M. Loïc Prieur, Avocat spécialisé en droit de l'urbanisme et loi du littoral

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Enfin, la mission a procédé à l'audition de M. Loïc Prieur, avocat spécialisé en droit de l'urbanisme et du littoral.

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, qui l'interrogeait sur les causes de la catastrophe créée par la tempête Xynthia, M. Loïc Prieur a estimé qu'à l'évidence, ce drame mettait en cause le droit de l'urbanisme et en particulier de l'urbanisme sur le littoral. Il a cependant ajouté que la création de dispositifs juridiques nouveaux dans le code de l'urbanisme ou dans le code de l'environnement ne lui semblait pas nécessaire car de nombreux instruments juridiques étaient disponibles pour faire face à de telles situations. L'instrument de droit commun, l'ex-plan d'occupation des sols (POS) devenu plan local d'urbanisme (PLU) permet, dès lors que le risque est avéré, de rendre des terrains inconstructibles. Si un PLU ne le prévoit pas dans de telles circonstances, il peut être annulé par le juge administratif pour erreur manifeste d'appréciation.

M. Bruno Retailleau, président, a demandé s'il ne fallait pas intégrer les plans de prévention des risques naturels (PPRN) aux plans locaux d'urbanisme (PLU) plutôt que de simplement les annexer.

M. Loïc Prieur a répondu qu'il conviendrait plutôt de hiérarchiser les PPRN et les PLU, afin de subordonner ces derniers aux prescriptions des premiers. Il a convenu que, en cas de modification d'un PPRN, il serait logique de prévoir une modification systématique du PLU.

En réponse à M. Alain Anziani, rapporteur, il a confirmé que les PLU avaient déjà vocation à intégrer les risques et qu'il était possible de rendre des terrains inconstructibles en application des PPRN. Il a indiqué que la partie réglementaire des PLU, directement opposable, permettait une gradation des contraintes en fonction des risques, depuis des prescriptions de construction spécifiques jusqu'à l'inconstructibilité. Ainsi, dans certaines zones touchées par la submersion marine, on aurait pu imposer des constructions à deux étages plutôt que d'imposer un seul niveau d'habitation pour des raisons esthétiques.

M. Bruno Retailleau, président, a demandé s'il fallait lier ces plans et les plans communaux de sauvegarde (PCS).

M. Loïc Prieur a répondu que l'on avait déjà rendu le droit de l'urbanisme complexe, avec de nombreuses références à prendre en compte, si bien qu'il n'était pas certain de l'opportunité de lier ces documents.

M. Bruno Retailleau, président, a demandé si la séparation entre, d'une part, les prescriptions du code de l'environnement, notamment issues de la loi du 3 janvier 1986 dite « loi Littoral » et, d'autre part, celles du code de l'urbanisme, ne créait pas des difficultés juridiques.

M. Loïc Prieur a confirmé que les sources juridiques étaient éclatées mais que cela ne posait pas de problème dès lors qu'elles étaient coordonnées. Il a ajouté que la loi Littoral de 1986 ne contenait pas d'objectifs en termes de sécurité publique, cette notion n'apparaissant que de manière indirecte dans la prise en compte de l'érosion des côtes, qui permet d'étendre la bande de 100 mètres inconstructibles sur le rivage. Pour deux lotissements durement frappés par la tempête Xynthia dans la commune de La Faute-sur-Mer (Les Doris et Les Voiliers), les espaces d'urbanisation concernés n'étaient pas inconstructibles en application de la loi Littoral.

M. Bruno Retailleau, président, a demandé si, dès lors, la loi Littoral ne devait pas prendre en compte des objectifs de sécurité.

M. Loïc Prieur a répondu qu'il avait étudié ce thème avec l'association France Nature Environnement et qu'il envisageait deux pistes de réflexion : d'une part, la prise en compte des risques de submersion marine parmi les objectifs de la loi Littoral avec la possibilité d'étendre la bande des 100 mètres inconstructibles dans ce cas et non plus pour de seuls motifs d'érosion de la côte ; d'autre part, l'extension des espaces naturels remarquables et inconstructibles pour des motifs liés aux risques de submersion marine et non plus pour des seuls motifs paysagers. Il a toutefois ajouté que l'on disposait déjà, dans le code de l'urbanisme, des instruments juridiques nécessaires pour rendre des terrains inconstructibles.

M. Bruno Retailleau, président, a fait observer que, malgré ces instruments, nombre de permis de construire avaient été délivrés sur des terrains durement touchés par la tempête, apparemment en toute légalité.

M. Loïc Prieur a reconnu que l'Etat, chargé la plupart du temps de l'instruction des permis de construire, et surtout responsable du contrôle de légalité, n'avait pas joué pleinement son rôle. L'Etat doit de plus donner son accord pour les constructions proches du rivage. L'article R. 111-2 du code de l'urbanisme permet à l'Etat de déférer un permis de construire au tribunal administratif pour des motifs de sécurité publique.

En réponse à M. Alain Anziani, rapporteur, il a confirmé que l'on enregistrait seulement un taux de 0,024 % de déférés préfectoraux et que chaque agent chargé du contrôle de légalité devait traiter 8.000 dossiers par an. Il s'agit donc d'abord d'une question de moyens et ensuite de volonté politique.

Répondant à M. Bruno Retailleau, président, qui a suggéré que le contrôle de légalité soit rendu systématique pour les constructions dans les zones à risques, M. Loïc Prieur a fait valoir que l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme permettait déjà aux préfets d'agir.

M. Bruno Retailleau, président, a souligné qu'il n'existait pas de réelle culture du risque en France et que l'Etat se montrait parfois plus tatillon pour la protection des espèces animales et végétales que pour des motifs de sécurité publique.

M. Loïc Prieur a indiqué que, outre le motif de déféré prévu à l'article R. 111 2 du code de l'urbanisme, un déféré était possible en application de la loi Littoral pour des motifs liés à l'absence de continuité d'une agglomération ou de villages. Mais l'expérience montrait, par exemple à Belle Ile en Mer, que les déférés touchaient des questions de paysages et non de risques.

M. Bruno Retailleau, président, a demandé quelles mesures pourraient être prises pour être plus efficace en matière de prévention des risques.

M. Loïc Prieur a répondu qu'il était difficile à un juriste de dire comment mieux inculquer une culture du risque en France. Il s'est dit cependant surpris par le manque de connaissances juridiques tant des élus dans les petites communes que des agents de l'Etat. Il a souligné la nécessité de renforcer la formation sur le droit de l'urbanisme et du littoral mais aussi sur les aspects scientifiques et techniques.

M. Alain Anziani, rapporteur, a demandé s'il ne faudrait pas clarifier et mieux hiérarchiser les dispositions du code de l'urbanisme.

M. Loïc Prieur a souscrit à cette analyse, mais il a indiqué que cela serait compliqué car le code de l'urbanisme était devenu l'instrument juridique de toutes les politiques publiques ayant une incidence sur le sol. Il a ajouté qu'une meilleure articulation des normes applicables pourrait être recherchée.

M. Bruno Retailleau, président, a souhaité savoir s'il ne serait pas possible de s'inspirer des dispositifs relatifs aux établissements recevant du public qui fonctionnaient bien.

M. Loïc Prieur a estimé qu'en s'inspirant de ces dispositifs, on pourrait mieux associer à la confection des PLU les organismes ayant un savoir sur le risque.

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