des élections. Elle a été ouverte par Harlem Désir, Secrétaire d'État aux Affaires européennes de la France, René Rouquet (Val-de-Marne - Socialiste, républicain et citoyen), vice-président de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et président de la délégation française auprès de l'APCE, Jean-Claude Frécon (Loire - Socialiste et républicain), président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe et Gianni Buquicchio, Président de la Commission de Venise.
Parmi les autres orateurs figuraient notamment Jean-Charles Gardetto, ancien membre de l'APCE et rapporteur sur le thème « Garantir des élections plus démocratiques », Giancarlo Defazio, Direction Générale justice et consommateurs de la Commission européenne, Tamar Zhvania, Présidente de la Commission électorale centrale de la Géorgie, et Nicolas Kaczorowski, Directeur pays à la Fondation internationale pour les systèmes électoraux (IFES, Tunisie), rapporteur de la conférence.
SECOND CHAPITRE :
3ÈME PARTIE DE LA SESSION ORDINAIRE DE
2015
La troisième partie de la session ordinaire de 2015 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, qui s'est tenue à Strasbourg, du 22 au 26 juin, a été l'occasion d'évoquer la situation de la démocratie, de l'État de droit et des droits de l'Homme dans plusieurs pays : l'Azerbaïdjan, la Hongrie, l'Ukraine, grâce à un débat sur les personnes portées disparues pendant le conflit dans ce pays, et le Maroc, au travers de l'évaluation du statut de partenaire pour la démocratie dont bénéficie son parlement.
Cette partie de session a été marquée par plusieurs temps forts, dont les discours de M. Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations unies, de M. Mladen Ivaniè, Président de la présidence de Bosnie-Herzégovine, dont le pays assure pour la première fois la présidence du Comité des Ministres, et de Mme Marie-Louise Coleiro Preca, Présidente de Malte, dont le pays célèbre le 50 e anniversaire de son adhésion au Conseil de l'Europe.
Parmi les questions traitées au cours de cette partie de session, l'Assemblée s'est penchée, à l'occasion d'un débat d'actualité, sur les défis que posent les flux migratoires et la façon dont l'Europe peut y répondre. Elle a, une fois encore, examiné les pouvoirs de la délégation russe et a décidé de ne pas les annuler, mais de reconduire jusqu'à la première partie de la session 2016 les sanctions qu'elle avait votées en janvier dernier, dont la privation du droit de vote. Elle a aussi consacré un débat à l'observation des élections législatives en Turquie du 7 juin précédent.
Enfin, elle a réélu pour cinq ans Mme Gabriella Battaini-Dragoni, Secrétaire générale adjointe du Conseil de l'Europe, qui exerçait son mandat depuis deux ans et demi, et a procédé à l'élection de quatre juges à la Cour européenne des droits de l'Homme : M. Armen Harutyunyan, au titre de l'Arménie, M. Martins Mits, au titre de la Lettonie, M. Georges Ravarani, au titre du Luxembourg, et Mme Stéphanie Mourou-Vikström au titre de Monaco.
I. ACTUALITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE
A. LA DÉLÉGATION ET SON BUREAU
La délégation française à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe comprend vingt-quatre députés (douze titulaires et douze suppléants) et douze sénateurs (six titulaires et six suppléants), soit dix-huit sièges.
Composition de la délégation en juin 2015
Membres titulaires |
|||
Chambre Parlement
|
Groupe
|
Groupe APCE |
|
Mme Brigitte ALLAIN |
Députée |
Écologiste |
SOC |
M. Gérard BAPT |
Député |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. Jean-Marie BOCKEL |
Sénateur |
UDI-UC |
PPE/DC |
Mme Maryvonne BLONDIN |
Sénatrice |
Socialiste et républicain |
SOC |
Mme Nicole DURANTON |
Sénateur |
Les Républicains |
PPE/DC |
Mme Josette DURRIEU |
Sénatrice |
Socialiste et républicain |
SOC |
M. Bernard FOURNIER |
Sénateur |
Les Républicains |
PPE/DC |
M. François GROSDIDIER |
Sénateur |
Les Républicains |
PPE/DC |
M. Denis JACQUAT |
Député |
Les Républicains |
PPE/DC |
Mme Marietta KARAMANLI |
Députée |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. Pierre-Yves LE BORGN' |
Député |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. Jean-Yves LE DÉAUT |
Député |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. François LONCLE |
Député |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. Thierry MARIANI |
Député |
Les Républicains |
PPE/DC |
M. Jean-Claude MIGNON |
Député |
Les Républicains |
PPE/DC |
M. François ROCHEBLOINE |
Député |
Union des démocrates et indépendants |
PPE/DC |
M. René ROUQUET |
Député |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
Mme Marie-Jo ZIMMERMANN |
Députée |
Les Républicains |
PPE/DC |
Membres suppléants |
|||
Chambre Parlement
|
Groupe
|
Groupe APCE |
|
M. Damien ABAD |
Député |
Les Républicains |
PPE/DC |
Mme Danielle AUROI |
Députée |
Écologiste |
SOC |
M. Philippe BIES |
Député |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. Jacques BIGOT |
Sénateur |
Socialiste et républicain |
SOC |
Mme Pascale CROZON |
Députée |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
Mme Marie-Christine DALLOZ |
Députée |
Les Républicains |
PPE/DC |
M. Jean-Claude FRÉCON |
Sénateur |
Socialiste et républicain |
SOC |
Mme Geneviève GOSSELIN-FLEURY |
Députée |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. Guy-Dominique KENNEL |
Sénateur |
Les Républicains |
PPE/DC |
Mme Colette LANGLADE |
Sénatrice |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. Jacques LEGENDRE |
Sénateur |
Les Républicains |
PPE/DC |
Mme Martine MARTINEL |
Députée |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. Yves POZZO DI BORGO |
Sénateur |
UDI-UC |
PPE/DC |
Mme Catherine QUÉRÉ |
Députée |
Socialiste, républicain et citoyen |
SOC |
M. André REICHARDT |
Sénateur |
Les Républicains |
PPE/DC |
M. Frédéric REISS |
Député |
Les Républicains |
PPE/DC |
M. Rudy SALLES |
Député |
Union des démocrates et indépendants |
PPE/DC |
M. André SCHNEIDER |
Député |
Les Républicains |
PPE/DC |
Le Bureau de la délégation est composé de la façon suivante :
Président |
M. René ROUQUET |
Député |
Socialiste, républicain et citoyen |
Président délégué |
M. Jean-Claude MIGNON |
Député |
Les Républicains |
Première vice-présidente |
Mme Josette DURRIEU |
Sénatrice |
Socialiste et républicain |
Vice-présidents |
Mme Brigitte ALLAIN |
Députée |
écologiste |
M. Jean-Marie BOCKEL |
Sénateur |
UDI-UC |
|
M. Jean-Claude FRÉCON |
Sénateur |
Socialiste et républicain |
|
Mme Marietta KARAMANLI |
Députée |
Socialiste, républicain et citoyen |
|
M. Jacques LEGENDRE |
Sénateur |
Les Républicains |
|
M. François LONCLE |
Député |
Socialistes, républicain et citoyen |
|
M. François ROCHEBLOINE |
Député |
Union des démocrates et indépendants |
|
M. André SCHNEIDER |
Député |
Les Républicains |
|
Mme Marie-Jo ZIMMERMANN |
Députée |
Les Républicains |
NOMINATIONS
M. René Rouquet (Val-de-Marne - Socialiste, républicain et citoyen), président de la délégation française, a présidé la séance du mardi 23 juin matin. Il a été désigné par le Bureau, au titre de la commission des questions politiques et de la démocratie, membre de la commission ad hoc pour participer au Forum mondial de la démocratie, à Strasbourg du 18 au 20 novembre 2015.
Mme Maryvonne Blondin (Finistère - Socialiste et républicain) est devenue membre titulaire de de la sous-commission sur l'égalité de genre de la commission sur l'égalité et la non-discrimination. Elle a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives en Azerbaïdjan du 1 er novembre 2015.
M. Jean-Marie Bockel (Haut-Rhin - UDI-UC) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléant de la commission ad hoc pour l'observation de l'élection présidentielle en Biélorussie du 11 octobre 2015, ainsi que de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives au Kirghizstan du 8 novembre 2015.
Mme Pascale Crozon (Rhône - Socialiste, républicain et citoyen) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléante de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives en Azerbaïdjan du 1 er novembre 2015.
Mme Nicole Duranton (Eure - Les Républicains) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléante de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives en Azerbaïdjan du 1 er novembre 2015.
Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées - Socialiste et républicain) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléante de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives en Azerbaïdjan du 1 er novembre 2015, ainsi que de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives au Kirghizstan du 8 novembre 2015.
M. Jean-Yves Le Déaut (Meurthe-et-Moselle - Socialiste, républicain et citoyen) , rapporteur général sur l'évaluation de l'impact de la science et de la technologie, a été désigné par la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias pour assister au Conseil de l'EPTA et à la Conférence sur l'innovation et le changement climatique, à Paris, les 23 et 24 septembre 2015.
M. Thierry Mariani (Français établis hors de France - Les Républicains) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre de la commission ad hoc pour l'observation de l'élection présidentielle en Biélorussie du 11 octobre 2015.
M. Yves Pozzo di Borgo (Paris - UDI-UC) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléant de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives au Kirghizstan du 8 novembre 2015.
M. André Reichardt (Bas-Rhin - Les Républicains) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléant de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives en Azerbaïdjan du 1 er novembre 2015.
M. François Rochebloine (Loire - Union des démocrates et indépendants) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléant de la commission ad hoc pour l'observation des élections législatives en Azerbaïdjan du 1 er novembre 2015.
B. RENCONTRES DE LA DÉLÉGATION
M. Jean-Marie Bockel (Haut-Rhin - UDI-UC), Mme Pascale Crozon (Rhône - Socialiste, républicain et citoyen) et M. Jean-Claude Frécon (Loire - Socialiste et républicain) ont rencontré, le mardi 23 juin, une délégation de magistrats français suivant une formation auprès du Conseil de l'Europe.
MM. René Rouquet (Val-de-Marne - Socialiste, républicain et socialiste), président de la délégation française , Pierre-Yves Le Borgn' (Français établis hors de France - Socialiste, républicain et citoyen) et Thierry Mariani (Français établis hors de France - Les Républicains) ont reçu, le mercredi 24 juin, Mme Svetislava Bulajic, candidate serbe au poste de Secrétaire général de l'APCE, dont l'élection se tiendra au cours de la quatrième partie de la session ordinaire, du 28 septembre au 2 octobre 2015.
La délégation a également participé à un dîner de travail à l'invitation de Mme Houria Yousfi, Consule générale d'Algérie à Strasbourg. Les échanges ont porté sur les relations entre la France et l'Algérie ainsi que celles entre l'APCE et l'Algérie et la manière dont ces dernières pourraient être renforcées, la commission des questions politiques et de la démocratie ayant précisément confié un rapport sur ce sujet à M. René Rouquet.
