N° 238
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014
Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 décembre 2013 |
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation (1) sur la place des parlementaires dans les instances locales après l'adoption des nouvelles règles de non-cumul ,
Par M. Jean-Claude PEYRONNET,
Sénateur.
(1) Cette délégation est composée de : La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation est composée de : Mme Jacqueline Gourault, présidente ; MM. Claude Belot, Christian Favier, Yves Krattinger, Antoine Lefèvre, Hervé Maurey, Jean-Claude Peyronnet, Rémy Pointereau et Mme Patricia Schillinger, v ice-présidents ; MM. Philippe Dallier et Claude Haut, secrétaires ; MM. Jean-Etienne Antoinette, Yannick Botrel, Mme Marie-Thérèse Bruguière, MM. François-Noël Buffet, Raymond Couderc, Jean-Patrick Courtois, Michel Delebarre, Éric Doligé, Jean-Luc Fichet, François Grosdidier, Charles Guené, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Georges Labazée, Joël Labbé, Gérard Le Cam, Jean Louis Masson, Stéphane Mazars, Rachel Mazuir, Jacques Mézard, Mme Renée Nicoux, MM. André Reichardt, Bruno Retailleau, Alain Richard et Jean-Pierre Vial . |
INTRODUCTION
Les parlementaires qui disposent d'un mandat local électif (près de 80%) sont à ce titre, soit par désignation de leur assemblée, soit de droit en tant que président d'exécutif, membres d'un grand nombre de commissions et organismes compétents dans les domaines les plus variés, touchant tous à la vie quotidienne de leur circonscription et de leurs électeurs : éducation, santé, sécurité, action sociale, transports, logement, loisirs, urbanisme et droit des sols, environnement (eau, assainissement, paysage urbain et rural), etc.
C'est cette participation à la gouvernance locale qui, seule, établit le lien entre les élus nationaux et leur territoire d'élection, lequel n'est constitué que de façon fugace par le mode de leur élection, même s'il est actuellement principalement majoritaire.
Les nouvelles règles de non cumul, qui englobent la totalité des exécutifs locaux, vont littéralement couper les parlementaires de toute la vie locale 1 ( * ) . Certes, en tant que simples conseillers (municipal, départemental ou régional), ils pourront être délégués par leur assemblée à tout syndicat, conseil d'administration ou organisme. Mais il est évident que les exécutifs locaux se réserveront toujours l'essentiel des représentations. C'est un mouvement naturel. Mais il se justifiera parce que les parlementaires n'exerçant plus de fonction exécutive, auront perdu la technicité qu'ils pouvaient posséder auparavant.
En conséquence, les parlementaires vont se retrouver « hors sol », rattachés pour la forme à un territoire, en l'absence de toute compétence à exercer, sinon la satisfaction de couper des rubans et de déposer des chrysanthèmes.
Pour pallier ces inconvénients fâcheux, le présent rapport d'information propose de les rattacher à leur territoire d'élection en jouant d'un autre registre que celui du mandat local.
Députés et sénateurs sont les représentants de la Nation. À ce titre, ils élaborent la loi et contrôlent l'action du gouvernement et l'application des lois. Cette double mission d'élaboration et de contrôle à l'échelle nationale doit pouvoir être prolongée à l'échelon local. Les parlementaires devraient en effet avoir pour tâche de veiller à l'application des lois susmentionnées dans leur circonscription d'élection, aux côtés des représentants de l'Etat.
Il est ainsi proposé d'ouvrir, de droit, l'ensemble des commissions ici qualifiées de « régaliennes », présidées par le préfet (voire le directeur de l'ARS et le recteur), lorsque ces commissions sont ouvertes à d'autres participants que les seuls fonctionnaires.
Une conférence départementale et une conférence régionale des parlementaires permettraient aux députés et sénateurs de se répartir dans ces commissions en fonction de leurs centres d'intérêt et selon des règles établies par décret.
On ne manquera pas de noter que cette proposition permettra de lier les parlementaires à leur territoire et de suivre de près, s'ils le souhaitent, toutes les questions et problématiques d'intérêt local qui intéressent les citoyens et les élus qu'ils représentent.
I. LA SITUATION ACTUELLE : UNE FORTE MAJORITÉ DE PARLEMENTAIRES PARTICIPENT À LA GESTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
A. LES INSTANCES DE GESTION LOCALES
Au point de départ se trouvent les assemblées territoriales : 36 600 conseils communaux, 2 000 conseils communautaires, 101 conseils départementaux, 22 conseils régionaux.
Au titre de leur fonction, les présidents de ces assemblées sont amenés à participer de droit comme membres et même président à une foultitude d'instances dont on ne peut donner le nombre exact, mais qui dépasse à coup sur les 100 000. Dans la majorité des cas, le maire peut déléguer à un adjoint ou à un conseiller la représentation.
On trouve d'abord les commissions concourant à l'exercice des compétences de l'institution, dont le nombre et le fonctionnement peuvent être établis par le règlement de l'assemblée :
- les commissions permanentes statutaires (finances, social, éducation, culture, travaux, transports, etc.), certaines étant établies par la loi (les commissions d'appels d'offre par exemple) ;
- les commissions extérieures à l'assemblée elle-même mais très directement liées à ses attributions : CCAS, Caisse des écoles, conseil local de sécurité ;
- ou les commissions imposées par la loi qui en a fixé les règles, comme la Commission communale des impôts directs ou de révision des listes électorales etc.
Vient ensuite une présence, souvent sous la forme d'une présidence de droit, dans les conseils d'administration, de gestion ou de surveillance des établissements publics de la collectivité : hôpital, Ephad, autres établissements sanitaires, établissements publics à vocation culturelle, touristique, sportive, de transport, etc.
Par ailleurs, après les lois de 1992 et de 1999, la coopération intercommunale s'est généralisée, ce qui a généré un nombre très élevé de nouvelles instances intra ou extra-communautaires, calquées sur le fonctionnement communal.
Pour autant, tous les syndicats de gestion n'ont pas disparu (eau, électricité, transport, voirie, musique, ordures ménagères, sans parler des sociétés d'économie mixte locale).
On ne saurait négliger enfin les organismes générés par les acteurs publics avec lesquels la collectivité territoriale est obligée de dialoguer pour des raisons « politiques » (conseils d'administration et assemblées générales des centaines de milliers d'associations réparties sur le territoire).
Au total, toutes ces représentations sont plus d'une centaine pour une commune de plus de 2 000 habitants, plus de 500 pour un département de plus de 300 000 habitants, et 2 000 pour un très gros département.
* 1 Tribune de Jean-Claude Peyronnet « Parlementaires : assiduité, cumul et mode de scrutin », AJDA n° 40/2012 - 26 novembre 2012.