II. LES ASSOCIATIONS AGRÉÉES SÉCURITÉ CIVILE
• M. Paul Francheterre, Secrétaire
général, Fédération nationale de protection civile,
mission de soutien aux populations sinistrées
Avec mon ami de la Croix-Rouge, nous avons l'habitude de faire la fermeture des colloques. Cela nous fait chaud au coeur qu'il y ait encore un auditoire. Je vais vous faire part d'un retour d'expérience des associations agréées sécurité civile. Qu'est-ce qu'une association agréée de sécurité civile ?
A. LA LOI DE MODERNISATION DE SÉCURITÉ CIVILE
La loi de modernisation de sécurité civile du 13 août 2004 dit que les associations sont agréées pour pouvoir répondre à tout ou partie des quatre types de missions de sécurité civile suivantes : les opérations de secours, les actions de soutien aux populations sinistrées, l'encadrement des bénévoles lors des actions de soutien aux populations, des dispositifs prévisionnels de secours. C'est ce que nous faisons. C'est ce que nous avons fait dans différentes actions. Je vais vous faire part d'un retour d'expérience.
B. IMPACTS DE TSUNAMI
Pour illustrer mes propos, j'ai récupéré quelques diapositives montrant l'impact du tsunami sur la Thaïlande et le Sri Lanka, où nous avions mis deux équipes d'intervention pendant deux mois. Quelques diapositives valent mieux que de longs discours pour montrer ce qui s'est passé réellement : la destruction de l'habitat, la destruction de l'économie locale, la possibilité de récupération de matériaux de première nécessité.
Au niveau du Sri Lanka, nous retrouvons la même chose : destructions, dispersions des moyens économiques, en particulier pour les pêcheurs, destruction des cellules d'accueil hospitalières, destruction de voies de communication et destruction de l'habitation.
C. IMPACTS DE SÉISME
Pour ce qui concerne les séismes, nous sommes intervenus en Indonésie en 2006, où l'on voit des impacts sur des habitats individuels ou collectifs.
A Haïti, en février 2010, vous voyez les impacts sur ces habitations. Qu'avons-nous fait ? J'ai parlé tout à l'heure d'agrément de sécurité civile et vous avez entendu parler de missions de secours. Même si ce n'est pas notre mission première, nous pouvons apporter une contribution, éventuellement avec des chiens de recherche ou des équipes qui sont projetées sur le terrain rapidement.
Je voudrais parler aussi - je reprendrai les propos du colonel Bruder - de la difficulté de transporter des équipes de sapeurs-pompiers sur site. Nous avons mis un point d'honneur à être autonome au niveau des déplacements pour ces opérations.
Quand nous avons fait jouer la simulation de l'exercice en Martinique, j'étais en activité à la Fédération nationale de protection civile et j'ai joué en temps réel, pour renforcer la base de la Martinique, avec des moyens venus de métropole, en recherchant auprès des compagnies aériennes européennes les possibilités de transport de bénévoles et de nos lots de matériels. Nous l'avons joué jusqu'au bout.
Nos actions sont aussi des missions de soins. Celles-ci sont un peu décalées par rapport aux premiers soins d'urgence qui sont prodigués par les services de secours. Vous voyez ici quelques plaies très importantes que l'on découvre une semaine après. Nos équipes médicales, à la fois pour nos bénévoles et pour médicaliser nos interventions, peuvent participer à ces missions.
Nous sommes surtout spécialisés dans l'aide aux populations. Le colonel Cova disait tout à l'heure que dans les actions réalisées il y a la recherche et le stockage de cadavres. C'est ce que nous avons fait à la demande des autorités en Thaïlande, en particulier : la récupération de ces cadavres, la mise en sac, et le conditionnement dans des containers.
Dans les actions à réaliser, il y a le regroupement des sinistrés. Un hébergement sous tente se fait quelquefois de façon désorganisée. On le voit sur ces diapositives. Elles sont parfois un petit plus organisées, comme le montre la photo sur votre gauche en bas. Nous avons remarqué très rapidement que les sinistrés, dès qu'ils le peuvent, dès qu'ils ont un moyen et la possibilité de revenir près de leurs biens, reviennent occuper leur territoire pour ne pas en être dépossédés. Il y aura quelque chose à faire, je vous en parlerai tout à l'heure.
