IV. LES FONDS DÉPARTEMENTAL ET RÉGIONAL DE PÉRÉQUATION DE LA CVAE
Enfin, le groupe de travail a souhaité aborder la question des fonds départemental et régional de péréquation de la CVAE . La création de ces fonds a été décidée en loi de finances pour 2010, pour répondre à la territorialisation de la CVAE et à ses effets en termes d'inégalités de ressources entre les collectivités territoriales.
Quelques éléments de rappel à cet égard. Le produit de la CVAE s'est élevé à 10,3 milliards d'euros en 2010. Selon une hypothèse de croissance de 2 % de la CVAE en 2011, le produit attendu pour les collectivités territoriales en 2011 s'élèverait à 10,5 milliards d'euros, ainsi répartis :
- 2,78 milliards d'euros pour le bloc communal (26,5 % de la ressource totale) ;
- 5,09 milliards d'euros pour les départements (correspondant à 48,5 % du produit global de la CVAE) ;
- et 2,63 milliards d'euros pour les régions (soit 25 % de la CVAE).
Selon les évaluations proposées par le rapport « Durieux-Subremon », la CVAE représenterait 80 % des ressources fiscales des régions et plus de 30 % des ressources fiscales des départements à compter de l'année 2011 .
La logique des fonds créés pour les départements et les régions s'explique par cette spécificité. En effet, à l'inverse des communes et des intercommunalités, leur richesse fiscale résultera essentiellement de la CVAE et non d'un panier de recettes fiscales étendu comme l'est celui du bloc communal. En outre, les compétences des régions et des départements ont été limitées par la loi précitée de réforme des collectivités territoriales. Il est donc apparu plus adapté au législateur de limiter cette péréquation à la CVAE, plutôt que de mettre en place une péréquation assise sur l'ensemble des recettes des régions et des départements. Enfin, s'agissant des départements, la loi de finances pour 2010 a déjà prévu un fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux, qui s'ajoutera au dispositif de péréquation de la CVAE.
Le mécanisme des fonds prévu par la loi de finances pour 2010 a été précisé en loi de finances pour 2011 et ceux-ci doivent entrer en vigueur à compter de l'année 2012 pour une application effective à compter de 2013 .
Toutefois, le groupe de travail estime que la réflexion concernant ces fonds n'a pas été menée jusqu'à son terme et qu'il est nécessaire de revenir sur cette question lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012 .
A. LE TEXTE VOTÉ EN LOI DE FINANCES POUR 2011
1. Une péréquation de la CVAE des régions et des départements prévue dès 2009
a) Des fonds créés sans analyse approfondie, pour pallier la territorialisation de la CVAE
A la différence de sa position concernant le bloc communal, le Sénat avait souhaité, lors de l'examen de la réforme de la taxe professionnelle, conserver une mutualisation du produit de la CVAE pour ses parts départementale et régionale , conformément à ce que proposait le Gouvernement dans la version initiale du projet de loi. Cette mutualisation permettait en effet de transformer la CVAE en un outil de péréquation efficace puisque son produit aurait été intégralement réparti en fonction de critères distincts de l'assiette d'imposition.
Toutefois, l'Assemblée nationale a préconisé pour sa part une territorialisation de la CVAE pour l'ensemble des catégories de collectivités territoriales et, par conséquent, pour les départements et les régions comme pour le bloc communal. Cette vision l'a emporté lors de la réunion de la commission mixte paritaire chargée d'examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2010.
Il en a résulté la nécessité pour le Gouvernement d'élaborer dans l'urgence, avant la lecture devant le Parlement des conclusions de la commission mixte paritaire, un dispositif de péréquation visant à éviter un trop fort creusement des écarts de richesse entre les départements et les régions. Le Gouvernement, comme le Parlement, était par ailleurs soucieux de respecter la disposition inscrite à l'article 72-2 de la Constitution selon laquelle « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ».
Deux fonds ont ainsi été inscrits dans la loi de finances pour 2010, sans examen approfondi de leurs effets, à travers l'adoption d'amendements présentés par le Gouvernement en lecture des conclusions de la commission mixte paritaire .
b) Les dispositifs adoptés en loi de finances pour 2010
L'article 78 de la loi de finances pour 2010 a prévu, à compter de 2011, la création de quatre fonds de péréquation de la CVAE : deux fonds pour les régions et deux fonds pour les départements.