Les membres Les Républicains de la délégation ont rencontré des membres CDU de la délégation allemande, le 22 juin, pour un déjeuner de travail.
II. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE DÉROULEMENT DE LA PARTIE DE SESSION
A. ORDRE DU JOUR ET INTERVENTIONS DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS
Lundi 22 juin
- Discours de Mme Marie-Louise Coleiro Preca, Présidente de Malte ;
- Cérémonie du 60 ème anniversaire du Prix de l'Europe ;
- Rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente et observation d'élections : Mmes Josette Durrieu et Nicole Duranton ;
- Communication du Comité des Ministres à l'Assemblée parlementaire, présentée par M. Igor Crnadak, Ministre des affaires étrangères de la Bosnie-Herzégovine, Président du Comité des Ministres : Mme Nicole Duranton et M. François Rochebloine .
Mardi 23 juin
- Discours de M. Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations unies : Mme Josette Durrieu et M. Jean-Marie Bockel ;
- Améliorer la protection des donneurs d'alerte : M. Pierre-Yves Le Borgn' ;
- Questions à M. Thorbjørn Jagland, Secrétaire général du Conseil de l'Europe : M. Jean-Marie Bockel ;
- Évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement du Maroc : M. Bernard Fournier ;
- Le fonctionnement des institutions démocratiques en Azerbaïdjan : Mmes Pascale Crozon et Nicole Duranton, MM. Bernard Fournier, Yves Pozzo di Borgo, André Reichardt et François Rochebloine .
Mercredi 24 juin
- Examen de l'annulation des pouvoirs déjà ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie (suivi du paragraphe 16 de la résolution 2034 (2015)) : Mme Josette Durrieu, MM. Thierry Mariani et Yves Pozzo di Borgo ;
- Discours de M. Mladen Ivaniæ, Président de la présidence de Bosnie-Herzégovine : M. Pierre-Yves Le Borgn' ;
- Situation en Hongrie suite à l'adoption de la résolution 1941 (2013) : MM. Pierre-Yves Le Borgn' et René Rouquet ;
- Débat conjoint : Accroître la transparence de la propriété des médias - La responsabilité et déontologie des médias dans un environnement médiatique changeant.
Jeudi 25 juin
- La nécessité d'une réponse européenne commune aux défis en matière de migration : M. René Rouquet ;
- Débat libre : M. Pierre-Yves Le Borgn' ;
- Les personnes portées disparues pendant le conflit en Ukraine ;
- Vers un nouveau modèle social européen.
Vendredi 26 juin
- Reconnaître et prévenir le néo-racisme ;
- Renforcer la coopération contre le cyberterrorisme et d'autres attaques de grande ampleur sur Internet : M. René Rouquet .
B. TEXTES ADOPTÉS
Le Règlement de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe distingue trois types de textes : les avis, les recommandations et les résolutions :
- aux termes de l'article 24.1. a , une recommandation consiste en une proposition de l'Assemblée adressée au Comité des Ministres, dont la mise en oeuvre échappe à la compétence de l'Assemblée, mais relève des gouvernements ;
- définie à l'article 24.1. b , une résolution exprime une décision de l'Assemblée sur une question de fond, dont la mise en oeuvre relève de sa compétence, ou un point de vue qui n'engage que sa responsabilité ;
- les avis répondent aux demandes qui sont soumises à l'Assemblée par le Comité des Ministres concernant l'adhésion de nouveaux États membres au Conseil de l'Europe, mais aussi les projets de conventions, le budget ou la mise en oeuvre de la Charte sociale.
Le texte intégral des rapports, avis, comptes rendus des
débats
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III. LES ACTUALITÉS DU CONSEIL DE L'EUROPE ET DE SON ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
A. LE RAPPORT D'ACTIVITÉ DU BUREAU ET DE LA COMMISSION PERMANENTE
L'ouverture de chaque partie de session est traditionnellement consacrée à l'examen du rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente.
La rapporteure, Mme Adele Gambaro (Italie - ADLE), a d'abord évoqué la prévention et la lutte contre le terrorisme. Rappelant l'adoption du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'Homme pour la prévention du terrorisme, elle a estimé que le Conseil de l'Europe avait montré qu'il était pionnier dans la rédaction d'instruments internationaux portant sur des sujets brûlants requérant une étroite coopération internationale et a appelé de ses voeux la levée des obstacles qui empêchent l'ouverture et la signature du Protocole. Elle a noté que le recrutement de combattants étrangers par des groupes terroristes et la radicalisation des jeunes concernaient tous les États membres du Conseil de l'Europe. Elle a considéré qu'il convenait de lutter contre le terrorisme tout en restant fidèles aux valeurs fondant nos démocraties et de trouver un juste équilibre entre contrôle et liberté. Elle a rappelé les travaux de plusieurs commissions de l'Assemblée parlementaire relatifs à la mise en oeuvre de la résolution adoptée en janvier dernier sur les attaques terroristes à Paris et les activités de l'Alliance parlementaire contre la haine, soulignant le rôle essentiel de la prévention.
La rapporteure a ensuite présenté les travaux de la Commission permanente lors de sa réunion à Sarajevo, le 22 mai dernier : débat sur les priorités de la Présidence bosnienne et sur la situation intérieure de la Bosnie-Herzégovine, situation préoccupante dans l'ancienne République yougoslave de Macédoine (violences récentes, crise institutionnelle, corruption et népotisme, manque de confiance du peuple dans la classe politique, risques d'instrumentalisation de la question ethnique, recours au boycott électoral plutôt qu'au dialogue) et importance du patrimoine culturel en situation de crise ou de post-crise.
Elle a également abordé le conflit en Syrie, très complexe en raison de la multiplicité des groupes combattants, et ses conséquences humanitaires. Elle a alors relaté la mission d'une délégation du Bureau dans des camps de réfugiés en Turquie, qui, selon elle, donne une leçon à l'Europe entière sur la façon de maintenir une porte ouverte face à l'afflux de migrants. A contrario , elle a regretté la lenteur et la difficulté des négociations au sein de l'Union européenne sur de modestes quotas d'accueil et constaté que certains pays, en particulier l'Italie et la Grèce, étaient laissés seuls en première ligne face aux tragédies qui ont lieu en Méditerranée.
Elle a conclu sur le scandale qui affecte la FIFA et a déploré l'insuffisante médiatisation des travaux de l'APCE qui a pourtant joué un rôle déterminant dans l'arrestation de certains dirigeants de la FIFA et dans la démission du président Blatter qui venait d'être réélu.
B. L'OBSERVATION DES ÉLECTIONS
L'examen du rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente donne lieu à un débat relatif aux missions d'observation électorale qui ont eu lieu depuis la précédente partie de session.
Une commission ad hoc du Bureau a ainsi observé les élections législatives en Turquie du 7 juin 2015.
Le rapporteur de la commission ad hoc , M. Tiny Kox (Pays-Bas - GUE), a estimé que les élections législatives du 7 juin avaient démontré la force de la démocratie turque, en termes de participation, de présence des partis et de choix réel offert aux électeurs. Il s'est félicité du fonctionnement efficace et transparent des bureaux de vote. Pour ce qui concerne l'ensemble du processus, au-delà du seul jour du scrutin, il a considéré que, si le cadre électoral est propice à la conduite d'élections démocratiques, certains éléments devraient être améliorés. Il a fait observer que les libertés fondamentales avaient été dans l'ensemble respectées, mais que la campagne électorale avait été entachée par un grand nombre d'attaques, y compris physiques, contre des candidats, certaines d'entre elles aboutissant à des blessures et même à des décès. Il a fait état d'un véritable sujet de préoccupation, celui de la liberté des médias : les journalistes critiques du pouvoir en place ont subi des pressions pendant la campagne. Il a également estimé que le seuil de 10 % pour entrer au Parlement était contre-productif pour la tenue d'élections libres et démocratiques et réclamé son abaissement. Il a regretté le rôle très actif du Président de la République pendant la campagne électorale, alors même que la Constitution le contraint en principe à la neutralité. Enfin, il a souligné le rôle très positif des observateurs citoyens et a souhaité qu'ils bénéficient d'un statut officiel.
Mme Nicole Duranton (Eure - Les Républicains), s'exprimant au nom du groupe PPE/DC , a indiqué qu'elle avait participé à l'observation de ces élections et s'est félicitée de la sincérité du scrutin. Elle a rappelé que celui-ci présentait un enjeu important, le Président Erdogan ayant annoncé son intention, en cas de victoire de l'AKP, de transformer les institutions turques en régime présidentiel, au risque d'accentuer la dérive autoritaire observable depuis son élection. Elle a considéré que, si la Turquie avait manifesté sa volonté réformatrice, elle devait parachever sa démonstration sur le plan politique et surtout électoral, certaines insuffisances n'ayant pas toutes été corrigées (forte mobilisation des ressources administratives au bénéfice du parti au pouvoir, manque de transparence du financement des partis politiques et des campagnes électorales, partialité des médias). Elle a estimé que cette démonstration était largement réussie, les Turcs ayant pu librement exprimer leur choix au cours d'une campagne extrêmement dynamique et ayant clairement refusé de céder aux sirènes du « despotisme éclairé ». Elle a ainsi mis en évidence la grande maturité démocratique des électeurs turcs, dans un contexte marqué par de récentes difficultés économiques et par les problèmes liés à l'afflux de réfugiés fuyant le conflit en Syrie. Elle a conclu en faisant observer que le libre choix des Turcs était aussi celui d'un pari ouvert sur l'avenir compte tenu des nombreuses combinaisons possibles de coalitions parlementaires.
Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées - Socialiste et républicain) a indiqué avoir observé les élections à Adana, à proximité de la frontière syrienne. Elle s'est félicitée du bon déroulement d'ensemble du scrutin, mais a regretté le déséquilibre des moyens et l'omniprésence du président en faveur de l'AKP, faisant observer que cette situation n'avait finalement pas donné les résultats escomptés, avec l'échec, certes relatif, de M. Erdogan et la victoire des Kurdes qui ont réussi à franchir le seuil des 10 %, remportant ainsi une victoire symbolique. Elle a estimé que les Kurdes resteraient le problème essentiel de la Turquie tant qu'aucune solution politique n'y aura été trouvée, le recours à la force et la négociation ayant échoué. Elle a insisté sur la gageure que constitue la formation d'une coalition parlementaire, aucune majorité ne s'imposant avec évidence, et jugé élevée la probabilité de nouvelles élections. Elle a fait part de son admiration pour le peuple kurde et sa culture historique. Elle a conclu en considérant que la puissance turque était indispensable à l'équilibre du Moyen-Orient et qu'elle devait gagner en clarté, sans agir de manière ambiguë.
