B. DES OBJECTIFS DE PERFORMANCES ET DES MODALITÉS D'ENCADREMENT DES COÛTS DISCUTABLES

Le contrat d'objectifs et de moyens de l'AFD contient trois types d'indicateurs qui visent « l'efficacité » ou la « rentabilité » de l'AFD.

1. Des indicateurs de suivi de projets classiques qui donnent une mesure très approximative de la qualité des projets

Le premier type d'indicateurs porte sur le suivi des projets .

Il s'agit tout d'abord du pourcentage de projets dans les Etats étrangers jugés au moins satisfaisant dans la réalisation de leurs objectifs (indicateur LOLF) qui devrait passer de 75,5 % à 80 % en 2013. Il s'agit là d'un indicateur de suivi très classique dont l'appréciation repose entièrement sur les critères selon lesquels les projets sont jugés satisfaisants.

Vos rapporteurs n'ont pas tous les éléments pour porter une appréciation sur les critères et la procédure retenus. Il apparaît en revanche important que la procédure de notation elle-même fasse l'objet d'une évaluation pour mesurer son indice de réalisme comme c'est le cas par exemple à la Banque mondiale.

Un deuxième indicateur porte sur la durée moyenne d'exécution des projets (prêts et subventions) achevés entre l'octroi du financement et son décaissement total qui devrait être ramené de 5,7 à 5 ans. Il s'agit d'un critère classique dans le domaine de la gestion de projet.

Comme tout indicateur synthétique, il agrège des situations très disparates entre pays et entre types de projets. Il est de notoriété publique que certains petits projets dans des terrains d'Afrique subsaharienne prennent plus de temps et parfois d'énergie que des projets d'une dimension financière beaucoup plus importante dans les pays émergents.

Cet indicateur porte sur des projets achevés en moyenne 5 ans après leur octroi. Il ne présente dés lors, en matière de pilotage de l'AFD, qu'un intérêt limité puisqu'une réduction de la durée moyenne d'exécution des projets n'a pas d'impact dans les trois premières années sur l'indicateur. Autrement dit, l'AFD ne semble pas avoir de levier pour modifier cet indicateur pendant la durée du contrat.

On peut se demander, de ce point de vue, si un suivi du coût de gestion moyen par catégorie de projets en prenant soin de différencier les ratios selon la taille des projets ne pourrait pas utilement compléter ces indicateurs.

2. Des ratios financiers dont l'évolution dépend largement de l'activité passée

Le deuxième type d'indicateurs est constitué par les ratios financiers classiques tels que le coefficient d'exploitation, régulièrement utilisé pour le suivi des établissements bancaires.

Vos rapporteurs ne sont pas étonnés de voir introduire des critères d'efficience financière dans le contrat. La bonne gestion de l'AFD est la garantie de la pérennité de son action.

Ils sont cependant d'avis qu'il ne faut pas ici faire l'économie d'une réflexion sur ce que l'on entend par l'efficacité de l'AFD au regard de ses objectifs.

On ne peut pas ignorer qu'au regard de son objet social, son efficacité devrait se mesurer à l'aune du rapport entre l'impact de ses projets de développement et leurs coûts pour la collectivité. L'efficacité dans cette perspective vise le maximum d'impact pour un minimum de coût, « le retour par euro dépensé », par exemple le nombre d'euros par tonne de CO2 évitée.

A un autre niveau, la valeur ajoutée de l'AFD par rapport à une activité de crédit traditionnel repose sur la qualité et la pertinence du conseil et de l'expertise qui accompagnent les projets et les pays partenaires. Dans les enquêtes de perception des différents bailleurs de fonds sur le terrain, l'AFD est par exemple reconnue pour sa qualité d'écoute et de flexibilité. C'est naturellement là un facteur d'efficacité, qui échappe aux ratios financiers dont ce n'est pas l'objet, qu'on pourrait éventuellement retrouver dans les études d'impact si elles étaient plus systématiques.

