B. L'INFORMATION INTÉGRÉE : UNE DEMANDE DE L'USAGER, DES DIFFICULTÉS À SURMONTER
1. L'information intégrée, première composante de l'intermodalité
L'information de l'usager est aujourd'hui une demande essentielle, notamment en ce qui concerne l'information en temps réel. Elle est déterminante dans l'appréciation de la qualité de service.
Le développement de l'intermodalité nécessite une réflexion sur l'information intégrée. En effet, si lors d'une correspondance entre deux trains, le voyageur peut facilement obtenir une information sur sa correspondance (heure de départ, voire même numéro de quai), il en est tout autrement lorsqu'il utilise pour poursuivre son voyage un autre moyen de transport. C'est ce que souligne le rapport de notre collègue Fabienne Keller sur la gare contemporaine 62 ( * ) , reprenant une parole d'usager : « Je sors du train et je ne suis plus client d'une entreprise ferroviaire, je cherche un bus et je ne suis pas encore client du transport urbain, qui va me renseigner ? » .
L'information multimodale est souvent « la première composante de l'intermodalité » 63 ( * ) :
- elle permet de présenter à l'usager l'ensemble de l'offre des transports collectifs existants ;
- elle incite par ricochet les acteurs à améliorer la coordination et donc une optimisation des moyens.
Une coordination de l'ensemble des acteurs du déplacement est donc nécessaire.
D'ailleurs, l'article 27 de la loi d'orientation sur les transports intérieurs prévoit que « l'Autorité organisatrice de transport urbain (AOTU) compétente sur un PTU de plus de 100 000 habitants se doit de mettre en place un service d'information multimodale à l'intention des usagers, en concertation avec l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements et les entreprises publiques ou privées de transport. Elle met en place un service de conseil en mobilité à l'intention des employeurs et des gestionnaires d'activités générant des flux de déplacements importants. ».
2. Des obstacles à surmonter
Toutefois, le développement de l'information multimodale n'est pas sans générer des difficultés.
L'utilisation des supports d'information d'un opérateur pour informer sur les transports réalisés par une autre autorité organisatrice des transports est complexe. Ainsi, Laurent Fontenau, directeur du service mobilité transports et stationnement du Grand Poitiers, souligne les problèmes liés au déploiement des systèmes d'information des uns chez les autres. Dans le cadre de la mise en place d'un pôle d'échange multimodal à Poitiers, l'un des obstacles a été l'affichage au sein de la gare des informations concernant l'ensemble des bus partant de la gare routière de Poitiers. En effet, seuls les cars TER étaient affichés sur les panneaux électroniques dans l'enceinte de la gare. Après négociation, la SNCF a accepté que la communauté urbaine de Poitiers, gestionnaire de la gare routière, puisse générer des informations dans le système d'information de la SNCF, et ainsi avoir un droit d'accès 64 ( * ) .
L'état d'avancement des différents opérateurs de transport en matière d'information peut être différent. Le développement des systèmes d'information s'est fait en France de manière très fragmenté. Chaque AOT a développé son propre système d'information, comme le souligne Patrick Jeantet, directeur général de Keolis. Deux obstacles naissent de ce constat : d'une part, les systèmes d'information ne sont pas interopérables entre eux et, d'autre part, l'état d'avancement varie fortement entre deux AOT. Or, la mise en place d'une information multimodale nécessite une harmonisation des systèmes d'information. Les acteurs qui ont investi beaucoup afin de développer leur propre protocole rechignent donc à faire marche arrière, pour se mettre au niveau des acteurs les moins avancés 65 ( * ) .
Des investissements financiers : enfin, le développement d'un système intégré coûte cher. Inévitablement se pose la question de la répartition des coûts financiers.
Selon l'association française pour l'information multimodale et la billettique (AFIMB), il existe des systèmes d'information intégrés dans 17 régions . Par rapport à 2012, deux systèmes d'information intégrés au niveau régional sont en cours de création : celui d'Aquitaine et celui de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Toutefois, comme le note le rapport de notre collègue Yves Krattinger 66 ( * ) , un système d'information multimodale n'inclut pas nécessairement toutes les AOT. En outre , ces systèmes d'information ne sont pas interopérables entre eux . Ainsi, il n'est pas possible aujourd'hui de rechercher le trajet entre deux lieux n'appartenant pas à la même région, et donc situés dans deux systèmes d'information multimodale différents. Une initiative soutenue par l'AFIMB est en cours, en vue d'élaborer des spécifications d'interface (API), permettant à deux systèmes d'information multimodale de communiquer entre eux selon un protocole standardisé.
Enfin, il s'agit le plus souvent d'une information théorique ne prenant pas en compte les perturbations, qu'elles soient prévues à l'avance, comme des travaux, ou ponctuelles (retard, annulation).
Systèmes d'information existants ou en cours de développement (juillet 2013), ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie
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* 62 Rapport au Premier ministre sur la gare contemporaine, Fabienne Keller, mars 2009.
* 63 Rapport n° 319 « Mettre les collectivités territoriales sur la bonne voie », Yves Krattinger, 2012-2013, Sénat.
* 64 Colloque « Villes et gares numériques : quelles connexions ? », 11 avril 2013.
* 65 Colloque « Villes et gares numériques : quelles connexions ? », 11 avril 2013.
* 66 Rapport n°319 « Mettre les collectivités territoriales sur la bonne voie », Yves Krattinger, 2012-2013, Sénat.