B. DES TRAJECTOIRES SALARIALES DIFFÉRENCIÉES ET DES INÉGALITÉS SALARIALES QUI AUGMENTENT

L'analyse des évolutions de salaires est généralement conduite à travers des indicateurs de moyennes qui par construction agrègent des réalités distinctes. Si ceux-ci ne sont pas inutiles, ils ne disent rien sur les situations concrètes des salariés qui ressortent comme de plus en plus dispersées.

Ainsi, alors que les indicateurs sur les salariés moyens invitent à conclure à une convergence du salariat, quand on va au-delà des informations révélées par ces moyennes pour examiner les différentes situations salariales à un niveau plus fin, la période récente confirme le sentiment que le régime salarial, loin d'être homogène, est de plus en plus éclaté.

L'analyse des situations de rémunération salariale concrètes aboutit au constat d'une grande diversité des situations individuelles .

Il existe des inégalités de salaires qui, au-delà des apparences données par certains indicateurs incomplètement fidèles à la réalité, s'élargissent. En haut de l'échelle très peu de salariés perçoivent des rémunérations qui leur permettent de devenir des « super-riches » 7 ( * ) ; en bas, un salariat pauvre se constitue. Dans l'entre-deux, la dynamique salariale est perçue comme d'autant plus faible que les salariés ne considèrent pas toujours (à tort ou à raison) que la part grandissante de leurs rémunérations destinée à couvrir les dépenses sociales n'est en fait qu'une forme différée des salaires.

1. Des pratiques salariales qui s'individualisent
a) Les salaires sont peu négociés

Le nombre des entreprises où il existe une négociation collective des salaires est plutôt faible. En 2007, seules 16 % des entreprises de 10 salariés et plus ont été dans ce cas. Ce nombre est particulièrement bas dans les petites entreprises et dans certains secteurs (construction, services aux particuliers, commerce).

PROPORTION D'ENTREPRISES AYANT OUVERT DES NÉGOCIATIONS
OU DISCUSSIONS SUR LES SALAIRES EN 2007 (EN % D'ENTREPRISES)

Source : enquête « Pratiques salariales ». DARES. 2007.

Il témoigne d' un écart important entre les obligations légales et les pratiques de négociation .

Légalement, toutes les entreprises disposant d'une section syndicale (et où au moins un délégué syndical a été désigné) doivent chaque année ouvrir des négociations collectives portant notamment sur les salaires. Parmi les entreprises de 10 salariés ou plus déclarant qu'un ou plusieurs délégués syndicaux étaient présents en leur sein, seules 60 % ont engagé des négociations ou discussions sur les rémunérations de 2007. Cette performance est très supérieure à celle des entreprises où il n'existe pas de délégués syndicaux mais elle témoigne d'une application moyenne de la loi.

Par ailleurs, la négociation n'aboutit pas toujours .

En 2007, le taux d'aboutissement a été de 60 % (de 69 % dans les entreprises où il y a une ou des délégations syndicales) si bien que le pourcentage d'entreprises couvertes par un accord salarial collectif d'entreprise est de 10 % du total des entreprises de 10 salariés ou plus des secteurs concurrentiels .

Ces piètres résultats doivent être nuancés .

En premier lieu, ces entreprises couvrent 45 % des salariés du champ envisagé (6 millions de salariés au total) et même 62 % quand on envisage les entreprises où des négociations collectives ont été ouvertes.

Ainsi, près de la moitié des salariés des secteurs concurrentiels ont été concernés par des évolutions salariales négociées au plus près des unités de base de la création de valeur.

En second lieu, l'une des raisons de l'absence de négociation collective au niveau de l'entreprise est attribuée à l'existence d'autres niveaux de négociation (la branche) ou de fixation des salaires (le SMIC) 8 ( * ) .

Enfin, les pratiques salariales ne sont pas figées du fait de la seule absence de négociation collective .

Ainsi, en 2007, si seules 10 % des entreprises ont vu se conclure un accord salarial, 86 % des entreprises de 10 salariés ou plus ont accordé des augmentations de salaires , proportion qui grandit avec la taille des entreprises.

RÉPARTITION DES ENTREPRISES SELON LE TYPE D'AUGMENTATIONS
ACCORDÉES EN 2007 (EN % D'ENTREPRISES)

Source : enquête « Pratiques salariales ». DARES. 2007.


* 7 Cette expression de la langue courante recouvre à peu près les catégories « les plus aisés » et « les très aisés » utilisées par l'INSEE.

* 8 Les fixations réglementaires du SMIC n'excluent pourtant pas les négociations collectives. Une partie importante des conventions collectives conclues viennent des nécessités de traduire les décisions réglementaires dans les dispositifs conventionnels.

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