C. LES DÉBATS INTERACTIFS AVEC L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
1. La communication du Comité des Ministres, présentée par M. Igor Crnadak, ministre des affaires étrangères de la Bosnie-Herzégovine, président du Comité des Ministres
M. Igor Crnadak, ministre des affaires étrangères de la Bosnie-Herzégovine, et, à ce titre, président du Comité des Ministres, a rappelé que son pays présidait le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe pour la première fois depuis son adhésion à l'Organisation en 2002. Il a ensuite présenté les priorités de sa Présidence : l'application de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, dite « Convention d'Istanbul », la politique de voisinage, au vu des récents événements qui se sont produits en Europe et dans les régions voisines, le cinéma européen dans le contexte du 60 e anniversaire de la Convention culturelle du Conseil de l'Europe, la dimension religieuse du dialogue interculturel et la promotion et la protection des droits de l'Homme, en mettant tout particulièrement l'accent sur la protection des droits des groupes vulnérables.
Le ministre bosnien a rappelé les conclusions de la session ministérielle du Comité des Ministres, réunie à Bruxelles le 19 mai 2015, principalement consacrée à la lutte contre l'extrémisme violent et la radicalisation qui conduisent au terrorisme, et au cours de laquelle furent adoptés, d'une part, le Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme, dont l'entrée en vigueur permettra de renforcer davantage la lutte contre l'émergence de combattants terroristes étrangers, et, d'autre part, une déclaration et un plan d'action sur le même sujet. Il a indiqué que la session ministérielle avait également abordé la situation en Ukraine, le dernier rapport du Secrétaire général sur la situation de la démocratie, des droits de l'Homme et de l'État de droit en Europe, le rapport consolidé du Secrétaire général sur le conflit en Géorgie et la réforme du système de la Convention européenne des droits de l'Homme, en particulier les mesures prises par la Cour pour accroître encore son efficacité et réduire considérablement le nombre d'affaires pendantes.
Le ministre a indiqué que le Comité des Ministres avait également poursuivi ses travaux sur les questions suivantes : l'abolition de la peine de mort en Europe et dans le monde, le rapport annuel d'activité pour 2014 du Commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe et son premier rapport d'activité trimestriel pour 2015, la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels, la promotion des questions relatives aux Roms et aux Gens du voyage, la dimension religieuse du dialogue interculturel, la coopération avec d'autres organisations multilatérales internationales, en particulier l'OSCE, ou encore la politique à l'égard des régions voisines.
Mme Nicole Duranton (Eure - Les Républicains) a exprimé sa vive préoccupation sur la situation dans l'ex-République yougoslave de Macédoine et a voulu connaître les actions entreprises par le Conseil de l'Europe pour stabiliser la situation dans ce pays fragile situé dans la région particulièrement sensible des Balkans.
Le président du Comité des Ministres a précisé que le Comité des Ministres avait répondu immédiatement à cette crise. Il a fait observer que le Secrétaire général avait appelé au dialogue politique et réaffirmé la disponibilité du Conseil de l'Europe à assister ce pays.
M. François Rochebloine (Loire - Union des démocrates et indépendants) s'est interrogé sur le rôle du Conseil de l'Europe face à l'afflux de réfugiés sur le territoire européen, en particulier pour la concertation et la mise en place d'initiatives communes à la hauteur de l'enjeu humain de cette situation particulièrement dramatique.
Le président du Comité des Ministres a indiqué que le Conseil de l'Europe abordait ces questions de différentes manières à de nombreuses occasions : promotion de la démocratisation dans les pays d'origine, actions en faveur de la bonne gouvernance dans le cadre de la politique de voisinage, vérification du respect des obligations en matière de droits de l'Homme découlant de la Convention à l'arrivée des migrants ou encore répartition équitable de l'accueil des migrants.
2. Le discours de Mme Marie-Louise Coleiro Preca, Présidente de Malte
Mme Marie-Louise Coleiro Preca, Présidente de Malte, a rappelé que son pays célébrait le 50 e anniversaire de son adhésion au Conseil de l'Europe, et qu'à cette occasion, Malte souhaitait réaffirmer ses engagements aux valeurs du Conseil de l'Europe et de la Convention européenne des droits de l'Homme ainsi qu'aux principes et mesures qui ont été présentés dans les déclarations d'Interlaken, d'Izmir, de Brighton et de Bruxelles.
Elle a insisté sur la nécessité de renforcer les relations avec les pays de la Méditerranée et de les aider à surmonter les défis qu'ils affrontent, en particulier les migrations, la radicalisation, l'extrémisme et de nouvelles formes de terrorisme. Elle a fait part des demandes de Malte pour que des mesures soient prises afin d'éviter la multiplication des morts en mer et a appelé à s'attaquer aux causes profondes des flux migratoires, en coopération avec les pays d'origine et de transit. Elle s'est félicitée des programmes lancés dans le domaine des migrations à la fois par l'Union européenne et le Conseil de l'Europe. Elle a indiqué que Malte était convaincue de la nécessité de créer une coalition internationale de lutte contre le trafic d'êtres humains, mandatée par les Nations unies pour mettre fin à l'activité des trafiquants qui tirent parti de la situation tragique des migrants et a dénoncé la trop longue passivité face à cette activité criminelle. Elle a insisté sur la nécessité d'une solution d'ensemble au problème des migrations et aussi sur la considération des droits des migrants qui passe par le respect pour la diversité et l'intégration et par la connaissance des traditions, coutumes et religions des autres pays. Elle aussi souligné le rôle de l'éducation et de la formation. Elle a appelé à s'intéresser aux facteurs de migration qui poussent des individus à quitter leur patrie tels que guerres, marasme économique, changement climatique et ses effets, etc. Elle a souhaité un regard différent sur les migrations qui doivent être perçues comme une opportunité plutôt que comme un fardeau. Elle a estimé que la politique de voisinage du Conseil de l'Europe avec les pays de l'Afrique du Nord, du Moyen-Orient et de l'Afrique centrale devait permettre de diffuser les valeurs du Conseil de l'Europe et d'assurer la stabilité.
La Présidente maltaise a ensuite abordé la question de la lutte contre le terrorisme, qui a été érigée en priorité du Conseil de l'Europe dans un contexte de multiplication d'attentats meurtriers, et a salué l'adoption du Protocole additionnel de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention du terrorisme conçu pour prévenir et empêcher le recrutement et le voyage de candidats au terrorisme, alors que de plus en plus de ressortissants européens cherchent à rejoindre les groupes terroristes en Irak et en Syrie. Elle s'est interrogée sur les raisons de ce phénomène et a appelé à doter les jeunes d'outils leur permettant de développer leurs valeurs et trouver leur chemin dans la vie. Elle a présenté la pratique maltaise de lutte contre la menace terroriste dans le cadre de l'État de droit, qui repose aussi sur la coopération étroite avec les pays d'Afrique du Nord et du Golfe.
Puis elle a évoqué l'égalité de genre qui est une valeur-clé des sociétés européennes et a souhaité que l'on passe de la rhétorique politique à une action tangible. Elle a fait observer que, si des progrès avaient été réalisés, des injustices demeurent dans des domaines essentiels et a cité la sous-représentation des femmes au sein des organes politiques et des postes à responsabilité, la discrimination sur le marché du travail, y compris au regard des salaires, et les atteintes à l'intégrité corporelle, rappelant qu'elle avait longtemps oeuvré contre les violences faites aux femmes et soulignant le caractère novateur de la Convention d'Istanbul. Elle a également mis en avant la nécessité d'avancer sur les droits des LGBTQI qui souffrent encore trop souvent de nombreuses discriminations en Europe. Elle a indiqué que Malte avait adopté une loi sur les unions civiles en avril 2014 qui permet aux couples de même sexe de contracter une union civile leur assurant les mêmes droits, responsabilités et obligations que les autres couples mariés, y compris du droit de présenter une demande d'adoption. Elle a estimé que la protection accordée aux LGBTQI à Malte comptait parmi les meilleures au monde.
La Présidente de Malte s'est ensuite exprimée sur la pauvreté, qui empêche les êtres humains d'atteindre leur potentiel complet et de participer pleinement à la vie des démocraties. Elle a rappelé que 80 millions de personnes étaient en situation de pauvreté en Europe et que, selon des projections statistiques, ce chiffre était appelé à augmenter. Elle a déploré que les politiques mises en oeuvre ne permettent pas de résoudre le problème de la pauvreté et qu'elles reposent trop souvent sur des stratégies économiques qui ne servent parfois qu'un petit nombre de personnes. Elle a estimé que le problème du chômage à long terme et des travailleurs pauvres devait plus particulièrement retenir l'attention.
Elle a conclu en faisant part de sa détermination à faire de son mieux pour que Malte applique les différents instruments assurant le respect et la protection des droits de l'Homme et a insisté sur la valeur ajoutée du Conseil de l'Europe en la matière.
3. Le discours de M. Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations unies
M. Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations unies, a estimé que l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe était l'un des mécanismes régionaux de défense des droits de l'Homme les plus efficaces du monde. Dans un monde marqué par les souffrances occasionnées par le déclenchement de crises nouvelles et la persistance de crises anciennes, il a considéré que ces crimes ne sauraient rester impunis.
Il a appelé l'Assemblée parlementaire à prendre part à une action mondiale portant sur quatre questions liées entre elles : les restrictions imposées à la société civile, les migrations, la montée de l'extrémisme violent et la nécessité de créer d'urgence les conditions d'un avenir placé sous le signe de la viabilité, chacun de ces fronts devant être fondé sur le respect des droits de l'Homme. Il a exhorté le Conseil de l'Europe à renforcer son partenariat avec l'ONU.
Notant qu'à l'échelle mondiale, la démocratie gagnait du terrain, il a cependant regretté que, dans certains pays, le mouvement s'était inversé, du fait de l'érosion des institutions démocratiques, des menaces sur l'indépendance du pouvoir judiciaire et de la liberté de la presse ou du recul de la place de la société civile, les ONG voyant leurs activités entravées dans de nombreux pays, y compris européens.
Il a considéré que l'une des menaces les plus graves de notre temps était la montée de l'extrémisme violent et a rappelé l'action des Nations unies pour combattre ce fléau, les dirigeants religieux ayant un rôle essentiel à jouer. Il a appelé à lutter contre le terrorisme dans le respect des droits de l'Homme et à soutenir les jeunes contre la tentation de la radicalisation. Il a annoncé le lancement, au mois de novembre, d'un plan d'action pour la prévention de l'extrémisme violent et a souligné les convergences de vues sur ces questions entre l'ONU et le Conseil de l'Europe.
