II. LES PISTES POUR L'AVENIR
A. LES BESOINS DE FINANCEMENT DE FRANCE TÉLÉVISIONS
Dans la logique de leurs analyses précédentes, vos rapporteurs soulignent que, s'agissant de la période 2009-2012, le choix du plan d'affaire de consacrer l'ensemble des économies réalisées par France Télévisions (synergies, baisse des coûts de diffusion) à la modernisation du groupe (média global, investissement dans la création, renégociation des accords collectifs) est pertinente et doit être soutenue.
La suppression de la publicité doit donc faire l'objet d'un financement spécifique et intégral.
L'évolution du modèle de financement des missions de service public de France Télévisions conduit à anticiper une forte augmentation des ressources publiques allouées au groupe, qui passeront de 1 945,3 millions d'euros en 2008 à 2 732 millions d'euros en 2012.
PLAN D'AFFAIRES DE FRANCE TÉLÉVISIONS 2009-2012
(en millions d'euros)
Réalisé 2007 |
Réalisé 2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
|
Ressource publique |
1 880 |
1 945 |
2 447 |
2 507 |
2 568 |
2 732 |
Recettes publicitaires et parrainage |
788 |
591 |
260 |
229 |
201 |
115 |
Source : direction générale des médias et des industries culturelles
Avec la suppression de la publicité en soirée en 2009, la part des ressources publiques de l'activité diffuseur est passée ainsi de 70 % en 2007 à 90,2 % en 2009 des ressources brutes . A l'extinction de l'analogique, prévue en 2012, et avec la suppression de la publicité en journée, la part des ressources publiques devrait représenter 95,3 % des ressources brutes du groupe .
Si l'évolution de la contribution à l'audiovisuel public d'une part, et la modification de sa clé de répartition entre les différents bénéficiaires 84 ( * ) d'autre part, seront des sources de cette augmentation de financement, la dotation budgétaire devrait passer d'un niveau d'environ 450 millions d'euros à environ 685 millions d'euros pour compenser la suppression totale de la publicité.
B. LES PRINCIPES INTANGIBLES DE VOS RAPPORTEURS
Vos rapporteurs se sont appuyés sur les principes intangibles suivants pour élaborer leurs scénarios de financement :
- le périmètre de France Télévisions ne doit pas évoluer à court terme . En effet, le bouquet de chaînes est pertinent (voir supra ) et l'audiovisuel public doit savoir s'adresser à toutes les catégories de la population. Ce panel de chaines est en outre similaire à celui proposé par les groupes audiovisuels publics en Europe ;
- la réforme de France Télévisions ne doit pas avoir d'impact négatif sur le budget de l'État . En ces temps de crise, il apparaît nécessaire de concevoir un financement responsable de la suppression de la publicité , au risque de remettre en cause la légitimité de la réforme. Les propositions qu'ils émettent s'inscrivent ainsi dans un cadre budgétaire constant ;
- la question du maintien de la publicité en journée ne doit pas constituer un tabou même si l'objectif reste sa suppression, qui aurait un intérêt majeur du point de vue culturel et en termes de spécificité du secteur public ;
- les économies réalisées par France Télévisions sont nécessaires mais seront, au moins à moyen terme, consacrées au développement du groupe (investissement dans le média global, coût de la renégociation des accords collectifs, investissement dans la création) . La suppression de la publicité doit donc faire l'objet, comme l'a préconisé le Conseil constitutionnel d'une compensation intégrale 85 ( * ) ;
- le financement doit être solide juridiquement et économiquement et la contribution à l'audiovisuel public doit en être le pilier ;
- une solution doit être définie rapidement ne serait-ce que pour l'avenir de la régie.
En effet, le conseil d'administration de France Télévisions a, dans sa séance du 13 avril 2010, suspendu les négociations que la direction avait entamées afin de vendre la régie, jusqu'à ce que « l'incertitude substantielle relative à la suppression de la publicité en journée soit levée ».
La suppression totale de la publicité sur France Télévisions imposerait de mettre en oeuvre une stratégie à la fois sociale et industrielle pour la régie , composée de plus 250 salariés.
Certes, France Télévisions conserverait des recettes publicitaires, mais relativement faibles (autour de 115 millions d'euros) et peu dynamiques, et son format actuel devrait forcément être revu, ce qui imposerait :
- soit de lancer un plan social ;
- soit d'ouvrir ses activités vers de nouveaux marchés. Cette dernière solution serait logiquement facilitée par une cession de parts (dont le pourcentage resterait à définir) à un opérateur publicitaire.
En tout état de cause, le point de non-retour pour gérer dans de bonnes conditions l'avenir de la régie semblerait se situer à la fin du premier trimestre 2011 , les écrans se vendant en effet environ six mois à l'avance à France Télévisions.
Vos rapporteurs considèrent à cet égard que la « clause de revoyure » prévue par l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 ne doit pas constituer la pierre angulaire de notre calendrier.
On peut en outre remarquer que le rapport demandé est relatif au marché de la publicité et aux conséquences de la suppression partielle de la publicité sur l'ensemble des chaînes et non sur le financement de France Télévisions. En fait, c'est le comité de suivi créé à l'article 74 de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 précitée qui aurait dû prendre en charge ces aspects.
Le fait qu'il n'ait pas été mis en place ne peut qu'inciter vos rapporteurs à insister sur l'importance de définir rapidement une ligne de conduite en faveur d'un financement responsable .
* 84 La part de CAP de l'audiovisuel extérieur est la principale variable d'ajustement envisagé dans la mesure où l'AEF dispose d'un financement mixte CAP/dotation budgétaire. Toutefois pour le budget de l'État, utiliser la CAP pour financer France Télévisions ou l'AEF ne change rien.
* 85 Par ailleurs, la Cour des comptes suggère même qu'il sera très difficile d'équilibrer le budget de France Télévisions dans les prochaines années, en dépit des économies réalisées, notamment en termes de coût de diffusion.