Pour chaque échelon de collectivités territoriales, deux fonds étaient donc prévus :
- l'un portant sur le stock du produit fiscal, qui prélève 25 % du produit de CVAE de chaque collectivité, avec une répartition en fonction de critères de charge ;
- l'autre portant sur le flux cumulé de produit fiscal, qui prélève la moitié des ressources de CVAE entre l'année « n » et l'année 2010 excédant la croissance moyenne, avec une répartition en fonction de critères de ressources. Seuls les régions et les départements dont le potentiel fiscal est supérieur à la moyenne peuvent être prélevés.
Aucune simulation et aucune évaluation des effets péréquateurs de ces fonds n'avait pu être réalisée avant leur adoption par le législateur.
2. L'évaluation du dispositif voté en 2009
a) Les conclusions du rapport « Durieux-Subremon »
Le rapport précité réalisé par la mission « Durieux-Subremon » en 2010 a permis d'évaluer les effets péréquateurs des fonds créés par la loi de finances pour 2010.
(1) Des mécanismes peu efficaces
Globalement, il a permis de constater la faiblesse des effets de ces fonds en termes de réduction des écarts de richesse entre les départements et les régions . Ainsi, « l'effet péréquateur des mécanismes mis en place pour les régions est faible. Le mécanisme sur stock permet de réduire les inégalités de moins de 5 % et le mécanisme sur flux de moins de 1 % à l'horizon 2015 ».
Cette faiblesse s'explique notamment par le fait que le dispositif de péréquation sur stock s'apparente en réalité à une péréquation sur « flux cumulés » , en raison de la garantie de ressources mise en place via la DCRTP et le FNGIR. En effet, l'évolution du stock de CVAE de chaque collectivité est prise en compte avant compensation à l'euro près des effets de la réforme, ce qui a pour conséquence de neutraliser à court terme son impact. La péréquation ne portera en réalité que sur le différentiel de croissance sur la CVAE constaté entre l'année de référence et les années qui suivent. Cette remarque est valable aussi bien pour les régions que pour les départements.
S'agissant des départements, le rapport conclut également à un effet péréquateur « faible » des mécanismes mis en place : « au total, le mécanisme sur stock permet de réduire les inégalités de 3,4 % et le mécanisme sur flux de 2,5 % à l'horizon 2015 ».
(2) Les pistes d'évolution envisagées
Plusieurs pistes d'évolution sont donc envisagées par la mission afin de rendre les dispositifs de péréquation plus efficaces.
En premier lieu, le rapport préconise une fusion, pour chacune des deux catégories de collectivités concernées, des deux mécanismes de péréquation . Il est en effet inutile de conserver deux dispositifs distincts de péréquation portant sur le flux de CVAE. En outre, la coexistence de deux fonds de péréquation du même produit fiscal pour une même catégorie de collectivités territoriales est de nature à rendre peu lisible l'effet global de la péréquation, d'autant plus que l'un des fonds répartit son produit selon des critères de charges tandis que l'autre utilise des critères de ressources, ce qui manque de cohérence.
Par ailleurs, dans l'hypothèse où le mécanisme de péréquation dit « sur stock » serait préservé, la mission « Durieux-Subremon » souhaite que soit examinée la possibilité d'augmenter au-delà de 25 % le montant de la CVAE prélevé , ce qui permettrait d'accroître l'effet du fonds en termes de réduction des écarts de richesse.
Enfin, le rapport des inspections souligne que l'effet du dispositif de péréquation sur flux est limité par le fait que deux conditions doivent être remplies pour qu'une collectivité subisse un prélèvement : la croissance de ses ressources de CVAE doit être supérieure à la moyenne et son potentiel fiscal doit également être supérieur à la moyenne. Il estime donc que le premier critère pourrait être supprimé et qu'ainsi, « le renforcement de la péréquation sur flux peut être obtenu en prélevant une partie de la croissance de la CVAE de toutes les régions dont le potentiel fiscal par habitant est supérieur à la moyenne ».
