2. La transparence fiscale, vecteur de lutte contre l'évasion
a) La norme internationale : l'échange sur demande de renseignements « vraisemblablement pertinents »
L'OCDE a élaboré en 1958 un modèle de convention qui tendait à éliminer les risques de double taxation par le pays de la résidence du bénéficiaire et celui de la source des revenus. Ce cadre a été une première fois révisé en 1963 et en 1977 , date à laquelle fut introduit l'article 26 relatif à l'échange sur demande de renseignements vraisemblablement pertinents 323 ( * ) .
Les dernières révisions significatives en ce domaine sont intervenues en 2005. Le modèle a été complété par deux paragraphes. Le nouveau paragraphe 4 de l'article 27 relatif au recouvrement prévoit que l'absence d'intérêt fiscal national propre pour cet État de collecter l'information requise ne lui permet pas de refuser de répondre à une demande 324 ( * ) . Le paragraphe 5 de l'article 26 précité prévoit, quant à lui, l'interdiction d'opposer le secret bancaire à une demande de renseignements.
Il existe une autre norme que celle élaborée par l'OCDE, en matière d'échange de renseignements : l 'ONU a également publié en 1980, un modèle de convention concernant les doubles impositions entre pays développés et pays en développement . Largement inspiré du modèle de l'OCDE de 1977, les différences, peu nombreuses, sont toutefois significatives en matière de suppression des doubles impositions. Le modèle onusien, moins utilisé, tend à conférer plus de droits à l'État source du revenu 325 ( * ) .
Le recours à un accord de suppression des doubles impositions afin de renforcer la coopération fiscale est cependant limité aux États présentant une certaine pression fiscale, ce qui n'est pas le cas des paradis fiscaux .
En conséquence, un accord cadre ayant pour objet exclusif l'échange de renseignements en matière fiscale a été publié en 2002 dans l'enceinte du Forum mondial, afin d'éradiquer les comportements fiscaux dommageables :
- l 'échange de renseignements aux termes de ce modèle, doit être accordé, par un État, sur la demande de l'autre État contractant lorsque l'information est « vraisemblablement pertinente » pour l'application de la législation fiscale interne de ce cosignataire ;
- la nature des renseignements peut être bancaire ou fiduciaire et concerner les conditions de propriété de sociétés ;
- les restrictions à la transmission de renseignements motivées par le secret bancaire ou par des exigences tenant à l'intérêt fiscal national sont prohibées ;
- les seuls refus de coopérer autorisés concernent les situations dans lesquelles l'État requis serait conduit :
. à prendre des mesures administratives dérogeant à sa législation ;
. à transmettre des renseignements qui révèleraient un secret commercial, industriel, professionnel ou dont la communication serait contraire à l'ordre public.
Enfin il convient de mentionner l'existence d'un outil multilatéral, la Convention du Conseil de l'Europe concernant l' assistance administrative mutuelle en matière fiscale élaborée conjointement par l'OCDE, et par le Conseil de l'Europe en 1988 326 ( * ) .
Elle doit permettre d'intégrer dans la démarche d'assistance fiscale les petits pays qui ne disposent pas des ressources nécessaires à la négociation des accords bilatéraux 327 ( * ) . La France a signée la version révisée de cette convention le 27 mai 2010 et l'a ratifiée le 27 octobre 2011 328 ( * ) .
* 323 « Les autorités compétentes des Etats contractants échangent les renseignements vraisemblablement pertinents pour appliquer les dispositions de la présente Convention ou pour l'administration ou l'application de la législation interne relative aux impôts de toute nature ou dénomination perçus pour le compte des Etats contractants, de leurs subdivisions politiques ou de leurs collectivités locales, dans la mesure où l'imposition qu'elles prévoient n'est pas contraire à la Convention . »
* 324 L'article 27 du modèle traite de l'assistance en matière de recouvrement. Cette norme a une portée plus réduite que celle sur l'échange de renseignements. En effet, la législation nationale de l'Etat peut interdire cette assistance ou la limiter.
* 325 Cette logique particulière est clairement liée aux intentions onusiennes de protéger les pays en développement contre l'évaporation fiscale touchant les revenus et les capitaux étrangers pouvant s'investir sur leurs territoires.
* 326 Ouverte à la signature le 25 janvier 1988 aux pays membres de l'Organisation et du Conseil, cette convention a été paraphée par la France le 17 septembre 2003, puis ratifiée le 1er mars 2005.
* 327 Cette convention a été révisée en 2010 afin, d'une part, de la mettre à jour et, d'autre part, de l'ouvrir à la signature d'Etats qui ne sont membres ni de l'OCDE, ni du Conseil de l'Europe.
* 328 Loi n° 2011-1370 du 27 octobre 2011 autorisant l'approbation du protocole d'amendement à la convention du Conseil de l'Europe concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale. Cf . http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl11-002.html