Le Secrétaire général s'est dit alarmé par le sort des migrants, des demandeurs d'asile et des réfugiés, en particulier en Méditerranée, dans la mer d'Andaman ainsi que dans le golfe du Bengale, des millions de personnes étant poussées à quitter leur pays en raison de la misère, de la guerre et de la violation de leurs droits fondamentaux. Il a lancé un appel en faveur de la protection et du respect des migrants, dont beaucoup risquent leur vie, et a estimé que l'Europe devait mettre en place des canaux sûrs et réguliers permettant la migration et la mobilité, tout en se disant conscient des difficultés que cela suppose. Il a exprimé sa confiance en l'Europe pour jouer un rôle moteur dans la solidarité globale, pour rejeter la rhétorique anti-migrant et pour reconnaître les contributions positives qu'apportent les migrants à nos sociétés. Il a également appelé l'attention sur le million de citoyens européens qui vivent dans des territoires dont le statut est contesté et sur lesquels les autorités gouvernementales n'ont pas d'emprise réelle.
Il a ensuite abordé la situation en Ukraine où plus de 6 000 personnes ont perdu la vie en à peine plus d'un an et où de graves violations des droits de l'Homme continuent à se produire, en particulier dans l'Est du pays. Il a lancé un nouvel appel à l'application complète des accords de Minsk et à un règlement politique du conflit, ainsi qu'à des réformes internes, contre la corruption en particulier. Il a rappelé les efforts conjoints du Conseil de l'Europe et du Haut-Commissaire des Nation unies aux droits de l'Homme afin de soutenir l'Ukraine dans la préparation de ses réformes.
Enfin, le Secrétaire général a abordé l'action des Nations unies en faveur du développement durable et le rôle des Objectifs du Millénaire pour le Développement, évoquant un travail en cours pour élaborer des objectifs de développement durable devant permettre d'éliminer la pauvreté, d'accroître la prospérité et de protéger la planète dans l'intérêt des générations futures. Il a souligné les efforts de l'Europe pour défendre cette cause. Il a également insisté sur la nécessité de parvenir à un nouvel accord sur le changement climatique, en France, en décembre prochain, et a mis en évidence deux objectifs importants : d'une part, parvenir à mobiliser 100 milliards de dollars chaque année d'ici à 2020, et, d'autre part, élaborer un dispositif global de financement du développement qui favorise l'adoption, au niveau mondial, de pratiques économiques compatibles avec le maintien de la hausse de la température planétaire en deçà de 2° C.
Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées - Socialiste et républicain), s'exprimant au nom du groupe SOC , a voulu connaître le rôle qui pourrait incomber aux Nations unies pour prévenir et écarter les menaces en matière de mouvements migratoires massifs, pour faire évoluer le droit humanitaire et, surtout, pour mettre en oeuvre une coopération internationale organisée, rapide et efficace.
Le Secrétaire général a rappelé qu'il avait appelé l'Union européenne et tous les pays concernés par ces phénomènes de migration à se pencher sur leurs causes profondes, alors que beaucoup de migrants risquent leur vie dans l'espoir d'une vie meilleure. Il a estimé que la première priorité devait être la protection des vies humaines puis que des voies régulières de prise en charge devaient être mises en place (intégration des familles, mise à disposition de bourses d'étude, création d'emplois). Il a fait observer que les Nations unies, avec l'aide de l'Union européenne, accomplissaient un lourd travail pour promouvoir la stabilité politique de ces pays, indiquant que 90 % des réfugiés venaient de Libye ou passaient par ce pays.
M. Jean-Marie Bockel (Haut-Rhin - UDI-UC) , rappelant que l'immigration clandestine se traduisait en Méditerranée par l'une des pires crises humanitaires depuis la Seconde Guerre mondiale, a souhaité savoir où en étaient les négociations avec l'Union européenne en vue de l'opération navale projetée contre les passeurs sur les côtes libyennes, qui requiert l'accord de l'ONU.
Le Secrétaire général a indiqué que l'ONU avait engagé avec l'Union européenne une opération navale en Méditerranée pour secourir les migrants et qu'il s'était rendu sur place pour en observer le déroulement. Il a précisé que la zone à couvrir étant très importante, la mission était difficile, d'autant plus qu'il s'agit de petites embarcations transportant des centaines de personnes. Il a indiqué avoir insisté auprès des leaders européens pour développer des opérations de sauvetage, la priorité étant de sauver des vies, et pour poursuivre les passeurs qui se rendent coupables de traite des êtres humains.
4. Les questions au Secrétaire général du Conseil de l'Europe
L'ordre du jour de cette partie de session avait ménagé du temps pour permettre au Secrétaire général du Conseil de l'Europe, M. ThorbjØrn Jagland, de répondre aux questions des parlementaires.
M. Jean-Marie Bockel (Haut-Rhin - UDI-UC) a souhaité que soit présenté l'état d'avancement de la révision de la Constitution ukrainienne, en particulier sur la question de la décentralisation qui bénéficie de l'assistance du Conseil de l'Europe et qui constitue un aspect essentiel de la mise en oeuvre des accords de Minsk 2.
Le Secrétaire général a indiqué que le Conseil de l'Europe avait trois représentants dans la commission de révision de la Constitution nommée par le Président Porochenko, étant prévu que la nouvelle Constitution puisse entrer en vigueur avant la fin de l'année. Il a précisé que certains aspects du texte en cours d'examen, les dispositions relatives au procureur général en particulier, avaient dû être corrigés de façon à pouvoir entreprendre une véritable réforme judiciaire, qui reste indispensable. Sur la question de la décentralisation, il a été recommandé aux autorités ukrainiennes de mettre en place une décentralisation asymétrique, c'est-à-dire accordant des pouvoirs différents en fonction de ce que sera la répartition territoriale des pouvoirs locaux. Il a indiqué que le Conseil de l'Europe allait envoyer un expert dans chacun des 25 oblasts d'Ukraine pour aider les autorités à mener à bien cette réforme de la décentralisation.
5. Le discours de M. Mladen Ivaniè, Président de la présidence de Bosnie-Herzégovine
M. Mladen Ivaniè, Président de la présidence de Bosnie-Herzégovine, a d'abord évoqué la situation de son pays, qui n'est certes pas parfaite, mais qui est bien meilleure que celle qui prévalait vingt ans auparavant, au sortir de la guerre, le pays étant aujourd'hui pacifié. Il a indiqué que le nouveau gouvernement et la nouvelle présidence souhaitaient privilégier le compromis et l'intérêt général pour relever les défis et faire avancer les réformes qui sont trop longtemps restées au point mort. Il a ainsi annoncé la présentation prochaine d'une feuille de route des réformes à engager à l'intérieur du pays, sur l'économie et la réforme de la Constitution en particulier, qui seront mises en oeuvre progressivement. Il s'est dit conscient de la nécessité de régler le mécanisme de coordination qui permettra, malgré les complexités structurelles du pays, de négocier d'une seule voix avec l'Union européenne qui exige le règlement de certaines questions telles que l'exécution de l'arrêt Sejdiæ et Finci. Sur ce point, il a affirmé que l'objectif de la Bosnie-Herzégovine était de se mettre en condition de pouvoir adhérer à l'Union européenne, le programme de réformes devant lui permettre d'être un pays candidat de façon à sortir de l'isolement. Il a également fait état de la volonté du pays d'entretenir de bonnes relations avec ses voisins, condition essentielle pour ramener la stabilité intérieure.
Le Président de la présidence bosnienne a ensuite abordé la question du terrorisme en insistant sur la nécessité de mieux coordonner les efforts pour faire face à la menace. Il a estimé que la lutte contre le terrorisme exigeait à la fois la fermeté et la responsabilité des dirigeants politiques, l'engagement des dirigeants des communautés religieuses et une coopération plus étroite des services de sécurité et de renseignement. Il a indiqué que le problème des combattants étrangers dans les rangs terroristes n'épargnait pas son pays. Il s'est félicité de ce que la Bosnie-Herzégovine et la Serbie, qui préside actuellement l'OSCE, travaillent dans le sens d'une meilleure coordination de leurs actions.
Observant que les atteintes aux droits de l'Homme se multipliaient actuellement en Europe, il a considéré que des solutions pouvaient être trouvées dans le rapport sur l'état de la sécurité démocratique en Europe du Secrétaire général. Il a estimé que l'Organisation devait utiliser son savoir-faire exceptionnel et les moyens non contraignants dont elle dispose pour lutter davantage encore contre la haine, l'intolérance et l'extrémisme. Il s'est ainsi félicité de l'adoption par le Comité des Ministres du plan d'action de lutte contre l'extrémisme et le terrorisme et a fait part de son attachement au Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'Homme sur la prévention du terrorisme, pour faire face notamment au problème des combattants étrangers. Il a rendu hommage aux travaux de l'Assemblée parlementaire en la matière et a cité la création de l'Alliance des parlementaires contre la haine ou encore l'institution du statut de partenaire pour la démocratie. Il a fait observer que, grâce à la Cour européenne des droits de l'Homme et à son système de suivi de l'exécution des arrêts, le Conseil de l'Europe était devenu une référence mondiale en matière de droits de l'Homme et a formé le voeu que l'Union européenne adhère rapidement à la Convention européenne des droits de l'Homme. Il a également souligné l'autorité acquise par la Commission de Venise en matière de droit constitutionnel, ses avis étant sollicités, y compris de la part de pays qui ne sont pas membres du Conseil de l'Europe.
M. Pierre-Yves Le Borgn' (Français établis hors de France - Socialiste, républicain et citoyen) a interrogé le Président de la présidence bosnienne sur l'application parfois difficile des arrêts de la Cour européenne des droits de l'Homme, qui porte atteinte à la crédibilité du Conseil de l'Europe, et a voulu connaître ses idées et propositions en la matière.
Le Président de la présidence bosnienne a affirmé qu'un arrêt de la Cour devait être exécuté, quel que soit le sentiment qu'il suscite. Il a ainsi reconnu que l'arrêt Sejdiæ et Finci constituait un défi pour les responsables politiques de Bosnie-Herzégovine, mais qu'il devait être exécuté.
IV. LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN EUROPE ET DANS LE MONDE
A. AMÉLIORER LA PROTECTION DES DONNEURS D'ALERTE
La commission des questions juridiques et des droits de l'Homme souligne l'importance de l'action des donneurs d'alerte pour promouvoir la bonne gouvernance, le respect de la vie privée, la liberté d'expression et la lutte contre la corruption, y compris dans les domaines de la sécurité nationale et du renseignement.
Elle se félicite de l'adoption par le Comité des Ministres d'une recommandation qui appelle les États membres à créer un cadre normatif, judiciaire et institutionnel adapté à la protection des donneurs d'alerte.
Compte tenu des révélations faites au sujet des opérations de surveillance massive et d'intrusion dans la vie privée menées par l'Agence nationale de sécurité des États-Unis et d'autres services de renseignement, qui concernent les communications de nombreuses personnes sans qu'elles soient soupçonnées d'avoir commis le moindre acte répréhensible, la commission considère que les mesures de protection des donneurs d'alerte devraient viser l'ensemble des personnes qui dénoncent les actes répréhensibles susceptibles de violer les droits d'autrui garantis par la Convention européenne des droits de l'Homme, y compris les personnes qui travaillent pour le compte des services de sécurité nationale ou de renseignement.
