3. Favoriser la mobilité, la fluidité et le dialogue

La question des collections du FNAC et des FRAC a été évoquée dans le chapitre précédent sous l'angle de la politique d'acquisition et de la gestion. Mais la philosophie de la circulation des oeuvres ne s'arrête pas à la question de prêts et d'expositions itinérantes. Elle concerne également la nature même des collections et leur devenir. Ainsi M. Christophe Girard, adjoint à la culture de la Ville de Paris, a-t-il lancé l'idée d'une réflexion sur la vocation patrimoniale des collections d'oeuvres d'art contemporain et sur la possibilité de soutenir la création. En effet, les moyens sont nécessairement limités pour acquérir de nouvelles oeuvres et donc soutenir la création française par le biais du FNAC et des FRAC. Parallèlement, on sait que certaines oeuvres ne sont malheureusement pas valorisées car elles restent confinées dans les réserves. D'où l'idée de vendre des oeuvres d'aujourd'hui pour en acquérir d'autres. Cette approche peut interpeler mais il ne s'agit pas d'envisager une procédure de déclassement systématique ou abusif du domaine public. Il s'agit simplement de lancer une réflexion sur ce que doit représenter le patrimoine contemporain et le mettre en relation avec la possibilité financière de poursuivre sa constitution dans les collections régionales ou nationale. A l'image des oeuvres d'art dans les rues de Paris dont l'implantation devrait davantage être envisagée de façon temporaire et non permanente, certaines oeuvres pourraient ainsi davantage circuler entre domaine public et domaine privé , ce qui aurait d'ailleurs pour effet de relancer la carrière des artistes concernés.

Un outil existe désormais grâce à l'initiative de membres de votre commission. En effet, la proposition de loi de Mme Catherine Morin-Desailly visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories fut l'occasion pour M. Philippe Richert, rapporteur, de proposer de réactiver un dispositif de déclassement des oeuvres appartenant aux collections publiques, resté « lettre morte ». Sur proposition de son rapporteur, votre commission fit donc la proposition de créer une nouvelle commission scientifique au champ de compétence bien délimité mais élargi, afin de réfléchir aux enjeux et à la philosophie de cette procédure de déclassement, « sans dogmatisme ni tabou ».

Ainsi fut adoptée la loi n° 2010-501 du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvelle-Zélande et relative à la gestion des collections. Le code du patrimoine prévoit désormais, dans son article 115-1, qu'une Commission scientifique nationale des collections puisse se prononcer sur le déclassement ou la cessions d'oeuvres ou de biens inscrits sur l'inventaire du FNAP, appartenant aux autres collections du domaine public, ou, hors domaine public, sur les collections des FRAC.

Le décret n° 2011-160 du 8 février 2011, tant attendu depuis la publication de la loi précitée, a enfin précisé la composition et le fonctionnement de la Commission scientifique nationale des collections, dont le troisième collège serait en charge des questions de déclassement des oeuvres d'art contemporain.

ARTICLE 115-1 DU CODE DU PATRIMOINE

La Commission scientifique nationale des collections a pour mission de conseiller les personnes publiques ou les personnes privées gestionnaires de fonds régionaux d'art contemporain, dans l'exercice de leurs compétences en matière de déclassement ou de cession de biens culturels appartenant à leurs collections, à l'exception des archives et des fonds de conservation des bibliothèques.

A cet effet, la commission :

1° Définit des recommandations en matière de déclassement des biens appartenant aux collections visées aux 2° et 3°, et de cession des biens visés au 4° ; elle peut également être consultée, par les autorités compétentes pour procéder à de tels déclassements ou cessions, sur toute question qui s'y rapporte ;

2° Donne son avis conforme sur les décisions de déclassement de biens appartenant aux collections des musées de France et d'oeuvres ou objets inscrits sur l'inventaire du Fonds national d'art contemporain et confiés à la garde du Centre national des arts plastiques ;

3° Donne son avis sur les décisions de déclassement de biens culturels appartenant aux autres collections qui relèvent du domaine public ;

4° Peut être saisie pour avis par les personnes privées gestionnaires de fonds régionaux d'art contemporain, lorsque les collections n'appartiennent pas au domaine public, sur les décisions de cession portant sur les biens qui les constituent.

DÉCRET N° 2011-160 DU 8 FÉVRIER 2011

I. La Commission scientifique nationale des collections instituée à l'article L. 115-1 du code du patrimoine comporte quatre collèges dont la compétence est ainsi définie :

.............................................................................................................

3° Le troisième collège donne :

a) L'avis conforme, prévu au 2° de l'article L. 115-1, sur les propositions de déclassement des oeuvres ou objets inscrits sur l'inventaire du Fonds national d'art contemporain et confiés à la garde du Centre national des arts plastiques ;

b) L'avis simple, prévu au 3° de l'article L. 115-1, sur les projets de déclassement des biens des fonds régionaux d'art contemporain appartenant au domaine public ;

c) L'avis simple, prévu au 4° de l'article L. 115-1, pour les projets de cession des biens des fonds régionaux d'art contemporain n'appartenant pas au domaine public ;

..............................................................................................................

Votre rapporteur, conscient de toutes les précautions qui doivent être prises dans une approche visant à reconsidérer à certains égards les oeuvres d'art contemporain dans les collections publiques, souhaite que la réflexion puisse avoir lieu. La Commission scientifique nationale pouvant désormais fonctionner, il serait tout à fait intéressant de lui confier une mission d'étude sur ce sujet afin qu'elle puisse définir des recommandations comme le prévoit le code du patrimoine. Non seulement cela serait utile pour l'image parfois critiquée des FRAC et du FNAC, mais cela donnerait tout son sens à l'instance que votre commission a souhaité instaurer.

Proposition n° 14 : Initier une réflexion sur la possibilité de revendre des oeuvres d'art contemporain des collections du FNAC et des FRAC pour en acquérir de nouvelles. Associer la Commission scientifique nationale des collections à cette réflexion en lui demandant de proposer des recommandations.

La question de la valorisation des collections des FRAC et du FNAC ne se pose pas seulement en termes de propriété, mais aussi sous l'angle de la mobilité des oeuvres. En effet, plusieurs témoignages ont interpellé votre rapporteur sur le développement des prêts et des expositions itinérantes. La formidable collection d'art contemporain dont dispose la France pourrait bénéficier à des collectivités (dans les mairies par exemple) ou à des établissements culturels ne disposant pas de moyens suffisants pour développer leurs propres collections.

Proposition n° 15 : Encourager l'itinérance des expositions et les prêts d'oeuvres d'art contemporain.

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