D. LE RÉTABLISSEMENT DES COMPTES DES ENTREPRISES DE LA RESTAURATION ET L'INVESTISSEMENT
1. Pourquoi restaurer la profitabilité des entreprises du secteur ?
Le soutien public à l'investissement dans la restauration se justifie de deux façons.
La première est que l'État impose aux entreprises du secteur des mises aux normes très coûteuses dans le domaine sanitaire ou de l'accès du public notamment pour l'accueil des personnes handicapées. Il est donc légitime qu'il les aide à atteindre les objectifs qu'il leur impose.
La seconde raison est que, même dans un secteur très intensif en travail comme la restauration, le développement de l'emploi implique une accumulation du capital. Il faut donc favoriser les conditions de cette accumulation pour accompagner la croissance de l'emploi. Or, on a vu précédemment que, pour des dizaines de milliers de très petites entreprises du secteur, la profitabilité avait fortement baissé depuis une quinzaine d'années.
La réduction du taux de TVA sert ces objectifs en permettant une augmentation des prix hors taxes : la remise de TVA qui n'est pas répercutée sur les prix à la consommation et les salaires se retrouve en effet mécaniquement dans la hausse des prix hors taxe, puis dans les marges commerciales et, in fine , dans le résultat d'exploitation des entreprises. De la sorte, les entreprises du secteur sont en mesure de constituer une épargne, qui pourra être investie dans un deuxième temps. Par ailleurs, l'amélioration de la situation comptable d'une entreprise lui permet d'accéder plus facilement au crédit, car les banques lui font alors plus facilement confiance 30 ( * ) . C'est donc aussi bien le financement externe qu'interne qui est favorisé.
Source : calculs à partir des indices de chiffres d'affaires en volume et valeur de l'INSEE.
2. Un bilan pour l'heure difficile à établir
Il est très difficile à ce stade de réaliser une évaluation satisfaisante de ce volet du contrat d'avenir. Pour l'instant, l'évolution du taux d'investissement des entreprises ne montre pas une reprise nette de l'accumulation du capital productif. Cela n'a en soi rien de surprenant, car la baisse de la TVA ne peut avoir un impact sur l'investissement qu'avec un délai assez long. Pour monter, financer et finalement lancer un projet d'investissement conséquent, il faut en effet aujourd'hui un à deux ans dans la restauration selon le témoignage fourni par certains des restaurateurs auditionnés. Si la réduction du taux de TVA a un effet positif sur l'accumulation du capital productif, cela se verra donc seulement dans les chiffres de l'investissement des mois ou des années à venir.
Autrement dit, pour l'heure, les entreprises du secteur se trouvent encore dans la phase intermédiaire où la baisse de TVA se traduit avant tout par la restauration des capacités de profit et d'épargne.
Pour mesurer cette formation d'épargne, on ne dispose encore que d'informations indirectes ou partielles, mais tout semble indiquer que la réduction du taux de TVA a bien eu l'effet attendu sur le résultat d'exploitation des entreprises du secteur.
Une étude a été réalisée à la demande de votre rapporteur par la Fédération des centres de gestion agréés. Elle porte sur un échantillon important, de près de 4 900 restaurants, qui regroupe des entreprises de taille plutôt réduite (3 salariés en moyenne). Cette étude montre que la marge brute des restaurants a bondi de 3,8 % entre 2008 et 2009 (après une croissance de seulement 0,8 % entre 2007 et 2008). Quant au résultat courant, c'est-à-dire le bénéfice avant impôt, il a augmenté de 5,4 % entre 2008 et 2009 alors qu'il avait chuté de 4 % entre 2007 et 2008.
LE RÉSULTAT DES ENTREPRISES DE LA RESTAURATION EN 2009
2008/2007 |
2008/2009 |
|
Nombre d'entreprises |
4 667 |
4 889 |
Chiffre d'affaires |
+ 1,1 % |
+ 2,1 |
Marge brute |
+ 0,8 % |
+ 3,9 % |
Valeur ajoutée |
- 0,1 % |
+ 4,7 % |
Charges de personnel |
+ 2,2 % |
+ 2,8 % |
Résultat courant |
- 4,0 % |
+ 5,4 % |
Source : étude réalisée par la Fédération des centres de gestion agréés.
Ce résultat correspond à ce qu'on pouvait attendre : à partir du moment où la baisse de 14 points de TVA est répercutée seulement en partie sur les prix à la consommation et sur les salaires, il est normal que le solde se retrouve dans les bénéfices. Ce qu'il faudra vérifier désormais c'est que ce surcroît de bénéfice ne deviendra pas intégralement du bénéfice distribué, mais qu'il servira à renforcer les fonds propres des entreprises.
Votre rapporteur est assez confiant sur ce point à la condition que les pouvoirs publics assurent au secteur de la restauration une certaine stabilité de ses perspectives en ne remettant pas en cause les règles fiscales tous les ans . Il faut laisser le temps au profit de se transformer en investissement en continuant à mettre la pression sur les restaurateurs et en leur rappelant qu'ils ont pris des engagements qui doivent être tenus.
Au cours de sa réunion du mercredi 13 octobre 2010, votre commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a adopté le rapport de votre groupe de travail, le groupe socialiste s'abstenant. |
* 30 Selon un sondage réalisé par à la demande de l'ordre des experts-comptables auprès des restaurateurs, 35 % des sondés ont affirmé avoir constaté une amélioration de la rentabilité qui a facilité leur accès au crédit.