D. LA FRANCE N'ATTEINDRA VRAISEMBLABLEMENT PAS LES OBJECTIFS AUX DATES PRÉVUES, MALGRÉ UNE MOBILISATION PLUS PRÉCOCE QUE POUR LA DERU
1. Des difficultés liées à l'incertitude des financements et à l'inertie des milieux
Malgré la mobilisation des acteurs, constatée sur le terrain, l'anticipation des investissements dans les programmations des agences de l'eau et les actions d'ores et déjà réalisées, un risque non négligeable subsiste de ne pas parvenir à la mise en oeuvre attendue des objectifs de la DCE , même si la France n'est pas un cas isolé. Il ne faut donc surtout pas relâcher les efforts en cours.
Certains de nos interlocuteurs rencontrés sur le terrain ont à cet égard fait part de leurs doutes à remplir les objectifs de la DCE, dans un contexte de raréfaction de la ressource financière des collectivités et de réforme territoriale . En effet, l'incertitude des financements associés à la mise en oeuvre de la DCE pourrait en retarder l'application. Pour un certain nombre de territoires, par exemple, il risque d'y avoir un télescopage avec les contraintes liées aux risques d'inondation. Faute de moyens suffisants, les collectivités devront donc choisir et flécher les budgets. Il est donc important de redéfinir les priorités pour cibler les financements .
En outre, nos interlocuteurs nous ont mis en garde, soulignant que les moyens présupposés ne seraient peut-être pas tous activés au final, et que les délais de mise en oeuvre pouvaient s'avérer beaucoup plus importants que prévu . Enfin, le temps de reconstitution de la qualité de l'eau et de réaction des milieux aquatiques, soumis à une certaine inertie , doit également être pris en compte.
Cependant, le point le plus problématique réside dans la difficulté à identifier les maîtres d'oeuvre pour le lancement des travaux.
2. La difficulté d'identifier les maîtrises d'ouvrage ralentit trop souvent les travaux
A la différence de la directive ERU, pour l'application de la DCE, la maîtrise d'ouvrage, c'est-à-dire l'identification des personnes qui doivent effectuer les travaux, n'est pas évidente pour toutes les actions . Naturelle pour des actions sur les rejets d'assainissement ou industriels (pollutions ponctuelles), elle nécessite dans certains cas un rôle réglementaire prééminent de l'Etat, sur la gestion quantitative (pouvoir de contrition déclenchant l'action « volontaire ») ou sur les pollutions diffuses (plans d'actions sur le domaine agricole). En outre, elle est clairement non attribuée sur les questions de restauration des milieux et d'espace de mobilité, où des synergies doivent être recherchées avec les problématiques d'inondation .
Le problème est d'autant plus aigu qu'il existe de très nombreux endroits à restaurer . Cela pose la question de l'instance de décision adapté.
La DCE induit par conséquent une réflexion sur le positionnement des acteurs, et notamment des services, en vue d'améliorer les compétences et les synergies .
3. La nécessité de mieux doter les agences de bassin
Au vu des problèmes de ressources auxquels sont confrontées les collectivités pour mettre en oeuvre les directives sur l'eau, il conviendrait de renforcer les capacités des agences de bassin à développer leurs financements au profit des politiques de l'eau (entretien des rivières, assainissement). Il faut faire en sorte que les agences aient les moyens d'accompagner les collectivités dans leurs démarches. Cela passerait sans doute par une meilleure utilisation de leurs ressources , voire par une augmentation des redevances , d'autant plus que la base fiscale de ces dernières est pertinente. A cet égard, les acteurs de terrain, par exemple à Bordeaux, estiment qu'il faudrait augmenter les moyens de l'ordre de 15 % à 20 % pour être en ligne avec les objectifs de la DCE dès 2015.