b) Les préconisations des parlementaires en mission
Les travaux des parlementaires en mission ont porté sur les fonds de péréquation départemental et régional de la CVAE comme sur le fonds de péréquation intercommunal et communal ( cf . supra ). Leurs constats et leurs préconisations recoupent, pour une large part, celles du rapport « Durieux-Subremon ». Ils proposent ainsi :
- de supprimer le mécanisme de péréquation sur stock , redondant par rapport au dispositif de péréquation sur flux cumulé en raison de la compensation à l'euro près des effets de la réforme ;
- de majorer à 50 % - au lieu de 25 % - le montant du prélèvement opéré sur les flux cumulés de la CVAE pour les régions comme pour les départements. Cette augmentation vise, d'une part, à compenser la disparition du mécanisme de péréquation sur stock et, d'autre part, à accroître l'effet péréquateur des fonds créés ;
- enfin, de modifier les modalités de redistribution du produit du fonds pour prendre en compte à la fois des critères de ressources et des critères de charges .
3. Le dispositif de l'article 124 de la loi de finances pour 2011
a) La fusion des fonds créés en loi de finances pour 2010
Le dispositif a finalement été fortement modifié par l'article 124 de la loi de finances pour 2011 qui a suivi, dans de nombreux points, les orientations dégagées par le rapport « Durieux-Subremon » et par les parlementaires en mission. Il a toutefois été adopté sans simulations fiables de ses effets.
Certaines des modifications apportées n'ont pas fait l'objet de modifications lors de l'examen du texte par le Parlement :
- pour chacune des deux catégories de collectivités territoriales, les deux fonds de péréquation créés par la loi de finances pour 2010 ont été fusionnés ;
- il en résulte deux fonds de péréquation sur flux cumulé - l'un pour les départements, l'autre pour les régions ;
- un mécanisme « d'effet cliquet » appliqué aux prélèvements permet d'éviter qu'un département ou une région ne fasse pas l'objet d'un prélèvement qui fasse diminuer son potentiel financier par habitant en dessous de la moyenne nationale, ce qui garantit les collectivités contre des prélèvements excessifs.
Un débat s'est en revanche ouvert entre l'Assemblée nationale et le Sénat sur les critères de prélèvement et l'ampleur des fonds de péréquation .
b) Une ampleur des prélèvements fortement réduite à l'issue du débat parlementaire
(1) La version proposée par le Gouvernement
Dans la version initiale du texte proposée par le Gouvernement, le prélèvement ne portait que sur les seuls départements et régions dont le potentiel fiscal par habitant est supérieur à la moyenne .
Le montant du prélèvement était égal à la moitié du produit de la CVAE en année « n » qui excède le produit de CVAE de l'année 2011 . C'est le principe de la péréquation sur flux cumulés. En 2012, l'assiette de prélèvement est relativement faible puisqu'elle ne correspond qu'à l'augmentation de CVAE entre les années 2011 et 2012. En revanche, l'ampleur du fonds est appelée à croître avec les années puisque, par exemple, en 2020, ce sera la moitié de la croissance globale de la CVAE entre l'année 2011 et l'année 2020 qui servira à la péréquation.
(2) La version adoptée par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a fortement réduit l'ampleur du dispositif 21 ( * ) de péréquation en prévoyant que le prélèvement ne portera que sur la moitié de la croissance de la CVAE qui excède, pour un département ou une région, la croissance globale de la CVAE entre les années 2011 et « n ».
Il faudra donc non seulement qu'une collectivité connaisse une croissance de sa CVAE pour être prélevée mais, en outre, que cette croissance soit plus rapide que la croissance moyenne de la CVAE sur le territoire national pendant la même période.
(3) La version adoptée par le Sénat
Le Sénat a adopté un amendement de sa commission des finances visant à remplacer le critère du potentiel fiscal par celui du potentiel financier . Le potentiel financier est en effet plus représentatif de la richesse réelle d'un territoire que son seul potentiel fiscal.
Par ailleurs, pour les seuls départements, le Sénat a prévu de revenir à la version initiale du Gouvernement , c'est-à-dire de retenir un prélèvement de la moitié du produit de la CVAE en année « n » qui excède le produit de CVAE de 2011, sans référence à la croissance moyenne de la CVAE.