On peut les aider à mettre en place un hébergement provisoire, chose que nous avons faite au Sri Lanka avec des techniciens. Les associations ont l'habitude de dire qu'elles ne sont pas que des secouristes. Le secourisme est une de nos nombreuses compétences. Nous avons des charpentiers, nous avons différentes professions qui mettent leurs connaissances, leurs compétences au service des sinistrés.
Là, nous avons construit, chiffré, acquis des matériels et préparé des plans pour la suite, par exemple au Sri Lanka, en Thaïlande. Voici un hébergement provisoire en Haïti qui a été appelé depuis le chalet des Français et qui a permis d'héberger 70 orphelins à Notre-Dame-de-la-Nativité.
Nous avons une mission à accomplir par rapport aux gens qui ont tout perdu, qui veulent rentrer rapidement chez eux quand il leur reste un toit. C'est ce qu'on appelle, dans un document de soutien aux populations, l'aide à l'habitabilité. Il s'agit de dégager les habitations, de récupérer tout ce qui est récupérable pour pouvoir s'installer. Il s'agit aussi de récupérer, avec des moyens techniques, quelques matériels pour pouvoir assurer une situation acceptable.
Ensuite, vous l'avez fait remarquer aussi, il y a des actions à réaliser : un soutien psychosociologique par une présence rassurante. Le colonel Cova le disait. D'expérience, nous avons mis en place depuis longtemps des formations pour nos bénévoles intervenants.
Nous avons relevé les moyens de sécurité civile sapeurs-pompiers qui rentraient de Macédoine, fin mai 2009 dans le camp de Stenkovac en Macédoine. Nous les avons relevés pendant cinq semaines, jusqu'au moment où les forces françaises de l'Otan sont rentrées au Kosovo. Je dois vous dire que ces missions étaient particulièrement éprouvantes pour les sapeurs-pompiers, comme pour les intervenants.
Nous avons mis en place le programme fait par le général Louis Crocq, psychiatre bien connu. Nous avons passé une convention avec la cellule d'urgence médico-psychologique nationale et des déclinaisons au niveau départemental.
Cette présence se veut, en plus d'être technique, rassurante. Je voudrais vous montrer deux images : une première image d'impact de maison éclatée. Est-ce un tremblement de terre ? Une deuxième : est-ce un tsunami ? Non, ce sont tout simplement les impacts des inondations du 15 juin 2010 dans le Var.
Toute l'expérience que nous avons acquise dans différentes missions est mise au service de nos concitoyens. Dans la loi de sécurité civile il est dit : « le citoyen au coeur de la sécurité civile ». Nous avons des femmes et des hommes bénévoles citoyens qui s'engagent pour aider les autres. Je représente, en tant qu'élu, 30 000 bénévoles de la protection civile. Je ne dois pas les décevoir.
Quelquefois, quand ils ne sont pas engagés, ils m'en veulent en me disant : « Nous sommes des Kleenex. On nous prend quand on a besoin et après on nous met de côté ». La plus belle récompense pour eux est l'engagement qui leur est donné par les différents services.
Je parlerai des inondations où dans la matinée du 16, le SDIS et le SAMU 83 m'ont demandé de mettre des véhicules d'intervention de premiers secours qui, normalement, n'ont pas d'existence légale, pour aider les sapeurs-pompiers qui étaient aux taquets. Nous avons fait des transferts de maison de retraite en grande noria, quelquefois à 100 kilomètres de leur base, sur des routes particulièrement difficiles.
Le colonel des sapeurs-pompiers me disait : « Vous nous avez, non pas tiré une épine du pied, mais un gros tronc d'arbre ». Je dois vous dire que ces bénévoles sont à votre disposition. Le colonel Bruder a parlé de la permanence au COGIC. Vos services, peut-être est-ce un oubli, n'ont pas mentionné que nous avons assuré, avec nos collègues de la Croix-Rouge, des permanences au COGIC, en particulier pour la pandémie grippale, lorsque le Premier Ministre a dit que la protection civile et la Croix-Rouge seraient engagées. Dès le lendemain, par rapport à la convention que nous avons, pour armer une permanence au COGIC, nous avons mis du personnel qui est même arrivé un petit peu trop tôt. Cela s'est stabilisé par la suite.
