2. Dans certains secteurs artistiques, on peut parler de véritable discrimination

Au-delà de quelques situations scandaleuses, dénoncées par les groupes d'action mentionnés plus haut, la place des artistes femmes varie énormément en fonction des disciplines.

Si on observe les acquisitions des Fonds régionaux d'art contemporain (FRAC) à l'aune de la place faite aux femmes dans l'ensemble de la création, les chiffres pour les années 2011 et 2012 font apparaître que cette part est inférieure à 30 %.

Pour la réalisation cinématographique, une étude du Centre national du cinéma publiée en mars 2013 indique que seuls 25 % des films produits en 2012 sont réalisés par des femmes.

Dans le spectacle vivant, l'analyse des programmations des structures labellisées et des théâtres nationaux fait apparaître seulement 15,14 % de femmes metteuses en scène.

En matière de spectacle vivant, les chiffres sont encore contrastés en fonction des disciplines.

Si l'on observe, de façon unanime, une régression de la place des femmes dans la danse 12 ( * ) , secteur qui leur était traditionnellement réservé, mais investi depuis les années 1980 par les hommes, porteurs d'une nouvelle esthétique dite de la « non-danse », la discipline la plus discriminante est la musique.

Certaines professions, telles celles de chef d'orchestre, y sont quasiment réservées aux hommes. Ainsi, il est quasiment impossible à une femme d'être recrutée « première soliste » d'un orchestre, sauf à être auditionnée derrière un paravent. Et toutes les femmes chefs d'orchestres françaises - que ce soit Laurence Equilbey, Claire Gibault ou Emmanuelle Haïm - ont créé leurs propres orchestres, faute d'être programmées dans les structures musicales (orchestres et opéras) existantes.

Le témoignage de Claire Gibault 13 ( * ) a particulièrement retenu l'attention de la délégation quand elle rapporte que, venant de diriger Idomeneo à Washington avec Placido Domingo, ainsi que d'autres oeuvres à la Scala de Milan et à Berlin, elle ne reçut aucune réponse de l'Opéra de Rennes ou de l'Orchestre de chambre de Toulouse à qui elle avait envoyé sa candidature : « Force est de constater que ni Laurence Equilbey, ni Emmanuelle Haïm, ni Nathalie Suzmann, ni moi-même ne sommes invitées par les institutions culturelles françaises ! » .

Enfin, dans certaines disciplines moins connues, telle la bande dessinée, les femmes ne représentent que 10 % des dessinatrices, alors même que la bande dessinée est un secteur florissant de l'édition.

Le témoignage de Chantal Montellier 14 ( * ) , dessinatrice et scénariste, a été très précieux pour les membres de la délégation. Ainsi a-t-elle décrit un « parcours du combattant », expliquant avoir longtemps été la seule femme dessinatrice dans les magazines au sein desquels elle travaillait ou explicitement découragée par les responsables de presse, tels le rédacteur en chef de la revue « A suivre » , Jean-Paul Mongin, qui « considérait que la bande dessinée féminine ne se vendrait pas » .


* 12 En 2006, on comptait 40 % de femmes à la tête des centres chorégraphiques nationaux ; elles ne sont plus que 29 %.

* 13 Témoignage de Claire Gibault, lors de son audition par la délégation, le 4 avril 2013.

* 14 Chantal Montellier, dessinatrice et scénariste et créatrice du Prix Artémisia de la bande dessinée auditionnée par la délégation le 11 avril 2013.

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