Le fait de donner l'alerte étant essentiel pour assurer le respect des limites légales imposées aux opérations de surveillance massive et ayant des ramifications internationales dans le domaine de la sécurité nationale ou du renseignement, les donneurs d'alerte, y compris les agents des services administratifs compétents et des entreprises privées concernées sous contrat avec l'État, dont les révélations sont par ailleurs conformes à la résolution 1729 (2010), à la recommandation CM/Rec(2014)7 du Comité des Ministres ou aux Principes de Tshwane avalisés par la résolution 1954 (2013), devraient se voir octroyer l'asile dans un État membre du Conseil de l'Europe lorsqu'ils sont persécutés dans leur propre pays.
M. Pierre-Yves Le Borgn' (Français établis hors de France - Socialiste, républicain et citoyen), s'exprimant au nom du groupe SOC , a estimé que les donneurs d'alerte étaient, dans nos sociétés de liberté, d'initiative et de responsabilité, de précieuses vigies démocratiques et qu'ils devaient, à ce titre, être non seulement protégés, mais également encouragés car oser parler comporte souvent de nombreux risques, comme le montre l'exemple d'Edward Snowden. Il a rappelé l'action du Conseil de l'Europe pour la protection des donneurs d'alerte, qui a influencé le droit français, ainsi que la richesse de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme. Il a considéré que la protection des donneurs d'alerte devait être améliorée dans les domaines de la sécurité nationale et du renseignement. Il a estimé que la même protection s'étendant jusqu'au droit à l'asile dans tout État membre du Conseil de l'Europe devait être accordée aux donneurs d'alerte sur les sujets de sécurité et de renseignement, si le risque qu'ils soient persécutés dans leur pays est avéré. À cet égard, il a appelé les États membres à compléter leur législation nationale en ce sens et a évoqué la possibilité d'élaborer une convention dédiée du Conseil de l'Europe.
B. SITUATION EN HONGRIE SUITE À L'ADOPTION DE LA RÉSOLUTION 1941 (2013)
Deux ans après l'adoption de sa résolution 1941 (2013) sur une demande d'ouverture d'une procédure de suivi pour la Hongrie, la commission des questions politiques et de la démocratie dresse le bilan de l'évolution de la situation politique en Hongrie et en particulier des mesures prises par les autorités hongroises dans la mise en oeuvre de cette résolution.
En ce qui concerne la loi sur la liberté de religion et le statut des Églises, la loi sur l'élection des membres du Parlement, la loi sur la Cour constitutionnelle, les lois relatives au système judiciaire et la législation applicable aux médias, la commission se félicite des mesures prises par les autorités hongroises et, constatant que les recommandations de l'Assemblée n'ont pas toutes été respectées, les encourage à maintenir leur dialogue avec le Conseil de l'Europe.
L'Assemblée a par conséquent demandé aux autorités hongroises de s'employer à régler les problèmes en suspens et décidé qu'il y avait lieu de mettre un terme à l'examen spécial de ces questions.
M. René Rouquet (Val-de-Marne - Socialiste, républicain et citoyen), président de la délégation française , a fait observer que le cas de la Hongrie, pourtant très loin d'être le plus problématique, illustrait une difficulté récurrente pour l'Assemblée, celle de la conduite à tenir lorsqu'un État franchit, plus ou moins gravement, la « ligne jaune ». Il a considéré que les sanctions constituaient une arme qui se retourne généralement contre leurs initiateurs dès lors qu'elles ne sont pas suivies d'effets, avec le risque de ne plus avoir d'interlocuteurs et de déplacer le dossier vers d'autres organisations, l'OSCE notamment, à l'exemple de ce qui se passe pour la Russie. Pour autant, il a estimé que se contenter de vigoureuses dénonciations platoniques n'était pas non plus très satisfaisant, comme le montre le cas de l'Azerbaïdjan. Il a pourtant regretté que la Hongrie s'éloigne de plus en plus des valeurs du Conseil de l'Europe. Il a rappelé que l'Assemblée avait décidé de ne pas ouvrir une procédure de suivi à l'encontre de la Hongrie, mais de suivre de près l'évolution de la situation et de dresser le bilan des progrès accomplis. Il a souligné les aspects positifs de cette démarche, maintien du dialogue et diverses avancées, même si des problèmes importants demeurent, les atteintes à la liberté des médias en particulier. Il s'est dit inquiet de l'impression donnée par la Hongrie de vouloir s'éloigner de l'Europe et aller vers un nationalisme inquiétant, comme l'ont montré les déclarations provocatrices du Premier ministre sur la peine de mort ou encore la « chasse aux sorcières » contre les ONG. Il a dès lors considéré qu'il lui semblait prématuré de mettre un terme à l'examen spécial de la Hongrie.
M. Pierre-Yves Le Borgn' (Français établis hors de France - Socialiste, républicain et citoyen) a indiqué ne pas parvenir à la même conclusion que le rapporteur et a estimé nécessaire que la surveillance du respect de ses obligations par la Hongrie se poursuive au sein de l'Assemblée car l'inquiétude pour le respect des droits fondamentaux suscitée par plusieurs développements législatifs ou annonces politiques du gouvernement hongrois demeure. Il a mentionné la restriction des pouvoirs de la Cour constitutionnelle et de l'indépendance de la banque centrale, les limitations à la liberté de la presse, la persistance de la violence à caractère ethnique, l'antisémitisme ambiant, les discriminations à l'égard de la communauté rom, le recours accru à la détention administrative, les conditions de vie déplorables des demandeurs d'asile dans les centres d'accueil ou encore le combat du gouvernement contre les ONG. Il a indiqué que cette préoccupation était largement partagée par de nombreuses institutions internationales. Il a fait observer que le rétablissement de la peine de mort en Hongrie était envisagé et que la construction d'un mur à la frontière avec la Serbie était évoquée, avant que ne soit annoncée la suspension unilatérale de l'application du règlement de Dublin III sur les demandes d'asile de migrants, avant une marche arrière. Il a conclu que ces développements n'étaient guère rassurants et a appelé à la poursuite de l'examen spécial de la situation des droits fondamentaux en Hongrie.
C. ÉVALUATION DU PARTENARIAT POUR LA DÉMOCRATIE CONCERNANT LE PARLEMENT DU MAROC
Le rapport est un suivi de la résolution 1942 (2013), par laquelle l'Assemblée avait décidé de continuer à passer en revue la mise en oeuvre du partenariat pour la démocratie avec le Parlement du Maroc et de procéder à une nouvelle évaluation dans un délai de deux ans. Il dresse le bilan des réformes politiques dans le pays et du respect des engagements politiques pris dans le cadre du partenariat.
Le rapport fait état d'une évaluation globalement positive des résultats atteints et se félicite que le partenariat ait joué un rôle important pour le lancement et l'application de réformes cruciales dans plusieurs domaines clés et le développement d'une coopération multiforme entre le Conseil de l'Europe et les institutions marocaines. Le partenariat doit rester un outil important visant à rationaliser l'ensemble du programme de réformes et à accroître le rôle et la responsabilité du Parlement dans ce processus.
Dans ce contexte, le rapport note que le rythme des réformes législatives et institutionnelles doit être accéléré afin de réaliser pleinement les ambitions de la Constitution de 2011. Des efforts supplémentaires sont attendus de la part du Parlement marocain pour parvenir à l'abolition de la peine de mort, prévenir les violations des droits fondamentaux et assurer la parité entre les femmes et les hommes.
Le rapport suggère que l'Assemblée parlementaire devrait continuer à passer en revue la mise en oeuvre des réformes politiques au Maroc et offrir son assistance au Parlement marocain, et effectuer une nouvelle évaluation du partenariat lorsque cela s'avérera approprié.
M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains) a indiqué que la lecture du rapport lui laissait penser qu'il existerait deux pays en un : un « Maroc légal » et un « Maroc réel ». Il a précisé que, côté « Maroc légal », le royaume chérifien accomplissait d'importants progrès sur la voie de la démocratisation et du respect des libertés fondamentales depuis l'entrée en vigueur de la Constitution de 2011. Il s'est félicité que le Conseil de l'Europe joue un rôle fondamental pour accompagner les autorités marocaines dans le processus de réformes et de démocratisation. Il a fait observer que cette action pouvait être complétée au niveau des parlements nationaux et a mentionné l'existence du Forum parlementaire franco-marocain qui permet d'aborder des enjeux importants pour les deux pays. Pour autant, il a estimé que, côté « Maroc réel », le bilan apparaissait plus nuancé, le rythme des réformes ayant ralenti et la volonté politique semblant faire défaut dans un contexte institutionnel marqué par le rôle prééminent du palais royal. Soulignant la stabilité réelle qui prévaut au Maroc, il a mis en garde contre la tentation de l'immobilisme. Il a rappelé que le Maroc restait confronté à des défis extrêmement importants, la menace du terrorisme djihadiste et le chômage des jeunes diplômés en particulier, et a jugé que le rapport donnait du pays une image contrastée, comme si les réformes adoptées n'avaient que peu de prise et peu de résultats concrets sur la vie quotidienne. Il a conclu sur la nécessité de mettre à profit le partenariat pour la démocratie pour rapprocher le « Maroc légal » et le « Maroc réel ».
D. DÉBAT LIBRE
La réforme du Règlement entrée en vigueur en janvier 2012 prévoit l'organisation d'un débat libre, les parlementaires pouvant intervenir sur un sujet qui n'est pas inscrit à l'ordre du jour.
M. Pierre-Yves Le Borgn' (Français établis hors de France - Socialiste, républicain et citoyen) est intervenu sur le recul des droits fondamentaux à l'Office européen des brevets (OEB). Il a rappelé qu'une organisation internationale dispose le plus souvent d'une immunité de juridiction en vertu des conventions qui l'ont instituée ou bien d'accords de siège et que cette immunité lui permet de ne pas être attraite devant les juridictions de l'État ou des États où elle est établie. Il a toutefois considéré que l'immunité de juridiction ne signifie pas espace de non-droit ou de moindre droit, l'agent d'une organisation internationale ne pouvant être privé de son droit d'être entendu par un tribunal, conformément à la Convention européenne des droits de l'Homme qui garantit également le droit à une action collective, ce qui inclut le droit pour une organisation syndicale représentant les agents de l'organisation d'être entendue également par un tribunal. Il a noté que la cour d'appel de La Haye, en février dernier, avait levé l'immunité de l'OEB, de façon rare, presque inédite, afin de protéger les droits collectifs des quelque 7 000 agents concernés. Il a en effet regretté les pratiques de l'Office peu conformes aux droits fondamentaux, mentionnant la restriction du droit d'association et du droit de grève, le blocage de la négociation collective ou encore la non-exécution d'une décision de justice. Il a rappelé le rapport de l'Assemblée sur les obligations des organisations internationales de répondre de leurs actes en cas de violation des droits de l'Homme pour estimer que la question du respect des droits sociaux, individuels comme collectifs, des agents des organisations internationales mériterait d'être davantage étudiée et renforcée, regrettant le climat interne qui règne à l'OEB.
