c) Pour les petites collectivités : un sentiment d'abandon de la part de l'Etat
Un autre « angle mort » de la RGPP renvoie aux petites collectivités territoriales. Leur problématique recoupe d'ailleurs souvent largement celle évoquée ci-dessus des zones rurales, ce qui ne surprend pas eu égard au tissu rural tel qu'on le connaît.
Ainsi que l'a estimé M. Hans Helmrich (UNSA) devant la mission, « les communes de moins de 1.500 habitants n'ont pas de service technique, pas d'ingénieurs ; depuis que les DDE ne les aident plus à établir les cahiers des charges et à préparer les marchés publics, elles sont obligées de faire confiance aux entreprises, ce qui les amène à valider des choses qui ne devraient pas l'être. On a fait la RGPP avant de mutualiser les services et comme les citoyens ne peuvent plus se tourner vers ceux de l'Etat, ils s'adressent aux collectivités qui sont proches ; les plus grandes peuvent faire face mais la situation des autres est complexe » 142 ( * ) .
Cette faiblesse a été confirmée par M. Jacques Nicolas (CGT), selon lequel « les petites collectivités, les plus nombreuses, souffrent d'être privées de toute une série de relais : comptable public, DDE... » 143 ( * ) .
De même, M. Olivier Dussopt, vice-président de l'Association des petites villes de France (APVF), a insisté sur cette perte de soutien de la part de l'Etat : « la capacité des petites villes à faire fonctionner leurs services a également été touchée par la fin de l'offre concurrentielle des DDE pour le réseau routier. Cela vaut aussi pour le droit du sol, l'instruction des permis de construire. Les collectivités locales manquent des ressources et de compétences » 144 ( * ) .
M. Olivier Dussopt a également souligné l'effet « dominos » ( Cf. supra ) particulièrement fort dans le cas des petites villes . Selon lui, « la fermeture des services publics n'a pas commencé avec la RGPP pour les petites villes, mais celle-ci l'a accélérée. L'absence de concertation a contribué à l'effet domino : la fermeture d'un service public entraîne une perte d'emplois, le déplacement de familles, des pertes pour les commerçants, des fermetures de classes, voire d'écoles, sans parler de l'effondrement du marché immobilier ».
Dans cette perspective, il a rappelé notamment que la réforme de la carte judiciaire a concerné 239 petites villes (pour 317 tribunaux supprimés au total au niveau national) et que « les réorganisations militaires n'ont pas frappé que Metz ou Nancy, mais aussi des petites villes comme Barcelonnette, Dieuze, Guéret ou Joigny..., où l'impact a été proportionnellement plus fort ». Il a également affirmé que la réorganisation des forces de sécurité avait eu des effets très négatifs sur les petites villes, du fait notamment des pertes d'emploi induites : « La sécurité ? Ce sont les transferts d'effectifs et les commissariats remplacés par des gendarmeries, 10 policiers étant remplacés par 6 ou 7 gendarmes, réputés plus disponibles -mais cela fait 30 % d'emplois en moins à Autun, Commercy, Issoudun ou Annonay ».
Au total, dans le cadre d'une enquête lancée en mars 2011 par l'APVF 145 ( * ) , 84 % des maires interrogés ont estimé que la RGPP avait un impact « négatif ou très négatif » sur le fonctionnement des services publics locaux de leurs collectivités .
Proposition n° 33 : Etablir une Charte fixant un niveau de service public minimal sur les territoires. |
* 142 Audition du 16 février 2011.
* 143 Idem.
* 144 Audition du 2 mars 2011.
* 145 Etude réalisée par l'APVF auprès d'un échantillon de 180 maires, représentatif des maires des communes françaises de 2.500 à 20.000 habitants.