(4) La version définitive adoptée en CMP
La commission mixte paritaire réunie pour examiner les dispositions du projet de loi de finances pour 2011 restant en discussion a choisi :
- de conserver la notion de potentiel financier plutôt que celle de potentiel fiscal ;
- de revenir à la version adoptée par l'Assemblée nationale pour les départements. Ainsi, pour les régions comme pour les départements, le prélèvement ne sera égal qu'à la moitié de la croissance de la CVAE qui excède la croissance moyenne entre les années 2011 et « n ».
Or, comme l'indique l'exemple ci-dessous, cette version définitive du texte adopté en loi de finances pour 2011 porte préjudice à l'efficacité des fonds de péréquation départemental et régional de la CVAE , par rapport à la version initiale proposée par le Gouvernement.
(5) Exemple concret des conséquences de la modification apportée par le Parlement aux fonds de péréquation de la CVAE
Les tableaux ci-dessous font apparaître la très forte réduction de l'ampleur des fonds entre le dispositif voté en loi de finances pour 2011, actuellement applicable, et celui qui aurait résulté de l'adoption du mécanisme proposé par le Gouvernement .
Les simulations figurant dans les tableaux ci-dessous, applicables aussi bien aux régions qu'aux départements, sont fondées sur les hypothèses suivantes :
- un département A avec un produit de CVAE de 100 en 2011 ;
- une croissance moyenne de CVAE de 2 % par an entre 2011 et 2015 : la base de 100 en 2011 devient donc, en moyenne, une base de 108,2 en 2015.
Effets du texte adopté en loi de finances pour 2011
Hypothèses |
Conséquences sur le prélèvement |
|
Si le département est en dessous de 108,2 de CVAE en 2015 |
Pas de prélèvement |
|
Si le département est au-dessus de 108,2 de CVAE en 2015 |
Potentiel financier par habitant inférieur à la moyenne |
Pas de prélèvement |
Potentiel financier par habitant supérieur à la moyenne |
Prélèvement de la moitié de la croissance de la CVAE excédant la croissance moyenne Par exemple, pour une CVAE à 120, prélèvement de : (120-108,2)/2 = 5,9 |
Source : commission des finances
Ainsi, il faudrait donc que le département A dispose, d'une part, d'un produit de CVAE en 2015 supérieur à 108,2 et, d'autre part, d'un potentiel financier par habitant supérieur à la moyenne pour subir un prélèvement ; et ce prélèvement ne s'élèverait qu'à 5,9 sur un produit de CVAE de 120.
Effets du texte initial proposé par le Gouvernement
Hypothèses |
Conséquences sur le prélèvement |
|
Si le département est en dessous de 100 de CVAE en 2015 |
Pas de prélèvement |
|
Si le département est au-dessus de 100 de CVAE en 2015 |
Potentiel fiscal par habitant inférieur à la moyenne |
Pas de prélèvement |
Potentiel fiscal par habitant supérieur à la moyenne |
Prélèvement de la moitié de la croissance de la CVAE Par exemple, pour une CVAE à 120, prélèvement de : (120-100)/2 = 10 |
Source : commission des finances
Dans la version proposée initialement, il suffirait que la CVAE d'un département soit supérieure à 100 - son montant de l'année 2011 - et que son potentiel financier soit supérieur à la moyenne pour faire l'objet d'un prélèvement. En outre, le prélèvement serait égal à 10 sur une base de CVAE de 120 en 2015.
Cet exemple, qui porte sur un département dont la croissance de la CVAE serait supérieure à la croissance moyenne, montre que dans la version du texte adopté, le prélèvement serait inférieur de 41 % au prélèvement tel que prévu par le texte initial. Les fonds consacrés à la péréquation départementale et régionale seraient donc réduits d'autant.
Les conséquences du texte actuel pourraient être encore plus dommageables si tous les départements, ou toutes les régions, voyaient leur CVAE augmenter dans des proportions identiques. Alors, bien que la CVAE augmente, aucun prélèvement ne serait opéré puisqu'aucune collectivité ne croîtrait plus rapidement que la moyenne. Il en résulterait qu'aucune péréquation ne serait opérée sur le produit de CVAE .
c) Des critères de reversements modifiés à la marge
Concernant les reversements, le texte proposé par le Gouvernement n'a été modifié qu'à la marge au cours de l'examen du projet de loi de finances pour 2011 par le Parlement.