V. LA PROCÉDURE DE SUIVI DE L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
A. LE FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS DÉMOCRATIQUES EN AZERBAÏDJAN
Dans l'optique des prochaines élections générales qui auront lieu en novembre 2015, la commission de suivi a examiné le fonctionnement des institutions démocratiques en Azerbaïdjan et évalué la mise en oeuvre des recommandations formulées par l'Assemblée en janvier 2013. Elle a centré ses efforts notamment sur l'équilibre des pouvoirs, l'indépendance de la justice et les questions électorales. Alarmée par les informations faisant état d'un recours de plus en plus fréquent à des poursuites pénales contre des dirigeants d'ONG, des journalistes, leurs avocats et d'autres personnes exprimant des opinions critiques, la commission a décidé d'examiner plus particulièrement l'état de mise en oeuvre des paragraphes 18.2 et 18.4 de la résolution 1917 (2013).
Même si elle a reconnu un processus électoral libre, équitable et transparent dans l'ensemble autour du jour du scrutin en octobre 2013, la commission regrette que certaines des recommandations les plus importantes de la Commission de Venise au sujet du cadre juridique électoral n'aient pas été mises en oeuvre. Malgré les efforts déployés par les autorités, elle constate un manque d'indépendance de l'appareil judiciaire et s'inquiète du respect des principes de l'équité des procès, de l'égalité des armes et du respect de la présomption d'innocence. Tout en soutenant les efforts engagés par le pays pour promouvoir la transparence et lutter contre la corruption, le financement du terrorisme et le blanchiment de capitaux, la commission appelle à trouver un bon équilibre entre le droit d'association et la liberté d'expression, garantis par la Convention européenne des droits de l'Homme, et la lutte légitime de l'État contre le crime organisé.
La commission est profondément préoccupée par la répression des droits de l'Homme en Azerbaïdjan, où les conditions de travail des ONG et des défenseurs des droits de l'Homme se sont considérablement détériorées, et par le nombre croissant de mesures de représailles visant des médias indépendants et des défenseurs de la liberté d'expression dans le pays. Elle appelle les autorités à mettre fin à ce harcèlement systématique des détracteurs du gouvernement. La commission se félicite du rétablissement des activités d'un groupe de travail conjoint sur les questions des droits de l'Homme à la suite de l'accord conclu en août 2014 entre le Secrétaire général du Conseil de l'Europe et le Président de la République d'Azerbaïdjan.
Au vu de ces préoccupations et développements, l'Assemblée devrait appeler à appliquer pleinement les arrêts de la Cour européenne des droits de l'Homme, conformément aux résolutions du Comité des Ministres. Elle devrait faire des recommandations dans les domaines de la séparation des pouvoirs, du processus électoral, de l'appareil judiciaire, de la liberté d'expression et de la liberté d'association.
Mme Nicole Duranton (Eure - Les Républicains) a noté que le rapport dressait des constats particulièrement inquiétants pour l'état de la démocratie en Azerbaïdjan et accablants pour les autorités de ce pays, aucun sujet évalué, sauf peut-être la lutte contre la corruption, n'ayant connu d'évolutions positives, la situation s'étant même détériorée depuis les élections présidentielles de 2013. Elle a regretté que l'Azerbaïdjan suscite souvent une grande indulgence de la part de bien des commentateurs et a évoqué, pour l'expliquer, sa politique étrangère qui se veut indépendante et équilibrée, entre l'Europe et la Russie, et une certaine mansuétude qui trouve son origine à la fois dans les intérêts bien compris qu'offrent les ressources naturelles considérables du pays et dans la compassion que l'occupation du Haut-Karabagh peut susciter. Elle a considéré que le conflit avec l'Arménie était devenu pour Bakou un argument fort utile pour repousser toute démocratisation et justifier diverses mesures coercitives, au nom de la stabilité. Elle a au contraire estimé que le meilleur moyen de garantir la stabilité en Azerbaïdjan était d'y instaurer la sécurité démocratique.
Mme Pascale Crozon (Rhône - Socialiste, républicain et citoyen) a indiqué qu'elle s'exprimait en paria compte tenu, comme 334 autres personnalités étrangères, et comme 10 parlementaires français, de son interdiction de séjour en Azerbaïdjan en raison d'un déplacement qu'elle avait effectué au Haut-Karabagh. Elle a dénoncé cette méthode qui repose sur l'intimidation et sur la réduction au silence d'élus qui entendent mettre en lumière un conflit depuis trop longtemps oublié. Elle a fait observer que réduire au silence les oppositions était l'objectif que se fixait le Président Aliev, le peuple azerbaïdjanais étant le premier à en souffrir. Elle a ainsi souligné, se fondant sur les rapports de diverses ONG, la négation de la liberté de la presse, l'existence de 80 prisonniers politiques, dont 20 prisonniers d'opinion, le haut niveau de corruption, le peu de respect des principes démocratiques ou encore l'insincérité des élections. Elle a dénoncé l'usage non conforme aux valeurs du Conseil de l'Europe que faisait l'Azerbaïdjan de ses ressources naturelles pour entretenir de bonnes relations avec un grand nombre de pays, dont la France.
M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains) s'est félicité de ce que le rapport démontrait comment le contexte géopolitique dans lequel évolue l'Azerbaïdjan, et qui recèle des difficultés et des tensions indéniables, était instrumentalisé par les autorités à la manière d'un alibi pour justifier le maintien au pouvoir d'un clan. Il a rappelé que les différents observateurs et experts des droits de l'Homme aboutissent tous aux mêmes conclusions sur la situation en Azerbaïdjan quant à l'absence de véritable séparation des pouvoirs, à l'inexistence d'élections libres et équitables, au non-respect des principes de l'État de droit, au musellement des médias. Il a également souligné l'action du Commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe qui est intervenu à plusieurs reprises cette année devant la Cour de Strasbourg dans des affaires concernant des défenseurs des droits de l'Homme azerbaïdjanais en dénonçant à chaque fois un problème de droits de l'Homme grave et systématique dans ce pays. Il a exprimé son inquiétude sur les résultats des élections législatives de novembre prochain et a fait le pari que le parti au pouvoir les remporterait. Enfin, il s'est demandé ce que l'appartenance de l'Azerbaïdjan au Conseil de l'Europe avait apporté au pays et à ses habitants.
M. Yves Pozzo di Borgo (Paris - UDI-UC) a indiqué que la lecture du rapport l'avait plongé dans une certaine perplexité car il dénonce les nombreuses lacunes de l'État de droit et des libertés fondamentales en Azerbaïdjan, dont l'existence de prisonniers d'opinion, mais rappelle aussi les nombreux défis que le pays doit relever. Il a considéré que, dans ce contexte, sa quête de stabilité n'était pas illégitime. Il a fait observer que le pays était amputé d'une partie de son territoire depuis une vingtaine d'années et ne contrôlait plus le Haut-Karabagh, la résolution de ce conflit gelé n'avançant guère. Il a fait valoir que l'Azerbaïdjan cherchait à maintenir l'équilibre dans un contexte géopolitique délicat, ses relations avec la Russie restant marquées par une certaine réserve, alors que, membre du Partenariat oriental de l'Union européenne, il souhaitait bénéficier d'une coopération sectorielle et d'une libéralisation du régime des visas. Il a rappelé que, sur le plan économique, l'Azerbaïdjan était sans doute l'une des plus belles réussites de l'ex-URSS. Il a estimé que ce pays devait se moderniser et s'adapter, son économie demeurant excessivement dépendante du secteur énergétique et son développement à long terme exigeant des réformes politiques et institutionnelles qui ne peuvent plus être ajournées. À cet égard, il a appelé à tirer profit de l'assistance du Conseil de l'Europe pour engager des réformes.
M. André Reichardt (Bas-Rhin - Les Républicains) a considéré que le rapport, en dépit de sa tonalité indéniablement sévère, avait le mérite de fournir une marche à suivre pour procéder aux améliorations attendues. Il a en effet estimé que l'Azerbaïdjan avait besoin que le Conseil de l'Europe l'aide à honorer ses obligations d'État membre. Il a rappelé que deux éléments devaient être pris en compte pour apprécier la situation de ce pays : les efforts entrepris à l'intérieur du pays, d'une part, et son environnement géopolitique, d'autre part. Il a noté la très sensible élévation du niveau de vie de ses habitants et les efforts de diversification de son économie, qui offre d'importantes opportunités aux entreprises européennes. Il a souligné sa voie de développement progressiste et moderne, sa diplomatie culturelle et économique active, son mécénat culturel et l'organisation de grands événements, mentionnant les premiers Jeux européens. Il a également insisté sur la laïcité de l'État. Par ailleurs, il a fait observer que l'Azerbaïdjan évoluait dans un environnement international particulièrement complexe et avait réussi à préserver une relation équilibrée avec la Russie, dont le rôle dans l'entretien du conflit au Haut-Karabagh est ambigu, tout en se rapprochant de l'Union européenne. C'est pourquoi il a souhaité que ce pays soit encouragé à continuer de s'ouvrir et non conduit à se replier sur lui-même.
M. François Rochebloine (Loire - Union des démocrates et indépendants) a estimé que le rapport contenait tous les éléments nécessaires pour instruire sur des bases solides le procès de la violation des libertés publiques en Azerbaïdjan, qu'il s'agisse de l'absence d'élections libres et équitables, du respect des droits de l'opposition, de l'indépendance de la justice, de la liberté de la presse et de la liberté d'expression ou de l'existence de prisonniers d'opinion. Il a toutefois regretté que, en dépit de ce réquisitoire implacable, les rapporteurs semblent chercher des excuses mal venues aux dirigeants de l'Azerbaïdjan, au motif notamment de l'occupation par l'Arménie du Haut-Karabagh. Il a jugé cette appréciation excessive et scandaleuse. Il a conclu en appelant l'Assemblée à une condamnation sans équivoque du régime liberticide qui sévit à Bakou.
B. EXAMEN DE L'ANNULATION DES POUVOIRS DÉJÀ RATIFIÉS DE LA DÉLÉGATION DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE (SUIVI DU PARAGRAPHE 16 DE LA RÉSOLUTION 2034 (2015))
La commission de suivi regrette profondément l'absence manifeste de progrès en ce qui concerne la mise en oeuvre des demandes formulées dans la résolution 2034 (2015). Elle déplore également la décision de la délégation russe de suspendre tout contact officiel avec elle jusqu'à la fin de 2015, qui constitue un rejet clair de l'offre de dialogue de l'Assemblée et qui conduit à s'interroger sur l'engagement de la délégation russe de coopérer et d'entretenir un dialogue positif avec l'Assemblée, s'agissant notamment du respect de ses engagements et obligations envers le Conseil de l'Europe.
