M. Jacques Auxiette, Président du conseil régional des Pays de la Loire, M. Patrick Jouin, Directeur général des services du conseil régional des Pays de la Loire

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En introduction, M. Jacques Auxiette, président du conseil régional des Pays de la Loire a déclaré que des dispositifs de prévention existaient pour anticiper la survenance de catastrophes naturelles mais que rien n'était dit sur la manière de réagir lorsque la catastrophe survenait. Il a estimé qu'il était impossible de prévoir tous les risques mais qu'en revanche il convenait de travailler à la manière de les gérer. Il a pris l'exemple d'un barrage à La Roche-sur-Yon, de sept mètres de hauteur, qu'il avait fait inspecter pour voir s'il était suffisamment solide pour ne pas rompre et noyer les maisons construites en aval, mais surtout en raison duquel il avait mis en place un dispositif d'alerte phonique automatique pour avertir les populations en cas de risques d'inondation. Or, lors de la tempête Xynthia, par exemple dans la commune de La Faute-sur-Mer, les habitants ont reçu l'information selon laquelle il y avait une alerte rouge sans indication des mesures à prendre. Ces mesures ne peuvent être du ressort de la décision individuelle.

M. Bruno Retailleau, président, a confirmé, suite notamment au récent déplacement de la mission en Gironde, que les maires avaient reçu des alertes mais sans indication des mesures à prendre et surtout, que ces alertes se multipliaient au cours de l'année, conduisant au risque de ne plus voir les habitants réagir. Aux Pays-Bas, l'alerte est donnée par téléphone, avec une explication de personne à personne, et non pas de matière impersonnelle par courriel ou sms, ce qui change considérablement la portée du message.

M. Jacques Auxiette a ensuite rappelé que la politique d'urbanisme ne relevait pas de la compétence des régions même si elle avait évidemment une place importante dans la prévention des risques. Il a ensuite indiqué que la région Pays de la Loire avait pris des mesures financières d'urgence suite au sinistre lors d'une session extraordinaire le 3 mars 2010, pour un montant de 20 millions d'euros. La région Poitou-Charentes avait pris des mesures analogues. La région agit dans ses domaines de compétences à savoir l'aménagement du territoire, les relations avec les acteurs économiques et les mesures environnementales. La région avait exprimé sa solidarité avec les communes sinistrées en aidant au colmatage des digues par des avances de fonds, les moyens financiers faisant défaut.

M. Jacques Auxiette a cité le cas d'un maire responsable de l'entretien de 21 kilomètres de digues avec un budget annuel de 70.000 euros. Il a indiqué que la région avait conçu son plan d'aide aux acteurs économiques comme des avances remboursables, les sinistrés attendant désormais les décisions des assurances. Les agriculteurs, ostréiculteurs et certains autres agents économiques restent très préoccupés de l'équilibre financier de leur exploitation dans la mesure où ils n'ont pour le moment rien perçu en dehors de ces avances qu'ils devront rembourser. Il semble qu'il existe une forte inertie nationale sur ce point.

M. Bruno Retailleau, président, a indiqué que le Ministre de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Pêche, avait été interpellé sur ce point, notamment lors de la discussion au Sénat du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, puis il s'était rendu sur le terrain en Vendée et en Charente Maritime. Il a confirmé que la situation de nombreux agriculteurs était difficile.

M. Jacques Auxiette a relevé que si la mobilisation des collectivités territoriales et des services déconcentrés de l'Etat dans les départements touchés par la tempête Xynthia avait été unanimement saluée, la réaction au niveau national ne semblait pas à la hauteur des enjeux. Il a fait valoir que lors de la discussion des contrats de plan Etat Région, la ligne budgétaire consacrée à la défense contre la mer avait été supprimée sur la demande de l'Etat, et remplacée par une convention pour trois ans avec la région Pays de la Loire, avec un taux de cofinancement réduit.

M. Bruno Retailleau, président, a indiqué qu'il avait interrogé le Ministre du Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l'Etat sur ce point, rappelant que le taux d'intervention de l'Etat était effectivement passé de 50 % à 25 %. Il a indiqué qu'il avait lui-même obtenu un simple accord oral pour le cofinancement des ouvrages de protection contre la mer en Vendée, et cela quelques jours avant la tempête Xynthia.

M. Jacques Auxiette a indiqué que la région Pays de la Loire s'était demandée comment venir en aide aux collectivités locales et avait lancé une consultation auprès des élus, notamment les maires des communes de la Faute-sur-Mer, l'Aiguillon-sur-Mer et la Tranche-sur-Mer. Il est apparu qu'une aide était souhaitée en matière d'élaboration des documents d'urbanisme. Il faut en effet affirmer la responsabilité des élus locaux en la matière, mais sous le contrôle de l'Etat. Il faut également préserver l'intégrité du territoire en protégeant le trait de côte et en permettant des activités économiques notamment de pêche, de voile, de tourisme, d'ostréiculture et de conchyliculture. L'intercommunalité doit permettre des progrès dans le développement de ces activités indispensables à la vie du littoral. Pour ce qui concerne les digues, M. Jacques Auxiette a indiqué que la mission de l'Etat n'avait pas consulté la région Pays de la Loire, mais qu'en tout état de cause les régions ne disposaient d'aucune marge de manoeuvre pour financer des opérations qui ne ressortaient pas de leur compétence.

