II. LES VACCINS : UN MÉDICAMENT D'AVENIR

A. LA SÉCURITÉ DES VACCINS

1. Un rapport bénéfice-risque plus difficile à appréhender

Le vaccin dépasse la distinction de la médecine classique entre la thérapeutique qui vise à soigner les maladies et l'hygiène qui vise à maintenir les personnes en bonne santé en ajustant leur mode de vie. C'est là une des raisons historiques de son intégration difficile aux pratiques médicales. Aujourd'hui le vaccin est considéré par la médecine et le droit comme un médicament à part entière. Il doit donc être présenté comme tel à la population avec un examen objectif des bénéfices qu'il apporte et des risques dont il peut être porteur.

Une vigilance particulière doit également être exercée en matière de lutte contre la contrefaçon qui a causé des morts notamment en Afrique en 1995 et dont l'Organisation mondiale de la santé considère qu'elle est un marché en expansion.

a) Le vaccin partage les caractéristiques des médicaments

Le vaccin partage avec les médicaments deux de leurs caractéristiques fondamentales : il a un effet thérapeutique et présente un rapport bénéfice-risque favorable. Il permet aux personnes auxquelles il a été administré de développer une protection immunitaire contre une maladie infectieuse, ce qui comporte pour ces sujets un moindre risque de la contracter ou de moindres conséquences en cas d'infection avérée. Le bénéfice qui en découle est très net, puisque certaines maladies peuvent ainsi être prévenues et finir par disparaître à l'échelle mondiale. Comme tout médicament, les vaccins comportent également des risques : leur mode d'action consistant à provoquer une réaction protectrice du système immunitaire, certains effets indésirables peuvent s'ensuivre, éventuellement à long terme. La balance bénéfice-risque est cependant nettement favorable dès lors qu'il s'agit de lutter contre certaines maladies dangereuses. C'est le cas s'agissant par exemple de la rougeole, qui constitue la première cause de mortalité infantile dans le monde.

Ces caractéristiques des vaccins expliquent que leur mode de surveillance et de prise en charge soit identique à celui des autres médicaments. Le rapport bénéfice-risque qui leur est associé est examiné initialement, puis de façon régulière in vivo , par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ainsi que par l'Agence européenne du médicament. Les vaccins reçoivent ainsi en premier lieu une autorisation de mise sur le marché (AMM), assortie d'indications et de contre-indications, et qui prévoit une utilisation selon les recommandations nationales définissant les populations à vacciner. Le risque peut ainsi être limité, comme pour tout médicament, par une prescription adaptée à chaque situation individuelle. La toxicité éventuelle d'un produit peut ensuite être dépistée par une surveillance régulière de la population vaccinée, qui repose sur les trois piliers classiques du système de pharmacovigilance : le recueil par les producteurs de tous les événements indésirables survenus, qui sont portés à la connaissance du public à travers des rapports périodiques ; un système de déclaration obligatoire ou spontanée à destination respective des professionnels de santé et des patients ; l'observation de cohortes de cette population à travers des études spécifiques. Cette surveillance peut déboucher sur la suspension ou le retrait de certains produits dont le rapport bénéfice-risque observé devient défavorable ; un vaccin contre les rotavirus qui provoquait des invaginations intestinales aiguës a ainsi été retiré du marché. La prise en charge de la plupart des vaccins par l'assurance maladie est par ailleurs identique à celle des médicaments à service médical rendu (SMR) important et s'établit à 65 %.

b) Le vaccin est un médicament particulier

Le vaccin constitue cependant un médicament particulier à plusieurs titres, ce qui explique sans doute la sensibilité particulière de la population aux risques associés à la vaccination. Il s'agit tout d'abord d'un médicament préventif, qui s'adresse en conséquence à des personnes le plus souvent jeunes et en bonne santé auxquelles il fait courir, pour un bénéfice éventuel et différé, un risque immédiat. Le vaccin peut ensuite être défini comme un médicament solidaire, dans la mesure où il n'entraîne pas seulement un bénéfice sur la santé au plan individuel mais permet également de protéger l'entourage des personnes vaccinées. Le vaccin présente enfin une dimension fortement politique lorsqu'une obligation vaccinale est définie par la puissance publique. A ces caractéristiques particulières répond une forme de surveillance renforcée : contrairement à la procédure observée pour les autres médicaments, aucun vaccin n'est libéré et mis en circulation sans un contrôle de la composition de chaque lot de produits. Il résulte de ces spécificités que si le bénéfice de la prévention apparaît clairement au plan collectif, il est parfois plus difficilement perçu à l'échelle individuelle.

2. Une contestation forte à laquelle il doit être apporté des réponses

L'examen vigilant de la sécurité des vaccins fondée sur l'enregistrement et l'évaluation des effets indésirables et sur les études scientifiques est nécessaire à la crédibilité de la politique vaccinale. L'Agence nationale de sécurité du médicament est chargée de mener une évaluation constante de ce rapport et de retirer du marché les vaccins dont les risques sont supérieurs aux bénéfices.

La campagne menée par l'association d'entraide aux malades de myofasciite à macrophages sur les dangers de l'adjuvant aluminique dans les vaccins qui s'appuie sur l'expérience des malades et sur des études publiées tant en France qu'aux Etats-Unis mérite donc toute l'attention des pouvoirs publics.

A l'initiative de votre rapporteur, la commission des affaires sociales a souhaité poser la question de la sécurité de l'adjuvant aluminique aux autorités sanitaires. Le Pr Dominique Maraninchi, directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament a ainsi indiqué lors de son audition que les recherche françaises sur la question se poursuivraient dans le cadre d'un programme piloté par l'Inserm et bénéficiant d'un financement ad hoc . Cette démarche paraît conforme à l'application du principe de précaution dans la mesure où il n'existe pas de consensus scientifique sur cette question sensible, où les adjuvants aluminiques sont utilisés depuis les années 1920 et où l'émergence du myofasciite à macrophage est récente, même si elle est sous-estimée selon l'association d'entraide aux malades.

Votre rapporteur considère que l'approfondissement des travaux de recherche à l'aide de fonds publics est important. Le déroulé des travaux engagés par l'Inserm fera l'objet d'une attention particulière de la commission. Il estime par ailleurs que la question de fond de l'accès aux adjuvants pour la recherche est centrale pour l'innovation en ce domaine. Les chercheurs auditionnés ont fait part de difficultés sur ce point et un accord avec les industriels, sous l'égide des ministères compétents, serait nécessaire pour renforcer l'indépendance de l'innovation par rapport aux considérations économiques et de propriété industrielle.

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