Cependant, la commission reste convaincue de l'importance d'un dialogue ouvert, de bonne foi, entre l'Assemblée et la délégation russe, pour trouver une solution durable, fondée sur le droit et les principes internationaux, au conflit dans l'Est de l'Ukraine et à l'annexion illégale de la Crimée.
Par conséquent, il est essentiel que le Parlement russe et sa délégation auprès de l'Assemblée expriment leur volonté claire d'engager avec l'Assemblée un dialogue sans conditions préalables sur le respect par la Russie de ses obligations et engagements à l'égard du Conseil de l'Europe, notamment en ce qui concerne sa politique vis-à-vis de ses voisins. Afin d'exprimer son engagement d'un tel dialogue ouvert et constructif avec la délégation russe, l'Assemblée, tout en notant les sanctions actuellement en place, a décidé de ne pas annuler, à ce stade, les pouvoirs déjà ratifiés de la délégation russe.
M. Yves Pozzo di Borgo (Paris - UDI-UC) a indiqué que la lecture du rapport confirmait les réserves qu'il avait exprimées sur la décision de l'Assemblée de janvier dernier de priver jusqu'à la fin de l'année les parlementaires russes de leurs droits de vote. Il a estimé que prendre des sanctions relevait des compétences du pouvoir exécutif, mais ne devait pas concerner les parlementaires, cela lui paraissant contraire à l'esprit des assemblées parlementaires. Il a mis en exergue la contradiction de la position de la commission de suivi, qui constate que la situation n'a pas ou presque pas évolué tout en recommandant de ne pas annuler les pouvoirs de la délégation russe, alors que l'absence de progrès aurait dû conduire à cette annulation. Il a vivement regretté la perte de crédibilité du travail de l'Assemblée, dont la décision a conduit à une impasse qui était malheureusement prévisible dès le départ. Il a estimé que l'Assemblée avait perdu sur les deux tableaux : le dialogue avec les parlementaires russes est rompu et la cause de la paix n'a pas progressé, le cessez-le-feu sur le front étant de plus en plus précaire. Il a considéré que l'action de l'OSCE, fondée sur la poursuite du dialogue, avait été beaucoup plus pertinente. Il a constaté que l'Assemblée parlementaire n'a pas su gérer les conséquences politiques du conflit en Ukraine par son attitude dogmatique et excessivement rigide, portant préjudice à son rôle. Il a fait observer que le projet de résolution renvoyait la question au début de 2016 et s'est interrogé sur le caractère réaliste de la décision qui sera prise alors.
Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées - Socialiste et républicain) a estimé que le rétablissement d'un dialogue ferme était nécessaire. Elle a regretté que, pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la paix est mise en danger sur le continent européen. Elle a appelé à sortir de cette impasse. Elle a mis en évidence l'existence d'un schisme entre la Russie et les pays occidentaux, estimant qu'il trouve son origine dans l'échec de l'ancrage de la Russie dans l'espace euro-atlantique. Elle a rappelé que la Russie craignait deux menaces, celle de l'OTAN, à l'Ouest, qui lui paraissait surestimée, et celle, bien réelle, du radicalisme sunnite, au Sud. Elle a considéré qu'il était nécessaire de mieux analyser la nouvelle approche stratégique russe car la volonté de puissance de la Russie, qui a le troisième budget militaire au monde, a été sous-estimée. Dans ce contexte, elle a jugé que l'annexion de la Crimée ne constituait pas une véritable surprise stratégique, même si elle bafoue les principes du droit international. Elle a conclu en considérant que la Russie ne devait pas être une ennemie, mais un partenaire.
M. Thierry Mariani (Français établis hors de France - Les Républicains) a regretté que le rapport impute l'absence de dialogue à la seule délégation russe. Il a fait observer que le dialogue a existé en Normandie sur les plages du Débarquement et qu'il avait permis de faire avancer la paix. Il s'est dit attristé que l'opportunité offerte par les cérémonies du 9 mai à Moscou n'ait pas été saisie pour rouvrir ce dialogue. Il a également rappelé que le dialogue avait permis d'aboutir aux accords de Minsk, qui doivent être appliqués par les deux parties. Il a jugé que le choix fait par l'AP-OSCE de préserver le dialogue avec la délégation russe lui semblait judicieux, regrettant que les sanctions votées par l'Assemblée du Conseil de l'Europe conduisent de fait à une absence totale de dialogue, alors même que l'ambassadeur russe continue à siéger et à voter au Comité des Ministres. Il a estimé que les sanctions ne devaient pas toucher des parlementaires car ceux-ci représentent les citoyens. Il a appelé à renouer le dialogue pour que le Conseil de l'Europe retrouve sa place aux côtés de l'OSCE dans le règlement du conflit.
VI. L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE ET LA SITUATION INTERNATIONALE
A. LES PERSONNES PORTÉES DISPARUES PENDANT LE CONFLIT EN UKRAINE
Le rapport présente un aperçu du problème actuel des personnes portées disparues au cours du conflit en Ukraine, y compris le nombre de civils, de volontaires et de militaires portés disparus, de personnes disparues en Crimée, ainsi que le nombre de militaires russes portés disparus. Il s'arrête en particulier sur les besoins des proches de ces personnes et de l'assistance qui devrait leur être offerte. Il souligne qu'il incombe avant tout aux autorités ukrainiennes et russes, ainsi qu'aux groupes séparatistes qui contrôlent les territoires des régions de Donetsk et de Lougansk, d'aider les familles des personnes disparues en matière de recherches et, le cas échéant, d'identification sans délai des restes de leurs proches.
Les autorités devraient aussi mettre en place le cadre juridique et les mécanismes nationaux nécessaires pour régler le problème des personnes disparues. À l'instar d'autres pays européens qui ont traité le problème des personnes disparues, il est capital de créer un mécanisme conjoint chargé de la question des personnes disparues pendant le conflit en Ukraine et d'assurer l'efficacité de son fonctionnement. L'ensemble des parties au conflit devraient accélérer le processus d'identification des corps exhumés en recourant à tous les moyens disponibles, notamment : comparaisons ADN, comparaison de données ante et post mortem et identification visuelle, selon les préconisations des médecins légistes. Elles devraient aussi fournir une assistance financière, médicale et sociale aux familles concernées. Le Conseil de l'Europe pourrait aussi jouer un rôle dans le processus en cours pour faire la lumière sur le sort et la localisation des personnes disparues en lien avec le conflit en Ukraine et mettre à disposition tout savoir-faire pertinent, notamment dans le cadre de programmes de coopération.
B. DÉBAT D'ACTUALITÉ : LA NÉCESSITÉ D'UNE RÉPONSE EUROPÉENNE COMMUNE AUX DÉFIS EN MATIÈRE DE MIGRATION
Dans un contexte marqué par la multiplication des naufrages de migrants cherchant à fuir la guerre et la misère sévissant dans leurs pays pour rejoindre l'Europe en traversant la Méditerranée, l'Assemblée parlementaire a décidé de tenir un débat d'actualité sur le thème « La nécessité d'une réponse européenne commune aux défis en matière de migration ».
M. Reha Denemec (Turquie - CE) a ouvert le débat en rappelant qu'il y aurait actuellement quelque 250 millions de migrants à l'échelle de la planète, la plupart d'entre eux apportant des revenus importants à leur pays d'origine grâce à leur travail. Il a noté que, si les migrations internationales avaient toujours existé, elles ont pris une nouvelle ampleur avec la mondialisation. Il a considéré que, dans ce contexte, le défi principal était de savoir comment valoriser ce phénomène pour en faire un atout et non un fardeau. Il a rappelé les nombreux travaux de l'Assemblée sur cette question sensible qui recouvre de multiples facettes. Il a indiqué que la plupart des migrants sont des personnes contraintes de quitter leur pays en raison de guerre, de facteurs économiques ou de persécutions, et qu'il s'agit alors de réfugiés ayant besoin d'une protection internationale. Il a regretté qu'il ait fallu que 3 000 personnes désespérées meurent en mer Méditerranée pour que les dirigeants européens se décident à agir. Faisant observer que sauver des vies était la priorité absolue, il s'est félicité de ce que, depuis le mois de mai, beaucoup avait été fait pour éviter de nouvelles tragédies en haute mer. Pour autant, il a considéré que le problème des réfugiés était devenu structurel et qu'il n'allait pas disparaître du simple fait que les migrations illégales seraient éradiquées. Il a appelé les pays européens à faire preuve de plus de solidarité dans l'accueil des réfugiés et a insisté sur leur responsabilité, qui doit être partagée avec les pays sur lesquels le fardeau pèse le plus.
Le parlementaire turc a rappelé que la guerre en Syrie avait déclenché la pire crise humanitaire de notre temps et des vagues de migrations vers les pays voisins, près de quatre millions de personnes ayant essayé de trouver refuge dans les pays limitrophes, dont la Turquie qui accueille deux millions de Syriens, dont un peu plus de 10 % vivent dans des centres d'accueil temporaires, la plupart vivant en dehors de ces centres et bénéficiant d'un régime de protection comprenant l'accès gratuit aux services de santé et d'éducation. Il a ajouté que la Turquie continuait d'assurer une aide humanitaire dans les parties les plus septentrionales de la Syrie grâce aux opérations transfrontalières menées par les Nations unies, sous la forme de centres de protection temporaire. Il a mis en évidence l'effort que cette solidarité représente pour son pays qui a dépensé plus de six milliards de dollars pour accueillir ces Syriens, la contribution de la communauté internationale ne représentant que 6 % du total. Il a rappelé qu'une commission ad hoc du Bureau de l'Assemblée avait observé la situation sur le terrain, les 14 et 15 juin, et a formé le voeu que cette visite ouvre la voie à une plus grande solidarité internationale. Il a conclu en insistant sur la responsabilité commune dans la protection des migrants et réfugiés et sur le nécessaire partage de ce fardeau qui implique des actes concrets de la part de tous les États membres du Conseil de l'Europe en termes financiers et en matière d'ouverture de leurs frontières pour faciliter la réinstallation des réfugiés.
