G. RÉSOLUTION DES PROBLÈMES DE PROPRIÉTÉ DES RÉFUGIÉS ET DES PERSONNES DÉPLACÉES
La multiplication du nombre de réfugiés sur le sol européen lors des vingt dernières années tient à des raisons diverses : conflits, actions terroristes, catastrophes naturelles. Lorsque le retour peut être effectif, ces personnes sont confrontées à une impossibilité de recouvrer leur ancienne situation patrimoniale : leur propriété a été dans la plupart des cas détruite, occupée ou confisquée, fragilisant in fine toute velléité de retour.
La restitution de la propriété est déclinée au travers d'une série de droits présents au sein de la Convention européenne des droits de l'Homme : droit à la propriété, droit à posséder un foyer.
La résolution telle qu'adoptée par l'Assemblée vise principalement à la mise en place de mécanismes de résolution de conflits de propriétés, en utilisant un certain nombre d'outils existants et notamment les principes de Pinheiro, à savoir vingt-trois principes définis dans le cadre des Nations unies. Comme l'a souligné M. Wolfgang Petritsch, ancien Haut représentant pour la Bosnie-Herzégovine, appelé à intervenir à l'occasion du débat, ce type de problématiques suppose également l'adoption dans les Etats concernés d'une législation et une administration adéquate en matière de logement et de propriété. Il convient parallèlement de créer au plan local un environnement non discriminatoire, avec un accès égal de tous aux services médico-sociaux, à l'éducation et au monde du travail.
H. LE FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS DÉMOCRATIQUES EN ALBANIE
L'intervention de la commission de suivi au sujet de l'Albanie se justifie par la crise politique qui paralyse le pays depuis les élections législatives de juin dernier. L'opposition conduite par le Parti socialiste boycotte le Parlement et conteste la légitimité du gouvernement. Or les marges de manoeuvres de l'exécutif demeurent limitées puisqu'il ne dispose pas de la majorité des 3/5 e requise pour faire aboutir les réformes devant le Parlement. Ce blocage est d'autant plus problématique qu'il paralyse le rapprochement de l'Albanie avec l'Union européenne.
Comme l'a souligné M. Yves Pozzo di Borgo (Paris - UC) , il convient de rappeler l'Albanie à ses responsabilités :
« Notre commission de suivi, à l'initiative de nos collègues MM. Laakso et Wilshire, a souhaité envoyer un avertissement à l'Albanie. Je partage son analyse et la sévérité de ses projets de résolution et de recommandation, même si je suis évidemment favorable à ce que notre Organisation apporte tout son soutien aux dirigeants albanais pour sortir de la crise politique actuelle.
L'Albanie et le peuple albanais ont beaucoup souffert, y compris en termes d'image, de l'isolement dans lequel des dirigeants atteints de paranoïa les ont fait vivre pendant des décennies, rompant leurs relations avec leurs différents alliés, successivement la Yougoslavie, l'Union soviétique puis la Chine, et hérissant les magnifiques paysages albanais de dizaines de milliers de petits fortins destinés à repousser une hypothétique invasion étrangère. L'histoire de l'Albanie ne saurait se résumer à la dictature d'Enver Hoxha, bien que celle-ci ait profondément marqué les mentalités.
Même si sa transition démocratique a été pénible, et si le pays a frôlé la guerre civile à l'époque de l'écroulement des « pyramides », l'Albanie a profondément changé. Grâce à de nombreuses réformes, sa transformation est radicale dans tous les domaines et le dynamisme de la société albanaise est unanimement salué.
Et l'on voudrait gâcher ces efforts ? Il me semble que la crise dans laquelle l'Albanie est plongée depuis le mois de septembre relève de moeurs politiques d'un autre âge.
Quels sont les enjeux ? Ni plus ni moins, il s'agit de sauver la crédibilité de l'Albanie sur la scène internationale, et d'abord européenne. En effet, comme le relèvent nos rapporteurs, le boycott du Parlement par le Parti socialiste, qui a perdu de peu les élections législatives du 28 juin 2009, a créé une situation d'impasse politique qui paralyse le fonctionnement des institutions démocratiques, bloque le vote d'indispensables réformes et porte atteinte à l'image de l'Albanie. Il n'est pas normal que dans l'Europe de 2010, le processus électoral soit aussi tendu et la vie politique marquée par un tel niveau de confrontation.
Notre Assemblée doit impérativement appeler les dirigeants albanais de tous bords politiques à la responsabilité, mais aussi à la constance et à la cohérence de leurs engagements euro-atlantiques. L'Albanie aspire légitimement à rejoindre l'Union européenne. Elle a d'ailleurs fait une demande officielle d'adhésion en avril dernier. Cet objectif est partagé par l'ensemble de la classe politique et par la population, à une écrasante majorité. Pour autant, il requiert la réalisation de profondes réformes qui restent nécessaires pour atteindre les standards européens, comme l'a relevé la Commission européenne dans un récent rapport.
Dès lors, il va sans dire que la crise politique actuelle constitue un mauvais signal et éloigne encore la perspective d'adhésion de l'Albanie, alors même que d'autres États des Balkans progressent plus vite qu'elle. Les dirigeants politiques albanais sont-ils bien conscients de cette situation et de la très mauvaise image qu'ils donnent d'eux-mêmes et de leur pays ? Il est impératif qu'ils prennent la mesure des conséquences de la crise qu'ils ont provoquée et qu'ils entretiennent, et qu'ils donnent enfin la priorité à la satisfaction de l'intérêt général de leur pays.
Le Conseil de l'Europe a un rôle majeur à jouer pour aider les dirigeants albanais à dénouer cette crise au plus vite, afin de rétablir le bon fonctionnement des institutions et d'engager les indispensables réformes dont le pays a besoin. »
La résolution adoptée par l'Assemblée insiste sur la nécessité de mettre en place une commission d'enquête parlementaire sur les élections de juin 2009 et améliorer parallèlement le code électoral, en suivant les recommandations de la commission de Venise.