Il faut apprendre à se connaître. Le cloisonnement n'est pas de mauvaise volonté. Le bénévolat a changé. Le bénévolat n'est pas de l'amateurisme. Il est compétent. Il ne demande qu'une chose : pouvoir travailler. S'il vous plaît, mettez quelque part dans vos réflexions la possibilité d'inclure ces bénévoles.
Monsieur le sénateur, je dois vous dire que dans votre département de l'Aude, le chef de mission à Haïti était le président de l'Association départementale de protection civile de l'Aude. Si vous le souhaitez, je l'accompagnerai pour vous rencontrer pour qu'il puisse témoigner.
On parlait de plan ORSEC, maintenant cela s'appelle l'Organisation de la réponse de sécurité civile. Les missions à assurer par les associations de sécurité civile sont principalement le soutien des populations : l'accueil, le soutien médico-psychologique, l'hébergement, le ravitaillement, l'assistance matérielle, l'aide à l'habitabilité.
Je vais vous présenter quelques images. Voilà ce qui se passe dans le Var. Voilà l'aide à l'habitabilité, voila une maison, des entreprises dégagées. Voilà une action de soutien psychosociologique auprès des personnes dans la difficulté, les adultes comme les enfants. Voilà aussi l'aide aux personnes âgées et le nettoyage de leurs habitations, de façon à ce qu'ils retrouvent un semblant de vie normale. Voilà les actions des grandes associations de sécurité civile. Monsieur le président, les bénévoles de la protection civile vous remercient de votre attention.
M. Eric Bruder
Je n'ai pas oublié les associations, évidemment. Chaque fois que les personnes viennent visiter le COGIC, j'insiste sur le fait qu'en plus des 260 000 sapeurs-pompiers, l'équivalent, soit 260 000 personnes dans les associations agréées de la sécurité civile sont à nos côtés. Je savais très bien que vous alliez l'aborder dans la dernière table ronde. C'est la raison pour laquelle je n'en ai pas parlé. Effectivement, sur la grippe, les renforts nationaux ont été engagés en assistance auprès des préfectures. Les associations agréées étaient à nos côtés. C'est une évidence.
Il faut distinguer la partie engagement sur le territoire national, où on a un rôle important à jouer pour vous engager, et les événements qui se passent à l'étranger, où le ministère des Affaires Etrangères est le gestionnaire de crise et engage au titre de ses prérogatives.
M. Paul Francheterre
Nous sommes autonomes et nous mettons nos moyens à disposition. Nous sommes organisés, disciplinés, tant pour les exercices que pour les interventions.
M. Roland Courteau
Le bénévolat est un acte authentique de solidarité.
M. Paul Francheterre
Monsieur le sénateur, je vais partir rapidement, car demain matin j'ai rendez-vous dans la ville du Muy. Nous avons fermé le site, mais elle m'a demandé de le remettre en état. C'est vraiment un besoin m'a-t-elle dit. Les gens, les personnes âgées disent : « Vous ne pouvez pas nous mettre dans un lotissement. Les gens de petits moyens, sont vraiment débordés par la situation. Mettez-nous les gens de la protection civile. »
Certains ont dit, par rapport à ma stature que vous avez sans doute remarqué : « Il y avait même le Père Noël. » Certains m'appellent le Père Noël. Au niveau contact et psychologie, c'est une bonne chose. Nous sommes là pour aider, soutenir la population dans ces moments difficiles. Ce sont vraiment des situations dramatiques.
Ce qui a déclenché mon envie d'aider les personnes sinistrées vient du fait que j'ai eu quelques responsabilités, j'ai été sapeur-pompier. J'ai fait une campagne de 1970 sur Mons et Tanneron. J'ai fait ensuite des opérations de secours. Dans une opération de secours, nous avions réussi à sauver une personne âgée que nous avons laissée ensuite, envisageant de nous occuper d'elle plus tard. Elle est rentrée chez elle deux jours après et s'est pendue. Ceci a été le déclencheur. On ne peut pas sauver des gens, les laisser sans rien, et les abandonner. Les associations de sécurité civile ont un rôle à jouer.
M. Roland Courteau
Quelqu'un a dit : on mesure le degré d'humanité des hommes et des femmes au chemin qu'ils et elles sont capables de parcourir pour aller vers les autres. Vous venez de nous apporter la démonstration de ce que je viens de dire. Je passe la parole à Patrice Dallem.