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, qui évoquait le cofinancement des régions pour les précédentes opérations sur les digues, M. Jacques Auxiette a répondu que la perte de recettes fiscales par les régions, qui depuis la suppression de la taxe professionnelle ne disposent plus que de bases fiscales réduites, avec la taxe sur les cartes grises et une partie des droits de mutation, empêchait d'envisager toute poursuite de ces dispositions. Il a ajouté que dans la situation actuelle, en l'absence de visibilité sur le budget 2011, les régions étaient incapables de prendre des engagements supplémentaires à ceux déjà pris.

Répondant à M. Bruno Retailleau, président, sur la façon dont le plan digues pourrait être conçu, M. Jacques Auxiette a fait valoir que le principe devait être celui de la responsabilité de l'Etat, détenant le pouvoir régalien. Les règles en matière de construction et d'entretien des digues devaient donc être fixées au niveau national mais déclinées au plan local. La question de la responsabilité de l'entretien des digues devait être clarifiée. Les collectivités territoriales devaient être associées au plan digues et les ressources devaient être pérennes et bien identifiées.

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, sur l'utilisation des crédits du Fonds Européen de Développement Régional (FEDER), M. Patrick Jouin, directeur général des services de la région Pays de la Loire, a répondu que, tout d'abord, les régions avaient l'espoir que le Fonds de Solidarité de l'Union européenne (FSUE) intervienne, la gestion des fonds devant ensuite être assumée par les deux Préfets de région et pas déléguée à un seul d'entre eux. Il a rappelé que le Président de la République avait annoncé un cofinancement des digues par l'Etat à hauteur de 50 % puis qu'un taux de 40 % avait été évoqué avec l'intervention du FEDER en complément. Il a souhaité que l'intervention du fonds européen vienne en complément et non en substitution de la contribution de l'Etat. Pour l'après-crise, la région était déjà en train de discuter de l'affectation des crédits du FEDER.

M. Jacques Auxiette a ajouté que la région Pays de la Loire était d'accord pour réorienter une partie des crédits de FEDER vers le renforcement des digues. La révision à mi-parcours des crédits du FEDER doit intervenir à l'automne et un premier document doit être transmis aux Régions en juillet dans cette perspective. Dans le même temps sont révisés les contrats de plan Etat-Région. Un abondement de ces crédits par le budget de l'Etat serait nécessaire, comme cela s'est fait en 1999, après la tempête.

M. Bruno Retailleau, président, a indiqué que même si les régions n'avaient pas de compétences d'urbanisme, elles avaient une compétence générale en matière d'aménagement du territoire et il a demandé quelle était leur doctrine en matière d'aménagement des zones littorales où il semblait que l'on avait parfois construit de manière anarchique.

M. Jacques Auxiette a répondu qu'effectivement des problèmes se posaient, qui nécessitaient d'appliquer strictement les règles d'urbanisme et de contrôler les permis de construire. Toutefois, il a fait valoir que la création de « zones noires » avait généré de l'angoisse et du désespoir inutilement et qu'il y avait d'autres moyens de répondre à ce qui était, tout de même, un phénomène climatique exceptionnel. Il a évoqué des solutions techniques comme on en trouve en bord de Loire dans les zones inondables. Il a déclaré que le développement économique des communes littorales ne devait pas être arrêté car il fallait donner des perspectives de développement aux communes concernées. Il a ajouté que l'urbanisation posait souvent des problèmes en termes d'environnement et de paysage, en plus des questions de sécurité. Enfin, il a plaidé pour la création d'un établissement public foncier départemental ou régional qui serait un outil de développement dans la zone littorale.

M. Bruno Retailleau a précisé que le Préfet du département de la Gironde avait également l'idée de créer un établissement public foncier national. Il a ensuite demandé quelles pouvaient être les mesures pour développer en France une véritable culture du risque.

M. Jacques Auxiette a répondu qu'il existait aujourd'hui un schéma régional d'aménagement et de développement durable des territoires et qu'il fallait rendre ce document prescriptif, alors qu'il est aujourd'hui simplement un outil de communication. Le volet relatif aux risques est par ailleurs insuffisant dans ce document.

M. Bruno Retailleau, président, a déploré un abandon de la politique du littoral. Il s'est demandé s'il ne fallait pas, comme cela existe pour la montagne, intégrer plus systématiquement dans les lois nationales un volet consacré aux spécificités du littoral. Il a ajouté qu'on ne réagissait aujourd'hui qu'après des catastrophes.

M. Jacques Auxiette a répondu que, dans une région comme les Pays de la Loire, disposant de 450 kilomètres de côtes, il fallait mettre en valeur la notion d'économie maritime. Il faut une réflexion nationale sur cette notion, qui inclut également le développement durable et l'écosystème. Enfin, il a souhaité que chacun fasse preuve d'humilité face aux catastrophes naturelles : tous les risques ne peuvent être prévus, mais il faut s'y préparer.

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