(1) Les critères de charge ont été conservés
Les critères de charges proposés par le texte initial pour procéder à la répartition, qui reprennent les critères introduits par votre commission des finances lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2010, n'ont notamment pas été modifiés .
Ainsi, pour les départements , ces critères, pondérés par un coefficient d'un sixième chacun, sont les suivants :
- la population ;
- le nombre de bénéficiaires de minima sociaux et la population âgée de plus de 75 ans ;
- la longueur de la voirie rapportée au nombre d'habitants.
Pour les régions , les critères de charge, également pondérés par un coefficient d'un sixième chacun, sont les suivants :
- la population ;
- les effectifs de lycéens dans les lycées publics et privés et les stagiaires de la formation professionnelle ;
- la superficie.
(2) Le critère de ressources
S'ajoute à ces trois critères de charges, pondérés au total par un coefficient d'un demi, un critère de ressources également pondéré par un coefficient d'un demi . La répartition des fonds s'opérera donc en fonction d'un indice synthétique composé pour moitié des ressources et pour moitié des charges de chaque département et de chaque région.
Le critère de ressources proposé dans la version initiale du texte était le potentiel fiscal. Conformément à sa logique consistant à prendre en compte un éventail le plus large possible de ressources pour évaluer la richesse des collectivités, le Sénat a remplacé la notion de potentiel fiscal par celle de potentiel financier, ce qui a été conservé dans la version définitive du texte adopté .
(3) Le critère d'éligibilité
Enfin, le texte prévoit que les reversements sont réservés :
- d'une part, aux régions dont le potentiel financier par habitant est inférieur à 0,85 fois la moyenne des potentiels financiers par habitant des régions. Ce seuil est conforme à celui utilisé pour la mise en oeuvre de la péréquation verticale et permet de cibler les régions les plus en difficulté ;
- d'autre part, aux départements dont le potentiel financier par habitant est inférieur à la moyenne des potentiels financiers par habitant des départements.
L'apport du Sénat a également consisté, s'agissant de ces critères d'éligibilité, à remplacer la notion de potentiel fiscal par celle de potentiel financier.
4. Les questions en suspens
Le texte de la loi de finances pour 2011 soulève de nombreuses interrogations :
- il nécessite que soit défini un potentiel financier des régions , notion actuellement inexistante dans le droit positif. Il est renvoyé sur ce point à la première partie du présent rapport ;
- l'exemple détaillé ci-avant soulève la question de la pertinence de prélèvements opérés sur la seule part de la croissance de la CVAE excédant la croissance moyenne, plutôt que sur la croissance totale de la CVAE ;
- le problème a été soulevé par l'Assemblée nationale de prélèvements qui pourraient être opérés sur la CVAE d'une collectivité alors même que cette CVAE augmente moins vite que l'inflation. En effet, la base de la CVAE étant la valeur ajoutée, elle augmentera nécessairement avec la hausse des prix. Or, on peut craindre qu'une collectivité dont la CVAE augmenterait ne subisse un prélèvement alors même que cette hausse est inférieure à l'inflation . Dans ce cas, la collectivité serait prélevée malgré la baisse de son « pouvoir d'achat fiscal » ;
- enfin, concernant les reversements, l'introduction d'un critère d'éligibilité en fonction du potentiel financier par habitant, distinct des critères servant à calculer le montant du reversement, entraîne des effets de seuil importants . Un département qui, une année « n », aurait un potentiel financier par habitant légèrement inférieur à la moyenne bénéficierait de reversements. Or, puisque ces reversements sont calculés notamment en fonction de ses charges, leur montant pourrait être non négligeable, alors même que le département se situe juste en dessous de la moyenne nationale des potentiels financiers par habitant. Si, en année « n + 1 », le département voit son potentiel financier par habitant excéder de peu la moyenne nationale, il ne bénéficiera plus d'aucun reversement, alors même que le poids de ses charges sera identique, voire qu'il aura augmenté depuis l'année « n ».
* 21 Voir l'exemple ci-après.