Il importe de garder à l'esprit ces préalables. Ils n'excluent pas de suivre des indicateurs purement financiers qui sont susceptibles d'éclairer l'AFD sur son efficience financière, mais ils imposent de ne pas se fier à ces seuls indicateurs sauf à dévoyer l'AFD de sa vocation.

En effet, la maximisation de certains indicateurs financiers pourrait très bien passer par des projets dont la pertinence en matière de développement serait discutable et la rentabilité financière avérée ou conduire l'AFD à se spécialiser dans des projets de très grande taille dans des géographies faciles plutôt qu'en Afrique subsaharienne.

Une spécialisation de l'AFD dans des projets supérieurs à 300 millions d'euros au Mexique, en Colombie, en Tunisie, en Turquie, en Inde et en Chine serait autrement plus rentable financièrement que la stratégie actuelle, puisque les coûts de gestion seraient moindres et le retour sur investissement supérieur. D'où l'importance de définir des objectifs clairs et des critères de concentration géographique des engagements.

Indicateur

réalisé 2009

prévision 2011

cible 2013

20

Baisse du ratio « charges d'exploitation non bancaire » / « encours »

2,0 %

1,45 %

21

Baisse du ratio « charges d'exploitation non bancaires / PNB (hors éléments non récurrents) »

75 %

< 60 %

Source :AFD

Compte tenu de la longueur des cycles de gestion des projets, les deux indicateurs 20 et 21 associent dans le cadre de l'AFD des données qui renvoient à des horizons temporels différents .

L'encours qui mesure les sommes versées non remboursées reflète l'activité passée et résulte de l'accumulation des décaissements liés aux engagements pris des années auparavant, tandis que les charges d'exploitation non bancaires qui mesurent notamment les frais de personnel et les frais généraux reflètent des arbitrages plus récents en matière de recrutement, de politiques salariales et de coût de fonctionnement.

Dans le cas de l'AFD, l'encours s'élève à environ 9 milliards d'euros pour les concours dans les Etats étrangers et à 2,8 milliards dans l'outre-mer pour des charges d'exploitation non bancaires de 245 millions en 2009.

L'indicateur est donc très largement fonction de l'encours qui devrait, compte tenu des octrois récents, poursuivre sa croissance et entraîner mécaniquement une diminution du ratio.

Dans le même esprit, il faut souligner que les décisions stratégiques prises aujourd'hui en matière d'instruction et d'engagement n'auront pour l'essentiel des conséquences que dans plusieurs années, c'est-à-dire au-delà de l'horizon temporel de ce contrat.

De ce fait, l'objectif de 1,45 % en 2013 par rapport à 2 % en 2009 pourrait être le résultat mécanique de cette évolution.

Il reste qu'une maîtrise des charges d'exploitation non bancaires peut naturellement contribuer à l'atteinte de cet objectif dont il est difficile de mesurer à quel point il implique une politique volontariste.

Les mêmes observations peuvent être faites sur l'indicateur 21, le coefficient d'exploitation dont l'évolution est néanmoins plus sensible à la variation de la marge sur intérêts et des provisions.

Une très grande partie du Produit Net Bancaire est le résultat mécanique des exercices précédents, si bien que son évolution pendant le triennum 2010-2013 résultera tout autant de la gestion du triennum précédent que des exercices en cours. Mais des mesures de court terme, comme la réduction des frais généraux et l'augmentation des recettes via la tarification des commissions d'instruction et d'engagement sont de nature à diminuer à court terme le ratio d'exploitation.

Il faut évidemment veiller à ce que des mesures de court terme n'entraînent pas sur le long terme une diminution du Produit Net Bancaire. Même en dehors de cette hypothèse, il n'est pas sûr que l'évolution souhaitée des ratios soit véritablement un critère significatif de la solidité financière de l'institution qui dépend plus largement de la façon dont ces objectifs sont atteints et d'un ensemble de paramètres difficilement synthétisables en deux ratios.

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