M. René Rouquet (Val-de-Marne - Socialiste, républicain et citoyen), président de la délégation française , indiquant avoir participé au déplacement en Turquie de la commission ad hoc du Bureau, a salué les efforts de ce pays pour accueillir au mieux les réfugiés syriens. Il a relevé que la situation dramatique des migrants en Méditerranée constituait un défi pour toute l'Europe, soulignant l'ampleur inédite de ce phénomène, et qu'elle nécessitait une réponse d'ensemble européenne. Il a estimé que c'est en donnant à ces jeunes un avenir dans leur pays que le défi migratoire sera relevé et a appelé au renforcement de la coopération et de l'aide au développement. Il a considéré que la lutte contre les trafiquants et les filières d'immigration clandestine devait être érigée en priorité, même si l'effondrement de l'État en Libye rend cette tâche d'autant plus difficile. Il a salué l'opération lancée par l'Union européenne en Méditerranée pour faire face à ces réseaux organisés, certains d'entre eux étant contrôlés par l'État islamique. Il a estimé que cette réponse d'ensemble devrait aussi comprendre un volet humanitaire et que l'Europe devait faire preuve de solidarité car la charge pour les pays du front est devenue trop lourde et crée des conditions difficiles pour les migrants et les régions qui les accueillent. Il a déploré la montée de l'extrémisme et la stigmatisation de l'« étranger », alors que beaucoup d'Européens sont enfants ou petits-enfants de réfugiés ou de migrants. Il a conclu en estimant que s'enfermer derrière un mur serait, au regard de l'histoire européenne, une honte.
VII. DE NOUVEAUX DÉFIS POUR LES DROITS DE L'HOMME
A. DÉBAT CONJOINT : ACCROÎTRE LA TRANSPARENCE DE LA PROPRIÉTÉ DES MÉDIAS ET LA RESPONSABILITÉ ET LA DÉONTOLOGIE DES MÉDIAS DANS UN ENVIRONNEMENT MÉDIATIQUE CHANGEANT
La transparence de la propriété des médias est nécessaire pour permettre au public de se forger une opinion sur la valeur des informations, des idées et des opinions diffusées par les médias. Cependant, il est fréquent que la propriété et le contrôle des médias ne soient pas transparents, soit en raison de l'absence d'obligation de transparence en droit interne dans les États membres, soit en raison de montages juridiques non transparents avec une propriété indirecte ou cachée, souvent en lien avec les attaches politiques ou les intérêts économiques ou religieux du véritable propriétaire d'un média.
Par conséquent, les États membres devraient veiller à ce que le public ait accès aux informations spécifiques sur les structures de propriété et de la gestion, les structures éditoriales des médias ainsi que leur financement. Les informations pertinentes doivent être adressées par les médias concernés à une autorité nationale indépendante chargée des médias.
Les codes de déontologie adoptés par les journalistes et les médias sont une expression volontaire de la diligence professionnelle de journalistes et de médias soucieux de garantir la qualité de leur travail, de rectifier leurs erreurs et d'agir de manière responsable vis-à-vis du public. L'autorégulation des médias est un moyen de réduire l'influence de l'État et d'autres secteurs de la société sur leurs contenus. De plus, les mécanismes d'autorégulation peuvent faciliter le règlement extrajudiciaire des litiges relatifs à ces contenus.
Cependant, la mutation rapide de l'environnement médiatique met à mal l'éthique du journalisme, et tous les journalistes n'adhèrent pas rigoureusement aux codes de déontologie. Dans bien des régions d'Europe, les journalistes travaillent dans des conditions matérielles médiocres sans bénéficier de la sécurité juridique nécessaire, ce qui les rend vulnérables aux pressions exercées sur eux par des tiers.
Les médias eux-mêmes devraient jouer un rôle prépondérant dans la définition et la défense des normes professionnelles applicables à leur personnel et aux personnes qui alimentent le contenu médiatique. Dans ce contexte, les médias devraient se doter de codes de déontologie et de médiateurs internes ainsi que de mécanismes permettant aux lecteurs, auditeurs ou spectateurs de faire part de leurs réclamations ou de leurs remarques concernant le respect de ces codes.
Dans plusieurs pays, les systèmes de co-régulation mis en place s'inscrivent dans un cadre législatif applicable à une déontologie des médias fondée sur l'autorégulation. Lorsque ces systèmes prévoient la possibilité d'imposer des amendes et d'autres sanctions, la Convention européenne des droits de l'Homme, en particulier son article 10, s'applique et doit être respectée.
B. VERS UN NOUVEAU MODÈLE SOCIAL EUROPÉEN
Le modèle social européen, ensemble de principes communs qui se déclinent différemment dans chaque pays du continent, caractérise les relations et les institutions socio-économiques européennes depuis des décennies. Il a donc eu une influence considérable sur la performance économique de l'Europe et sur le bien-être de sa population. Cependant, divers phénomènes, liés à la mondialisation, aux changements technologiques et aux tendances démographiques, ainsi qu'à l'actuelle crise économique et financière, remettent en question les normes minimales européennes dans le domaine socio-économique et les valeurs de solidarité sociale qui les sous-tendent.
L'Assemblée parlementaire a exprimé sa préoccupation face à l'augmentation des inégalités sociales et économiques, à la corruption et à l'évasion et la fraude fiscales, pratiquées à grande échelle, qui menacent la cohésion sociale et la stabilité politique dans plusieurs pays. Elle sensibilise les États membres à la nécessité de traiter un certain nombre de problèmes : la dégradation permanente de l'emploi et des conditions de travail, les difficultés d'accès des jeunes au marché du travail, l'affaiblissement des mécanismes de négociation collective, et la réduction de la portée et de la qualité des services publics, y compris pour les personnes les plus vulnérables, comme les membres de minorités ethniques, les migrants ou les personnes handicapées. De nouvelles politiques socio-économiques, éducatives et fiscales, combinées avec une allocation budgétaire ciblée, pourraient porter les bénéfices du modèle social européen à de futures générations.
C. RECONNAÎTRE ET PRÉVENIR LE NÉO-RACISME
En Europe, on assiste à la montée du racisme, de la xénophobie et de l'intolérance sous différentes formes, plus particulièrement à l'égard des migrants, des musulmans, des juifs et des Roms. Au moins deux facteurs principaux semblent avoir exacerbé ce phénomène : d'une part, la crise économique de ces dernières années, de l'autre, l'instabilité géopolitique dans certains pays d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
Le racisme se manifeste actuellement sous de nouvelles formes et ne fait plus nécessairement référence à l'idée d'une hiérarchie entre les « races ». Ce qui se manifeste est souvent un « racisme sans races », fondé sur l'affirmation que les différences culturelles sont irréductibles. Le racisme contemporain est plus insidieux mais tout aussi délétère que le racisme traditionnel, puisque son but et ses effets sont les mêmes : il vise à expliquer et légitimer des comportements ou discours discriminatoires et contribue à les alimenter.
Le discours de haine, de plus en plus répandu notamment dans la sphère politique et sur Internet, suscite également des inquiétudes. Les responsables politiques devraient être conscients de l'impact de leurs discours sur l'opinion publique et s'abstenir d'utiliser tout langage discriminatoire, insultant, voire agressif envers des groupes ou catégories de personnes.
Le racisme étant un phénomène complexe, lié à plusieurs facteurs, il doit être combattu sur plusieurs fronts. En plus des instruments juridiques visant à interdire et sanctionner toute expression de racisme, y compris le discours de haine, il convient de combattre l'intolérance en utilisant des outils culturels et sociaux. L'éducation et l'information doivent jouer un rôle crucial dans la formation des citoyens au respect de la diversité ethnique, culturelle et religieuse. La solidarité avec les groupes victimes de racisme et ciblés par le discours de haine, et entre ces groupes, contribue de façon significative à combattre le racisme et la discrimination sous toutes leurs formes.
D. RENFORCER LA COOPÉRATION CONTRE LE CYBERTERRORISME ET D'AUTRES ATTAQUES DE GRANDE AMPLEUR SUR INTERNET
Considérant qu'il y a un impact positif des nouvelles technologies de l'information sur tous les aspects des sociétés modernes et de la vie humaine, le développement d'Internet et des autres réseaux informatiques fait apparaître de nouvelles fragilités dans les sociétés. C'est pourquoi il est nécessaire de poursuivre les travaux contre le cyberterrorisme et d'autres formes d'attaques de grande ampleur visant les systèmes informatiques ou commises par leur intermédiaire et qui menacent la sécurité nationale, la sécurité publique et le bien-être économique des États.
L'entraide judiciaire entre les services répressifs devrait être améliorée et adaptée en fonction du développement technologique. Les mesures de sécurité devraient être développées pour protéger les services et infrastructures essentiels. Les États ont la responsabilité, au niveau international, de prendre toutes les mesures raisonnables pour empêcher que des cyberattaques de grande ampleur soient menées par des personnes relevant de leur juridiction ou à partir de leur territoire national.
Sur la base de ses conventions, le Conseil de l'Europe devrait répondre à ce problème croissant, à l'échelle mondiale, pour la sécurité des réseaux informatiques.
M. René Rouquet (Val-de-Marne - SRC), président de la délégation française , rappelant qu'en 1993, le futurologue Alvin Toffler prédisait que des terroristes chercheraient à s'attaquer aux infrastructures informatiques et de télécommunications des États-Unis, a fait observer que, vingt ans plus tard, le cyberterrorisme ne relevait plus du domaine de la science-fiction. Il a estimé que la lutte contre ce nouveau visage du terrorisme était complexe et nécessitait une coordination de tous les acteurs concernés. À cet égard, il a fait part de deux initiatives françaises lui paraissant intéressantes : la création en 2009 de la plateforme de signalement Pharos qui permet à chaque internaute de signaler les contenus et comportements illicites sur Internet, qui sont vérifiés par des gendarmes et des policiers qui, si nécessaire, alertent les services compétents en France et à l'étranger, cette plateforme ayant connu un pic d'activité de 6 000 signalements par jour, dont une majorité concernait des contenus djihadistes, au lendemain des attentats de janvier dernier à Paris ; la création en France d'un poste de préfet en charge de la lutte contre la cyber-menace, qui va également dans le sens d'une meilleure réactivité et d'une coopération accrue avec les opérateurs. Il a considéré que les cyberattaques constituaient un défi technologique d'une autre nature, les hackers étant de plus en plus organisés et disposant de moyens matériels ou financiers importants. C'est pourquoi il a appelé à la formation et au recrutement d'ingénieurs informaticiens spécialisés pour contrer ces menaces et a rappelé la création d'un réseau cyber-défense de la réserve citoyenne qui vise à sensibiliser la société civile et qui pourrait être étendu. Il a souligné le retard pris dans ce domaine par l'Europe, peu de pays étant prêts à faire face à une attaque informatique de grande ampleur, alors même que la capacité d'un État à se protéger contre des attaques informatiques majeures constitue un élément de souveraineté nationale. Il a jugé que ces attaques pourraient avoir des répercussions plus importantes encore sur la vie quotidienne et des conséquences potentiellement dramatiques. Il a conclu en estimant que l'Europe devait réagir rapidement car les hackers-terroristes ont déjà un temps d'avance.
* 1 Source : site du Conseil de l'Europe
http://www.venice.coe.int/WebForms/pages/default.aspx?p=01_activities
* 2 Page 500 du rapport 2014 de la CEPEJ :
http://www.coe.int/t/dghl/cooperation/cepej/evaluation/2014/Rapport_2014_fr.pdf